OMC: NOUVELLES 2011

FORUM PUBLIC DE L’OMC: 19—21 SEPTEMBRE 2011

Lors de la séance d’ouverture du Forum public 2011, le 19 septembre, le Directeur général Pascal Lamy a rappelé le contexte dans lequel s’inscrivaient les discussions de cette année et a souligné le rôle important du Forum pour relever les défis futurs. Durabilité, énergie et sécurité alimentaire sont parmi les sujets qui ont été débattus ce premier jour.

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POUR EN SAVOIR PLUS:

  

“Le monde traverse une période de turbulences,” a déclaré M. Lamy lors de son allocution d’ouverture. “Nous assistons à une crise alimentaire.  Dans de nombreuses parties du monde, la croissance économique n’est pas suffisante pour permettre le rééquilibrage des finances publiques qui est nécessaire après les mesures adoptées pendant la crise financière.  Ailleurs, le rythme de la croissance amène à s’interroger sur sa viabilité écologique et sociale.  Le chômage reste beaucoup trop élevé et ses conséquences néfastes attisent les tendances isolationnistes.  Nous assistons à des changements de régimes dans de nombreuses parties du monde arabe …  Le monde a besoin de repères.  Il a besoin d’une coopération internationale accrue et améliorée.”

M. Lamy a indiqué que l’OMC avait “réussi à aider les pays à garder le cap au plus fort de la récente crise économique”, mais a ajouté:  “il faut aussi que nous renforcions le système commercial mondial pour faire face aux défis qui nous attendent …  C’est là que le présent Forum public a un rôle crucial à jouer”.

Avant d’inviter la Présidente du Costa Rica, Mme Laura Chinchilla Miranda, à prendre la parole, le Directeur général a souligné que le Costa Rica avait montré comment l’ouverture des échanges pouvait contribuer de façon positive au développement, et que ce pays visait également à devenir la première économie neutre en carbone.

Discours d’ouverture:  allocution d’ouverture de Mme Laura Chinchilla Miranda, Présidente du Costa Rica
Dans son allocution d’ouverture, la Présidente, Mme Chinchilla, a exprimé son soutien ferme au libre-échange, “qui s’était révélé être un puissant instrument de croissance économique et de lutte contre la pauvreté”, ajoutant que son pays “témoignait des avantages que l’ouverture commerciale pouvait procurer”.

La Présidente a dit que le Cycle de Doha était la tâche la plus urgente incombant à la communauté internationale.  Elle a ajouté:  “le moins que nous puissions faire après une décennie de discussions, c’est de montrer une certaine flexibilité”;  et a rappelé que “sans le Cycle de Doha, de nombreux pays seraient perdants, en particulier ceux qui ont un petit marché et peu de moyens d’exporter et d’attirer des investissements”.

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Séance 2: Trouver des réponses aux défis du commerce mondial

Les questions de durabilité, d’énergie et de sécurité alimentaire ont été au centre de la discussion.  L’impasse du Cycle de Doha et les réformes de l’OMC ont également été abordées.

M. Mahamadou Issoufou, Président du Niger:  “Nous vivons dans un monde d’inégalités choquantes avec, dans les pays en développement, de nombreuses personnes qui vivent dans la pauvreté.” M. Issoufou a établi un parallèle avec la production automobile chez Ford en disant que, de la même façon qu’Henry Ford voulait que ses employés puissent s’offrir les voitures de son entreprise, la hausse des revenus dans les pays les plus pauvres encourageait la croissance des pays du Nord.  Il a dit que les pays du Sud avaient souvent le sentiment que les pays industrialisés renonceraient à l’ouverture des échanges si elle ne favorisait plus leur avantage comparatif.  Pour lui, la spéculation sur les marchés dérivés était responsable de l’envolée des prix des céréales qui mettait en péril la sécurité alimentaire de l’ensemble de la région du Sahel.  Faisant état des coûts de transport et d’énergie élevés auxquels était confronté son pays, le Président Issoufou a demandé à l’OMC d’aider les pays comme le Niger par l’intermédiaire du programme d’Aide pour le commerce.

M. James Leape, Directeur général du World Wildlife Fund (WWF):  D’après M. Leape, le rythme de croissance actuel nécessite plus de ressources qu’il n’en existe sur Terre.  “Nous continuons d’agir comme si nous disposions d’une planète et demie pour répondre à nos besoins” , a-t-il déclaré, avant d’ajouter:  “dans les 40 années à venir, nous devrons produire autant de nourriture que ces 800 dernières années” .  “La seule voie qui mène à une croissance durable est une voie écologiquement durable” , a-t-il souligné.  En conséquence, la durabilité est plus qu’un intérêt particulier supplémentaire à prendre en compte dans le régime commercial.  L’OMC a un rôle majeur à jouer pour assurer la réduction des subventions qui ont des effets pervers.  De façon plus générale, au-delà de la lutte contre le protectionnisme qui a trop souvent protégé les intérêts des pays du Nord au détriment de ceux des pays du Sud, l’OMC doit soutenir l’action en faveur du développement durable.

M. Maximo Torero, Directeur de l’Institut international de recherche sur les politiques alimentaires (IFPRI):  M. Torero a souligné le rôle important du commerce pour garantir l’accès à une alimentation suffisante dans les décennies à venir.  Il a fait remarquer que l’offre de produits alimentaires de base était relativement concentrée dans quelques pays, de sorte que les restrictions à l’exportation constituaient de sérieuses menaces et que les marchés pouvaient rapidement devenir vulnérables à la volatilité.  S’agissant de la spéculation et des pratiques concernant les denrées alimentaires, M. Torero a déclaré qu’un certain degré de spéculation était bénéfique, puisqu’elle permettait d’approvisionner les marchés en liquidités.  La “spéculation excessive” , en revanche, peut être dangereuse dans la mesure où elle risque d’accentuer la volatilité, ce qui n’est pas sans conséquences pour les populations pauvres.  Il est toutefois difficile de définir ce qui est ’excessif’.

