DIRECTEURS GÉNÉRAUX ADJOINTS

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Je me réjouis de l'occasion qui m'est donnée aujourd'hui de m'adresser à vous au nom de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) dans le cadre de l'"International Business Panel", événement majeur du Forum mondial pour l'alimentation et l'agriculture, au même titre que la Conférence des Ministres de l'agriculture de Berlin, la plus grande conférence au monde de ce type.

La Conférence de Berlin donne aux responsables politiques et aux organisations agricoles la possibilité de nouer le dialogue pour réfléchir ensemble, entre autres choses, à la meilleure façon d'encourager une production agricole durable et de favoriser la sécurité alimentaire au niveau mondial.

Cet après-midi, je souhaite vous faire part de cinq points essentiels.

Premièrement, bien que nous n'abordions pas souvent les choses sous cet angle, il n'y a rien à part la défense nationale, qui soit aussi important pour le bien-être des populations que la promotion de l'agriculture.

Deuxièmement, même si cela va de soi, il faut reconnaître que le commerce mondial de produits agricoles est en grande partie soumis aux règles de l'OMC.

Troisièmement, chacun sait que les règles sont bonnes, mais qu'elles doivent être améliorées.

Quatrièmement, les accords commerciaux bilatéraux ou régionaux ne sont pas le meilleur moyen de parvenir à des améliorations.

Cinquièmement, il est véritablement possible de traiter efficacement des aspects fondamentaux du commerce des produits agricoles à l'OMC, et cela dès maintenant.

Le premier objectif, qui consiste à promouvoir l'agriculture pour le bien de tous, est clairement énoncé dans le deuxième des Objectifs de développement durable à l'horizon 2030 adoptés par les Nations Unies. Il est ainsi libellé: "Éliminer la faim, assurer la sécurité alimentaire, améliorer la nutrition et promouvoir l'agriculture durable."

L'OMC joue un rôle vital pour la réalisation de cet objectif.

Les travaux pertinents de notre Organisation dans le domaine de l'agriculture reposent sur cinq hypothèses:

  • l'ouverture au commerce accroît la disponibilité des produits alimentaires en permettant de les acheminer des zones excédentaires vers les zones déficitaires;
  • l'ouverture au commerce encourage une répartition efficace des ressources en fonction des avantages comparatifs, limitant ainsi les pertes d'efficacité;
  • l'ouverture au commerce accroît la diversité des régimes alimentaires nationaux et accélère la diffusion au niveau international de réglementations sanitaires et phytosanitaires (SPS) solides, réduisant ainsi les obstacles non nécessaires au commerce;
  • l'ouverture au commerce facilite l'accès des populations du monde entier à des produits alimentaires abordables et de grande qualité; et
  • l'ouverture au commerce contribue à réduire la volatilité des prix, ce qui profite tant aux agriculteurs et aux éleveurs qu'aux consommateurs, les risques associés à la production alimentaire nationale étant bien plus élevés que ceux liés à la mise en commun de la production au niveau mondial.

En résumé, le système commercial international fondé sur des règles de l'OMC constitue un socle pour la production, la distribution et la consommation de produits agricoles à l'échelle mondiale, et favorise ainsi la sécurité alimentaire pour tous ses Membres, tout en garantissant la sécurité sanitaire des produits alimentaires destinés à la consommation humaine et animale grâce à la coopération avec les organisations internationales de normalisation pertinentes.

Les disciplines de l'OMC qui sous-tendent le système multilatéral de commerce des produits agricoles, constituent un bien public collectif inestimable qu'il convient de renforcer afin d'assurer une large répartition des avantages entre les pays. Ces disciplines limitent et réduisent les distorsions créées par les politiques agricoles nationales et permettent de faire en sorte que les courants d'échanges soient aussi fluides et prévisibles que possible, garantissant ainsi la sécurité alimentaire des pays Membres et de leurs populations. En outre, un mécanisme de règlement des différends efficace et largement accepté peut permettre d'éviter que les désaccords commerciaux ne dégénèrent en conflits plus larges et ne perturbent les échanges.

