WTO news: what’s been happening in the WTO
NOUVELLES: ALLOCUTIONS — DG MIKE MOORE

MM/LIB/1
Libreville, 13 novembre 2000

Libreville 2000 — Réunion des ministres Africains chargés du commerce

Libreville, 13-15 novembre 2000

Excellence Monsieur le Président de la République gabonaise,
Excellences Mesdames et Messieurs les Présidents d'institutions,
Excellences Mesdames et Messieurs les Ministres,
Excellences Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs et Représentants des organisations interafricaines et internationales,
Chers collègues,
Mesdames et Messieurs,

Vous me permettrez, avant toute chose, d'exprimer à Son Excellence El Hadj Omar Bongo, Président de la République gabonaise, au gouvernement et au peuple gabonais, ma profonde gratitude et mes sincères remerciements pour l'accueil chaleureux et pour tous les soins dont nous sommes l'objet depuis notre arrivée sur cette terre africaine de Libreville.

Monsieur le Président de la République,

Si nous sommes aujourd'hui à Libreville pour nous concerter sur les questions liées au développement du commerce, c'est bien grâce à votre très haute vision politique et à votre engagement personnel bien connus du monde entier de toujours contribuer à l'émancipation de l'Afrique, à son épanouissement, à son développement et à son rayonnement sur la scène internationale. Votre décision d'organiser cette réunion des Ministres africains chargés du commerce, avec l'appui du Secrétariat de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), est une démonstration renouvelée de votre engagement de servir l'Afrique et de lui donner le leadership nécessaire pour son affirmation et sa participation active et effective à la gestion des affaires du monde. Mais le contraire aurait été difficile à comprendre, Monsieur le Président de la République, quand on sait que vous assumez avec enthousiasme et beaucoup de réussite votre rôle de doyen des Chefs d'État en Afrique.

Je voudrais aussi féliciter votre gouvernement, avec une mention spéciale à l'endroit de Monsieur Alfred Mabika, votre dynamique et dévoué Ministre du commerce, du tourisme, du développement industriel et de l'artisanat, et à travers lui toute son équipe avec en tête, et tout particulièrement Madame le Ministre délégué Ursule Ekié, pour l'énorme travail accompli pour aboutir à la tenue de cette importante réunion ministérielle, aujourd'hui à Libreville. Je voudrais aussi exprimer ma reconnaissance à Son Excellence Madame Yolande Biké, votre Ambassadeur à Genève et Représentant permanent du Gabon auprès de l'Organisation mondiale du commerce, de surcroît Présidente du Comité Environnement et Commerce, sans la disponibilité et les conseils pertinents et avisés de laquelle nous aurions rencontré certainement des obstacles insurmontables dans la préparation de cette réunion ministérielle.

Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs,

Si cette réunion se tient aujourd'hui et avec la participation de tous les pays les moins avancés d'Afrique, c'est grâce au soutien financier de donateurs, soucieux de voir votre continent s'intégrer dans le système commercial multilatéral et devenir des acteurs de la mondialisation, et surtout de pouvoir participer activement et effectivement aux activités de l'OMC. Je voudrais saisir cette occasion pour réitérer mes remerciements aux gouvernements de l'Afrique du Sud, de la Belgique, de l'Égypte, de la France, du Gabon, de la Grande-Bretagne, de l'Irlande, du Japon, du Luxembourg, du Maroc, de la Chine de Taiwan, de même qu'aux responsables de l'Agence intergouvernementale de la francophonie, du Groupe de la Banque africaine de développement, du Centre de recherche pour le développement international, de l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle, du Programme des Nations Unies pour le développement et de l'Union européenne qui, de façon spontanée et dans un élan de solidarité, ont accepté de mettre à la disposition du Gabon et du Secrétariat de l'OMC les moyens financiers et matériels nécessaires pour l'organisation réussie de cette réunion de Libreville.

Je voudrais aussi exprimer ma satisfaction aux organisations internationales qui ont accepté de collaborer et de participer avec leur expertise dans les travaux des 24 ateliers qui serviront d'épine dorsale à notre réunion. Les ateliers, faut-il le rappeler, seront organisés autour de dix thèmes couvrant les accords et les règles du GATT/de l'OMC.

La présente réunion, à Libreville, des Ministres africains chargés du commerce, la toute première du genre en Afrique dans l'histoire du GATT et de l'OMC, vise essentiellement à sensibiliser les responsables et décideurs des pays africains sur l'impérieuse nécessité de prendre part et de participer activement à la consolidation du système commercial multilatéral et aux activités de l'OMC et à renforcer leurs capacités et leurs compétences pour une utilisation plus efficace des règles et des accords en vigueur, et aussi pour une meilleure participation aux négociations en cours à Genève de même qu'à celles qui se tiendront par la suite.

