La Déclaration distincte de Doha expliquée
Les gouvernements Membres de l'OMC ont adopté par consensus la Déclaration sur l'Accord sur les ADPIC et la santé publique à la quatrième Conférence ministérielle de l'OMC à Doha (Qatar) le 14 novembre 2001. La Déclaration vise à répondre aux préoccupations qui ont été exprimées selon lesquelles l'Accord sur les ADPIC pourrait rendre plus difficile l'accès à certains médicaments pour les patients dans les pays pauvres.
Voir aussi:
> Texte
de la Déclaration de Doha sur l'Accord sur les ADPIC et la santé
> Note
d'information sur les ADPIC et les brevets pharmaceutiques
> Faits nouveaux depuis Doha
> Retour à Questions ADPIC
Des droits de brevet sont accordés aux inventeurs pour promouvoir la recherche développement. Cela concerne aussi la création de nouveaux médicaments. L'Accord sur les ADPIC, qui est en vigueur depuis 1995, consacre aussi dans le droit international public le droit des gouvernements de prendre différentes sortes de mesures qui assortissent de réserves ou limitent les droits de propriété intellectuelle, y compris à des fins de santé publique.
Cependant, certains Membres et groupes d'intérêts dans le public doutaient que la flexibilité énoncée dans l'Accord sur les ADPIC soit suffisante pour favoriser la santé publique, particulièrement en facilitant un accès à des prix abordables à des médicaments existants tout en encourageant la recherche-développement pour la fabrication de nouveaux médicaments.
-
Des opinions divergentes ont été exprimées quant à la nature et à la portée de la flexibilité prévue dans l'Accord sur les ADPIC, par exemple en ce qui concerne les licences obligatoires ou les importations parallèles (voir les explications dans la note d'information).
-
On a demandé si cette flexibilité serait interprétée par l'OMC et ses Membres dans un sens large et favorable à la santé publique.
-
On s'est inquiété de la possibilité que les gouvernements ne se sentent pas libres de recourir pleinement à cette flexibilité, sans craindre les pressions des partenaires commerciaux ou des entreprises.
La réponse dans la Déclaration haut de page
La Déclaration spéciale répond à ces préoccupations de plusieurs manières.
Premièrement, elle souligne que
l'Accord sur les ADPIC n'empêche pas et ne devrait pas empêcher les
gouvernements Membres de l'OMC de prendre des mesures pour protéger la
santé publique. Elle réaffirme le droit des Membres de recourir
pleinement aux dispositions de l'Accord sur les ADPIC, qui ménagent
une flexibilité à cet effet.
Ces affirmations importantes sont un signal de la part de tous les
Membres de l'OMC: ils n'essaieront pas de s'empêcher mutuellement
d'utiliser ces dispositions.
Deuxièmement, la Déclaration
indique clairement que l'Accord sur les ADPIC devrait être interprété
et mis en œuvre d'une manière qui appuie le droit des Membres de l'OMC
de protéger la santé publique et, en particulier, de promouvoir
l'accès de tous aux médicaments.
Elle met aussi l'accent sur l'importance des objectifs et des
principes de l'Accord sur les ADPIC pour l'interprétation de ses
dispositions. Bien que la Déclaration ne fasse pas spécifiquement
référence aux articles 7 (“Objectifs”) et 8 (“Principes”) de l'Accord
sur les ADPIC, les pays en développement Membres attachent une
importance particulière à ces dispositions.
Ces affirmations constituent donc une instruction importante aussi
bien pour chaque Membre que – en cas de différends – pour les organes
de l'OMC chargés du règlement des différends.
Troisièmement, la Déclaration
contient un certain nombre de clarifications importantes sur certaines
des flexibilités prévues dans l'Accord sur les ADPIC. En même temps,
elle maintient les engagements des Membres au titre de l'Accord.
Au sujet des licences obligatoires, la Déclaration indique clairement
que chaque Membre a la liberté de déterminer les motifs pour lesquels
ces licences sont accordées. Cette précision, par exemple, apporte un
démenti utile à l'opinion qui est parfois exprimée selon laquelle une
certaine forme d'urgence est une condition préalable pour les licences
obligatoires.
L'Accord sur les ADPIC mentionne bien les situations d'urgence
nationale ou d'autres circonstances d'extrême urgence en relation avec
les licences obligatoires, mais uniquement pour indiquer que dans ces
circonstances, il n'est pas nécessaire d'essayer d'obtenir une licence
volontaire avant de recourir aux licences obligatoires.