La manière dont l'un de ces désaccords a été géré illustre bien cette fonction essentielle du système commercial mondial. Il s'agit de ce que l'on a appelé la "guerre du poulet". La création du Marché commun européen a sonné le glas du marché ouvert pour le poulet, en provenance des États-Unis. Conformément aux règles du GATT, les États-Unis étaient autorisés à prendre des mesures de rétorsion ou, plus exactement, à compenser la perte d'accès aux marchés qu'ils avaient subie. C'est ce qu'ils ont fait en relevant les droits de douane appliqués à de nombreux produits européens - le brandy de grande qualité, les camionnettes allemandes, la fécule de pommes de terre, ou encore la dextrine. Un des conseillers du gouvernement des États-Unis pour le secteur privé m'a par la suite rapporté que le Président Kennedy avait téléphoné au Chancelier Adenauer. Ce dernier pensait que l'appel concernerait probablement la construction du mur de Berlin et les tensions avec l'Union soviétique et la RDA. Mais pas du tout. Il s'agissait de l'accès aux marchés pour les poulets des États-Unis. Le fait est que le GATT, prédécesseur de l'OMC, offrait un moyen de contenir le problème. Depuis la création du GATT, les différends ont été résolus, certes non sans émotions, mais en tout cas sans risque d'effondrement des relations commerciales.

Comme vous le savez, le système alimentaire agricole international a été transformé par la mondialisation, sous l'effet de progrès technologiques tout au long de la chaîne de valeur. Les produits horticoles tels que les baies, les pommes et les poires, qui n'auraient jamais pu être acheminés sur de longues distances, le sont aujourd'hui grâce aux conteneurs réfrigérés. En tant que consommateurs, nous avons accès à une grande variété de produits tout au long de l'année. Des améliorations radicales se produisent actuellement dans l'agriculture et dans le commerce mondial en général, en raison d'une révolution liée à la numérisation de presque tous les aspects de l'activité humaine. Il est ainsi d'autant plus important que l'OMC continue de s'adapter aux mutations du commerce. Notre Organisation est un forum unique en son genre où la communauté internationale peut convenir de règles d'application générale et les mettre en œuvre pour garantir un système de commerce des produits agricoles juste, solide et dynamique, adapté aux nouvelles réalités et difficultés et à même de contribuer à la réalisation des Objectifs du Programme de développement durable à l'horizon 2030 des Nations Unies.

Toute ma vie professionnelle a été consacrée au commerce, et en grande partie aux négociations commerciales. Ma nomination en tant que négociateur chargé du commerce pour les États-Unis n'a été bloquée par le Sénat américain que quelques jours (cette procédure prend actuellement plusieurs mois), suite à quoi je me suis engagé à accorder un très haut degré de priorité au commerce des produits agricoles. Je considère que cet engagement a maintenant été renouvelé, au niveau international, du fait que j'ai rejoint l'OMC en tant que Directeur général adjoint chargé notamment de la Division de l'agriculture.

Vous ne serez pas surpris d'entendre que le commerce des produits agricoles n'est pas un sujet de négociation facile, loin s'en faut. Cela a été constaté à maintes reprises. Je l'ai moi-même appris depuis bien longtemps, que ce soit à l'occasion de négociations sur l'accès aux marchés avec le gouvernement japonais - destinées à faire pénétrer sur ce marché quelques tonnes métriques de viande de bœuf de première qualité, quelques caisses de citrons et une quantité très modeste de cuir - ou à Genève au GATT pour tenter de contrôler la forte volatilité des prix sur le marché mondial des céréales au moyen d'un accord multilatéral sur le stockage (qui ne s'est pas concrétisé au final).

Toutefois, des progrès ont été accomplis, tant au niveau bilatéral qu'au niveau multilatéral.

Des progrès ont été accomplis dans le domaine de l'agriculture lorsque l'OMC a été créée il y a 23 ans.