M. Pascal Lamy, Directeur général de l’OMC:  “Sur des questions importantes et à long terme telles que la sécurité alimentaire” , a déclaré M. Lamy, “nous devons activer la courroie de distribution entre l’offre et la demande qu’est le commerce — d’où la nécessité de faire progresser le Cycle de Doha”.  M. Lamy a dit que la sortie de l’impasse dans laquelle se trouvent les négociations permettrait à l’OMC de relever de nouveaux défis tout en répondant aux attentes des pays en développement, qui voient dans le système commercial multilatéral un espoir de mettre fin à la concurrence déloyale qu’ont à subir leurs produits agricoles du fait des subventions.  D’après lui, la Conférence ministérielle prévue en décembre offrirait aux gouvernements une opportunité de faire avancer le Cycle de Doha, en parvenant éventuellement à des accords sur des questions spécifiques qui répondent aux besoins des pays en développement.  Il a indiqué que ces vingt dernières années avaient été marquées par un rapprochement considérable entre les communautés commerciales et environnementales, illustré notamment par l’évolution de la jurisprudence de l’OMC.  S’agissant de l’initiative “Fabriqué dans le monde” , M. Lamy a dit que les négociateurs avaient tendance à continuer de se référer aux réalités du commerce international d’il y a vingt ans.  Il a ajouté que les chaînes de valeur mondiales avaient des effets positifs sur le développement:  les petits pays qui n’étaient pas en mesure de produire eux-mêmes des voitures pouvaient quand même produire des pièces automobiles concurrentielles, en tant que partie d’une chaîne.

L’éventail de questions soulevées par les experts a donné lieu à des débats enrichissants.  Sur les questions liées au commerce et aux fluctuations des taux de change, le Président du Niger comme M. Lamy ont fait remarquer que la situation était plus simple avant 1970, quand le régime international de taux de change fixe était en place.  M. Lamy a rappelé que l’OMC n’était pas l’instance qui convenait pour discuter des questions relatives aux niveaux des taux de change qui relevaient davantage des mandats du FMI et du Forum de stabilité financière.  Néanmoins, il a fait observer que les conséquences commerciales des mouvements des taux de change n’étaient plus un sujet tabou à l’OMC:  de fait, un groupe de travail de l’OMC (le Groupe de travail du commerce, de la dette et des finances) a entamé des discussions à ce sujet.

À la question de savoir si la conception institutionnelle de l’OMC, fondée sur le consensus et le droit de veto de chaque Membre, était responsable de l’impasse des négociations de Doha, M. Lamy a répondu que la source du désaccord était une divergence de longue date entre deux groupes de pays concernant le degré d’ouverture de leurs marchés respectifs.  Il a déclaré que le principe du consensus resterait un principe de base de l’OMC, notamment parce qu’il serait plus difficile de lui trouver une solution de remplacement que de conclure le Cycle de Doha.  Des questions de procédure, telles que le maintien de l’engagement unique ou l’autorisation d’accords plurilatéraux, devraient être tranchées.

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Séance 3: Fabriqué dans le monde:  données factuelles et conséquences pour le commerce

L’émergence du modèle de fabrication internationale a des conséquences importantes sur la relation entre le commerce et le développement.  Durant cette séance, des renseignements sur les performances commerciales et la création d’emplois en Europe ont été fournis, l’expérience suédoise des chaînes de valeur mondiales a été décrite et le cas du Costa Rica a été étudié.

La séance a été ouverte et animée par M. Will Milberg, qui a indiqué que les chaînes de valeur mondiales étaient un aspect très important du commerce international, car elles favorisaient un environnement plus libéral pour les échanges mondiaux.  Les conséquences des chaînes de valeur sur les échanges sont devenues les principaux moteurs du commerce.

M. Lucien Cernat, de la Commission européenne, a décrit l’expérience de l’Union européenne et mis en exergue l’importance de l’initiative “Fabriqué dans le monde” .  Il a dit que le commerce et la création d’emplois devaient tous deux recevoir le soutien de la population.

M. Henrik Isakson, de la Direction générale suédoise du commerce, a rappelé que les exportations suédoises n’étaient pas seulement “Fabriquées en Suède” ;  la moitié du PIB de la Suède était imputable aux exportations.  Il a dit que les étiquettes portant la mention “Fabriqué en …” étaient, pour la plupart, trompeuses.  D’après lui, les pays devraient s’employer à promouvoir les importations plutôt que les exportations.

Mme Anabel Gonzalez, Ministre du commerce extérieur du Costa Rica, a présenté l’expérience de son pays par rapport aux chaînes de valeur mondiales.  Elle a expliqué que le Costa Rica était devenu un participant actif à ces chaînes de valeur grâce à une vision stratégique, un environnement commercial favorable, une plate-forme d’exportation solide, une main-d’œuvre qualifiée et une situation géographique privilégiée, près du marché des États-Unis.  Elle a indiqué que l’étape suivante consisterait à diversifier, renforcer et améliorer les chaînes de valeur mondiales en vue de tirer profit d’opportunités majeures telles que le resserrement des liens entre l’Asie et l’Amérique latine, l’expansion des chaînes de valeur mondiales à d’autres domaines de production et la délocalisation des services.

