OMC: NOUVELLES 2011

PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE: ADPIC ET LA SANTÉ PUBLIQUE

NOTE:
CET ARTICLE a pour objet d’aider le public à mieux comprendre les questions traitées à l’OMC. bien que tout ait été fait pour garantir l’exactitude des renseignements qui y figurent, l’article ne préjuge pas des dispositions des gouvernements membres.

 

POUR EN SAVOIR PLUS:
> www.wto.org/trips
> les ADPIC et la santé
> les ADPIC et la biodiversité
> OMS-OMPI-OMC

> nouvelles sur les ADPIC

 

DEUX DÉCLARATIONS DE DOHA

La Conférence ministérielle de Doha (Qatar) a donné lieu à deux déclarations.  La déclaration principale, plus connue sous le nom de "Déclaration de Doha", porte sur le programme de travail des négociations, appelé informellement "Programme de Doha pour le développement" ou "Cycle de Doha", ainsi que sur d'autres questions.

Les ministres ont également publié la Déclaration sur les ADPIC et la santé publique, dont une disposition, le paragraphe 6, appelait des décisions concernant un problème spécifique.  Ces décisions ont été prises en 2003 et 2005.  Le "système prévu au paragraphe 6" qui en résulte supprime les obstacles liés à la propriété intellectuelle qui auraient empêché les pays d'utiliser des licences obligatoires pour fabriquer des médicaments génériques destinés exclusivement à l'exportation vers des pays n'ayant pas la capacité de les fabriquer eux-mêmes.  Mais la Déclaration dans son ensemble est bien plus que cela.
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Les participants de diverses organisations au Symposium sur la diplomatie en matière de santé dans le monde, organisé par l'Institut de hautes études internationales et du développement de Genève pour marquer le 10ème anniversaire de la Déclaration et tenu à l'OMC, étaient du même avis.


M. Lamy s'exprimait lors d'une séance présidée par Ruth Dreifuss, ancienne Présidente de la Confédération suisse et ancienne Présidente de la Commission de l'OMS sur les droits de propriété intellectuelle, l'innovation et la santé publique.  Margaret Chan, Directrice générale de l'OMS, et Francis Gurry, Directeur général de l'OMPI, étaient également présents sur l'estrade.

M. Lamy a dit que la Déclaration ministérielle de Doha sur l'Accord sur les ADPIC (aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce) et la santé publique, adoptée en novembre 2001, avait marqué un tournant politique dans la gouvernance mondiale de la santé publique.

Il a rappelé qu'avant l'adoption de la Déclaration, la protection de la propriété intellectuelle (en particulier la protection conférée par un brevet pour les médicaments et les produits médicaux) et l'Accord de l'OMC sur les ADPIC étaient souvent considérés des obstacles à la santé publique.

Aujourd'hui, la perception a changé car la Déclaration affirme que les deux ne sont pas contradictoires.  M. Lamy en a cité la phrase suivante:  "Nous convenons que l'Accord sur les ADPIC n'empêche pas et ne devrait pas empêcher les Membres de prendre des mesures pour protéger la santé publique."

Il a dit que cela avait eu une conséquence importante:  la priorité n'était plus donnée à la "compatibilité" du commerce, de la propriété intellectuelle et de la santé mais à la "cohérence" plus dynamique et plus constructive entre ces trois domaines.  Cela avait également permis d'établir un partenariat entre l'Organisation mondiale de la santé (OMS), l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) et l'OMC.

M. Lamy a ajouté qu'il incombait avant tout aux gouvernements nationaux de garantir la cohérence, y compris dans la manière dont les accords bilatéraux ou régionaux de libre-échange traitaient la propriété intellectuelle.  Il a dit que si les gouvernements adoptaient des normes en matière de protection de la propriété intellectuelle plus strictes que celles qu'exigeait l'Accord sur les ADPIC (connues sous le nom de "ADPIC-plus"), ils n'étaient pas responsables devant l'OMC mais devant les commentateurs de l'action publique.

