OMC: NOUVELLES 2009

> La Déclaration de Doha expliquée
> La Décision de Doha sur la mise en œuvre expliquée
> Comment les négociations sont organisées

Rapport du Président du Comité des négociations commerciales

Je voudrais commencer en souhaitant aujourd'hui la bienvenue aux participants à la Semaine de Genève pour les Membres sans représentation qui ont eu la possibilité d'assister à cette réunion du Conseil général. Je suis heureux que nous ayons encore une fois pu coordonner les travaux de la Semaine de Genève et de cette session afin que les participants puissent avoir une idée générale de ce qui se passe ici.

Depuis mon dernier rapport au Conseil général en février, la situation économique a continué de se dégrader pour tous les Membres de l'OMC. Le commerce est devenu l'une des victimes de cette crise. Selon nos prévisions, le commerce mondial se contractera de 9 pour cent cette année, plombé par l'effondrement de la demande mondiale et par l'insuffisance du financement du commerce qui ont créé des contraintes du côté de l'offre, freinant la croissance des exportations, en particulier dans de nombreux pays en développement.

Personne ne peut prévoir la durée de cette récession, ni l'ampleur de ses conséquences sur notre tissu social, mais on ne saurait mettre en doute la fragilité de l'économie mondiale et l'importance centrale du commerce dans la reprise.

Cette crise économique mondiale a été au centre d'un certain nombre de réunions internationales auxquelles j'ai participé récemment et je voulais vous faire part de quelques impressions et conclusions que j'ai tirées de ces rencontres ainsi que de certaines réunions bilatérales récentes. Je voudrais aussi vous expliquer comment je vois l'avenir du Cycle de Doha pour les mois qui viennent.

Vous le savez, j'ai participé à la réunion du G-20 à Londres début avril. Comme on peut le comprendre, la réunion était axée sur la recherche de solutions aux difficultés immédiates rencontrées par le système financier international. Mais j'ai été très encouragé de voir que les dirigeants du G-20 étaient conscients de l'importance du commerce international en général et du système commercial multilatéral en particulier pour la stimulation de la demande globale et la reprise d'une croissance soutenue au niveau mondial.

Dans mon intervention au G-20, j'ai insisté sur quatre grands points.

Premièrement, j'ai souligné qu'il importait de maintenir l'ouverture du commerce et de lutter contre les pressions protectionnistes. J'ai souligné qu'il était nécessaire que les dirigeants soutiennent fermement le mécanisme de surveillance des mesures commerciales et liées au commerce adoptées dans le contexte de la crise, qui a été mis en place par l'OMC et qui fournit aux Membres des rapports à jour réguliers, le prochain devant paraître avant la fin du mois de juin.

Deuxièmement, j'ai souligné qu'il importait de maintenir l'ouverture du commerce en concluant le Cycle de Doha. J'ai expliqué les progrès importants que nous avions déjà accomplis dans ce qui est en fait l'accord commercial multilatéral le plus ambitieux de tous les temps et j'ai encouragé les dirigeants à faire tous les efforts possibles pour surmonter les quelques dernières difficultés.

Troisièmement, j'ai aussi souligné qu'il importait de tenir les promesses faites dans le cadre de l'Aide pour le commerce, en particulier parce qu'elles permettront à un bon nombre des pays les plus pauvres de préparer leur sortie de la crise en investissant et en améliorant leur capacité de production.

Enfin, j'ai aussi indiqué qu'il importait de faire en sorte qu'un financement du commerce soit disponible à un coût abordable afin de continuer à huiler les mécanismes du commerce.

Vous avez probablement tous vu le communiqué du G-20. Outre qu'ils ont rejeté le protectionnisme et qu'ils se sont engagés à fournir un financement pour le commerce, à maintenir les annonces de contributions faites dans le cadre de l'Aide pour le commerce et à conclure le Cycle, les dirigeants ont envoyé au monde un signal clair disant que le commerce et l'OMC restaient au cœur d'une solution plus large à la crise. Cet engagement a encore été réitéré à un certain nombre de réunions bilatérales auxquelles j'ai participé pendant la réunion du G-20.

Ce regain d'intérêt et d'attention politique à l'égard du commerce et du Programme de Doha s'est manifesté plus récemment aux réunions de printemps de la Banque mondiale et du FMI, où ma participation au Comité du FMI et au Comité du développement de la Banque mondiale ainsi qu'à des réunions avec un certain nombre de ministres a confirmé la dynamique qui s'était créée les semaines précédentes.