Des progrès ont été accomplis à Nairobi il y a deux ans, à la Conférence ministérielle de l'OMC, lorsque les Membres sont convenus d'éliminer les subventions à l'exportation de produits agricoles.

Des progrès plus limités, mais néanmoins significatifs, ont été accomplis sur la détention de stocks publics à des fins de sécurité alimentaire, juste avant la Conférence ministérielle de Buenos Aires. Les Membres n'ont pas trouvé de solution, mais ils ont pris conscience plus clairement des difficultés que pose cette question et de la façon dont elle s'articule par rapport à leurs intérêts plus larges. Ils ont centré leurs efforts sur la disponibilité des données pour renforcer la transparence et sur les effets de l'écoulement de stocks publics sur le marché. Ces enjeux ne concernent pas uniquement les grands exportateurs de produits agricoles; ils ont aussi une incidence sur la sécurité alimentaire des pays en développement. Des propositions ont été faites par la Russie, le Brésil, l'UE et d'autres pays encore, pour encourager la présentation de notifications et la transparence. Les discussions intensives qui ont eu lieu visaient à trouver un équilibre approprié entre le droit souverain de chaque Membre de l'OMC de mettre en place des programmes destinés à assurer la sécurité alimentaire sur son territoire, et la nécessité de veiller dans le même temps à ce que les stocks achetés dans le cadre de ces programmes n'aient pas d'effet de distorsion des échanges et n'aient pas d'effet défavorable sur la sécurité alimentaire d'autres Membres.

Soutenus par le Secrétariat de l'OMC, les Membres abordent l'année 2018 avec une volonté renouvelée de trouver des solutions mutuellement acceptables à des problèmes de longue date qui affectent le secteur agricole, dans l'intérêt de tous les Membres de l'OMC.

Nous pouvons encore améliorer le système de commerce des produits agricoles afin de le rendre plus réactif face aux défis actuels. Je prendrai trois exemples concrets:

  1. Premièrement, certaines mesures de soutien interne continuent de créer des distorsions importantes du commerce mondial des produits agricoles. Les règles de l'OMC prévoient certaines disciplines, notamment des limites applicables au soutien interne ayant des effets de distorsion des échanges et de la production, dans l'Accord sur l'agriculture et l'Accord sur les subventions et les mesures compensatoires. Cela étant dit, depuis 2001, le soutien interne susceptible d'avoir des effets de distorsion des échanges a considérablement augmenté. On estime ainsi que la somme des niveaux autorisés de soutien interne de neuf grands pays Membres de l'OMC (mesure globale du soutien consolidée et de minimis) a augmenté de 250 milliards de dollars EU entre 2001 et 2014, pour atteindre près de 500 milliards de dollars EU, en raison de la hausse de la production. Ce chiffre pourrait dépasser les 1 000 milliards de dollars EU d'ici à 2030.

    Il s'agit là de ce qui est permis au titre de l'Accord de l'OMC sur l'agriculture, et non des subventions réellement accordées par les gouvernements. Si l'on prend l'année 2001, les subventions effectivement appliquées ne représentent qu'une portion minime de ces montants, à savoir environ 25%. Il n'en demeure pas moins que ces niveaux sont inacceptables. Si le soutien autorisé n'est pas accordé dans son intégralité, il peut l'être. Et compte tenu des montants en jeu, de nouvelles disciplines doivent être élaborées. Sans cela, le système de commerce des produits agricoles pourrait être en proie à de graves distorsions accompagnées d'effets très défavorables sur les économies des pays en développement pauvres qui dépendent de l'agriculture pour les moyens d'existence et la sécurité alimentaire de leurs populations. Ces pays ne peuvent pas, et ne devraient pas, être confrontés à la concurrence de pays qui bénéficient d'un soutien financier aussi important. Il serait utile à cet égard de réaliser des études sur les vulnérabilités potentielles.

