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DÉVELOPPEMENT: RÉSUMÉ

Rapport de l'institut international du développement durable sur le Symposium de haut niveau de L'OMC sur le commerce et Le développement, 17-18 Mars 1999

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Allocutions d'ouverture 

Ouvrant le symposium, M. Renato Ruggiero, Directeur général de l'OMC, a dit qu'à certains égards le dialogue sur le commerce et le développement n'était pas nouveau parce que le développement était l'un des objectifs centraux du GATT. À d'autres égards toutefois, il l'était; en premier lieu parce qu'à l'ère de la mondialisation, de l'interdépendance et des communications instantanées les inégalités entre les pays et les peuples devenaient de plus en plus inacceptables. Il a rappelé que plus de deux milliards de personnes, soit un tiers de l'humanité, vivaient avec moins de 2 dollars par jour, qu'un milliard et demi de personnes n'avaient pas accès à l'eau douce, et que 130 millions d'enfants n'étaient jamais allés à l'école. L'idée que des milliards de gens sont prisonniers de la misère, alors que d'autres continuent de s'enrichir, est non seulement inacceptable mais aussi moralement intolérable. En second lieu, le rôle des pays en développement dans le système commercial a profondément changé. Lorsque le GATT a vu le jour, il ne comptait que 23 Membres, et seulement onze d'entre eux appartenaient au monde en développement. Aujourd'hui, l'OMC compte 134 Membres et 80 pour cent d'entre eux font partie des économies en développement, des économies les moins avancées et des économies en transition. La quasi-totalité des 30 candidats à l'accession sont des économies en développement ou des économies en transition. M. Ruggiero a dit que les pays en développement sont de plus en plus essentiels à la bonne santé de l'économie mondiale. Entre 1973 et 1997, leur part dans les importations de produits manufacturés des pays développés a triplé, passant de 7,5 pour cent à 23 pour cent. Cela illustre la réalité: le défi du développement n'est plus seulement un défi que doivent relever les pays en développement; il doit aussi figurer au rang des préoccupations des économies avancées.

L'Ambassadeur Ali Mchumo, Président du Conseil général de l'OMC, a dit que le symposium devait contribuer à faciliter l'intégration des pays en développement au système commercial multilatéral, à développer la cohérence entre les politiques commerciales, financières et les politiques de développement et entre les institutions correspondantes, à améliorer la participation des PMA au système commercial et à réduire leur vulnérabilité au sein du système, et à renforcer le rôle de l'OMC dans le soutien des objectifs de développement définis dans l'Accord de Marrakech.

M. Rubens Ricupero, Secrétaire général de la CNUCED, a souligné qu'il fallait, pour éradiquer la pauvreté, arrêter une stratégie claire qui s'inscrirait dans un cadre temporel précis. Le commerce et le développement, a-t-il dit, devaient se soutenir et se renforcer mutuellement. Il a qualifié la crise financière asiatique de “crise de développement“, a évoqué ses nombreuses dimensions et a parlé des besoins de pays en développement lors des futures négociations commerciales – sous forme d'un accès élargi et d'une souplesse accrue. Il a dit qu'il fallait que les produits et services des pays en développement bénéficient d'un meilleur accès aux marchés. Il a suggéré de s'attaquer aux questions non réglées pendant le Tokyo Round et le Cycle d'Uruguay – dont les crêtes tarifaires et la progressivité des droits dans les secteurs de l'alimentation, des textiles, des vêtements, des chaussures et du cuir; le report jusqu'en 2005 d'un retrait, significatif du point de vue économique, des limitations appliquées aux exportations de textiles et de vêtements des pays en développement; le stade embryonnaire de la libéralisation du commerce des produits agricoles; le recours abusif aux procédures antidumping; le problème des règles d'origine; et les normes techniques et les obstacles de caractère environnemental. M. Ricupero souhaitait également qu'un nouvel élan soit donné au traitement spécial et différencié, et à l'amélioration de la coopération technique dans le domaine des échanges. Ces objectifs, que l'on devait atteindre grâce à la coopération entre les organisations internationales, pourraient aider les pays en développement à participer activement aux futures négociations.

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Exposés d'orientation générale 

M. Paolo Fulci, Président du Conseil économique et social, a dit qu'il fallait assurer la cohésion des politiques et veiller à la cohérence entre leurs divers aspects, qu'il s'agisse de commerce, d'aide, de finances ou d'environnement. L'éradication de la pauvreté devait être la priorité absolue. Selon lui, la pauvreté était l'ennemi numéro 1 puisqu'elle engendrait l'ignorance, la famine, l'analphabétisme, le chômage, la dégradation de l'environnement, l'intolérance et la haine. Il a lancé un appel pour que l'on donne à la mondialisation un visage humain. Il a souligné que le partenariat et non l'hégémonie était l'élément-clé. Le commerce devait être ouvert à tous et la pauvreté, la faiblesse et la vulnérabilité de certains ne devaient pas les empêcher de tirer profit des avantages qui en découlaient.

M. Shigemitsu Sugisaki, Directeur général adjoint du Fonds monétaire international, a dit que l'une des grandes déceptions des deux dernières décennies avait été l'incapacité de rapprocher les niveaux de vie des pays les plus pauvres de la planète de ceux des pays riches. Ce résultat décevant, malgré tous les efforts déployés, montrait qu'il fallait d'urgence rechercher des solutions à long terme qui soient audacieuses. Il a mentionné trois éléments essentiels: une action des PMA en vue de soutenir et de renforcer leurs propres politiques en matière de croissance et de développement; une action de la communauté internationale en vue d'améliorer l'environnement financier externe, en particulier par un allégement approprié de la dette, un accès consolidé en franchise de droits pour tous les produits des PMA et l'octroi d'une assistance à des conditions préférentielles; et l'amélioration de l'accès aux marchés des pays industriels, qui permettrait de stimuler les activités commerciales et l'investissement dans les PMA. Il a aussi appuyé la proposition tendant à offrir aux exportations des PMA un accès consolidé en franchise de droits.

M. Caio K. Koch-Weser, Directeur général, Opérations de la Banque mondiale, a indiqué que depuis près de deux décennies les pays en développement en tant que groupe avaient été à l'avant-garde des progrès réalisés dans le domaine de la libéralisation du commerce; cette ouverture aux échanges s'était traduite par une croissance plus élevée et avait stimulé l'économie mondiale dans son ensemble. Il a souligné qu'il était important de protéger ces acquis et de résister à un retour du protectionnisme. Chacun a un rôle à jouer pour que les avancées se poursuivent, depuis la Banque mondiale et les autres institutions internationales jusqu'aux pays eux-mêmes. Le commerce à lui seul ne peut constituer le fondement d'un développement durable. Il doit s'inscrire dans un programme de développement plus large visant à diriger l'investissement vers les plus pauvres et à les intégrer dans l'économie mondiale. L'intervenant a par ailleurs insisté sur la nécessité d'intégrer les politiques commerciales dans un cadre général de politiques macro-économiques sectorielles et sociales conçues pour lutter contre la pauvreté, ainsi que sur l'impératif de “bonne gestion des affaires publiques“.