M. Hubert Escaith, de l’OMC, a relevé l’importance des services dans le commerce.  Il a dit que les accords commerciaux préférentiels permettaient d’harmoniser les réglementations et les chaînes de valeur mondiales.  Les négociations bilatérales ne sauraient entrer en concurrence avec les négociations multilatérales.  La production et l’emploi dépendent des pays en développement.  Pour finir, il a souligné l’importance de mettre en place des politiques au niveau international et de trouver une solution mondiale pour un monde interdépendant.

En réponse aux questions du public, la Ministre Mme Anabel Gonzalez a indiqué que l’intégration régionale serait nécessaire en Amérique centrale.  Les accords commerciaux préférentiels pourraient constituer la base d’un système intégré.  M. Escaith a dit que bien qu’il ne soit pas nouveau, le concept “Fabriqué dans le monde” était devenu, ces dernières années, de plus en plus pertinent en termes d’emplois et de conséquences politiques.  En conclusion, M. Cernat a invité les décideurs et les chercheurs à s’impliquer dans cette initiative.

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Séance 4: Enseignements tirés des ALE régionaux et bilatéraux − évaluer les impacts économiques et le point de savoir si des règles plus strictes stimulent l’innovation

Cette séance a été consacrée aux dispositions des accords de libre-échange (ALE) relatives aux droits de propriété intellectuelle (DPI) et à leur impact sur l’innovation.  D’une manière générale, il a été convenu qu’une association positive existait et que les DPI favorisaient également les échanges.  Des règles strictes en matière de propriété intellectuelle attireraient les entreprises innovantes, ce qui améliorerait à son tour les performances commerciales.

La première présentation portait sur l’Amérique latine, mettant en avant l’innovation comme moteur du développement, source d’avantages comparatifs durables et facteur d’amélioration de la qualité de vie.  Les DPI présentent donc une importance majeure, étant donné qu’ils sont l’un des moyens permettant de capter la valeur immatérielle de l’innovation.  Les caractéristiques principales des dispositions relatives à la propriété intellectuelle contenues dans les ALE conclus en Amérique latine ont été décrites.  Les facteurs suivants ont été considérés comme jouant un rôle majeur dans l’innovation:  une base de recherche solide;  un cadre juridique et un cadre de politique;  une culture de l’innovation;  des services de transfert de technologie;  et des services de développement des entreprises.

La seconde présentation était fondée sur une étude menée par M. Alexander Koff, intitulée “Étude de l’impact économique des accords de libre-échange contenant des dispositions ADPIC (droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce) plus” .  Cette étude, axée sur les dispositions ADPIC-plus des ALE signés par les États-Unis, conclut qu’une protection plus grande des DPI a des conséquences positives sur les échanges, même pour les pays en développement parties à ces ALE.  Dans le public, un représentant de la Jordanie a étayé cette conclusion, arguant que, contrairement à ce qu’il pensait auparavant, l’industrie pharmaceutique de son pays avait grandement tiré profit de l’Accord de l’OMC sur les ADPIC.  Dans ses recommandations, M. Koff a précisé qu’il était important de distinguer la protection des marques de fabrique ou de commerce des brevets.

Les intervenants se sont également appuyés sur les réussites de différents pays (tels que le Brésil, le Pérou, le Chili, le Mexique ou la Jordanie) pour mettre en avant l’intérêt des DPI pour l’innovation et le commerce.  Ils ont aussi abordé le manque de ressources des pays en développement.  En conséquence, ils ont insisté à la fois sur les besoins d’assistance technique et les systèmes de meilleures pratiques à mettre en place pour aider les pays en développement à tirer profit des DPI.

D’une manière générale, les présentations ont souligné le fait que la propriété intellectuelle était un moyen de favoriser l’innovation et le commerce, mais pas une fin en soi.

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Séance 5: Un accord-cadre de l’OMC sur l’énergie durable

Cette séance portait sur la relation entre énergie et politique commerciale ainsi que sur la réceptivité prospective des règles de l’OMC à un accord-cadre sur l’énergie, le cadre existant n’encourageant guère le débat ni l’avancée des énergies renouvelables.

M. Nitya Nanda, de l’Institut de l’énergie et des ressources (TERI), a fait observer que la gouvernance mondiale en matière d’énergie était entravée par des lacunes réglementaires et par la résistance des pays en développement, notamment vis-à-vis de l’accession au Traité sur la Charte de l’énergie, en raison du statut qu’il accorde aux parties privées dans son système de règlement des différends.  À cet égard, il a particulièrement insisté sur l’avantage comparatif du système de règlement des différends de l’OMC.  À l’inverse, du fait de l’absence de certains grands pays fournisseurs d’énergie à l’OMC, certaines questions ne peuvent être abordées dans le cadre de l’Organisation.  M. Nanda a également avancé qu’outre les énergies modernes, on aurait aussi intérêt à soumettre les énergies transitoires à réglementation, étant donné que la transition n’aura pas lieu du jour au lendemain.

M. Jens Alsbrik, responsable de l’accès aux marchés chez VESTAS wind systems, a indiqué que dans l’industrie éolienne, les obstacles tarifaires restaient un défi important sinon prépondérant, la préoccupation principale étant liée aux prescriptions relatives à la teneur en éléments locaux.  Malgré la surcapacité existante de l’industrie, ces obstacles l’empêchent de fonctionner à pleine capacité, limitant les économies d’échelle et la baisse des coûts de l’énergie éolienne.  D’après M. Alsbrik, pour libéraliser les échanges dans le domaine de l’énergie, une initiative globale associant tous les secteurs de production, à l’instar de l’approche sectorielle adoptée dans l’Accord de 1996 sur les technologies de l’information (ATI), serait plus prometteuse pour l’énergie verte que le Cycle de Doha.

