NOUVELLES: ALLOCUTIONS — DG PASCAL LAMY

Symposium de l'OEPC sur “la crise économique et financière et le rôle de l'OMC”

POUR EN SAVOIR PLUS:
> Allocutions: Pascal Lamy

  

Merci beaucoup, M. l'Ambassadeur Matus.  Permettez-moi d'ajouter ma voix aux remerciements adressés au FMI et à l'OCDE pour leurs contributions à cette réunion.

Cette Session extraordinaire de l'OEPC s'appuie sur les exercices de suivi des politiques commerciales que nous avons mis au point au cours des trois dernières années.  Comme je l'ai dit à la réunion de l'OEPC de la semaine dernière, je pense que nous devrions réfléchir à la manière dont notre exercice de suivi pourrait être présenté aux Ministres en décembre.  La discussion d'aujourd'hui devrait enrichir quelque peu notre réflexion.

Au cours de cette Session extraordinaire, nous porterons plus particulièrement notre attention sur les répercussions commerciales des mesures exceptionnelles de soutien budgétaire instaurées par de nombreux Membres en réponse aux crises économiques et financières mondiales de 2008-2009.  Nous avons distribué un rapport, que vous avez tous en face de vous, pour guider cet exercice.  Cela nous amène à l'interface entre politiques macro-économiques et politiques commerciales.

Cette interface est étendue et elle a toujours été considérée, dans une large mesure, comme ne relevant pas des compétences de l'OMC.  Comme nous le savons tous et comme cela est rappelé à la note de bas de page n° 1 de la première page du document WT/TPR/OV/W/4 que vous avez sous les yeux, notre activité de suivi n'a pas d'effet juridique sur les droits et obligations des Membres.

Nous devrions tous garder cet important avertissement à l'esprit pendant le symposium d'aujourd'hui.  Bon nombre des mesures qui ont fait l'objet de notre suivi ne sont pas soumises aux disciplines existant dans le cadre de l'OMC ni à des obligations de notification.  Certaines peuvent être assujetties aux règles de l'OMC, mais, comme vous le savez tous, il n'appartient pas au Secrétariat de remettre en cause leur conformité.  Seuls les Membres sont habilités à le faire, dans les comités pertinents ou dans le cadre du système de règlement des différends.  Cela a aussi des incidences sur les obligations de notification.

Nous explorons, en quelque sorte, des terres vierges, avec l'espoir qu'au bout du compte, nous distinguerons tous mieux les effets des mesures nationales sur les partenaires commerciaux, et serons ainsi en mesure de clarifier encore les responsabilités de l'OMC dans ce domaine.  Dans cette organisation, ce sont les Membres qui décident des règles et du processus de leur mise en œuvre.  Faute d'accord, en l'occurrence nous explorons, nous lançons des idées.

Il ne nous faudrait pas non plus oublier que deux autres exercices connexes sont en cours à l'OMC.  L'un au Comité du commerce des services financiers, qui, l'année dernière, a consacré une session aux mesures de soutien financier et monétaire mises en place par les Membres en réponse à la crise financière.  L'autre dans le Groupe de travail du commerce, de la dette et des finances, qui a convenu d'engager des travaux sur la relation entre le commerce et les taux de change.  Nous devons impérativement veiller à la cohérence des travaux sur l'interface macro-économie/commerce menés dans les différents organes de l'OMC.

Les précédents rapports de suivi de l'OMC recensaient les mesures prises par les Membres dans le cadre de leurs programmes de relance budgétaire, même si, il est vrai, ils étaient loin d'être aussi détaillés que notre suivi des mesures à la frontière comme les droits de douane, les mesures correctives commerciales etc.  En dehors des programmes de sauvetage financier, des programmes d'aide budgétaire ont été mis en œuvre ou annoncés par de nombreux Membres, à la fois développés et en développement.

Il est évident que c'est grâce à ces programmes de relance budgétaire que la forte contraction mondiale du commerce et de la production survenue en 2008-2009 a pu être infléchie.  Ce faisant, il est probable que ces programmes ont aussi contribué à atténuer la pression poussant les gouvernements à répondre à la crise par les restrictions des échanges habituelles, afin de protéger la production et l'emploi au niveau national.  Je crois que nul ne doute sérieusement parmi nous que, considérés de ce point de vue, les programmes budgétaires ont soutenu les échanges et le système commercial multilatéral.