Le Professeur T.N. Srinivasan, titulaire de la chaire d'économie à l'Université Yale, a mis en avant le côté déraisonnable des efforts visant à atteindre de trop nombreux objectifs avec un seul instrument, et a suggéré que l'Accord sur les ADPIC soit retiré des prérogatives du GATT pour être confié à l'OMPI, que le CCE soit dissous et que l'environnement soit désormais du ressort du PNUD, et que les questions de travail soient exclues des compétences du GATT pour être attribuées à l'OIT. Il a souligné qu'il était nécessaire de placer le commerce des produits agricoles sous l'égide du GATT. Il comprenait “l'hésitation des pays en développement“ à se lancer dans un nouveau cycle de négociations. Il a comparé la lutte contre le dumping à une “arme nucléaire dans l'arsenal de la politique commerciale“ et préconisait sa suppression. Il a estimé que l'on pouvait régler la question des accords régionaux en introduisant une “clause d'extinction“, suivant laquelle les préférences dont jouissaient les parties à un accord régional seraient étendues à tous les Membres de l'OMC dans un délai de cinq ans. Il a dit que les pays en développement avaient contribué à leur propre marginalisation par rapport au système commercial multilatéral et avaient renoncé, en insistant sur un traitement spécial et différencié, à de nombreux avantages. Il n'était pas dans l'intérêt des pays en développement de retarder un nouveau cycle de négociations; ils devraient adopter un programme concret, axé sur les intérêts fondamentaux. Il doutait par ailleurs de l'utilité de l'accès préférentiel aux marchés pour les pays les moins avancés.

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Débat 

Le BANGLADESH a dit qu'il fallait revoir tous les engagements antérieurs contractés par les pays développés envers les PMA, ainsi que leur mise en œuvre. Il a insisté sur la capacité limitée des PMA de souscrire de nouveaux engagements. Comme l'INDE et le ZIMBABWE, il ne souhaitait pas que de nouvelles questions soient abordées, le programme de travail de l'OMC étant surchargé. Le PAKISTAN et l'INDONÉSIE ont appelé à faire preuve de cohérence dans l'élaboration des politiques macro-économiques et à donner un nouvel élan à la coopération internationale pour le développement. Le COSTA RICA a mis l'accent sur la nécessité d'ouvrir les marchés, de renforcer les disciplines commerciales et de lutter contre les tendances protectionnistes et l'unilatéralisme. Il a souligné que le nouveau cycle de négociations devrait notamment garantir une plus grande libéralisation des procédures douanières et l'élimination des crêtes tarifaires et de la progressivité des droits. Le SÉNÉGAL a mis l'accent sur la nécessité d'adopter des mesures d'allégement de la dette et de travailler à une plus grande coordination des politiques. L'ÉGYPTE a dit que l'OMC avait contribué à la promotion des échanges, mais que les déséquilibres soulevaient de plus en plus de préoccupations. Elle a demandé au Secrétariat d'analyser la répartition des avantages produits par le Cycle d'Uruguay. La COLOMBIE a demandé la mise en place d'un instrument qui assurerait l'égalité d'accès à la justice dans le cadre des procédures de règlement des différends de l'OMC et a indiqué qu'un groupe de pays avait proposé la création d'un centre autonome d'assistance juridique aux pays les moins avancés.

Le RÉSEAU DU TIERS MONDE s'est inscrit en faux contre l'idée selon laquelle le commerce menait toujours à la croissance et que chacun avait tiré parti du Cycle d'Uruguay. Il a cité un certain nombre d'études récentes montrant qu'une libéralisation du commerce inappropriée pouvait engendrer des pertes et la stagnation économique, comme on l'observait dans de nombreux pays d'Afrique et d'Amérique latine. Le WORLD DEVELOPMENT MOVEMENT a rappelé que son groupe était opposé à l'Accord multilatéral sur l'investissement (AMI) parce qu'il proposait de faire table rase des politiques que les gouvernements utilisaient pour atteindre leurs objectifs en matière de développement.

L'UNION EUROPÉENNE a dit que la meilleure façon pour les pays en développement de faire obstacle à l'unilatéralisme et au protectionnisme et d'assurer leur intégration au système commercial multilatéral serait de participer à un nouveau cycle de négociations. Elle était disposée à remettre en jeu tous ses droits actuels pour le nouveau cycle de négociations. Elle a insisté sur la nécessité d'apporter aux pays en développement une aide pour la mise en œuvre, d'élaborer une stratégie en vue du renforcement des capacités et d'opérer une réforme institutionnelle visant à faciliter la participation des pays en développement au système de l'OMC. Appuyée par le ROYAUME-UNI et le DANEMARK, elle a demandé que l'on porte une attention particulière aux préoccupations des PMA. Les ÉTATS-UNIS ont donné des précisions sur la façon dont le Président Clinton concevait le nouveau cycle de négociations; il souhaitait notamment un programme de négociations accéléré, une réforme institutionnelle pour assurer la transparence, le renforcement des capacités et la poursuite de la libéralisation des échanges. Ils étaient disposés à travailler à un élargissement de l'accès aux marchés pour les produits agricoles et industriels, à débattre de tous les problèmes de mise en œuvre au cas par cas et à envisager d'améliorer les procédures de règlement des différends.

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Groupe de travail n° 1: liens entre les politiques commerciales et les politiques du développement 

M. Paul Collier, Groupe de recherche sur le développement, Banque mondiale, était le modérateur de ce groupe de travail.

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Orateur principal 

M. C. Fred Bergsten, Directeur, Institut d'économie internationale, Washington, D.C., considérait qu'un nouveau cycle de négociations s'imposait d'urgence; l'ouverture du système commercial était compromise par les mesures protectionnistes de l'Union européenne et des États-Unis. Il a énuméré les intérêts prioritaires que les pays en développement pourraient défendre pendant les nouvelles négociations, notamment un accès accru aux marchés pour les textiles et les produits agricoles, la suppression des tarifs préférentiels dans les accords régionaux, de nouveaux accords sur l'investissement étranger direct, le renforcement des disciplines concernant le recours aux droits antidumping, la libéralisation du mouvement des personnes physiques ainsi que la poursuite du renforcement du mécanisme de règlement des différends. Il a ajouté que les pays en développement avaient beaucoup à gagner du lancement d'un nouveau cycle de négociations et que, d'un point de vue stratégique, un nouveau cycle était préférable à la renégociation du Cycle d'Uruguay. Il a aussi dit que les pays en développement devraient éviter de faire pression pour que soit renouvelé le “traitement spécial et différencié“, et chercher plutôt à avoir une participation entière et active, en partenaires égaux, au système commercial. Il a également indiqué qu'un nouveau cycle était essentiel pour que la “roue“ de la libéralisation des échanges continue de tourner.