L'un des domaines de coopération entre les trois organisations a été l'examen de la relation entre les incitations à l'innovation, l'accès aux médicaments et le commerce.  À la réunion, Antony Taubman, Directeur de la Division de la propriété intellectuelle de l'OMC, a dit qu'une étude présentant divers faits et chiffres serait bientôt publiée, qui guiderait les décideurs dans leurs choix parmi les options complexes dont ils disposent pour fournir de meilleurs services de santé à leurs populations pauvres en améliorant l'accès aux technologies médicales et aux médicaments nécessaires.

 

Avant et après

M. Lamy a dit que la Déclaration de Doha sur les ADPIC et la santé publique, adoptée en 2001, avait marqué un véritable tournant et avait changé la donne.

Changement de règles.  La Déclaration a permis aux gouvernements Membres de l'OMC de résoudre un problème qui existait alors dans l'Accord sur les ADPIC:  ils ont modifié la disposition pertinente de l'Accord afin de supprimer l'obstacle qui empêchait les pays d'utiliser des licences obligatoires pour fabriquer des médicaments génériques destinés exclusivement à l'exportation vers des pays qui n'avaient pas la capacité de les fabriquer eux-mêmes, créant ainsi le "système prévu au paragraphe 6".

M. Lamy a dit que c'était un résultat très important qui montrait qu'il s'agissait pour les gouvernements Membres d'une priorité politique car parvenir à un consensus pour modifier les règles de l'OMC n'était jamais facile.

(Une licence obligatoire s'entend de l'autorisation donnée par un gouvernement à un fabricant de fabriquer un médicament ou un autre produit sans la permission du titulaire du brevet.)

Le débat autour du "paragraphe 6".  M. Lamy a pris note du débat en cours sur la question de savoir si le système prévu au paragraphe 6 fonctionne.  Les uns assurent qu'il fonctionne car il a déjà été utilisé une fois (pour des médicaments génériques exportés par le Canada vers le Rwanda) et que le simple fait qu'il existe permet aux pays de négocier plus efficacement afin de faire baisser les prix des médicaments.

Les autres affirment que le fait qu'il n'a été utilisé qu'une seule fois traduit sa trop grande complexité et que les prix baissent pour d'autres raisons, telles que l'augmentation des quantités achetées.

"Il ne m'appartient pas de prendre parti", a dit M. Lamy.  "Nous pouvons seulement espérer que le débat sera aussi éclairé que possible."

Assistance technique conjointe.  La Déclaration a également conduit l'OMC à renforcer l'assistance technique qu'elle fournit aux pays en développement afin de les aider à comprendre les différentes flexibilités (telles que les licences obligatoires et les importations parallèles) de l'Accord sur les ADPIC et à les utiliser selon qu'il est approprié.  Plusieurs programmes ont été conçus et mis en œuvre en collaboration avec l'OMS et l'OMPI.  M. Lamy a affirmé que grâce à cela, les décideurs étaient mieux informés et ne voyaient plus ces flexibilités comme une "théorie" abstraite.

Il a dit que cette décision avait été prise malgré les vives réactions qu'elle avait suscitées chez ceux qui estimaient que ce n'était pas le rôle de l'OMC de promouvoir les flexibilités.

Perspectives.  L'expérience montre que la question de l'accès aux médicaments comporte de nombreux aspects et fait intervenir de nombreux acteurs.  Cela souligne la nécessité de continuer à travailler ensemble, même lorsque les organismes ont des ressources limitées et une culture différente, a dit M. Lamy.

Il a poursuivi en disant que le processus par lequel l'innovation et l'invention procuraient des avantages économiques et sociaux était aussi en train d'évoluer.  Par exemple, il a fait observer que la Communauté de brevets pour les médicaments (multiples brevets "regroupés" et pour lesquels une licence est délivrée par un organisme unique, le but étant de réduire les coûts de transaction pour tous les acteurs concernés) n'était pas envisageable il y a dix ans.

 

Étude de l'OMS, de l'OMPI et de l'OMC

Voir le résumé de l'étude conjointe à paraître.