La réunion des Ministres africains chargés du commerce de Libreville s'inscrit dans les engagements que je me suis donnés en prenant mes fonctions de Directeur général il y a un peu plus d'un an d'appuyer les efforts des pays en développement dans le système commercial multilatéral en faisant en sorte que la libéralisation du commerce se poursuive dans le sens qu'elle soit profitable à tous les pays, qu'ils soient riches ou pauvres, grands ou petits.

Comme je le disais au sommet des Chefs d'État et de gouvernement du Marché commun de l'Afrique australe, le COMESA, à Maurice en mai dernier, l'OMC doit faire plus pour l'Afrique, mais l'Afrique doit pour sa part centrer davantage son attention sur l'OMC. J'ai lu récemment que la libéralisation du commerce des produits agricoles, à elle seule, représenterait un gain équivalant au triple du montant total de l'APD.

Force est de reconnaître que depuis ma prise de fonctions, je me suis déployé pour pouvoir être à l'écoute des Africains et inclure dans les priorités de l'OMC leurs préoccupations légitimes.

Au titre de ces efforts, je citerai entre autres la nomination du premier Africain au poste de Directeur général adjoint en plus de 50 ans d'existence du GATT/de l'OMC, en la personne de mon ami et dévoué collègue Ablassé Ouedraogo, sans la vision politique, le savoir-faire, le courage et la persévérance duquel nous n'aurions sans doute pas tenu cette réunion aujourd'hui à Libreville. Merci Ablassé pour l'excellent travail que tu es en train de faire dans mon équipe à l'OMC.

En outre, j'ai essayé autant que mon calendrier me le permettait de prendre part personnellement à plusieurs rencontres d'importance sur le continent et de m'imprégner des difficultés des pays africains pour mieux les comprendre. C'est ainsi que j'ai été le tout premier Directeur général du GATT/de l'OMC à m'adresser à la Réunion ministérielle du Groupe des 77, c'était à Marrakech en septembre 1999, et à participer à votre deuxième conférence organisée sous l'égide de l'OUA à Alger aussi en septembre 1999. Je me suis aussi rendu en Éthiopie et ai visité les sièges de la Commission économique des Nations Unies pour l'Afrique et de l'Organisation de l'unité africaine à Addis-Abeba. J'ai participé, en outre, à Maurice en mai 2000 au Sommet des Chefs d'État du COMESA, avant de me rendre en visite de travail au Lesotho, en Afrique du Sud en juin dernier et au Togo pour le 37ème Sommet des Chefs d'État et de gouvernement de l'OUA tenu en juillet dernier à Lomé.

Au nombre des activités et actions en cours à l'OMC pour consolider le système commercial multilatéral, et qui sont d'un intérêt tout particulier pour les pays africains, sont entre autres: les négociations sur l'agriculture et sur le commerce des services, la mise en place d'un mécanisme approprié pour étudier les problèmes liés à la mise en œuvre, le renforcement des capacités des pays en développement par l'élargissement des programmes de coopération technique. En outre, plus de 25 pays ont pris des engagements en vue d'améliorer l'accès aux marchés. Je tiens à féliciter l'UE, et en particulier M. Pascal Lamy pour le leadership dont il fait montre, ainsi que les États-Unis pour la Loi sur la croissance et les perspectives économiques des pays africains, qui ouvrira d'importants débouchés. Je suis sûr que M. Pascal Lamy et Mme l'Ambassadeur Susan Esserman ne manqueront pas d'évoquer ces actions. De plus, le Programme intégré conjoint d'assistance technique à certains PMA (JITAP), le Cadre intégré pour l'assistance technique liée au commerce en faveur des pays les moins avancés, l'installation de centres de référence dans tous les pays et aux sièges des organisations régionales et sous-régionales d'intégration, l'organisation de la deuxième Semaine de Genève en octobre 2000 pour les pays qui n'ont pas de missions résidentes à Genève sont autant d'initiatives qui dénotent une confiance accrue en l'Afrique et un engagement renouvelé à l'égard de ce continent.

Toutes ces initiatives prises pour permettre une intégration des pays africains dans le système commercial multilatéral ont permis en outre, au Secrétariat de l'OMC et aux États Membres, de passer de la phase de consolidation de confiance à la phase de création de coalitions pragmatiques autour des intérêts vitaux de chacun. Mais il convient d'admettre que le monde du commerce a bien changé avec la globalisation et la régionalisation qui impliquent de nouveaux efforts pour améliorer la participation de chacun dans les échanges internationaux.