Comme l'OIT l'a indiqué récemment, il est malheureusement clair que la pleine incidence sociale de la crise actuelle est encore à venir et qu'elle créera inévitablement davantage de pressions politiques sur le système commercial multilatéral. Mais c'est précisément à ce moment, alors que les tentations protectionnistes se multiplient, que la valeur du système commercial multilatéral nous apparaît à tous le plus clairement.

S'il y a un message constant que j'ai pu retenir de mes réunions de ces trois derniers mois, c'est que les gouvernements attendent du système de règles commerciales mondiales de l'OMC qu'il assure la prévisibilité, la transparence et la stabilité et qu'il rende confiance aux opérateurs économiques. Toutes les parties prenantes conviennent qu'un commerce ouvert reste essentiel à une reprise économique mondiale. Pour elles, la conclusion du Cycle de Doha constitue le plan de relance mondial le plus facilement disponible.

En ce qui concerne le Cycle de Doha, mon impression globale est que si la crise économique s'est aggravée depuis le début de l'année, le climat politique des négociations s'est amélioré. Nous avons vu un relèvement du niveau d'engagement politique et des signaux clairs d'un engagement et d'un soutien renouvelés en faveur d'une conclusion rapide du Cycle de Doha.

La récente visite à Genève du nouveau Représentant des États-Unis pour les questions commerciales internationales, l'Ambassadeur Ron Kirk, au début de ce mois, a été particulièrement appréciée et opportune. Il a clairement exprimé son engagement en faveur de l'aboutissement du Cycle de négociations. Des élections ont également eu lieu en Inde et nous attendons avec impatience la désignation du Ministre du commerce.

Les choses continuent d'avancer dans le cadre de notre processus de Genève sur l'ensemble du programme de négociation. On pourrait certes qualifier de techniques une bonne partie des travaux actuellement menés dans les groupes de négociation, mais cela ne veut pas dire qu'ils aient moins d'importance. Les Présidents font tout leur possible pour éliminer les obstacles à un décollage au niveau politique, et je les en remercie.

Dans le domaine de l'agriculture, nous avons un nouveau Président de la Session extraordinaire, l'Ambassadeur David Walker. S'appuyant sur les travaux fructueux qui ont été menés dans le cadre du groupe jusqu'ici, il poursuit ses consultations pour faire avancer les travaux sur un certain nombre de questions qui demeurent en suspens, parmi lesquelles figure la formulation du MSS. D'autres questions techniques en suspens seront aussi à l'examen dans les semaines à venir, notamment en ce qui concerne les produits sensibles, les produits spéciaux, les produits tropicaux et l'érosion des préférences, le coton et la simplification des tarifs. Il n'est pas non plus prématuré, à mon avis, de commencer à préparer le processus d'établissement des listes et de vérification et la rédaction des textes juridiques.

Le Groupe de négociation sur l'AMNA a récemment tenu une réunion ouverte. Les auteurs de propositions sur les actions sectorielles ont fait rapport sur les travaux techniques qu'ils ont entrepris et ont exprimé leur intention de s'employer à faire avancer les travaux sur cette question avec leurs partenaires commerciaux dans les semaines à venir. Cette semaine, il y aura une session du Groupe de négociation consacrée aux propositions de textes sur les obstacles non tarifaires. En juillet, le Groupe tiendra un atelier sur l'établissement des listes, conçu pour offrir aux participants la possibilité de se préparer en vue des questions techniques qui seront abordées lorsque la phase d'établissement des listes commencera réellement.

Le Groupe des règles a aussi mené des travaux dans un grand nombre de domaines, avec des réunions récemment tenues sur l'antidumping, les subventions et les mesures compensatoires ainsi que les subventions à la pêche et d'autres activités prévues sur les accords commerciaux régionaux. S'agissant de l'antidumping, le Groupe a suivi une approche à trois niveaux lorsqu'il a examiné le texte du Président — il a débattu, premièrement, des questions entre crochets, deuxièmement, du texte qui ne figure pas entre crochets, et troisièmement, des questions qui ne sont actuellement pas prises en compte dans le texte. Les discussions concernant les subventions horizontales ont été d'ordre général car les délégations se sont vu ménager la possibilité de présenter leurs vues générales sur la façon dont elles considéraient l'évolution des négociations dans ce domaine. Le Groupe a aussi discuté des subventions à la pêche et poursuivi ses débats sur la feuille de route en se concentrant sur des questions comme la prohibition et les exceptions générales. La prochaine série de réunions ouvertes est prévue pour la semaine du 29 juin.

