ALLOCUTIONS — DG NGOZI OKONJO-IWEALA

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Excellences, chers collègues, chers amis,

Je me joins à mon ami le Dr Tedros pour vous dire à quel point je suis ravie que vous ayez pu vous joindre à nous aujourd'hui pour examiner où nous en sommes s'agissant du défi que représente l'équité vaccinale. Votre présence est très appréciée.

En avril, lorsque nous avons tenu notre premier dialogue selon les règles de la Chatham House, je vous ai promis qu'il y en aurait d'autres. Je suis donc heureuse de reprendre cette conversation trois mois plus tard. Beaucoup de choses se sont passées depuis avril.

Pour ce qui est des points positifs, le déploiement des vaccins s'est accéléré.

    • En juin, 1,1 milliard de doses ont été administrées dans le monde: 45% de plus qu'en mai, et plus du double du total enregistré en avril.
    • Plus de 134 millions de doses ont désormais été livrées à 136 économies dans le cadre du mécanisme COVAX.
    • La production de vaccins s'accélère également. D'après Airfinity, 1 milliard de doses supplémentaires ont été produites en juin, portant le total de la production mondiale à 3,8 milliards à la mi-juillet.
    • Selon les estimations, la production mondiale pourrait atteindre 11 milliards de doses cette année, à condition que de nouveaux vaccins, comme Novavax et plusieurs autres, obtiennent l'homologation des autorités réglementaires. Si la production atteint effectivement 11 milliards de doses, cela pourrait contribuer à répondre à la demande mondiale, si des rappels ne sont pas nécessaires.

Pour ce qui est des points négatifs, plus d'un million de décès ont été enregistrés depuis le 14 avril. Et l'inégalité vaccinale se creuse selon certains indicateurs.

    • Les Africains, qui représentent 17% de la population mondiale, n'ont reçu que 1,4% du 1,1 milliard de doses administrées en juin. Les habitants des pays à faible revenu n'en ont reçu que 0,24%. Ces deux proportions se sont encore réduites dans la première partie du mois de juillet.
    • Dans les pays développés, 94 doses pour 100 habitants ont été administrées. En Afrique, ce chiffre est de 4,5 et de 1,6 dans les pays à faible revenu.
    • En Afrique, 20 millions de personnes seulement, soit 1,5% de la population, sont totalement vaccinées, contre 42% dans les pays développés.
    • Nous ne pouvons pas accepter cela, pour des raisons morales, pratiques et économiques.

Avec la propagation du variant Delta à l'échelle mondiale, on peut parler de “conte des deux pandémies.”

    • À travers l'Asie, l'Afrique et l'Amérique latine, où les taux de vaccination sont faibles, les décès liés à la COVID-19 atteignent à nouveau des sommets.
    • Pendant ce temps, dans les pays où les taux de vaccination sont élevés, la hausse des infections ne n'est pas traduite, du moins pour le moment, par une augmentation des taux d'hospitalisation et de mortalité.

La possibilité qu'une partie de la nouvelle production de vaccins arrivant sur le marché soit moins efficace du fait des nouveaux variants ou qu'elle soit finalement destinée aux groupes de populations à faibles risques et à l'administration de rappels constitue un autre motif de préoccupation.

La production reste très centralisée: il semblerait qu'environ 75% des vaccins de cette année proviennent de cinq Membres de l'OMC: la Chine, l'Inde, l'Allemagne, les États-Unis et la France. En outre, il y a peu de transparence s'agissant des contrats relatifs aux vaccins ou des marchés d'intrants, même si le nouveau marché COVAX devrait contribuer à faire correspondre la demande d'intrants avec l'offre.

L'accès inégal aux vaccins explique en grande partie la reprise en K de l'économie mondiale, suivant laquelle les économies avancées et quelques autres progressent rapidement, alors que le reste est à la traîne et connaît une hausse de la pauvreté, de la faim et du chômage.

La conférence d'aujourd'hui vise notamment à mieux comprendre ce qui se passe au niveau de la production de vaccins.