M. Emmanuel Guérin, Directeur du Programme climat et énergie de l’IDDRI, a abordé le rôle ambivalent que le commerce peut jouer dans la promotion de l’énergie verte, selon que le commerce et les politiques climatiques sont coordonnés ou non.  Il a distingué les politiques tirées par la demande de celles reposant sur les technologies, montrant comment les politiques se répartissaient suivant ces deux modèles et leur efficacité dans la réalisation des objectifs fixés.

M. Ricardo Melendez-Ortiz, Directeur exécutif de l’ICTSD, a soulevé le problème de l’accès aux formes modernes d’énergie et l’importance du commerce à cet égard.  Il a indiqué que pour promouvoir l’utilisation des énergies renouvelables, les politiques devraient encourager les technologies vertes et augmenter leurs capacités de production, y compris au moyen de subventions, normes techniques, prescriptions relatives à la teneur en éléments locaux et transfert de technologie.  Enfin, il a évoqué les différentes possibilités d’accord-cadre dans le domaine de l’énergie proposées par l’ICTSD, à savoir un accord de type ATI ou AMP dans le cadre de l’OMC, ou un accord plurilatéral hors du cadre de l’OMC, avec des conséquences différentes sur les membres et le partage des avantages.

La modératrice a conclu la séance en insistant sur la convergence des intervenants quant au fait que le cadre actuel n’encourageait pas suffisamment l’action en faveur des énergies renouvelables.  Elle a également rappelé que les pays avaient besoin d’une enceinte pour discuter et se rapprocher sur les questions des énergies propres, dans laquelle chacun s’engagerait sans craindre de sanctions commerciales.

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Séance 6: Instaurer une gouvernance mondiale cohérente pour la sécurité alimentaire

Au cours de cette séance, les experts se sont concentrés sur le Plan d’action du G-20, y compris la recommandation en faveur d’un renforcement de la coordination internationale des politiques relatives à la sécurité alimentaire, en présentant les approches nouvelles et évolutives destinées à améliorer la gouvernance mondiale dans ce domaine.

M. François Riegert, Représentant de la France auprès de l’OMC, a présenté un panorama complet des quatre principaux domaines de travail dont est convenu le G-20:  la production agricole sur le long terme, la transparence et l’information sur les marchés internationaux, la coordination internationale, ainsi que la gestion du risque et les marchés financiers.  Il a dit que les ministres du G-20 s’étaient engagés à interdire les obstacles à l’exportation pour les achats réalisés à des fins humanitaires par le Programme alimentaire mondial (PAM) et qu’ils avaient pour objectif de présenter une résolution spécifique à la Conférence ministérielle de l’OMC, en décembre 2011.

Mme Carmel Cahill, de l’OCDE, a expliqué le fonctionnement du Système d’information sur les marchés agricoles (AMIS) qui comporte un Secrétariat, une équipe de réaction rapide et un groupe technique chargé de fournir des renseignements relatifs aux prévisions sur les marchés à court terme.  D’après Mme Cahill, les éléments de preuve à la disposition du groupe interinstitutions ont montré que les subventions et mandats relatifs aux biocarburants contribuaient à la volatilité des prix des produits alimentaires et devaient être supprimés.  Le groupe interinstitutions s’était intéressé, entre autres choses, aux restrictions à l’exportation, et avait recommandé de mener davantage de travaux pour définir les circonstances dans lesquelles ces restrictions pourraient être utilisées.

M. Kostas Stamoulis, de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), a insisté sur le fait que la réussite des stratégies de sécurité alimentaire passait par leur appropriation par les pays eux-mêmes.  Au sein de la FAO, le Comité de la sécurité alimentaire joue un rôle important dans l’amélioration de la cohérence dans ce domaine, en comblant les lacunes qui existent en matière de coordination, de connaissances, de politiques et de responsabilité.

Mme Lauren Landis, du Programme alimentaire mondial (PAM) de l’ONU, a commenté la façon dont son organisation a évolué pour mieux répondre aux crises alimentaires dans le contexte de la volatilité des prix des produits alimentaires.  Elle a souligné l’importance de parvenir à un accord sur une résolution interdisant les obstacles à l’exportation pour les achats réalisés à des fins humanitaires par le PAM à la Conférence ministérielle de l’OMC, en décembre 2011.

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Séance 7: Aide publique, subventions et politique de la concurrence:  Quel rôle l’OMC jouera-t-elle dans l’avenir?

La séance était consacrée aux dispositions qui traitaient à l’échelon mondial de la politique de la concurrence, des entreprises publiques et des subventions, ainsi qu’à la portée des règles multilatérales qui les régissent.  Les experts sont convenus de la nécessité de mettre en place davantage de règles.  Ils ont aussi reconnu que ces questions pourraient être mieux traitées au niveau multilatéral qu’au niveau bilatéral et que l’OMC représentait l’enceinte idéale pour ce faire.

La séance, animée par M. Reinhard Quick, Vice-Président de BUSINESSEUROPE, était axée sur les règles multilatérales et nationales relatives aux subventions, aux entreprises publiques et aux politiques de la concurrence.

Il a été noté que l’OMC disposait effectivement de règles sur les subventions ayant des effets de distorsion des échanges.  Cependant, face à la mondialisation et à l’évolution de la situation internationale, de nouveaux défis émergent qui pourraient nécessiter des disciplines et institutions plus strictes.  Pour créer de nouvelles règles plus efficaces, un exercice de transparence est également important.  La notification complète et dans les délais des subventions permettrait une meilleure information et une meilleure compréhension des effets qu’ont les subventions sur le marché et pourrait ainsi aboutir à des discussions plus constructives en vue d’une solution multilatérale.  Il a été noté que si la plupart des accords de libre-échange incluent des dispositions relatives aux subventions, elles ne vont jamais au-delà de ce qui est déjà prévu par les Accords de l’OMC.  Cela démontre que l’action multilatérale menée sur ces questions ne peut pas être remplacée par des accords bilatéraux.  L’OMC constitue l’enceinte idéale pour traiter et régler cette question avec succès, car il s’agit de la seule instance où les règles sont contraignantes.

