Publié le 19 août, le Baromètre se situe actuellement à 84,5 points, soit 15,5 de moins que la valeur de référence de 100, et 18,6 de moins que l'année dernière à la même période. Cette valeur, qui est la plus basse enregistrée depuis 2007 et rappelle l'époque de la crise financière de 2008-2009, rejoint les statistiques publiées par l'OMC en juin, avec une baisse estimée du commerce des marchandises au deuxième trimestre 2020 de 18,5% par rapport à l'année dernière. L’ampleur exacte de la chute des échanges ne sera confirmée que plus tard dans l’année, lorsque des données officielles sur le volume des échanges seront disponibles pour la période allant d’avril à juin.

Tous les indices qui composent le Baromètre restent nettement inférieurs à la tendance, et beaucoup sont au niveau le plus bas jamais enregistré, même si certains ont commencé à se stabiliser. Les indices des produits automobiles (71,8) et du fret aérien (76,5) sont de loin les pires depuis 2007. Le transport de conteneurs (86,9) reste également très déprimé.⁽¹⁾ Les commandes à l’exportation (88,4) montrent cependant des signes de reprise, puisque cette valeur est en hausse. Dans le même temps, les indices des composants électroniques (92,8) et des matières premières agricoles (92,5) se sont relativement bien maintenus, n’affichant que des baisses modestes. 

Les statistiques de juin de l’OMC pointaient une baisse de 14% du volume du commerce mondial des marchandises entre le premier et le deuxième trimestre de l'année. D'après cette estimation, ainsi que les nouveaux chiffres du Baromètre du commerce des marchandises, le commerce mondial évoluerait conformément au moins pessimiste des deux scénarios exposés dans les prévisions d’avril de l’OMC, à savoir une contraction de 13% du volume du commerce des marchandises en 2020 par rapport à 2019. Cependant, les économistes de l’OMC ont averti en juin que, compte tenu du lourd tribut économique de la pandémie de COVID-19, les projections indiquant une forte reprise des échanges suivant une courbe en V en 2021 pourraient s’avérer trop optimistes. Dans un contexte toujours très incertain, s'agissant de la politique économique et commerciale comme de l’évolution de la crise sanitaire, on ne peut exclure la possibilité d'une courbe en L. Le commerce mondial se trouverait alors bien en deçà de sa trajectoire d’avant la pandémie.

Le Baromètre du commerce des marchandises est conçu pour évaluer la dynamique et identifier les points d'inflexion de la croissance du commerce mondial. Un chiffre de 100 indique que la croissance suit les tendances à moyen terme; un chiffre supérieur à 100 indique que la croissance est supérieure à la tendance, tandis qu'un chiffre inférieur à 100 indique une croissance inférieure à la tendance.

En temps normal, le Baromètre du commerce des marchandises fait apparaître des changements dans la trajectoire du commerce mondial quelques mois à l'avance. Mais le caractère soudain et inattendu de la crise liée à la COVID-19 pourrait avoir profondément bouleversé les comportements et schémas économiques, réduisant ainsi la valeur prédictive des indicateurs conventionnels. Dans ce contexte instable, les statistiques à haute fréquence (c’est-à-dire quotidiennes ou hebdomadaires), obtenues grâce aux progrès du traitement et de la collecte des données, pourraient permettre aux analystes de déceler les signes précoces d'une reprise de l’activité économique et des échanges commerciaux. D’autres types de statistiques pourraient aussi donner des indications sur la confiance des consommateurs et des entreprises. Ainsi, des augmentations modestes ont déjà été enregistrées pour plusieurs indicateurs liés au commerce, comme ceux qui suivent les vols commerciaux et les escales des porte-conteneurs. On peut citer également des indicateurs concernant les contrats à terme pour le cuivre, ainsi que la couverture médiatique des perspectives économiques (voir ci-après).

L’OMC continuera de suivre l’évolution des échanges commerciaux tout au long de la crise, y compris à l'aide d'indicateurs économiques non conventionnels et à haute fréquence.