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Présentateurs 

Mme María Livanos Cattaui, Secrétaire général, Chambre de commerce internationale, a dit que toute nouvelle stratégie devait prendre en compte les aspects micro-économiques. En ce qui concerne les PMA, elle a demandé que l'attention soit portée sur les entreprises locales, les marchés locaux et des partenariats adéquats avec les entreprises internationales. Elle a regretté que beaucoup de pays en développement continuent d'appliquer des politiques protectionnistes dans les secteurs des textiles et de l'agriculture. De nombreux éléments concrets faisaient par ailleurs obstacle à la libre circulation des marchandises, comme les normes techniques et les prescriptions en matière d'étiquetage. Elle a précisé que le rôle du commerce dans la promotion du développement ne devait pas faire oublier les préalables essentiels au développement, à savoir des systèmes politiques stables, un droit commercial solide, un système judiciaire indépendant et une administration efficace et intègre. Elle a aussi affirmé que l'environnement hostile au capital que l'on observait dans de nombreux pays en développement décourageait les investissements d'origine étrangère et intérieure.

M. Keith Bezansen, Directeur de l'Institute of Development Studies, Royaume-Uni, a dit qu'un nouveau cycle de négociations commerciales mondiales s'imposait d'urgence pour promouvoir le développement. Il a estimé qu'il fallait traiter les questions non réglées pendant le Cycle d'Uruguay, à savoir les textiles, les vêtements et l'agriculture. Quoi que l'on dise des défauts, des dangers et des conséquences que l'ouverture économique pouvait avoir pour le développement, il ne faisait guère de doute à ses yeux qu'une nouvelle ère de protectionnisme commercial de la part des États-Unis porterait gravement atteinte aux perspectives des pays pauvres. Il a ajouté qu'il restait beaucoup à apprendre sur les liens entre la politique commerciale et le développement, car il s'agissait là d'un domaine complexe. L'expérience de l'Asie de l'Est et de certains pays d'Amérique latine montrait qu'il était important que l'ouverture économique se fasse progressivement et que la prudence s'imposait sur le plan de la libéralisation des mouvements de capitaux. Il a par ailleurs insisté sur le fait que les politiques commerciales devaient être intégrées à un cadre plus large de politiques du développement englobant l'épargne et l'investissement, la stabilité macro-économique et le développement des ressources humaines.

M. Wontak Hong, Université de Séoul, République de Corée, a proposé que l'on se concentre sur les moyens qui permettraient aux pays en développement d'être des partenaires plus actifs dans le système de l'OMC. Il a recommandé de tirer profit de l'expérience de l'Asie de l'Est. L'expansion des exportations de produits manufacturés à forte intensité de main-d'œuvre pourrait être un important facteur de croissance, car elle permettrait de créer des emplois, d'améliorer la productivité globale de la main-d'œuvre et de créer un effet d'apprentissage dynamique. Il a souligné que les gouvernements devaient jouer un rôle adéquat et que cela constituait la leçon à tirer de la crise économique asiatique. Il fallait que les pays industrialisés et l'OMC apprennent à accepter que les gouvernements des pays en développement jouent un rôle plus actif.

M. Deepak Nayyar, Université Jawaharlal Nehru, New Delhi, a insisté sur le fait que le commerce était un moyen et pas une fin en soi, et que le but du développement n'était pas la croissance économique mais l'amélioration des conditions de vie, et a ajouté que la vocation exportatrice n'était pas la même chose que l'ouverture. Il a dit que le degré d'ouverture et la nature de l'intervention constituaient des choix stratégiques en vue de l'industrialisation, choix qui ne pouvaient être faits “une fois pour toutes“, car ils dépendaient du stade de développement et devaient évoluer au fil du temps. Il a aussi dit qu'il était essentiel de redéfinir le rôle économique de l'État par rapport au marché, afin que les deux institutions se complètent au fur et à mesure que la situation évoluait ou que les temps changeaient. Soulignant qu'il existait des asymétries flagrantes dans un monde composé de partenaires inégaux, il a dit qu'il y avait des règles différentes dans les diverses sphères. Par exemple, la liberté de mouvement des capitaux contrastait avec l'absence de libre circulation de la main-d'œuvre. En outre, l'asymétrie qui se dessinait dans les règles internationales réduisait très sensiblement l'autonomie dont disposaient les pays en développement pour formuler les politiques économiques en vue de l'industrialisation et du développement.

M. John Toye, CNUCED, a reconnu qu'il était urgent de lancer un nouveau cycle de négociations commerciales, mais se demandait si ce serait possible dans le délai envisagé. Il se demandait notamment s'il restait suffisamment de temps pour mettre en œuvre un programme d'assistance technique pour les pays en développement, de façon que ceux-ci soient prêts pour les négociations devant commencer en novembre. Il a dit que, si les Membres se sentaient bousculés, il se pouvait qu'ils ne coopèrent pas au lancement du prochain cycle. Il a souligné que les dispositions relatives au traitement spécial et différencié ne devaient pas conduire à des exemptions généralisées.

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Débat 

Les participants ont exprimé toute une série de points de vue sur l'incidence d'une libéralisation accrue des échanges et ont mis en exergue les diverses priorités concernant les questions que l'OMC devrait traiter. L'INDE a déclaré que les pays en développement n'avaient pas tiré profit du Cycle d'Uruguay et a souligné que, pendant les séries de négociations précédentes, seules les questions importantes pour les pays industrialisés avaient été abordées. Elle en a appelé à un rééquilibrage et non pas à une renégociation du Cycle d'Uruguay. Elle interprétait les remarques de Fred Bergsten comme signifiant que si les pays en développement n'acceptaient pas de nouvelles négociations ainsi qu'une libéralisation accrue, les pays développés risquaient de ne pas respecter pleinement les engagements déjà contractés. L'ÉGYPTE considérait elle aussi que des problèmes inattendus s'étaient posés dans la mise en œuvre des engagements résultant du Cycle d'Uruguay et que les avantages attendus ne s'étaient pas matérialisés. Comme CUBA, l'Égypte s'élevait contre l'abus des mesures unilatérales par les pays industrialisés. Elle recommandait le recours au processus d'examen incorporé prescrit par les résultats du Cycle d'Uruguay, pour voir si le système fonctionnait.