Les experts ont relevé la difficulté d’établir une définition commune de ce qui constitue une entreprise publique et de déterminer les effets de distorsion du marché qu’elle produit.  À l’OMC, peu d’intérêt était accordé aux entreprises publiques jusqu’à ce que la Chine et d’autres pays émergents comptant de nombreuses entreprises de ce type commencent à voir leur part du marché international augmenter.  Récemment, la question a bénéficié d’une plus grande visibilité et des discussions sur la neutralité en matière de concurrence ont eu lieu à l’OCDE et dans d’autres enceintes.  Les entreprises publiques peuvent être importantes pour les pays en développement, s’agissant notamment de la gestion des ressources naturelles.  Bien que des travaux aient été menés dans le cadre des négociations sur l’agriculture, un accord sur la définition des entreprises publiques n’a pas encore été trouvé.

La politique de la concurrence faisait initialement partie des dénommées “questions de Singapour” , mais a été abandonnée par la suite.  Cependant, les entreprises privées opérant désormais à l’échelon international, le besoin de règles multilatérales devient plus pertinent.  Le retard pris en ce qui concerne l’introduction de dispositions régissant au niveau mondial les politiques de la concurrence peut s’expliquer par le fait que, jusqu’à récemment, la plupart des pays en développement étaient peu expérimentés en matière d’élaboration et de mise en œuvre de ce type de politiques.  Cette lacune a été comblée par les autorités nationales, privées et autres.  Même si certains accords bilatéraux abordent les politiques de la concurrence, comme c’est le cas dans le domaine des subventions, ces dispositions n’ont pas de poids réel.  Le Représentant de la Chine a dit que si l’OMC était capable de concilier les préoccupations de tous les Membres de l’OMC (en particulier ceux disposant de moins d’expérience dans le domaine), il serait alors possible d’organiser une discussion fructueuse sur la politique de la concurrence et d’aboutir à un accord multilatéral.

En conclusion, des règles plus nombreuses et plus efficaces doivent être établies pour répondre à la complexité de la mondialisation.  Les problèmes mondiaux appellent des solutions mondiales.  L’un des experts a dit qu’il souhaitait que la Conférence ministérielle de décembre permette d’établir des lignes directrices sur ces questions.

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Séance 8:  Comment éviter la crise qui s’annonce dans le domaine des traitements du fait de la mutation du paysage de la propriété intellectuelle?

Cette séance était organisée par la Communauté de brevets pour les médicaments et animée par M. Antony Taubman, Directeur de la Division de la propriété intellectuelle de l’OMC.  Elle faisait intervenir les quatre experts suivants:  Mme Michelle Childs, Directrice de la politique de témoignage, MSF;  M. Carlos Correa, Université de Buenos Aires;  M. Nelson Otwoma, Coordinateur national/Directeur, National Empowerment Network of People Living with HIV/AIDS in Kenya;  et Mme Ellen T Hoen, Directrice exécutive, Communauté de brevets pour les médicaments.

Mme Childs, Mme Hoen et M. Otwoma ont présenté un aperçu de la crise à venir dans le domaine des traitements qui menace les personnes vivant avec le VIH, en particulier dans les pays à faibles et à moyens revenus:

  • De plus en plus de personnes vivant avec le VIH dans les pays en développement ne peuvent recevoir de traitements en raison de la hausse du coût de ces derniers.
  • Lorsqu’elles développent une pharmacorésistance, elles ont besoin de nouveaux traitements.  Or, la plupart des médicaments récents traitant le VIH sont brevetés dans de grands pays producteurs de génériques, tels que l’Inde.
  • La protection par brevets des nouveaux médicaments fait grimper le coût des traitements, qui pourraient devenir inabordables.

M. Otwoma a souligné l’importance d’arriver à un compromis entre les intérêts des patients et ceux de la recherche-développement.  Les quatre experts ont débattu des solutions à apporter à la crise attendue dans le domaine des traitements, dans le contexte changeant de la propriété intellectuelle (PI).  En s’appuyant sur leurs expériences passées, ils sont généralement convenus que les systèmes de brevets/propriété intellectuelle risquaient d’empêcher l’accès abordable aux médicaments et que la concurrence des génériques contribuait effectivement à faire baisser les prix des médicaments.

S’agissant des solutions, Mme Hoen a présenté le fonctionnement de la Communauté de brevets pour les médicaments, tout en indiquant ses limites.  La communauté fonctionne sur une base volontaire, se concentre uniquement sur les médicaments traitant le VIH/SIDA et a une portée géographique définie.  M. Correa a présenté d’autres options, y compris l’application effective des normes de brevetabilité dans les pays en développement, l’utilisation de licences obligatoires et l’intervention des pouvoirs publics, ainsi que de nouveaux mécanismes d’innovation dans les industries pharmaceutiques.

M. Peter Beyer, de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), a informé le public sur les évolutions récentes au sein de l’OMS et sur la coopération entre trois organisations internationales (l’OMC, l’OMPI et l’OMS) sur la question de la propriété intellectuelle et de la santé publique.  Il a indiqué que l’OMS soutenait les travaux de la Communauté de brevets pour les médicaments mais que dans la mesure où cette communauté fonctionnait sur une base volontaire, il était important que les membres de l’OMS envisagent d’autres options.