Dans le cadre de la Session extraordinaire sur les services le mois dernier, les participants ont réaffirmé leurs intérêts offensifs et défensifs. La discussion sur les modalités pour les PMA progresse, mais on attend encore des propositions détaillées, qui, si tout va bien, seront bientôt présentées de façon que cette négociation puisse aussi avancer. La prochaine réunion de la Session extraordinaire se tiendra conjointement avec la prochaine série de réunions sur les services, et sera éventuellement précédée de l'une des “enchiladas” du Président.

Dans le cadre de la Session extraordinaire du CCD, les Membres se sont attachés à présenter des éléments d'un mécanisme de surveillance du traitement spécial et différencié. Les discussions sur les propositions axées sur des accords particuliers ont été suspendues jusqu'à ce que les Membres soient en mesure de présenter de nouvelles idées ou de nouvelles formulations qui débloqueraient cette partie de la discussion.

S'agissant de la Session extraordinaire sur les ADPIC, des positions stratégiques ont été adoptées, et le Président s'emploie à faire en sorte que le groupe soit prêt à aller de l'avant dès que le contexte général le permettra. À la prochaine session du 10 juin, il cherchera à orienter la discussion sur les différentes questions plutôt que sur des propositions spécifiques.

Le Groupe de négociation sur la facilitation des échanges a également accompli des progrès utiles sur tous les piliers relevant de son mandat. Les travaux sur les articles du GATT ont produit un certain nombre de suggestions supplémentaires sur la manière d'améliorer les textes existants. Des progrès appréciables ont aussi été réalisés en ce qui concerne le traitement spécial et différencié, domaine dans lequel le processus des Amis du Président semble à présent fermement établi et bien avancé. Le Groupe prévoit de se réunir de nouveau le mois prochain.

Dans le domaine du commerce et de l'environnement, le Président a consulté les délégations sur divers aspects du programme de travail de juillet. Une réunion ouverte consacrée à la transparence s'est tenue récemment et, dans l'ensemble, les Membres se sont montrés disposés à entreprendre des activités, y compris des travaux techniques sur tout un éventail de questions, qui aideraient les délégations à se préparer à la phase suivante de ce programme de travail. Il y a également d'autres possibilités d'approfondir les connaissances sur un certain nombre de questions relevant du mandat et de mieux les comprendre, notamment les questions relatives au renforcement des capacités et au développement. Le Président a l'intention de tenir d'autres consultations dans un proche avenir pour discuter des différents éléments de fond du programme de travail, y compris les questions transversales.

Enfin, dans le cadre de la Session extraordinaire de l'ORD, les frais de procédure pour les petits participants ont récemment fait l'objet de discussions, avec la participation du Centre consultatif sur la législation de l'OMC. Les délégations débattent aussi de questions comme la composition des groupes spéciaux et les renseignements confidentiels.

Ainsi, globalement, des progrès valables ont été accomplis au niveau technique, ce qui, nous le savons tous, est une condition nécessaire mais pas suffisante pour faire aboutir le Cycle. La question essentielle demeure la suivante: “quand les participants seront-ils prêts à revenir à la table de négociation au niveau politique?” J'espère que nous commencerons bientôt à voir l'ébauche d'une réponse.

Comme vous le savez tous, une série de réunions politiques internationales majeures doivent avoir lieu au cours des deux prochains mois. Nous pouvons nous attendre à ce que, à chaque fois, le Cycle de Doha soit une considération centrale, et nous devons faire en sorte que cette succession de réunions permette de créer une dynamique. Nous avons là une série d'occasions de relancer le processus politique du Cycle.

Il y aura, les 8 et 9 juin, la réunion du Groupe de Cairns et des Ministres du commerce d'autres pays. La réunion des Ministres du commerce de l'OCDE constituera une autre opportunité à la fin de juin. En juillet, il y aura la réunion des dirigeants du G-8 et du G-8+ et celle des Ministres du commerce de l'APEC. Chacune de ces réunions devrait fournir l'occasion d'un engagement politique plus fort au niveau ministériel et contribuer à créer les conditions d'un progrès vers la conclusion d'un accord sur les produits agricoles et industriels et, cela va sans dire, sur l'ensemble du Cycle. Comme toujours, je vous tiendrai informés de tous les faits nouveaux concernant ces différents aspects.

Je continuerai également bien sûr d'avoir régulièrement des échanges de vues et d'assurer la coordination avec le Président du Conseil général et les Présidents des groupes de négociation pour progresser dans chacun des domaines dans le cadre général de l'engagement unique.

J'ai été informé des discussions informelles qui ont cours entre certains d'entre vous — envisageant, en dehors de la boîte à outils actuellement utilisée pour le processus de négociation, de placer les pourparlers sur une voie plus directe pour commencer à inscrire dans les listes les engagements dans les domaines de l'agriculture et de l'AMNA.