    Cela étant dit, il convient de se rappeler que l'OMC autorise les mesures de soutien interne n'ayant pas d'effets de distorsion des échanges, qui peuvent être prises pour aider les agriculteurs sans incidences négatives pour les autres pays. Ce soutien concerne les versements au titre de programmes de protection de l'environnement et les dépenses liées à la lutte contre les parasites et les maladies, aux services d'inspection et à de nombreuses autres catégories, pour ne mentionner que celles en lien avec le thème de la durabilité, de la responsabilité et de l'efficacité examiné à Berlin cette année.
  2. Deuxièmement, les restrictions à l'exportation peuvent aussi avoir une incidence négative sur la sécurité alimentaire. De nombreux Membres de l'OMC se sont prononcés en faveur de l'amélioration des règles, en particulier dans le domaine de la transparence. Les Membres ont le droit de prendre sur leurs marchés intérieurs des mesures appropriées pour prévenir une situation critique due à une pénurie de produits alimentaires, ou pour remédier à cette situation. La véritable sécurité alimentaire dépend de l'adoption d'accords et de la prise d'engagements fermes pour résister à la tentation d'imposer des restrictions à l'exportation, à l'exception des restrictions autorisées par les disciplines de l'OMC, si nécessaire.
  3. Troisièmement, s'agissant des obstacles au commerce, des droits de douane conséquents continuent d'être appliqués à un nombre limité de produits dont l'exportation présente un intérêt pour beaucoup de pays, y compris pour les pays en développement. La moyenne mondiale des droits consolidés visant l'ensemble des marchandises est de 6,8%, tandis que le taux appliqué est de 3,2%. Dans le cas des produits agricoles, en revanche, la moyenne des taux consolidés est de 54,8%, alors que le taux appliqué est de 14,6%. Au-delà des droits de douane, les mesures réglementaires ont un impact croissant sur le commerce international. Si elles sont essentielles au bon fonctionnement des économies modernes, ces mesures peuvent aussi avoir un effet défavorable sur le commerce des produits alimentaires et peuvent involontairement, ou pire encore, volontairement, établir une discrimination à l'égard des importations. En réalité, les normes ont remplacé les droits de douane à la première place des entraves au commerce.

Parmi les mesures les plus fréquemment rencontrées dans le cadre du commerce de produits agricoles et alimentaires, figurent les mesures sanitaires et phytosanitaires, les règlements et normes techniques, ainsi que les procédures douanières complexes. L'Accord SPS de l'OMC assure un équilibre délicat entre, d'une part, le droit des pays d'imposer des mesures destinées à protéger la santé et la vie des personnes et des animaux et à préserver les végétaux et, d'autre part, la nécessité d'éviter des restrictions non nécessaires au commerce. Dans le même esprit, l'Accord OTC vise à assurer un équilibre entre le droit des pays de poursuivre des objectifs légitimes et la nécessité d'éviter les obstacles non nécessaires au commerce. De nombreux différends concernant des mesures SPS et OTC ont été réglés de manière satisfaisante à l'OMC. On peut citer l'affaire Australie - Pommes, dans laquelle la Nouvelle-Zélande a contesté avec succès les mesures SPS imposées à l'importation de ses pommes par l'Australie; ou encore l'affaire CE - Sardines dans laquelle, après que l'Union européenne a interdit l'importation de sardines en provenance du Pérou, les parties ont finalement réussi à trouver une solution mutuellement satisfaisante. En outre, dans de nombreux cas les parties parviennent à un accord après avoir discuté de problèmes commerciaux spécifiques au sein du Comité SPS. En 2017, les Membres ont ainsi signalé la résolution totale ou partielle de 29 problèmes commerciaux spécifiques.

Il existe de bons exemples de partenariats entre l'OMC et d'autres organisations qui sont destinés à renforcer les capacités sanitaires et phytosanitaires des pays en développement, notamment dans le cadre du Fonds pour l'application des normes et le développement du commerce:

  • en Thaïlande et au Viet Nam, le soutien aux exportations de fruits et légumes;
  • au Nigéria, la promotion de la sécurité pour les exportations de sésame et de karité;
  • au Nicaragua, la formation technique des petits agriculteurs, qui sont souvent des femmes au respect des normes pour soutenir les exportations agricoles;
  • au Bélize, le renforcement du régime SPS pour améliorer les contrôles zoosanitaires et faciliter les exportations de bétail;
  • en Ouganda, l'aide au renforcement des contrôles phytosanitaires pour accroître les exportations de fleurs; et
  • en Afrique, en Amérique latine et en Asie du Sud-Est, le soutien aux producteurs et négociants pour le respect des normes en matière de pesticides pour l'exportation.