Au cours de la séance de questions-réponses, une question a été posée sur les conséquences de l’inclusion de dispositions ADPIC-plus dans les ACR/ALE pour les pays en développement.  Mme Childs et M. Correa ont tous deux indiqué qu’il fallait fermement encourager les pays en développement à refuser les dispositions ADPIC-plus lors des négociations des ALE, faute d’éléments de preuve empiriques ou de renseignements suffisants sur les avantages en découlant.  M. Beyer a précisé que l’OMS conseillait systématiquement à ses membres d’évaluer l’impact des dispositions ADPIC-plus avant de les accepter.

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Séance 9: Le système commercial multilatéral fondé sur des règles et le rôle des accords commerciaux préférentiels (ACPr) — Point de vue du monde des affaires

Les membres du groupe d’experts de la Chambre de commerce internationale, qui présentaient chacun une perspective ou un point de vue du monde des affaires, ont fermement et unanimement appelé l’OMC à jouer un rôle plus fort dans la surveillance des ACPr.  Au moins l’un des intervenants a dit des ACPr qu’ils étaient une “horreur” pour le secteur privé.  Ils correspondent néanmoins à une réalité de plus en plus présente.

Certains ont fait valoir que le Mécanisme de 2006 pour la transparence des ACR était un outil utile mais insuffisant pour réellement garantir la conformité avec les règles existantes.  Ainsi, en utilisant de façon plus explicite l’article XIV du GATT et l’article V de l’AGCS, l’OMC devrait tirer profit de ses ressources et garantir la conformité ainsi que la complémentarité entre les ACPr et les règles commerciales multilatérales.  Les règles de l’OMC sont le fondement des ACPr et les deux articles susmentionnés en sont les gardiens.  À partir de là, le Secrétariat de l’OMC devrait définir les meilleures pratiques en ce qui concerne les ACPr.  Ce n’est qu’à cette condition que les ACPr pourront favoriser la libéralisation multilatérale.

Le monde des affaires a également rappelé qu’au final, seules les règles commerciales multilatérales garantissent la transparence et la prévisibilité nécessaires.

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Séance 10: Trouver des réponses aux défis du commerce mondial:  entretien avec Pascal Lamy

Mme Zeinab Badawi a demandé au Directeur général de l’OMC, M. Pascal Lamy, quels étaient les principaux obstacles à la conclusion du Cycle de Doha, et si le programme avait été “détourné” .  M. Lamy a répondu que les Membres de l’OMC réalisaient qu’ils se trouvaient dans une “impasse” et que les sujets à traiter étaient peut être trop nombreux.  Il a indiqué que la réduction des droits appliqués aux produits industriels était l’obstacle le plus important et la source de cette impasse.  En outre, l’expression “pays en développement” a évolué sous l’influence des puissants pays en développement d’aujourd’hui, appelés “pays émergents” .  La réciprocité entre les pays en développement et les pays développés est donc augmentée;  toutefois il doit exister une “contrepartie” car les pays BRIC (Brésil, Russie, Inde et Chine) n’accepteront pas de compromis sans recevoir quelque chose en retour.

Mme Zeinab Badawi a demandé s’il existait une “égalité de conditions” .  M. Lamy a déclaré que nous en étions beaucoup plus proches aujourd’hui qu’il y a 15 ans.  Sur la question de la crise financière et du protectionnisme, M. Lamy a répondu que la tentation protectionniste était présente et qu’elle le resterait tant que le chômage serait élevé, mais que le protectionnisme commercial ne protégeait pas les emplois.  S’agissant du commerce et des politiques monétaires, M. Lamy a indiqué que ces questions allaient au-delà du mandat de l’OMC, qui était axé sur l’ouverture des échanges et les règles commerciales.  Sur le point de savoir si le commerce permettait la croissance, M. Lamy a dit que le commerce pouvait favoriser la réduction de la pauvreté et le développement, comme l’avaient montré la Chine, l’Inde, etc.  Enfin, lorsqu’on lui a demandé s’il croyait ou non au libre-échange, Pascal Lamy a répondu qu’il croyait à “l’ouverture des échanges” .

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Séance 11:Les aliments abondants et bon marché deviennent rares et chers:  le système commercial mondial peut-il faire face à cette évolution?

Cette séance était consacrée au rôle du commerce dans la protection de la sécurité alimentaire ainsi qu’à l’impact des politiques commerciales et de la réglementation sur la volatilité des prix des produits alimentaires et sur le flux de produits agricoles et alimentaires.  Même si leurs points de vue étaient différents, les experts sont convenus que l’ouverture des échanges pouvait aider à garantir la sécurité alimentaire et à modérer la volatilité des prix.

M. Antoine Bouet, de l’Institut international de recherche sur les politiques alimentaires, a présenté plusieurs études économiques démontrant que le protectionnisme (à la fois les droits d’importation et les restrictions à l’exportation) dans le secteur agricole entraînait la hausse et la volatilité des prix des produits alimentaires.  Son étude montre qu’en cas de choc du côté de l’offre, les prix des produits alimentaires peuvent subir une hausse allant jusqu’à 40 pour cent.

M. Nicholas Kalaitzandonakes, de l’EMAC (Economics and Management of Agrobiotechnology Centre) a insisté sur le fait que l’innovation et la croissance de la productivité constituaient la seule solution aux problèmes alimentaires.  Il a cité des études montrant que la perturbation des échanges due à un asynchronisme réglementaire (c’est-à-dire un produit approuvé par un pays exportateur mais pas par le pays importateur) était coûteuse.

Mme Alice Chepleting Kalya, de l’Agricultural Society of Kenya, a parlé des problèmes rencontrés par les agriculteurs d’Afrique subsaharienne, y compris les subventions publiques, le manque d’économies d’échelle, l’absence de tolérance s’agissant des produits génétiquement modifiés et la faible valeur dans la chaîne de marché.