L'Afrique dispose en fait d'importants atouts pour corriger la trajectoire en devenant un véritable acteur de la mondialisation au lieu de continuer à assumer le rôle d'objet. Je crois en l'Afrique et en ses capacités de rejeter la marginalisation et de devenir beaucoup plus dynamique dans le commerce mondial.

Il y a beaucoup à gagner. Les dirigeants africains me disent que l'Afrique refuse de rester marginalisée plus longtemps. L'Afrique veut jouer un plus grand rôle! Des travaux concrets ont été engagés pour tenter de résoudre les difficultés rencontrées par de nombreux pays dans la mise en œuvre des résultats du Cycle d'Uruguay. Ces travaux sont utiles et doivent aboutir. Mais au fond de moi-même, je crois que pour éviter le maintien de la marginalisation, il nous faut un nouveau cycle de négociations commerciales, avec l'Afrique à la table de négociation et les grandes préoccupations de l'Afrique à l'ordre du jour. Aucun nouveau cycle de négociations ne pourra démarrer ou s'achever sans que les besoins légitimes de toutes les nations y soient abordés. Un nouveau cycle serait bon pour l'Afrique. Il serait bénéfique pour tout le monde.

Certes, s'engager avec précipitation dans un nouveau cycle comporte des risques. Un autre échec serait désastreux. Si l'on doit lancer un nouveau cycle, il faut que tous les gouvernements fassent preuve d'une plus grande flexibilité et qu'ils trouvent la volonté politique de confronter des intérêts particuliers bien enracinés, au profit de tous. Les gouvernements des petits et des grands pays doivent aller au-delà des positions exprimées à Seattle. Seattle a échoué non pas en raison des mouvements de protestation, mais parce que les différences, d'un côté et de l'autre de l'Atlantique et du Nord au Sud, étaient trop profondes, trop marquées pour être surmontées.

Il reste des différences importantes entre les positions des divers pays, notamment en ce qui concerne les sujets à inclure dans les négociations futures. Il faudra établir des passerelles pour faire avancer le système commercial sur la base d'un programme de libéralisation vaste et équilibré comme nous le voulons tous. Le travail que mes collègues du Secrétariat et moi-même avons accompli au cours de l'année passée a, je crois, amélioré le climat dans lequel ces questions sont traitées. Nous avons œuvré systématiquement pour encourager le dialogue et la compréhension à tous les niveaux, depuis les Ministres jusqu'aux experts techniques. Nous poursuivrons et intensifierons ces efforts.

Tout le programme de travail existant de l'OMC — très étoffé — doit être exécuté avec énergie de façon à contribuer non seulement à susciter la confiance mais aussi à créer une dynamique. Je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour que les préparatifs soient accomplis et que les conditions soient favorables aux décisions politiques nécessaires pour lancer un programme de négociation plus large. Cependant, seuls les gouvernements Membres de l'OMC peuvent prendre ces décisions. Personne ne peut décider à leur place.

Pour parvenir à un consensus afin d'étendre le programme de négociation, il faudra que toutes les parties fassent preuve de flexibilité et d'une volonté de forger des compromis, et cela, très franchement, plus que par le passé. Il faudra être réaliste, faire des choix difficiles parmi différentes priorités et montrer du courage politique. Personne ne peut s'attendre à ce qu'on atteigne l'ensemble des objectifs fixés. Mais tous les participants ont intérêt à ce que nous réussissions, et aussi difficile soit-il de parvenir à un consensus, c'est la seule façon de convenir d'un nouveau cycle en faveur duquel tous les Membres de l'OMC puissent s'engager activement. Vous pouvez être sûrs que je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour faciliter les efforts déployés par les Membres pour parvenir au consensus.

Je demande instamment à tous les gouvernements Membres de l'OMC de tirer parti des progrès accomplis l'année dernière, pour œuvrer ensemble concrètement et de façon pragmatique, sans jamais perdre de vue cette vérité: il faut que ce système soit dynamique et en constante évolution, et qu'il fonctionne dans l'intérêt de tous les pays Membres et de toutes les populations.

Pour conclure, je voudrais réitérer à Mesdames et Messieurs les Ministres chargés des questions relevant de la compétence de l'Organisation mondiale du commerce mes sincères remerciements et toute ma reconnaissance pour le soutien permanent qu'ils n'ont cessé de m'apporter dans l'accomplissement de ma mission. Je vous rappelle une nouvelle fois que moi-même et le Secrétariat de l'OMC sommes à votre entière disposition pour vous appuyer dans toute action que vous entreprendrez au niveau de vos pays respectifs, en vue d'une prise en compte du commerce comme une priorité dans vos programmes nationaux de développement. Pour ce faire, je sais compter sur la bonne collaboration des agences soeurs de l'OMC pour gagner ce pari.

Je vous remercie.