Le SOUTH CENTRE souhaitait avoir une OMC dans laquelle les pays en développement ne seraient pas manœuvrés et dépassés dans tous les domaines et en appelait à un réexamen institutionnel des procédures de l'OMC. La RÉPUBLIQUE DOMINICAINE a dit que le droit au traitement spécial était “lettre morte“. Le MAROC a fait remarquer qu'il fallait mesurer l'incidence de la liberté des échanges sur les économies des pays en développement. Le SECRÉTARIAT du GROUPE DES PAYS D'AFRIQUE, DES CARAÏBES ET DU PACIFIQUE (ACP) a indiqué que l'assistance technique ne remplaçait pas la création de capacités pour mettre en œuvre les accords. Il a également noté que la réforme économique constituait une base nécessaire pour pouvoir participer à l'économie mondiale, mais que les pays fortement endettés ne pouvaient pas se permettre de procéder à des réformes économiques. La CONSUMER UNITY AND TRUST SOCIETY a souligné que les éléments qui, pour les pays en développement, entravaient l'accès aux marchés devaient bénéficier d'un degré élevé de priorité. La CIST a dit que les pays en développement ne respectaient les normes fondamentales du travail que sous la pression exercée par les pays développés, ce qui signifiait que les perdants étaient les travailleurs des pays en développement.

La SUÈDE a insisté sur l'importance de l'accès aux marchés dans les négociations à venir. Elle appuyait ce que proposait le Président, à savoir que lors des négociations de Seattle l'on s'engage à faire en sorte que les exportations des PMA bénéficient d'un accès en franchise de droits. Elle a aussi souligné l'importance du commerce Sud-Sud, de la consolidation des tarifs douaniers aux taux appliqués par les pays en développement, et de l'amélioration de l'assistance technique. La FRANCE a préconisé l'adoption d'un programme généreux et ambitieux d'allégement de la dette et a rappelé qu'elle proposait un moratoire de 30 ans. Elle a souligné qu'il était nécessaire que les PMA tirent profit de l'accès à la coopération technique ainsi que des préférences généralisées. Le JAPON a insisté sur la nécessité d'un nouveau cycle de négociations et sur le fait que celui-ci devrait traiter de l'investissement. Il a aussi insisté sur l'importance que revêtait le renforcement des capacités.

Répondant à l'Inde, M. Fred Bergsten a dit qu'une étude de la Banque mondiale montrait que les pays en développement avaient bénéficié, du fait du Cycle d'Uruguay, de 1,2 à 2 pour cent de croissance annuelle supplémentaire de leur PNB. Répondant à M. Bezansen, il a indiqué que toutes les négociations menées après la guerre avaient été déclenchées par des mesures protectionnistes — un résultat de la crise macro-économique et monétaire — et a ajouté qu'il était temps de faire à nouveau tourner la “roue“.

En résumé, M. Paul Collier a dit que différents points de vue avaient été exprimés — à savoir que la libéralisation des échanges était une condition nécessaire et suffisante pour le développement, qu'elle n'était ni nécessaire ni suffisante et qu'elle était nécessaire mais insuffisante. Il a souscrit au point de vue selon lequel la libéralisation des échanges était une condition nécessaire mais pas suffisante. Il a ajouté que nombre de PMA avaient créé des environnements hostiles au capital, et n'avaient pas de programmes sociaux qui permettraient à la croissance d'être complétée par l'équité. Il a aussi dit que les politiques commerciales devaient être intégrées à un cadre plus large de stratégies de développement axées sur la lutte contre la pauvreté et que la spécialisation des PMA et des pays à faible revenu dans une gamme étroite de produits de base les avait rendus vulnérables aux chocs extérieurs. Les pays en développement avaient contribué à leur propre marginalisation en appliquant des politiques de fermeture. L'OMC était par conséquent une organisation naturelle pour les pays à faible revenu. Il a ajouté qu'il était dans l'intérêt des petits pays à faible revenu qui procédaient à des réformes de tenter de se débarrasser des activités antidumping, de déterminer quels étaient les problèmes en matière d'environnement et de main-d'œuvre qui étaient réels et ceux qui ne l'étaient pas, et de se concentrer sur l'agriculture et les textiles comme étant les principaux domaines appelant des réformes lors des prochaines négociations. Il était favorable à l'initiative concernant l'accès consolidé en franchise de droits pour toutes les exportations des PMA et était d'accord avec Fred Bergsten lorsqu'il disait que, à moins que des mesures ne soient prises, l'avenir pourrait être protectionniste.

Le lendemain, le RÉSEAU DU TIERS MONDE, présentant une communication signée par plusieurs ONG, a dit que nombre des participants étaient mécontents de la manière dont les travaux du premier groupe de travail avaient été conduits, ainsi que des conclusions du modérateur. Il a ajouté que les pays africains étaient insultés par les observations du modérateur, selon lesquelles ces pays se marginalisaient délibérément à l'OMC. Il considérait aussi que le modérateur voulait dire que les pays en développement ne changeraient que s'ils subissaient un choc et que les États-Unis étaient sur le point de leur faire subir le choc du protectionnisme. Il était donc préférable qu'ils se préparent à un nouveau cycle de négociations. Il a en outre contesté les remarques de Bergsten qui, a-t-il dit, signifiaient que les pays en développement devaient ouvrir leurs marchés intégralement aux États-Unis et à l'Europe, faute de quoi ils se heurteraient à un protectionnisme accru. Il s'agissait là de propagande et non pas de science économique.

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Groupe de travail n° 2: perspectives des pays en développement en matière de commerce et de développement 

Le modérateur, M. Rubens Ricupero, Secrétaire général de la CNUCED, a rappelé que le débat de la veille montrait que le développement était une question extrêmement complexe et que le rapport entre le commerce et le développement était encore plus complexe. Bien que ce rapport soit indéniable, ses avantages n'étaient pas automatiques et de nombreuses variables entraient en ligne de compte.

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Orateur principal  

M. Carlos Magariños, Directeur général de l'ONUDI, a dit que des efforts plus ciblés étaient nécessaires pour que les règles du jeu soient plus équitables pour les pays en développement et pour permettre à ceux-ci d'améliorer leurs perspectives de développement. Il a indiqué que la politique commerciale devait être intégrée à un cadre plus large de politiques macro-économiques, structurelles et sectorielles. Dans le cadre de la coopération technique et du transfert des connaissances, il a ajouté qu'il convenait que les organisations multilatérales créent des équipes spéciales afin d'aider les pays en développement à mieux comprendre leurs propres intérêts dans les négociations commerciales et de les aider à arrêter leurs stratégies et leurs positions, individuellement ou collectivement. Ces équipes devraient aussi contribuer aux efforts déployés par les pays en développement pour être associés à la préparation des négociations commerciales. Il a aussi suggéré que l'on trouve des mécanismes permettant de diffuser des informations sur les avantages du Système généralisé de préférences (SGP) auprès des pays admis à en bénéficier. Il a proposé que l'entrée à l'OMC des pays en développement candidats soit accélérée. Il a préconisé une étude attentive du calendrier, du déroulement et du degré de libéralisation des marchés, de façon que chaque pays en développement puisse s'adapter aux conséquences de l'ouverture des marchés. Il a par ailleurs mentionné l'incidence des progrès technologiques, qui ont fait baisser le coût des communications et des transports, ce qui pourrait être bénéfique pour les pays en développement.