Enfin, M. Stuart Harbinson, de Sidley Austin LLP, a abordé le rôle de l’OMC dans le contexte de la sécurité alimentaire.  Il a dit que le mandat actuel du Cycle de Doha était approprié pour traiter les préoccupations liées à l’agriculture.

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Séance 12: l’après-ADPIC

Présidée par M. Ahmed Abdel Latif (ICTSD), cette séance était axée sur l’impact de l’Accord sur les ADPIC (aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce) 15 ans après son entrée en vigueur sur les plans juridique, économique et institutionnel, ainsi que sur les éventuels enseignements à tirer pour l’avenir du régime international de propriété intellectuelle (PI).

Mme Annette Kur (Institut Max-Planck) a présenté sa proposition textuelle de réforme de l’Accord sur les ADPIC, qui fait partie des nombreux projets portant sur l’après-ADPIC.  Loin de se contenter de regretter l’inadéquation de l’Accord ou des solutions parallèles telles que les ALE, cette approche suggère de revenir sur l’Accord sur les ADPIC pour le transformer en un régime plus équilibré.  En présentant effectivement un projet de libellé juridique, Mme Kur espérait fournir une sorte de “Loi portant modification de l’Accord sur les ADPIC” qui servirait de référence aux discussions.  Elle proposait entre autres choses d’étoffer l’article 7 (“Objectifs”) afin qu’il ne vise plus seulement le transfert de technologie et l’innovation, et de mettre davantage l’accent sur l’article 8 (“Principes”) pour faire en sorte que la charge de prouver une violation de l’Accord sur les ADPIC incombe à la partie alléguant cette violation.  La proposition introduit également une “règle d’équilibre général” (proposition d’article 8a) et une disposition détaillée sur l’interaction entre la propriété intellectuelle et les règles de concurrence (article 8b).  Mme Kur a ensuite proposé de remplacer la règle du triple critère de l’article 13 par des exceptions obligatoires à la protection, qui devraient être surveillées au niveau international.

En analysant les éléments de preuve et les recherches menées sur l’impact économique de l’Accord sur les ADPIC, l’économiste M. Carsten Fink (OMPI) a constaté que la plupart des recherches avaient été consacrées aux “modifications de la législation nationale” comme conséquence observable de l’Accord sur les ADPIC.  Très peu d’économistes avaient tenté d’étudier l’effet de “l’amélioration de la crédibilité découlant de l’existence d’une politique nationale liée par le droit international” qui était, il faut en convenir, bien plus difficile à examiner en raison du manque de variables appropriées.  Les recherches portant sur les changements de la réglementation nationale comme mesure de l’impact de l’Accord sur les ADPIC se sont généralement heurtées à la difficulté d’évaluer le lien de causalité et l’ampleur relative de l’incidence des évolutions externes et internes.  S’agissant des études consacrées à l’impact de la propriété intellectuelle sur l’IED de façon plus générale, les résultats semblaient montrer que la propriété intellectuelle avait effectivement eu une influence, mais que d’un point de vue empirique l’effet était relativement limité en termes de décisions concrètes d’investissement (ou de relocalisation de la recherche-développement), car d’autres facteurs tels que la taille de l’économie, les infrastructures et le potentiel de croissance d’un marché faisaient régulièrement passer la propriété intellectuelle au second plan.

D’après Mme Nandini Kotthapally (Mission de l’Inde auprès de l’OMC), même si l’OMPI était pendant longtemps restée en retrait de l’élaboration de règles de propriété intellectuelle au niveau international, depuis l’entrée en vigueur de l’Accord sur les ADPIC — aucun des traités de fond prévus sur le droit des brevets, la protection des interprétations audiovisuelles et les sociétés de radiodiffusion n’avait vu le jour — , elle avait retrouvé sa place d’institution majeure dans le domaine de la propriété intellectuelle avec l’adoption du Plan d’action de l’OMPI pour le développement en 2007.  Ce plan d’action constituait un changement de paradigme qui avait transformé la notion de propriété intellectuelle:  elle n’était plus l’apanage d’une élite aisée mais était fermement ancrée dans le contexte du développement.  Il s’agissait maintenant d’un principe accepté à l’OMPI et au-delà, qui avait été mis en pratique au Comité du développement et de la propriété intellectuelle de l’OMPI (CDIP).  Ce changement, ainsi que les prometteuses activités d’établissement de normes récemment tenues à l’OMPI — la proposition de traité sur les exceptions au droit d’auteur en faveur des bibliothèques et des personnes malvoyantes, ainsi que les travaux menés sur les ressources génétiques et les savoirs traditionnels — illustraient bien l’évolution de la “géographie de l’innovation” , dans laquelle la région asiatique était devenue la plus active en termes de dépôt de demandes de brevets, dépassant les États-Unis et l’Europe.

Mme Victoria Whitford (Office de la propriété intellectuelle du Royaume-Uni) a dit que l’Office de la propriété intellectuelle du Royaume-Uni s’efforçait de fonder ses objectifs de politique — à savoir que la PI devrait soutenir l’innovation et la croissance de sorte à aider les pays pauvres à se développer et à relever les défis mondiaux — sur des éléments de preuve économiques solides, comme le montrait le rapport Hargreaves réalisé à la demande du gouvernement, sur la “propriété intellectuelle et la croissance” .  Les résultats, relativement nuancés, démontraient que si une protection solide de la propriété intellectuelle était associée à une hausse de la croissance dans les pays à revenu élevé, cet effet positif était plus limité dans les pays à revenu moyen où la croissance des industries d’imitation était réduite.  Dans les pays à faible revenu, une forte protection de la propriété intellectuelle n’avait pas d’effet sur la croissance, ou l’influençait de façon négative.  Même si une évaluation exacte nécessitait davantage de recherches, il apparaissait clairement que, pour réussir, les approches devaient être adaptées aux besoins de chaque pays et concilier des intérêts différents.  D’après l’Office de la propriété intellectuelle du Royaume-Uni, le régime international de propriété intellectuelle devait permettre aux créateurs et inventeurs d’être propriétaires de leurs travaux mais aussi garantir un accès approprié à ces derniers.  Dans ce contexte, Mme Whitford a avancé que l’Accord sur les ADPIC, qui prévoyait différentes périodes de transition pour les pays les moins avancés, était déjà une “approche adaptée” et devrait prendre en compte la réalité économiques.  Ainsi, le Royaume-Uni était d’avis que la période de transition accordée aux PMA, dont l’expiration était prévue le 1er juillet 2013, devrait être prolongée afin de soutenir la croissance et le développement dans ces pays.