La Déclaration de Doha sur les ADPIC et la santé publique a, entre autres, conduit à une collaboration plus étroite entre l'OMS, l'OMPI et l'OMC.  Même si ces organisations ont des objectifs et des domaines de compétence différents, leur collaboration permet une meilleure compréhension de ces trois domaines et l'élaboration de politiques axées sur la réalisation d'objectifs communs en matière de santé, de propriété intellectuelle et de commerce.

Antony Taubman, Directeur de la Division de la propriété intellectuelle de l'OMC, a exposé brièvement les conclusions préliminaires d'une étude qui sera publiée en 2012.  Faire en sorte que les patients pauvres aient accès aux médicaments et à d'autres produits de santé nécessite une utilisation appropriée ("rationnelle") de ces produits, des prix abordables, des systèmes de santé bien conçus, un financement adéquat et des stratégies minutieusement choisies pour l'achat des produits.  La propriété intellectuelle n'est qu'un aspect du problème.

Le but de cette étude est de guider les décideurs confrontés à un ensemble d'options de politique complexes, sans faire de recommandations.  Elle examine l'accès aux médicaments et l'innovation conjointement, plutôt que séparément ou selon une approche statique, ainsi que les effets qu'ils ont l'un sur l'autre au fil du temps.

 

Trois thèmes

M. Lamy a souligné trois thèmes que les travaux en cours ont permis de dégager:

Clarification: les règles doivent être transparentes et claires.  On dispose aujourd'hui de renseignements factuels plus précis sur la charge de morbidité, l'accès aux médicaments et les prix, ainsi que sur la portée et le champ d'application des brevets.

Coordination: les questions de santé publique ne peuvent pas être traitées séparément des autres questions.  Il faut une certaine cohérence pour réaliser des objectifs plus généraux, en particulier en ce qui concerne les droits de l'homme, la santé publique, le système commercial multilatéral et le système de propriété intellectuelle.  La cohérence est aussi nécessaire sur le terrain, par exemple dans le cadre de l'assistance technique et de la coopération trilatérale entre l'OMS, l'OMPI et l'OMC.

Mise en œuvre:  les règles et leurs flexibilités ne produisent les résultats escomptés que lorsque les gouvernements prennent des décisions concrètes dans leur propre pays.  La clarification et la coordination facilitent les choses, mais ne remplacent pas l'action.  Des initiatives concrètes garantiront un meilleur accès aux médicaments et feront en sorte que l'innovation réponde aux besoins de santé non satisfaits.

Évolution récente

L'étude porte sur la relation entre l'innovation, l'accès aux médicaments et le commerce compte tenu d'un certain nombre de faits nouveaux survenus au cours de la dernière décennie et évoque quelques-uns des défis à relever.

Fabrication et développement de produits.  Les partenariats public-privé gagnent de l'importance et les partenariats pour le développement de produits de santé entrent dans une phase de "maturité".  La recherche-développement dans l'industrie pharmaceutique évolue, y compris dans de nombreux pays en développement grâce à la diversification des modes de développement des produits.

Politiques et systèmes de santé nationaux.  On s'attache davantage à renforcer les systèmes de santé nationaux.  On consacre davantage de fonds à la mise au point de vaccins et aux campagnes de vaccination.  L'impact des maladies non transmissibles dans les pays en développement fait l'objet d'une attention accrue au niveau mondial.

Propriété intellectuelle et incitations.  On comprend mieux la relation entre la santé publique, le système de propriété intellectuelle et les moyens de promouvoir l'innovation et l'accès aux technologies médicales.  Parallèlement, il y a un débat général sur les moyens de promouvoir l'innovation dans le domaine de la recherche médicale et de financer la recherche-développement, en particulier en ce qui concerne les maladies négligées.

Meilleure information, meilleur débat.  Les discussions sur la politique publique internationale sont mieux éclairées et reposent davantage sur des faits.  En effet, les données disponibles sont plus nombreuses et couvrent des sujets plus variés.  De ce fait, les politiques sont plus cohérentes au niveau international et la coopération concernant les politiques de santé qui touchent plusieurs domaines liés entre eux, à savoir la santé, le commerce et la propriété intellectuelle, est plus concrète.

 


Comprendre le jargon 

• ADPIC

• Importations parallèles

• Système prévu au paragraphe 6

 

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