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Présentateurs   

M. Marcelo de Paiva Abreu, Rio de Janeiro, Brésil, a esquissé un programme possible pour le nouveau cycle de négociations; il a recommandé la suppression des distorsions du commerce des produits agricoles, l'amélioration de la discipline internationale concernant les droits antidumping et le renforcement du système multilatéral afin de lutter contre le recours aux mesures unilatérales. Il a préconisé un réexamen du traitement spécial et différencié pour les économies en développement et a dit que ce traitement devait être axé sur l'intégration des PMA et des pays à faible revenu dans le système commercial multilatéral. Il a évoqué l'importance des engagements et des programmes de caractère contraignant concernant les systèmes généraux de préférences.

M. Arjun Sengupta, Centre for Policy Research (Centre d'études politiques), New Delhi, Inde, a fait remarquer que si la libéralisation des échanges ne s'appuyait pas sur des politiques en matière d'investissement, d'infrastructure, de sécurité sociale et de développement social elle ne pouvait pas déboucher sur la croissance. Il a cité l'échec des programmes d'ajustement du FMI dans plusieurs pays d'Afrique, échec qui, à son avis, était dû à l'insuffisance des ressources, et a recommandé que la libéralisation des échanges s'accompagne d'un apport de capitaux aux pays en développement. Il a souligné que ces derniers devaient bénéficier d'un traitement spécial et différencié, ce traitement se justifiant par le fait qu'il était essentiel aux échanges entre partenaires inégaux.

M. John Whalley, Universités de Warwick et Western Ontario, a évoqué la complexité de l'étude des problèmes d'environnement. Il a cité plusieurs facteurs tels que les progrès en ce qui concerne la réduction des droits de douane, la baisse des frais de transport, l'innovation technologique, la forte expansion des échanges Sud-Sud, ainsi que des événements extérieurs à l'OMC comme le processus du Protocole de Kyoto. L'hétérogénéité des pays en développement compliquait encore les choses. S'agissant de l'assistance technique, il a dit qu'un accent particulier avait bien été mis sur la mise en œuvre des décisions issues du Cycle d'Uruguay, mais qu'il était tout aussi important de renforcer la capacité de négociation. Il a rappelé que pendant le Cycle d'Uruguay la nature des dispositions concernant le traitement spécial et différencié avait changé afin que soit prise en compte l'importance croissante de la flexibilité et des périodes de transition pour pouvoir faire face aux coûts de l'ajustement. Il a dit qu'il fallait traiter la question du traitement spécial et différencié “inverse“, qui se traduisait par l'application de règles particulièrement défavorables aux pays en développement dans le secteur des textiles et certains segments de l'agriculture. Il se demandait si l'insistance sur le traitement spécial et différencié pouvait encore constituer la stratégie de négociation générale des pays en développement et doutait qu'une telle stratégie réponde à leurs intérêts. Il a dit qu'il fallait faciliter l'accès des PMA au mécanisme de règlement des différends, et était favorable à la création d'un centre de conseil juridique indépendant. Il a souligné l'importance de l'aide étrangère au développement et de l'allégement de la dette.

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Débat 

De nombreux participants ont axé leurs interventions sur le point de savoir s'il y avait lieu de tenir un nouveau cycle de négociations commerciales, et ont évoqué les questions à examiner soit avant, soit pendant les nouveaux pourparlers. HONG KONG, CHINE a dit que beaucoup de Membres étaient convaincus que le programme du nouveau cycle n'était pas équilibré. Les domaines présentant un intérêt pour les pays développés y étaient inscrits, alors que ceux qui intéressaient les pays en développement n'y figuraient pas. La BOLIVIE a dit que les secteurs les plus protégés étaient ceux dans lesquels les pays en développement étaient les plus compétitifs. Elle était favorable à la création d'un centre de conseil juridique. SRI LANKA a indiqué que les PMA étaient de plus en plus marginalisés tout en étant encouragés, par les pays souhaitant avoir accès à leurs marchés, à “grimper à bord“. La GUINÉE a dit qu'il ne fallait pas oublier la faiblesse de la capacité de production. Le BANGLADESH INSTITUTE OF DEVELOPMENT STUDIES regrettait que certains pays et blocs n'envisageaient pas sérieusement la question des droits nuls pour les PMA. Cela devait être fait à la réunion de Seattle. L'UNION DES CONFÉDÉRATIONS DE L'INDUSTRIE ET DES EMPLOYEURS D'EUROPE (UNICE) souhaitait que la question de l'investissement soit inscrite au programme du prochain cycle de négociations et a insisté sur le fait que l'échec de la négociation de l'AMI ne devait pas empêcher l'OMC d'examiner cette question. Le BRÉSIL a proposé, entre autres choses, d'augmenter les quotas d'accès minimal dans l'agriculture, d'élaborer des disciplines multilatérales visant à limiter le recours abusif aux enquêtes antidumping, d'inscrire les services dans le programme incorporé et d'instaurer un contrôle multilatéral des schémas SGP. La CONFEDERATION OF INDIAN INDUSTRY (CII) a souligné que le renforcement des capacités s'imposait avant toute discussion sur un nouveau cycle de négociations. Elle a dit qu'il était nécessaire d'examiner les questions liées au traitement spécial et différencié et à la lutte contre le dumping. La SUISSE pensait qu'une cohérence était nécessaire entre les organisations internationales, ainsi qu'entre les gouvernements et au sein de ceux-ci. Elle était favorable au lancement d'un nouveau cycle de négociations et a promis que l'on se concentrerait sur les crêtes tarifaires et la progressivité des droits, questions importantes pour les pays en développement. La NORVÈGE a indiqué qu'il n'était pas nécessaire d'attendre un nouveau cycle pour apporter des améliorations et a préconisé une amélioration de l'accès aux mécanismes de règlement des différends. La FINLANDE et l'OUGANDA ont dit que l'OMC devait assurer le renforcement des capacités au moyen de programmes d'assistance technique appropriés; avec la NOUVELLE-ZÉLANDE, ces pays se sont dits favorables à ce que les exportations des PMA bénéficient d'un accès aux marchés en franchise de droits. La CORÉE a demandé que la possibilité d'une amélioration de l'accès aux marchés soit étudiée et a ajouté qu'au cours du prochain cycle de négociations on devrait envisager de maintenir le traitement spécial et différencié. La RESEARCH FOUNDATION FOR SCIENCE, TECHNOLOGY AND ECOLOGY (RFSTE) s'est dite déçue par la “médiocrité des métaphores employées pendant les symposiums de haut niveau“. Elle a insisté sur le fait que si la bicyclette avait un pneu crevé il serait plus logique d'en descendre, le pneu crevé étant la crise écologique. Elle a suggéré qu'un délai de deux ans soit accordé à tous les pays, pour qu'ils puissent organiser un débat démocratique sur leur avenir, avant de revenir à l'OMC. Le MEXIQUE a souligné qu'il était nécessaire que les pays en développement préparent activement le prochain cycle de négociations. Le INSTITUTE FOR AGRICULTURE AND TRADE POLICY considérait qu'il convenait de revoir les politiques concernant les subventions internes et les subventions à l'exportation et a souligné qu'un nouveau cycle de négociations était prématuré.