Mme Zhao Hong (Mission de la Chine auprès de l’OMC) a dit que les énormes efforts législatifs déployés par la Chine, avant et après son accession à l’OMC, pour se conformer à l’Accord sur les ADPIC, avaient eu un impact très positif en soutenant l’émergence du concept de primauté du droit, et n’avaient pas entravé la croissance économique de la Chine.  Elle disposait maintenant d’une vaste infrastructure soutenant la propriété intellectuelle (comprenant 400 000 employés à l’Office des marques et 2 200 juges spécialisés dans les tribunaux de la propriété intellectuelle) et connaissait une croissance sans précédent des droits enregistrés.  Il y avait encore des plaintes mais les partenaires commerciaux de la Chine reconnaissaient les efforts qu’elle déployait, en particulier pour faire respecter les droits.  Mme Hong a dit qu’à l’avenir, il serait primordial de parvenir à un équilibre entre l’intérêt de la protection et l’intérêt public.  Elle a ajouté que, dans le cadre de l’OMC, les marchandises protégées par des DPI et les autres biens devraient être traités de la même façon:  si les détenteurs de DPI pouvaient contrôler l’exportation de leurs produits, l’OMC semblait traiter les contrôles à l’exportation réalisés par les propriétaires de matières premières différemment.  En outre, la transparence exigeait l’introduction d’une prescription en matière de divulgation pour l’origine des ressources génétiques dans les demandes de brevets.  Mme Hong était également en faveur d’une extension des IG et souhaitait que la responsabilité de faire respecter les DPI incombe au secteur privé.

M. Pedro Roffe (ICTSD) a conclu la séance en formulant des observations concernant l’impact des ALE sur le régime international de propriété intellectuelle.  Si les ALE étaient un dérivé légitime de l’Accord sur les ADPIC, ils démontraient aussi son incapacité à traiter la complexité de la politique dans ce domaine.  Les intérêts du secteur avaient joué un rôle décisif dans la définition du champ d’application des ALE, lequel avait été encore élargi par les règles du traitement NPF et du traitement national dans l’Accord sur les ADPIC.  Les ALE étaient une évolution asymétrique consistant à imposer un système au partenaire de l’ALE et ils avaient eu pour conséquence principale l’alignement des régimes réglementaires sur le régime du pays le plus développé (l’exclusivité des données relatives aux essais de médicaments, par exemple).  En résumé, les ALE avaient conduit à une expansion du système de propriété intellectuelle en imposant des calendriers stricts d’accession et de ratification par rapport aux autres traités (comme l’UPOV en 1991), et leur effet sur les coalitions de pays partageant les mêmes idées au sein des institutions multilatérales n’était pas encore clair.  L’impact des ALE, y compris leur conformité avec l’Accord sur les ADPIC, devrait faire l’objet d’une plus grande surveillance et devrait, dans l’idéal, respecter les principes établis dans le Plan d’action de l’OMPI pour le développement.

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Séance 13: l’OMC en transition:  faire face à des défis nouveaux et en constante évolution

La séance était divisée en deux parties, la première portant sur les prix des produits alimentaires et les subventions dans le secteur agricole, et la seconde sur l’avenir de l’OMC.

Les intervenants ont exprimé des réserves sur les Membres qui demandent à l’OMC de se charger des questions d’agriculture, et ont proposé comme alternative la création d’une Organisation mondiale de l’agriculture (OMA).  De l’avis des experts, l’OMA serait une organisation bien plus favorable aux agriculteurs, car les préoccupations de ces derniers vont au-delà des questions de concurrence:  ils doivent aussi gérer les parasites, les conditions météorologiques et les catastrophes naturelles.  Les intervenants ont conseillé aux gouvernements de commencer à réglementer la spéculation sur les matières premières agricoles, qui porte atteinte à la fois à la sécurité alimentaire et aux prix des produits alimentaires.  S’ils sont convenus que ce domaine ne relevait pas du mandat de l’OMC, ils ont déclaré que l’Organisation ne pourrait pas fonctionner correctement si ce problème de spéculation n’était pas résolu.

S’agissant de l’avenir de l’OMC et du Cycle de Doha, les experts ont dit que le Cycle était mort et qu’il devait être enterré.  D’après eux, l’OMC devait aller de l’avant et réaliser des progrès dans d’autres domaines.  Sinon, elle perdrait de sa crédibilité.  Les experts ont argué que les négociations échouaient car elles étaient fondées sur des règles et principes qui ne reflétaient plus le paysage politique et économique actuel.  Dans le même esprit, les experts ont indiqué que les changements dans la géométrie des pouvoirs entre les Membres de l’OMC étaient responsables des problèmes du Cycle de Doha.  D’après les intervenants, le Cycle de Doha n’avait pas su s’adapter aux changements géopolitiques et financiers qui s’étaient produits depuis son lancement.

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