Le Baromètre du commerce des marchandises est disponible dans son intégralité ici.

De plus amples détails sur la méthodologie sont exposés dans une note technique ici.

Graphique 1 : Vols commerciaux, 1er janvier 2020 — 31 juillet 2020
(indice, semaine du 1er janvier = 100)

Source : OpenSky Network et calculs du Secrétariat de l’OMC.

Le graphique 1 montre le nombre de vols commerciaux par jour enregistrés par OpenSky Network depuis le début de l'année 2020.  Le nombre de vols dans le monde a chuté de près de 80 % entre fin février et mi-avril, cette tendance étant plus marquée pour les vols internationaux que pour les vols intérieurs. Les vols ont ensuite progressivement repris, mais fin juillet les chiffres restaient inférieurs d’environ 40 % au niveau du début de l’année. Les vols commerciaux sont un indicateur important de la situation de l’économie mondiale, car ils sont étroitement liés au commerce des marchandises et des services.

Graphique 2 : Escales de porte-conteneurs, AIS, 12 mai 2019 — 1er août 2020
(Nombre d'escales par semaine)

Source : Groupe de travail mondial sur l'utilisation des mégadonnées en statistique officielle, Nations Unies.
Note : Estimation pour la première semaine de 2020 en raison de données incomplètes.

Le graphique 2 montre le nombre d'escales effectuées par des porte-conteneurs chaque semaine d'après le Système d’identification automatique (AIS) mis au point par l’Organisation maritime internationale (OMI). Les escales ont fortement diminué en février 2020, quand la gravité de la COVID-19 est devenue apparente, puis elles ont repris, avant de baisser à nouveau en avril-mai à mesure que la maladie se propageait plus largement. Au début du mois d’août, les escales de porte-conteneurs étaient encore en recul d’environ 7 % en glissement annuel, mais cela constituait une légère amélioration par rapport à la baisse de 11 % enregistrée en mai.

Graphique 3 : Contrats à terme pour le cuivre, COMEX, 12 août 2019 — 11 août 2020
($EU par livre)

Source : Chicago Mercantile Exchange (CME).

Les prix des contrats à terme pour le cuivre sont largement reconnus comme un indicateur avancé de l’activité économique, en raison de l’importance de ce métal dans de nombreux secteurs manufacturiers. Des contrats normalisés sont négociés à la Bourse du COMEX, une division du Chicago Mercantile Exchange (CME). La valeur des opérations à terme sur le cuivre avait baissé de 27 % mi-mars par rapport au début de l’année, mais elle a depuis augmenté de 37 %, reflétant des attentes croissantes quant à la reprise économique. Pour savoir si ces attentes sont justifiées, il faudra continuer d'observer l'évolution de la pandémie de COVID-19, y compris les deuxièmes vagues d’infection et l’amélioration des possibilités de traitement.

Graphique 4 : Couverture médiatique de l’activité économique, 12 août 2019 — 11 août 2020
( % et indice, neutre = 0)

Source : The GDELT Project Summary Service.

Le graphique 4 montre le volume quotidien et la tonalité des informations diffusées dans les médias contenant l’expression “activité économique”, telles que recensées par le GDELT Project. La tonalité des informations diffusées, déjà négative avant la pandémie, était au plus bas en mars lorsque la menace pesant sur l’économie mondiale est devenue évidente, et que les répercussions économiques de la crise ont suscité un intérêt croissant. L'évolution du ton adopté par les médias depuis donne à penser que la perception de la situation économique mondiale s’améliore progressivement, même si elle reste globalement négative, et on constate que l'économie occupe de moins en moins de place dans la couverture médiatique. 

Notes:

1. Certaines des données brutes qui composent les différents indices font apparaître de fortes baisses suivies de nets rebonds. Une amorce de redressement peut ne pas apparaître tant que la reprise ne se poursuit pas pendant un certain temps. retour au texte