La Déclaration précise clairement que chaque Membre a le droit de
déterminer ce qui constitue une situation d'urgence nationale ou
d'autres circonstances d'extrême urgence, et que les crises dans le
domaine de la santé publique, y compris celles qui sont liées au VIH/SIDA,
à la tuberculose, au paludisme et à d'autres épidémies, peuvent
répondre à ce critère.
La Déclaration mentionne aussi l'“épuisement” des droits de propriété
intellectuelle et donc le droit d'un Membre d'autoriser des
importations parallèles (pour les explications, voir la
note d'information).
L'Accord sur les ADPIC dispose que les pratiques des gouvernements
Membres dans ce domaine ne peuvent pas être contestées dans le cadre
du système de règlement des différends de l'OMC. La Déclaration
indique clairement que les dispositions de l'Accord sur les ADPIC
concernant l'épuisement des droits laissent effectivement à chaque
Membre la liberté d'établir son propre régime sans contestation – sous
réserve des dispositions de l'Accord qui interdisent la discrimination
sur la base de la nationalité d'une personne.
Suivi dans les pays haut de page
Les Membres de l'OMC ont clarifié la flexibilité prévue dans l'Accord
sur les ADPIC et leur droit d'y recourir pleinement, mais les choses
ne s'arrêtent pas là. C'est le droit interne d'un pays qui a
directement force exécutoire dans ce pays. Par conséquent, la
Déclaration ne supprime pas la nécessité pour chaque pays de prendre
les mesures nécessaires sur le plan national pour recourir à cette
flexibilité en cas de besoin s'il veut faire en sorte que les
médicaments soient disponibles à des prix abordables.
Pour les pays les moins avancés Membres de l'OMC, la Déclaration
précise que ces pays ne sont pas tenus, jusqu'en 2016, de protéger les
droits liés aux brevets et aux renseignements non divulgués pour ce
qui est des produits pharmaceutiques. En ce qui concerne ces droits,
la période de transition dont bénéficient ces pays pour l'application
des dispositions de l'Accord sur les ADPIC est dont prolongée de dix
ans..
Mandat de Doha haut de page
AAu cours des travaux concernant la Déclaration, il s'est posé la
question des pays ayant des capacités de fabrication limitées et de la
manière dont ces pays pourraient utiliser effectivement les licences
obligatoires.
Il n'y a pas désaccord sur le fait que les Membres peuvent délivrer
des licences obligatoires pour l'importation ainsi que pour la
production intérieure. Ce qui a suscité des préoccupations, c'était le
point de savoir si les médicaments génériques fabriqués dans d'autres
pays seraient disponibles à l'importation, en particulier au regard de
la disposition de l'article 31 f) de l'Accord sur les ADPIC.
Cette disposition précise que toute licence obligatoire accordée à des
producteurs de médicaments génériques dans ces autres pays sera
utilisée “principalement pour l'approvisionnement du marché intérieur
du Membre” qui délivre la licence obligatoire.
Cette préoccupation peut être d'autant plus vive que des pays ayant un
important secteur de médicaments génériques, comme l'Inde, sont tenus
d'assurer la protection des brevets pour les produits pharmaceutiques
à partir de 2005. À cet égard, la Déclaration reconnaît le problème et
donne pour instruction au Conseil des ADPIC d'y trouver rapidement
solution et de faire rapport sur ce sujet avant la fin de 2002. (Les
Membres ne sont pas parvenus à un consensus à cette date limite. Dans
la préparation de la Conférence ministérielle de Cancún, on s'efforce
actuellement de sortir de l'impasse.)
Pour en savoir plus sur le Programme de Doha pour le développement,
cliquez ici; pour
plus de détails sur les travaux du Conseil des ADPIC, cliquez
ici.
Importance de la protection de la propriété intellectuelle haut de page
Tout en mettant l'accent sur le champ d'action que l'Accord sur les ADPIC ménage aux gouvernements pour prendre des mesures afin de promouvoir l'accès aux médicaments, la Déclaration reconnaît aussi l'importance de la protection de la propriété intellectuelle pour le développement de nouveaux médicaments. Elle réaffirme aussi les engagements des Membres de l'OMC au titre de l'Accord sur les ADPIC.