Résumant nombre des thèmes communs évoquées par les intervenants, M. Rubens Ricupero, le modérateur, a noté ce qui suit: la politique commerciale devait être intégrée dans un ensemble plus large de stratégies en matière de développement; une plus grande cohérence s'imposait dans l'élaboration des politiques au niveau international, avec des efforts dans d'autres domaines, comme le financement et l'allégement de la dette; la technologie était importante pour le développement; une amélioration continue de l'accès aux marchés, particulièrement pour les vêtements, les textiles et les produits agricoles, était nécessaire; et l'accès au mécanisme de règlement des différends devrait être amélioré. Il a dit que nombre de participants avaient souligné que l'assistance technique était essentielle pour renforcer la capacité de participer aux négociations commerciales ainsi qu'aux activités de l'OMC en général. De nombreuses opinions ont été exprimées au sujet du traitement spécial et différencié. De nombreux participants ont dit qu'il fallait revoir le traitement spécial. M. Ricupero a indiqué qu'une approche pragmatique s'était dégagée, approche visant à étudier les possibilités de libéralisation et d'assouplissement des règles.

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Groupe de travail n° 3: intégration plus poussée des pays en développement, notamment des moins avancés d'entre eux (PMA), au système commercial 

L'Ambassadeur Iftekhar Ahmed Chowdhury (Bangladesh), modérateur, a commencé par évoquer les domaines susceptibles d'être examinés, dont le degré et les modalités de la participation des pays en développement, les obstacles au développement auxquels ces pays étaient confrontés aux plans interne et international, et les moyens de surmonter ces obstacles, le rôle et les limites de l'assistance technique, ainsi que le rôle du commerce et d'autres institutions pour ce qui est d'aider à intégrer les pays en développement au système commercial multilatéral.

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Orateur principal 

M. Alec Erwin, Ministre du commerce et de l'industrie, Afrique du Sud, a déclaré qu'il était impératif que les règles du système commercial multilatéral soient conçues de manière à permettre de réaliser des objectifs clairs et équitables. Sinon, le système mondial serait livré au libre jeu de la puissance, quoique sous le couvert de règles. Il a souligné qu'il fallait que le prochain cycle de négociations traite des réformes structurelles, non seulement dans le monde en développement, mais aussi dans le monde développé. Il a mis en cause l'existence d'“industries disposant de droits acquis“ dans le monde développé, qui empêchait l'expansion des marchés pour les produits du monde en développement. Il a insisté sur le fait que le monde en développement devait commercer avec les marchés existants ayant le pouvoir d'acheter. Il a recommandé que le monde en développement gère ses économies de façon que le capital puisse s'accumuler au plan intérieur, et a souligné le rôle des gouvernements à cet égard. Il a suggéré que les pays en développement regroupent leurs ressources et leurs compétences et fassent ainsi contrepoids au G7.

Sir Leon Brittan, Vice-Président de la Commission européenne, a proposé qu'à Seattle l'OMC prône le renforcement des capacités et élabore un programme de travail pouvant accroître la coopération entre donateurs, éviter les chevauchements et mieux cibler l'assistance. Il a encouragé les participants à envisager un nouveau cycle de négociations commerciales multilatérales, et a expliqué que le nouveau cycle était crucial pour les pays en développement, car l'établissement de l'ordre du jour était un processus ouvert et le résultat serait déterminé par consensus. Il a promis de soumettre à négociation, lors du nouveau cycle, tous les droits de douane de l'Union européenne. Il a recommandé de combiner les avantages de la non-discrimination dans l'établissement de règles à l'OMC avec le traitement spécial et différencié lorsque cela était justifié par des raisons économiques et de développement. Il a dit que l'UE offrait déjà l'accès en franchise de droits pour 99 pour cent des exportations des PMA et pensait qu'à Seattle tous les pays industrialisés devaient s'engager à faire en sorte que tous les produits exportés par les PMA bénéficient d'une admission en franchise. Il a souligné qu'il fallait faire preuve de flexibilité et prévoir des périodes de transition pour les PMA.

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Présentateurs 

M. Moussa Touré, Président de Commission, Union économique et monétaire ouest-africaine, a dit que la libéralisation ne pouvait être bénéfique que si elle était accompagnée de politiques complémentaires, ce qui n'était pour l'instant pas le cas dans de nombreux pays. Il a insisté sur le problème posé par les procédures douanières appliquées aux produits agricoles et dit que le potentiel de nombreux PMA ne pouvait être réalisé en raison des obstacles non tarifaires dans les pays développés et de l'application des normes SPS à des fins protectionnistes. La volatilité des monnaies avait également une forte incidence sur les pays en développement. Il a souligné l'importance de l'intégration régionale des petits pays afin de se préparer aux marchés concurrentiels.

M. Denis Bélisle, Directeur exécutif, Centre du commerce international CNUCED/OMC, a dit que l'idée selon laquelle les pays en développement n'étaient pas en mesure d'exploiter les possibilités parce qu'ils n'avaient pas de produits à exporter était incomplète et inexacte. Il a évoqué trois principaux éléments faisant obstacle à la croissance des exportations des pays en développement. Premièrement, il a préconisé une large diffusion, parmi les décideurs, de renseignements faciles à comprendre sur le système commercial multilatéral. Les exportateurs avaient besoin de connaître les conséquences que le système avait pour les affaires, ainsi que de savoir, par exemple, quels étaient les obstacles techniques au commerce et les mesures phytosanitaires susceptibles de restreindre leurs exportations. Deuxièmement, il a dit qu'il fallait remédier à l'absence de compétitivité et au manque de connaissance des débouchés commerciaux, en adoptant une stratégie à plusieurs niveaux. Cette stratégie comprendrait des services d'information commerciale renforcés au niveau national, des structures de coût rationalisées dans l'exploitation des entreprises, ainsi qu'une amélioration de la productivité de la main-d'œuvre grâce à la mise en valeur des ressources humaines. Troisièmement, il a préconisé le développement de l'expérience pratique de l'exportation, par une intensification des échanges Sud-Sud, qui encouragerait l'amélioration des procédés de production et les compétences en matière de commercialisation. Ces mesures permettraient aux pays en développement de s'attaquer aux marchés plus exigeants du Nord.