    • Nous aimerions entendre les fabricants parler des niveaux actuels et projetés de la production de vaccins en 2021 et 2022, ainsi que des goulets d'étranglement qu'ils rencontrent — et leurs idées pour y remédier.
    • J'aimerais entendre les fabricants et les partenaires comme la SFI et Afreximbank parler des investissements visant l'augmentation des capacités de production qu'ils ont réalisés ou reçus, ou de ceux qui sont prévus, en particulier sur les marchés émergents et dans les pays en développement.
    • Nous aimerions entendre ceux qui gèrent les droits de propriété intellectuelle parler des facteurs qui influencent leurs décisions en matière de transfert de technologie et de savoir-faire, ainsi que des cas dans lesquels concéder des licences pour la PI en particulier, et de ce qui encouragerait ces mesures.
    • Nous aimerions que les ministres et les Membres nous expliquent comment la distribution se déroule sur le terrain et quels sont les problèmes particuliers qu'ils ont rencontrés.
    • Et nous aimerions que tout le monde partage ses idées sur la façon dont nous pouvons faire mieux en matière d'accès, d'innovation et de diversification de la base de production de vaccins.

Cette réunion se déroule selon les règles de la Chatham House, j'espère donc que vous parlerez tous avec franchise.

À l'OMC, nous avons été bien occupés depuis la réunion d'avril.

En mai, le Dr Tedros et moi-même nous sommes associés à nos homologues du FMI et de la Banque mondiale pour demander des investissements de départ d'un montant de 50 milliards de dollars pour accroître la vaccination dans le monde, pour sauver des vies, ainsi qu'un plan de relance de l'économie mondiale de 9 000 milliards de dollars.

Le mois dernier, nous avons organisé à l'OMC un symposium technique sur la chaîne d'approvisionnement et la transparence réglementaire. L'idée était de mieux comprendre les goulets d'étranglement de la chaîne d'approvisionnement et la façon d'y remédier afin que nous puissions contribuer davantage aux efforts faits par les fabricants pour accélérer la production de vaccins.

Nous avons collaboré avec l'Organisation mondiale des douanes, l'OCDE, des chercheurs, des entreprises et d'autres parties prenantes pour établir une liste évolutive d'intrants essentiels pour la fabrication de vaccins, ainsi qu'une autre liste des questions politiques et réglementaires affectant le commerce de ces intrants. Nous espérons que vous trouverez ce travail utile.

Étant donné que les composants des vaccins et que le matériel de production sont complexes et souvent trop pointus pour figurer dans les classifications de produits normalisées au niveau international que les autorités douanières utilisent, ces listes devraient faciliter le suivi et la comparaison des flux commerciaux et permettre de mieux cibler les mesures de facilitation des échanges.

D'après ces travaux, sur les quelque 50 restrictions à l'exportation liées à la COVID qui restent en vigueur, environ 27 pourraient affecter certains composants de vaccins et matériels de fabrication. Dix autres restrictions concernent les gants, les équipements de protection individuelle et d'autres produits nécessaires à l'administration des vaccins.

Je remercie ceux qui ont participé à ces travaux et j'encourage tout le monde à consulter ces listes, qui sont publiées sur notre site Web, et à nous faire savoir ce qu'il faut ajouter, ou supprimer.

S'agissant des négociations, comme vous le savez, nous sommes passés aux négociations fondées sur des textes en ce qui concerne la proposition de dérogation à l'Accord sur les ADPIC. Ces négociations avancent lentement en ce moment car les Membres essaient de concilier des vues et approches divergentes. Nous travaillons actuellement d'arrache-pied pour voir comment nous pouvons aider les Membres à rapprocher leurs positions et faire progresser ces négociations.

Les Membres ont aussi présenté des idées sur un ensemble plus large de préoccupations liées à la santé, comme les restrictions à l'exportation, les abaissements tarifaires, la facilitation des échanges et l'augmentation de la production et de la distribution de vaccins, en plus des questions liées à la propriété intellectuelle.

L'un de nos ambassadeurs les plus respectés, M. l'Ambassadeur David Walker (Nouvelle-Zélande), a été désigné par le Président du Conseil général facilitateur chargé de la réponse de l'OMC à la COVID-19. Il guide les Membres dans le cadre d'un processus visant à essayer de rassembler ces différents éléments dans un cadre en vue de notre douzième Conférence ministérielle afin que les ministres puissent approuver une déclaration ou une décision ministérielle sur ces questions; pas seulement en ce qui concerne notre réponse à la pandémie actuelle mais en préparation de la prochaine.

J'espère que les discussions que nous aurons ici aujourd'hui permettront d'éclairer les travaux des Membres concernant la réponse de l'OMC aux pandémies pour que des réunions de ce genre ne soient plus nécessaires à l'avenir.

Je vous remercie et vous souhaite à tous un après-midi fructueux.

 

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