Découvrir ce qui se passe à l'OMC

NOUVELLES:  COMMUNIQUÉS DE PRESSE 1998

PRESS/95
9 mars 1998

M. Ruggiero critique les obstacles “invisibles” au commerce

Dans l'allocution d'ouverture qu'il a prononcée ce jour (9 mars) au Symposium de l'OMC sur la facilitation des échanges, le Directeur général de l'OMC, M. Renato Ruggiero, a critiqué les obstacles “invisibles” au commerce - prescriptions excessives en matière de documentation et retards dus aux procédures imposées aux entreprises lorsqu'elles expédient des marchandises au-delà des frontières -, dont il a dit qu'ils entraînaient des coûts supplémentaires pour les négociants, les consommateurs et les économies nationales et instauraient un “environnement commercial globalement défavorable”.  

M. Ruggiero a déclaré que, comme les obstacles classiques au commerce - droits de douane et restrictions quantitatives - étaient plus bas que jamais à la suite du Cycle d'Uruguay, l'attention se portait désormais sur ce qu'il a appelé les “coûts invisibles” dus aux prescriptions en matière de documentation, aux retards entraînés par les procédures et au manque de transparence et de prévisibilité dans l'application des règles et réglementations officielles.

Il a dit qu'il qualifiait ces coûts d'“invisibles” car ils ne faisaient pas partie de la politique commerciale proprement dite des gouvernements, mais qu'ils n'étaient “certainement pas invisibles pour les négociants et les consommateurs”. Dans bien des cas, a-t-il indiqué, ces coûts “invisibles” dépassaient le niveau effectif des droits payés sur les produits.

Il a ajouté que, “comme les droits de douane et les mesures non tarifaires traditionnelles sont partout en net recul, les obstacles aux opérations transfrontières dus aux procédures sont désormais un facteur déterminant des décisions d'investissement prises par les investisseurs étrangers”.

M. Ruggiero s'est dit confiant que, grâce au Symposium “les Membres de l'OMC seront mieux en mesure de passer à la phase des travaux analytiques sur la facilitation des échanges, pour voir s'il y a lieu d'établir des règles de l'OMC dans ce domaine”.

L'OMC a réuni environ 300 négociants et fonctionnaires chargés des politiques gouvernementales afin de recenser les problèmes qui entravent la circulation des marchandises à travers les frontières, lors d'un Symposium sur la facilitation des échanges qui a lieu les 9 et 10 mars 1998 dans son nouveau Centre de conférences. Il s'agit d'une initiative du Conseil du commerce des marchandises de l'OMC, qui a été chargé par la Conférence ministérielle de Singapour d'“entreprendre des travaux exploratoires et analytiques, en s'inspirant des travaux des autres organisations internationales compétentes, au sujet de la simplification des procédures commerciales pour voir s'il y a lieu d'établir des règles de l'OMC dans ce domaine”.

Quelques-unes des grandes sociétés mondiales présentent à cette occasion les problèmes concrets auxquels se heurtent les négociants lorsqu'ils expédient des marchandises au-delà des frontières. Parmi les intervenants figurent des représentants des sociétés suivantes: Federal Express, General Motors, General Electric Information Systems et Mattel (Etats-Unis); Shell (Pays-Bas); Gondrand AG (Suisse); Lemuir Group (Inde); SITPRO et Marinade Ltd (Royaume-Uni); Xerox Brazil (Brésil); Bank of Botswana; et Multimedia Development Corporation (Malaisie). Les groupes industriels suivants participent également aux débats: Fédération des industries allemandes, Exportateurs français de vins et spiritueux, Fédération des entrepreneurs néerlandais et Association britannique de services

Les ONG participantes sont les suivantes: Chambre de commerce internationale, Association du transport aérien international (IATA), Chambre internationale de la marine marchande, Union internationale des transports routiers, Union internationale des chemins de fer, Chambre de commerce de Lima, Chambre de commerce nationale du Zimbabwe et FIATA.

On trouvera ci-après le texte intégral de l'allocution prononcée par M. Ruggiero.

“Je vous souhaite la bienvenue au Symposium de l'OMC sur la facilitation des échanges.

Nous célébrons cette année le cinquantième anniversaire du système commercial multilatéral. Incarné d'abord par le GATT et à présent par l'OMC, ce système a apporté au monde une prospérité sans précédent en libéralisant progressivement les échanges de marchandises et de services. Il y a 50 ans, les droits de douane dans les pays industrialisés étaient en moyenne de 40 pour cent environ sur les produits industriels. Lorsque les résultats du Cycle d'Uruguay seront intégralement mis en oeuvre, ces droits de douane seront inférieurs à 4 pour cent en moyenne dans les pays développés, et 40 pour cent environ des importations sur ces marchés seront totalement exemptes de droits.

Outre cet abaissement considérable des droits, nous avons assisté au cours de ces dernières années à un recul spectaculaire du recours aux restrictions quantitatives comme instrument de politique commerciale. Pour les deux groupes de produits que ce recours touchait le plus fréquemment jusqu'en 1994, c'est-à-dire les textiles et les vêtements et les produits agricoles, les restrictions en question ont été éliminées ou sont en train de l'être à la suite du Cycle d'Uruguay. De grands progrès ont été accomplis au GATT et à l'OMC en ce qui concerne la réduction des obstacles au commerce dans les domaines de l'évaluation en douane, des licences d'importation, des normes et des réglementations techniques, et des mesures sanitaires et phytosanitaires.