Mme Anna Kajumulo Tibaijuka, Coordonnateur spécial, Pays les moins avancés, pays en développement sans littoral et pays en développement insulaires, CNUCED, a dit qu'un nouveau cycle de négociations s'imposait pour étudier les moyens permettant de supprimer les contraintes auxquelles les PMA étaient confrontés. Elle voulait que l'on se concentre sur le développement des ressources humaines et institutionnelles, sur l'amélioration de la gestion des affaires publiques, sur la réduction de la pauvreté et sur le renforcement de la démocratie et des droits de l'homme. Pour les PMA, le “slogan”, a-t-elle dit, serait plus d'aide, associée à un allégement de la dette, à une amélioration des conditions commerciales, et à une augmentation des investissements. Elle a fait remarquer que 20 à 40 pour cent des recettes d'exportation des PMA étaient consacrés au service de la dette et préconisé la mise en place de divers dispositifs d'allégement de la dette. Elle a insisté sur la nécessité d'améliorer l'infrastructure et d'accroître l'accès aux marchés et la coopération technique en matière de commerce. Elle a aussi souligné que les PMA avaient besoin d'une assistance technique pour créer un cadre juridique et institutionnel régissant l'investissement étranger.

M. Robert Sharer, Chef de la Division politique commerciale, FMI, a dit que, malgré les concessions spéciales et les préférences commerciales, les PMA étaient restés en grande partie en marge du commerce mondial et de la prospérité économique. Dans une certaine mesure, cette situation résultait des politiques économiques des PMA eux-mêmes, qui jusqu'à une époque récente n'avaient pas œuvré dans le sens de l'ouverture ni favorisé les liens avec l'économie internationale. L'environnement commercial mondial n'avait cependant pas aidé, car il avait découragé la diversification des exportations et permis aux PMA de ne pas procéder aux réformes économiques nécessaires. Le nouveau cycle de négociations de l'OMC constituerait une occasion unique d'intégrer les PMA au système commercial mondial et de créer les conditions extérieures qui leur permettraient de diversifier leurs exportations et d'utiliser le commerce comme un moteur de croissance et de développement. Le fait d'offrir aux PMA un accès en franchise aux marchés des pays industrialisés en échange de leur participation au système commercial mondial les encouragerait à mettre en œuvre des réformes au plan intérieur, surtout une politique commerciale plus libérale, qui amélioreraient aussi leurs perspectives de croissance. De plus, tout en pouvant être intéressante pour les PMA, cette proposition n'entraînerait pas de coûts importants pour les pays industriels. Dans le passé, les programmes destinés à aider les PMA à s'intégrer au système commercial international n'avaient pas fonctionné. Il était temps d'essayer autre chose.

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Débat 

Plusieurs intervenants ont insisté sur la nécessité de renforcer les capacités et d'adopter différentes approches en la matière. Nombre de pays, dont le GUATEMALA et l'URUGUAY, se sont dits favorables à la création d'un service de conseil juridique à l'OMC. La COMMUNAUTÉ ÉCONOMIQUE ET MONÉTAIRE DE L'AFRIQUE CENTRALE (CEMAC) a souligné la nécessité d'une assistance technique. Le CANADA a dit qu'il fallait consacrer plus d'attention et de ressources au renforcement des capacités dans les domaines suivants: comprendre les questions traitées pendant les nouvelles négociations et arrêter les positions dans les négociations; respecter les obligations existantes dans le cadre de l'OMC; et promouvoir un environnement propice au développement. Les ÉTATS-UNIS considéraient que l'OMC tirerait parti de la participation des bénéficiaires de l'assistance qui serait ainsi induite par la demande. Le ROYAUME-UNI a invité les autres participants à faire du prochain cycle de négociations un “cycle du développement“. Il a dit que si c'était un cycle du développement les pays en développement devaient avoir la capacité de négocier. L'ALLEMAGNE a insisté sur le rôle de l'assistance technique et a annoncé une contribution de 1 million de DM au Fonds d'affectation spéciale de l'OMC afin d'aider les pays en développement à défendre leurs intérêts dans le système commercial multilatéral.

L'accès aux marchés pour les PMA a été au centre de plusieurs déclarations. Les ÉTATS-UNIS ont indiqué que l'amélioration de l'accès aux marchés était une responsabilité partagée, qu'ils importaient davantage des pays en développement et que les produits des PMA bénéficiaient de divers types d'admission en franchise. Les PAYS-BAS ont dit que l'idée d'améliorer l'accès pour les produits agricoles et les textiles n'avait pas uniquement pour but d'inciter les pays en développement à accepter un autre cycle de négociations. Ils voyaient un monde sans droits de douane dans une décennie ou deux. La FAO a fait observer que dans le domaine de l'agriculture les résultats des PMA étaient médiocres et a ajouté qu'il n'était pas étonnant qu'ils aient subi de graves revers économiques. Elle a dit qu'elle cherchait à accroître la compétitivité de ce secteur et a souligné que, en dépit des progrès accomplis, l'accès aux marchés restait entravé par les normes SPS et OTC. La FAO s'était lancée dans un programme de formation en vue du prochain cycle. L'AUSTRALIE s'est dite favorable à l'accès en franchise pour les PMA, mais a précisé que cela ne suffisait pas. Ils ne devraient pas avoir à entrer en concurrence avec des produits fortement subventionnés. La HONGRIE a appuyé l'idée d'un nouveau cycle de négociations ainsi que la suggestion selon laquelle tous les pays développés Membres de l'OMC devraient accorder l'accès en franchise pour toutes les exportations des PMA. Elle a ajouté que l'amélioration de l'accès aux marchés devait être complétée par le renforcement de l'assistance technique liée au commerce.