C'est lorsque nous examinons de plus près les composantes de ces programmes budgétaires que des préoccupations peuvent naître:  certaines mesures (taxes, subventions, programmes de marchés publics) ne sont-elles pas discriminantes à l'égard des produits et services importés ou des fournisseurs de services étrangers?  Ou n'ont-elles pas autrement altéré les conditions de concurrence sur le marché d'un Membre de sorte que les producteurs nationaux sont favorisés par rapport à leurs concurrents étrangers?

Nous savons, bien sûr, que cela est possible en théorie.  Mais pour remédier effectivement aux préoccupations que je viens juste d'évoquer, une analyse empirique est nécessaire.

Au départ, il y a donc une question de transparence:  que savons-nous des mesures budgétaires spécifiques que les Membres ont employées pour sortir de la crise?

La réponse, à en juger par la note d'information du Secrétariat sur ce symposium, est que nous ne savons pas grand-chose.  Nous avons une idée générale de l'ampleur globale des programmes de soutien budgétaire d'un grand nombre de Membres, mais nous en savons peu sur les mesures spécifiques qui ont été utilisées.  Quelques Membres publient effectivement les détails de leurs mesures de soutien budgétaire en faveur des producteurs nationaux, mais la plupart ne le font pas.  Les Parties à l'Accord sur les marchés publics (AMP) s'informent mutuellement de leurs activités dans le domaine, mais la plupart des Membres ne sont pas parties à l'AMP, et même lorsqu'ils le sont, on sait bien peu de choses sur les activités de leurs entités infrafédérales dans ce domaine.

Sans ces données empiriques, il est difficile de passer à l'étape suivante et d'essayer d'évaluer les effets des mesures sur le commerce.  Je remarque que le FMI a tenté de le faire dans le document qu'il présentera au cours du symposium d'aujourd'hui, et je l'en félicite.  Toutefois, je note que le FMI a lui aussi jugé nécessaire d'avertir le lecteur des contraintes qu'il avait rencontrés en matière de données.

En conséquence, si nous voulons aborder l'exercice d'aujourd'hui avec sérieux, ma première suggestion sera d'appeler à une plus grande transparence.  Cela vaut aussi bien pour cet exercice que pour les fonctions de suivi et de surveillance de l'OMC dans leur ensemble.  C'est là un domaine qu'il me semble possible d'améliorer.  Nous pouvons et nous devons faire mieux en matière de notification et de partage de l'information.

Ma seconde suggestion est de ne pas nous hasarder à jeter nos filets trop loin pour l'instant.  Nous ferions mieux de nous concentrer sur ce dont nous disposons déjà à l'OMC et d'essayer d'aller de l'avant.

À cet égard, il me semble que nous devrions porter en premier lieu notre attention sur les marchés publics.  On estime entre 15 et 20 pour cent leur contribution au PIB des Parties à l'AMP, et probablement est-elle d'environ autant pour les Membres dans leur ensemble.  Cela représente un marché énorme.  L'ouverture des marchés publics aux fournisseurs étrangers offre un très fort potentiel d'expansion du commerce.  Des progrès considérables ont été réalisés dans cette voie par le Comité des marchés publics.  Si nous faisons fond sur ses travaux, si nous augmentons le nombre des Parties à l'AMP et étendons le champ d'application de l'Accord, de larges perspectives s'ouvriront pour stimuler la croissance des échanges et soumettre ce domaine du soutien budgétaire à un examen multilatéral plus strict.

Voilà qui clôt mes remarques liminaires pour cette réunion.  Je suis impatient de connaître les vues et les expériences des délégations en ce qui concerne les effets des mesures de sortie de crise et le rôle que l'OMC peut jouer en la matière.  Ces éléments pourront constituer une base de réflexion utile pour la Conférence ministérielle organisée à la fin de cette année.

Je vous remercie de votre attention.

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