Le fait que le système commercial multilatéral est bon, sans être parfait, est illustré avec éclat par les préoccupations actuelles concernant l'avenir des échanges commerciaux à la frontière irlandaise. Nous avons tous entendu parler de la consternation que suscite la question de savoir s'il y aura une frontière stricte, souple, ou pas de frontière du tout entre les deux parties de l'île une fois le Brexit finalisé. La situation actuelle - le marché unique de l'UE - fournit une norme de référence pour un commerce relativement sans entrave entre l'Irlande et l'Irlande du Nord. Une autre option, clairement moins bonne que celle d'un marché unique, serait un "accord de libre-échange" (ALE) de grande qualité entre le Royaume-Uni et l'UE, en vertu duquel de nombreux obstacles au commerce des marchandises et des services seraient éliminés de manière substantielle. La troisième option, qui n'est pas mauvaise du tout mais qui n'est peut-être pas aussi bonne qu'un ALE sur mesure, est celle du commerce sur la base des règles de l'OMC.

Cela ne signifie pas que la libéralisation sous les auspices de l'OMC est dénuée d'intérêt. Bien au contraire - sans l'OMC, nous n'aurions pas assisté à l'augmentation spectaculaire du commerce mondial qui s'est produite au cours des quatre dernières décennies. Ce qui ressort en revanche, c'est qu'il peut y avoir un écart considérable entre le traitement réservé aux produits et services non originaires, et peut-être même à la propriété intellectuelle non originaire, et le traitement applicable aux équivalents d'origine nationale ou régionale. Si la question de la frontière irlandaise retient l'attention, l'incidence des ALE sur la prescription générale de non-discrimination de l'OMC n'est pas un cas isolé, loin s'en faut, de l'effet préjudiciable des accords régionaux et bilatéraux sur les intérêts commerciaux. Le cas des importations de bœuf au Japon est un exemple très actuel, puisque le bœuf australien importé dans le cadre du Partenariat transpacifique bénéficiera d'un meilleur accès que le bœuf en provenance des États-Unis.

Les accords de libre-échange sont-ils la voie de l'avenir? Je ne le pense pas, bien que beaucoup d'attention soit actuellement portée à ce mode de négociation.

Les trois plus grandes nations commerçantes sont aujourd'hui l'UE, les États-Unis et la Chine. Chacune trouve intéressant de conclure des accords entre un nombre limité de participants. L'UE est championne du monde du bilatéralisme et du régionalisme, avec près d'une centaine d'accords bilatéraux et régionaux en vigueur ou à divers stades de négociation, mais elle déclare être attachée au multilatéralisme en tant que philosophie commerciale. Les États-Unis croient en la supériorité des accords bilatéraux d'un point de vue idéologique, mais ils n'ont commencé à négocier aucun nouvel accord de ce type. Enfin, la Chine participe à des négociations sur un vaste accord régional et plusieurs accords bilatéraux, tout en soutenant fermement, au plus haut niveau du gouvernement, le système commercial multilatéral. Dans chaque cas, les accords commerciaux bilatéraux et régionaux auront un impact potentiellement négatif sur les économies des non-signataires et créeront des fardeaux supplémentaires au moins pour certaines de leurs entreprises.

Les accords commerciaux bilatéraux et régionaux à eux seuls ne nous permettront jamais d'obtenir ce dont l'agriculture mondiale a besoin. La poursuite de la libéralisation multilatérale est le seul moyen fiable et non discriminatoire d'adopter des règles et de rendre le commerce plus ouvert. Parfois, les accords commerciaux régionaux incluent des innovations susceptibles d'améliorer le commerce mondial, mais ce n'est pas leur objectif ni leur effet principal.