La levée des obstacles au commerce a entraîné une croissance phénoménale du commerce international. Entre 1948 et 1997, les exportations mondiales de marchandises ont augmenté en moyenne de 6 pour cent par an en valeur réelle, ce qui a multiplié par 14 le volume des opérations. En comparaison, la production totale a augmenté en moyenne de 3,7 pour cent par an et a été multipliée par 5,5. Depuis le milieu des années 80, et surtout durant les années 90, alors que la production n'a que peu augmenté dans bon nombre de pays industrialisés, la croissance des échanges est restée constamment élevée.

Pour les entreprises, la réduction des obstacles à l'accès aux marchés facilite de plus en plus la recherche de fournisseurs au niveau mondial.

L'intégration croissante des économies est également facilitée par la réduction des obstacles à l'investissement étranger direct dans de nombreux pays, investissement dont le volume a aussi été multiplié plusieurs fois au cours de ces dernières décennies.

Elle a en outre été stimulée par la révolution des technologies de l'information, qui permet aux sociétés de gérer des opérations à distance et accroît les échanges au moyen du commerce électronique. Et la chute des coûts de transport a encore intensifié le commerce des marchandises.

A mesure que les obstacles classiques au commerce disparaissent, des obstacles moins visibles dus à l'inefficacité de l'administration et de l'organisation du traitement des opérations commerciales se révèlent devant le public.

L'attention se porte désormais sur les coûts “invisibles” dus aux prescriptions en matière de documentation, aux retards entraînés par les procédures et au manque de transparence et de prévisibilité dans l'application des règles et réglementations officielles. Je qualifie ces coûts d'“invisibles” car ils ne font pas partie de la politique commerciale proprement dite des gouvernements. Ils ne sont certainement pas invisibles pour les négociants et les consommateurs. Leur estimation varie selon les variables utilisées pour les calculer, mais il est évident que, dans bien des cas, ils dépassent le niveau effectif des droits payés sur les produits concernés.

Les obstacles administratifs à l'importation et à l'exportation ne sont assurément pas des instruments efficaces pour une politique commerciale restrictive. Les prescriptions excessives en matière de documentation et les procédures lentes et désuètes sont des mesures grossières, imprécises et aveugles qui entravent l'ensemble des échanges et instaurent un environnement commercial globalement défavorable. Elles nuisent souvent aux objectifs de la politique économique nationale. Par exemple, une structure tarifaire soigneusement conçue, avec des droits faibles sur les produits intermédiaires en vue de stimuler la compétitivité des entreprises nationales, risque d'être contrecarrée si le coût d'importation de ces produits est renchéri par des obstacles administratifs. Contrairement aux droits de douane, qui créent des recettes budgétaires, les coûts invisibles dus aux obstacles administratifs sont de véritables pertes improductives, qui ne profitent à personne et ne servent aucun objectif significatif.

Les entreprises rivalisent aujourd'hui dans un monde où les obstacles au commerce et à l'investissement disparaissent, ce qui rend plus mobiles les capitaux et les technologies. L'intégration économique mondiale a changé la nature du marché international. Les industries s'établissent dans les lieux où elles peuvent être exploitées de la manière la plus efficace. Le premier critère de leur décision en la matière est la présence d'une infrastructure matérielle et sociale de qualité. L'environnement macro-économique, qui permet aux entreprises de fonctionner dans une relative liberté, est de la plus haute importance pour les décisions de gestion. Les entreprises doivent avoir accès aux marchés mondiaux, tant pour leurs importations que pour leurs exportations. Comme les droits de douane et les mesures non tarifaires traditionnelles sont partout en net recul, les obstacles aux opérations transfrontières dus aux procédures sont désormais un facteur déterminant des décisions d'investissement prises par les investisseurs étrangers.

A la première Réunion ministérielle de l'OMC, qui s'est tenue à Singapour en décembre 1996, les Ministres ont chargé le Conseil du commerce des marchandises d'“entreprendre des travaux exploratoires et analytiques, en s'inspirant des travaux des autres organisations internationales compétentes, au sujet de la simplification des procédures commerciales pour voir s'il y a lieu d'établir des règles de l'OMC dans ce domaine”.

Depuis, des travaux exploratoires ont été effectués et une note informelle a été établie par le Secrétariat de l'OMC sur les travaux réalisés ou en cours de réalisation dans d'autres organisations internationales, y compris des organisations non gouvernementales, au sujet de la facilitation des échanges. La note informelle décrit les travaux de plus de 15 organisations qui s'occupent d'un large éventail d'aspects relatifs à la simplification des procédures commerciales.

Après des entretiens préliminaires au Conseil, de nombreux Membres ont estimé qu'il fallait réunir davantage d'informations et mieux comprendre la nature des obstacles administratifs aux opérations transfrontières avant de procéder à une analyse sérieuse. Il a donc été décidé d'organiser un Symposium sur la facilitation des échanges à l'OMC.

Je suis pleinement confiant que, grâce aux exposés et aux discussions qui animeront ces deux journées, les Membres de l'OMC seront mieux en mesure de passer à la phase des travaux analytiques sur la facilitation des échanges, pour voir s'il y a lieu d'établir des règles de l'OMC dans ce domaine.

Je vous souhaite un symposium fructueux”.