Je suis bien conscient que pour certains d'entre vous l'approche fondée sur des modalités est sacro-sainte. C'est une approche qui permet d'indiquer clairement à tout le monde ce qu'il y a sur la table grâce aux abaissements des droits suivant la formule et aux flexibilités spécifiques qui seraient convenues. Mais d'autres estiment que si les modalités définissent les aspects défensifs de l'accord au moyen des flexibilités, par essence ces dernières font qu'il est difficile de déterminer quelles nouvelles possibilités d'accès aux marchés pourront se dégager. Pour certains pays, si les gouvernements pouvaient indiquer quels produits bénéficieraient d'un traitement plus flexible au stade de l'établissement des listes, qu'il s'agisse de produits sensibles, de produits spéciaux, d'accès en franchise de droits et sans contingent ou de flexibilités pour l'AMNA, cela conférerait une plus grande clarté au processus.

Mon sentiment personnel est qu'il est possible de concilier les deux en suivant deux voies parallèles. L'une permettrait de s'assurer que l'engagement technique dans les groupes de négociation passe à la vitesse supérieure pour traiter un certain nombre de questions techniques comme indiqué précédemment. Simultanément, les Membres effectueraient une sorte de “test de résultat”, dans le cadre de discussions bilatérales ou plurilatérales, qui leur permettrait de clarifier entre eux l'utilisation des flexibilités et, par ce biais, la valeur de l'accord. C'est à mon avis faisable à condition qu'il y ait un engagement politique sérieux de la part des Membres. En d'autres termes, à condition que les ministres donnent les instructions nécessaires pour que des travaux sur le fond aient lieu suivant ces deux voies.

Enfin, en ce qui concerne l'Aide pour le commerce, je suis heureux de pouvoir indiquer que les préparatifs en vue du deuxième Examen global de l'Aide pour le commerce des 6 et 7 juillet sont en bonne voie.

J'ai assisté à la Conférence de haut niveau sur le couloir Nord-Sud qui s'est tenue à Lusaka les 6 et 7 avril et qui a permis aux Présidents du COMESA, de la Communauté de l'Afrique de l'Est et de la CDAA d'esquisser les différents projets et programmes qui constituent le programme pilote mené au titre de l'Aide pour le commerce dans le couloir Nord-Sud. La Conférence a permis de bien mettre en évidence les obstacles au commerce qui doivent être éliminés suivant un ordre de priorité pour réduire les coûts commerciaux.

J'ai aussi récemment assisté au deuxième examen régional de l'Aide pour le commerce à Montego Bay (Jamaïque) pour l'Amérique latine et les Caraïbes au cours duquel un certain nombre de projets ont été évoqués pour illustrer les progrès accomplis dans la mise en œuvre pratique de l'Aide pour le commerce. Je m'envolerai demain vers le Cambodge pour assister à l'examen régional pour l'Asie et le Pacifique.

À chacune de ces occasions, j'ai souligné à quel point il importe que les promesses de l'Aide pour le commerce soient tenues, malgré la crise. L'Aide pour le commerce aidera en fait les pays en développement à se préparer à l'après-crise. En renforçant leur capacité de production, ils libéreront leur potentiel de croissance, ce qui leur permettra de tirer parti des nouveaux débouchés commerciaux. J'ai aussi souligné la nécessité de continuer à encourager cette coopération Sud-Sud en matière d'Aide pour le commerce, qui est à l'évidence de plus en plus importante.

En ce qui concerne l'avenir, je pense que le deuxième examen global de l'Aide pour le commerce des 6 et 7 juillet fournira une occasion précise et concrète de montrer comment l'Aide pour le commerce fonctionne dans la pratique et de voir si les engagements en matière d'additionnalité sont tenus. Je collabore étroitement avec le Président du Comité du commerce et du développement, la DGA Mme Rugwabiza et les Membres pour préparer cette réunion.

Pour conclure, M. le Président, si d'après certains nous sommes peut-être en train de toucher le fond de la crise économique, nous n'en avons pas encore ressenti toutes les conséquences sociales lesquelles se traduiront inévitablement par des pressions politiques négatives pour le commerce. Personnellement et très franchement, je pense que l'“épreuve de résistance” du système commercial multilatéral est encore à venir. Il est donc essentiel de maintenir en alerte notre système de surveillance et de progresser vers la conclusion du Cycle. Une demeure plus solide ne fera que mieux résister à la violence des vents politiques auxquels il nous faut malheureusement nous attendre.

 

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