Il appartient aux participants réunis ici cette semaine, ainsi qu'à ceux qui partagent le désir d'accomplir des progrès pour le bien de l'agriculture sur notre planète, de décider si une approche mondiale, aussi difficile soit-elle à mettre en place, est la meilleure voie à suivre, puis de la mettre en œuvre.

Y-a-t-il alors une voie à suivre en pratique au niveau multilatéral?

Le principal message que je souhaite vous transmettre, un peu plus d'un mois après la Conférence ministérielle de Buenos Aires, c'est que l'OMC est opérationnelle. Ce qu'elle peut accomplir dépend de ses Membres, et les gouvernements des Membres dépendent à leur tour très largement de la contribution du secteur privé pour dégager des orientations.

L'OMC est conçue comme une organisation hautement pragmatique. Les évaluations que font les entreprises et les autres parties prenantes de leurs besoins façonnent le programme de l'Organisation. Vous qui êtes ici, qui représentez le secteur privé, les entreprises et les associations, les agriculteurs et les éleveurs, avez toujours une bonne longueur d'avance sur vos gouvernements en ce qui concerne l'évaluation de vos besoins. Sans votre contribution, le système commercial international serait bien moins efficace et pertinent. Par l'intermédiaire de vos gouvernements respectifs, vous avez la possibilité de faire savoir à l'OMC quels sont vos besoins et quel type d'environnement commercial mondial devrait être mis en place. Il est impératif, pour que des progrès puissent être accomplis, que vous tous qui appartenez au secteur privé communiquiez avec vos gouvernements et autorités. Si les chefs d'entreprise ne contactent pas les Ministres du commerce et de l'agriculture et les Chefs de gouvernements pour demander avec insistance un commerce davantage ouvert et fondé sur des règles, les chances de succès sont bien moindres. Si les Chefs de gouvernements qui souhaitent obtenir ce résultat n'établissent pas le contact avec leurs homologues, il est plus difficile de faire progresser les négociations sur l'agriculture.

Étant donné que la population mondiale devrait passer de 7 milliards à 9,6 milliards de personnes d'ici à 2050, l'approvisionnement alimentaire doit augmenter de 60% au cours des trois prochaines décennies, pour éviter que la famine ne frappe les pays les plus vulnérables et pour obtenir des résultats acceptables pour tous. Il est donc nécessaire que la production agricole soit innovante et durable, et qu'elle soit sous-tendue par des politiques nationales efficaces et par des disciplines convenues d'un commun accord au niveau mondial.

Si la communauté internationale centre son attention sur les défis que doit relever l'humanité et travaille en étroite collaboration, nous parviendrons à produire suffisamment de nourriture et à assurer la sécurité alimentaire, conformément aux Objectifs de développement durable des Nations Unies, ainsi qu'à assurer la sécurité sanitaire des produits alimentaires. L'OMC peut jouer un rôle indispensable pour aider les pays à y parvenir.

De retour de la Conférence ministérielle de l'OMC à Buenos Aires, je suis pleinement convaincu que des progrès importants peuvent être faits à l'OMC dans le domaine de l'agriculture, en 2018 et au-delà. Ces progrès consistent notamment à limiter le soutien interne, à mieux comprendre l'utilisation des restrictions à l'exportation et à renforcer la transparence les concernant, et à réduire et éliminer les obstacles au commerce afin d'améliorer l'accès aux marchés. Ce ne sera pas chose facile, et même si tous les pays Membres déploient de grands efforts et font preuve de bonne volonté, les résultats ne seront pas immédiats. Toutefois, l'autre solution n'est pas simplement de maintenir le statu quo, mais d'assister à une érosion des progrès déjà accomplis. Ce qui se passera cette année et les suivantes dépend en grande partie de vous et de ceux qui se trouvent dans des situations semblables - ceux qui sont le plus concernés par les résultats.

Je vous remercie.

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