L'INDE a expliqué le “scepticisme“ du monde en développement à l'égard de l'OMC en faisant remarquer que les questions défendues par le monde développé, telles que les droits de propriété intellectuelle et les services, avaient donné lieu à des accords, que la politique en matière d'investissement et la politique de la concurrence avaient abouti à la création de groupes de travail et que l'environnement avait conduit à la création du CCE. En revanche, les préoccupations des pays en développement, comme le transfert de technologie, les mécanismes financiers, le renforcement des capacités, l'allégement de la dette et les contraintes affectant l'offre, n'avaient pas été abordées. Le NÉPAL a préconisé une approche intégrée, un accès garanti aux marchés pour les produits des PMA et un renforcement de l'assistance bilatérale et multilatérale afin de régler le problème des contraintes affectant l'offre. La CORÉE a insisté sur la nécessité d'assouplir les procédures d'accession. Elle a demandé l'adoption de la “dérogation générale“ en tant que base juridique permettant d'accorder un traitement préférentiel aux PMA. La MALAISIE a signalé que ce n'était pas la simple menace d'un renforcement du protectionnisme aux États-Unis et dans l'Union européenne qui inciterait les pays en développement à participer au nouveau cycle de négociations.

En résumé, le modérateur a noté que de nombreuses idées avaient été exprimées sur l'intégration des pays en développement au système commercial multilatéral. Il a fait remarquer que les pays développés ne devaient pas oublier que les actes valaient mieux que les paroles. Il a également pris note du fait que de nombreuses déclarations mettaient en doute la conception selon laquelle une simple libéralisation des échanges suffisait. Il a dit que les PMA seraient encouragés si le système commercial ne devenait pas une source d'obligations supplémentaires. Le ROYAUME-UNI a rappelé qu'il était important de soulager la pauvreté et nécessaire d'intégrer les politiques commerciales dans un ensemble plus vaste de politiques en faveur du développement.

Le Directeur général de l'OMC, M. Renato Ruggiero, a fait remarquer en clôturant le symposium qu'en quatre jours de débat près de 200 interventions avaient été faites par les délégations. Il a dit que la réunion avait été positive et constructive, un nombre impressionnant d'interventions ayant contribué à une meilleure compréhension des problèmes liés au commerce et au développement. Il a rappelé notamment les éléments suivants: l'importance particulière qui avait été accordée aux pays les moins avancés; la déclaration de M. Alec Erwin, qui préconisait un ajustement de la libéralisation des échanges et des politiques de développement, à la fois dans les pays en développement et dans les pays développés; le large consensus qui s'était formé autour de l'idée que la libéralisation des échanges n'était pas en soi suffisante pour permettre le développement; et le soutien en faveur d'une collaboration plus étroite entre les principales organisations internationales pour pouvoir établir un cadre intégré en termes de stratégie de développement.

M. Ruggiero a pris note du débat sur les objectifs à poursuivre dans le cadre de l'OMC et a fait sienne l'idée de M. Erwin selon laquelle une plus grande équité sociale devait être recherchée dans les futures négociations. Il était reconnu que de nombreux pays en développement avaient eu du mal à mettre en œuvre les résultats du Cycle d'Uruguay; il s'agissait là d'un problème grave qui devait être examiné sans a priori afin de préparer les négociations futures. Des études montraient que, bien que le Cycle d'Uruguay ait produit des avantages, ceux-ci n'avaient pas nécessairement été équitablement répartis.

En ce qui concerne le prochain cycle de négociations multilatérales – que beaucoup ont qualifié de “Cycle du développement“ –, certains participants ont fait part du besoin d'en retarder la phase initiale. D'autres ont indiqué qu'il importait de respecter l'échéance convenue; cela serait possible si les pays en développement avaient une plus grande confiance en eux-mêmes, en leur rôle et en leur poids dans les négociations à venir. M. Ruggiero a rappelé la déclaration de M. Ricupero selon laquelle les pays en développement devaient s'atteler à un programme de travail constructif dans un esprit plus combatif, de façon à pouvoir définir et défendre leurs intérêts avec succès.

Le rôle des nouvelles technologies avait été mentionné comme étant un élément essentiel à la fois des négociations futures et du processus de développement en général. M. Ruggiero avait été très impressionné par les négociations en vue de la libéralisation dans le secteur des télécommunications, qui avaient été achevées en quelques mois. Ces négociations n'avaient pas été particulièrement ardues pour les pays en développement. Ils avaient rapidement reconnu que la libéralisation des télécommunications présenterait un intérêt pour eux puisqu'elle ouvrirait la voie à un flux d'investissements et à des techniques de réseaux qui leur permettraient d'accroître leur compétitivité. M. Ruggiero a aussi rappelé que les pays en développement avaient apporté des contributions positives dans le domaine du commerce électronique, permettant d'arriver à un accord sur un programme de travail ambitieux. Il était essentiel d'examiner la manière dont les nouvelles technologies pouvaient être utilisées pour accélérer le développement des pays en développement et des pays les moins avancés.

M. Ruggiero a dit qu'une réussite majeure du symposium résidait dans le soutien sans faille manifesté en faveur de la priorité à accorder à l'intégration des PMA au système commercial multilatéral, et de la nécessité pour les pays industriels d'ouvrir leurs marchés en accordant un accès en franchise de droits et sans contingentement aux exportations des pays les moins avancés, dès les premiers stades du prochain cycle de négociations. Il a également pris note du soutien de tous en faveur de l'élaboration d'une stratégie intégrée destinée à pallier les lacunes en matière de capacités que connaissaient les PMA, de la prise d'une décision rapide sur l'allégement de la dette, de mesures visant à renforcer l'accès des PMA au mécanisme de règlement des différends, et de l'octroi d'une assistance à la fois financière et juridique à cette fin. Il a remercié le FMI, la Banque mondiale et la CNUCED pour leur soutien dans ce domaine.

Répondant à la préoccupation exprimée quant à la tendance du système de l'OMC à exclure certains pays en développement, M. Ruggiero a concédé que le système n'était pas parfait, et a reconnu que certains pays en développement et certains pays parmi les moins avancés avaient des difficultés à participer pleinement aux activités de l'Organisation. Cela était principalement dû au trop grand nombre de réunions, c'est-à-dire à un problème concret, et non à une politique délibérée d'exclusion. Tout en reconnaissant que de nouveaux efforts devaient être faits pour améliorer la capacité de négociation des pays en développement, il a souligné l'habileté avec laquelle les ambassadeurs des pays en développement et des pays les moins avancés défendaient les intérêts de leurs pays, et a rappelé que le succès de la Conférence ministérielle de Singapour était dû pour une large part au travail accompli par les ministres des pays en développement. Ces pays jouaient par conséquent un rôle très important au sein de l'Organisation et il fallait donc se débarrasser de l'idée selon laquelle l'Organisation travaillait pour certains Membres, contre d'autres.

Comme il l'avait fait pour le Symposium sur le commerce et l'environnement, M. Ruggiero a déclaré que le Symposium sur le commerce et le développement était clos, mais qu'un nouveau dialogue était désormais engagé.