CONFÉRENCE
MINISTÉRIELLE DE L'OMC, SEATTLE 1999: COMMERCE ET
ENVIRONNEMENT
Travaux du comité du commerce et de lenvironnement
Lorsque les Ministres ont approuvé les résultats des négociations du Cycle dUruguay à Marrakech, en avril 1994, ils ont décidé de lancer à lOMC un vaste programme de travail (voir ci-dessous) consacré au commerce et à lenvironnement. Au cours des cinq dernières années, ce programme de travail a été au centre des débats du Comité du commerce et de lenvironnement (CCE). Le principal objectif du CCE est détablir des rapports constructifs entre les préoccupations commerciales et environnementales.
- identifier les relations entre les mesures commerciales et les mesures environnementales de manière à promouvoir le développement durable;
- faire des recommandations appropriées pour déterminer sil y a lieu de modifier les dispositions du système commercial multilatéral, en en respectant le caractère ouvert, équitable et non discriminatoire.
Ce large mandat, qui englobe les marchandises, les services et les droits de propriété intellectuelle, fait fond sur les travaux menés dans le cadre du précédent Groupe du GATT sur les mesures relatives à lenvironnement et le commerce international. Depuis 1997, le CCE a adopté une approche thématique de ses travaux afin délargir et dapprofondir les débats et de pouvoir examiner toutes les questions inscrites au programme de travail de manière systématique. À cette fin, celles-ci ont été regroupées en deux grandes catégories: les questions relatives à laccès aux marchés et les questions relatives à linterdépendance des activités multilatérales concernant lenvironnement et des activités multilatérales concernant le commerce.
Conformément à la Décision ministérielle, le CCE a présenté un rapport sur létat davancement de tous les points de son programme de travail aux Conférences ministérielles de 1996 et de 1998 qui se sont tenues respectivement à Singapour et à Genève. Il a adopté son rapport sur les travaux effectués en 1999, qui sera présenté à la Conférence ministérielle de Seattle.
Ces dernières années, lOMC a organisé plusieurs symposiums, consacrés à linterface du commerce et de lenvironnement, auxquels ont participé des représentants de la société civile. Le dernier en date est le Symposium de haut niveau sur le commerce et lenvironnement qui a eu lieu en mars 1999 avec la participation de plus de 130 organisations non gouvernementales et intergouvernementales. Parmi les participants, il y avait également des représentants de haut niveau des Ministères du commerce, de lenvironnement et du développement ainsi que dautres organismes gouvernementaux des Membres de lOMC soccupant de questions concernant le développement durable. Cette réunion a servi de cadre à un échange de vues et de renseignements utile entre les responsables du commerce et les défenseurs de lenvironnement.
Selon un récent rapport du Secrétariat de lOMC, lintégration et la croissance économiques internationales rendent dautant plus nécessaire ladoption de politiques environnementales rationnelles aux niveaux national et international. La coopération internationale est particulièrement importante pour sattaquer aux problèmes environnementaux transfrontières et mondiaux auxquels les nations ne peuvent faire face seules. Cela serait vrai même si les nations ne commerçaient pas les unes avec les autres
haut de pageCommerce et environnement dans le cadre de lOMC
Le Comité du commerce et de lenvironnement (CCE) a intégré les questions denvironnement et de développement durable dans le programme de travail de lOMC. Plusieurs paramètres importants ont guidé ses travaux.
- Le premier est que la compétence de lOMC pour la coordination des politiques dans ce domaine se limite au commerce et aux aspects des politiques environnementales qui touchent au commerce et qui peuvent avoir des effets notables sur les échanges de ses Membres. En dautres termes, il ne sagit pas de faire de lOMC un organisme à vocation environnementale. LOMC ne doit pas non plus intervenir dans lexamen des priorités nationales, la fixation de normes ou lélaboration de politiques globales en matière denvironnement. Cela demeurera la tâche des gouvernements nationaux et dautres organisations intergouvernementales mieux à même de sen acquitter.
- Le deuxième paramètre est quun renforcement de la coordination nationale et de la coopération multilatérale est nécessaire pour traiter les problèmes denvironnement.
- Et le troisième paramètre est quil est indispensable de garantir des possibilités daccès aux marchés pour aider les pays en développement à uvrer dans le sens dun développement durable.
La contribution que lOMC pourrait apporter à la question de la protection de lenvironnement a été reconnue à la Conférence des Nations Unies sur lenvironnement et le développement (CNUED - Sommet Planète Terre) de 1992, lors de laquelle il a été indiqué quun système commercial multilatéral ouvert, équitable et non discriminatoire, avait un rôle essentiel à jouer dans les efforts nationaux et internationaux visant à mieux protéger et conserver les ressources naturelles et à promouvoir le développement durable. La mise en uvre des résultats du Cycle dUruguay figurait parmi les recommandations les plus importantes que la CNUED ait, à lépoque, faites au GATT.
Dans son premier rapport, en 1996, le CCE a reconnu que le commerce et lenvironnement étaient deux domaines importants de lélaboration des politiques et quils devaient sétayer mutuellement afin de promouvoir le développement durable. Il y est également dit que le système commercial multilatéral a la capacité dintégrer davantage les considérations environnementales et daccroître sa contribution à la promotion du développement durable sans compromettre son caractère ouvert, équitable et non discriminatoire.
Afin de faire prendre conscience des liens qui existent entre commerce, environnement et développement durable et daméliorer le dialogue entre les responsables de lélaboration des politiques des Ministères du commerce et des Ministères de lenvironnement des gouvernements Membres de lOMC, le Secrétariat de lOMC a organisé une série de séminaires régionaux sur le commerce et lenvironnement à lintention de fonctionnaires des pays en développement, des pays les moins avancés et des pays en transition.
À sa dernière réunion, en octobre 1999, afin de sacquitter du mandat qui lui a été confié, le CCE est convenu de tenir trois réunions en 2000 et de continuer à approfondir lanalyse de tous les points inscrits au programme de travail sur la base de deux grands thèmes - laccès aux marchés et linterdépendance des activités multilatérales concernant lenvironnement et des activités multilatérales concernant le commerce.
Le programme de travail du CCE porte notamment sur les points suivants:
haut de pageMesures commerciales appliquées en vertu daccords environnementaux multilatéraux (AEM)
Tout au long des discussions qui se sont tenues à lOMC sur cette question, il est apparu clairement que, pour sattaquer aux problèmes environnementaux mondiaux ou transfrontières, lapproche que privilégiaient les gouvernements était laction coopérative et multilatérale dans le cadre dun AEM. Certains accords environnementaux multilatéraux contiennent des dispositions commerciales, mais les restrictions des échanges ne sont pas lunique instrument ni nécessairement le plus efficace à utiliser dans le cadre des AEM. Elles peuvent parfois jouer un rôle important. Il a également été indiqué que lOMC offrait déjà de larges possibilités, très appréciables, dappliquer des mesures commerciales dans le cadre dAEM dune manière compatible avec les règles de lOMC.
Comme les années précédentes, le CCE a tenu en juin 1999 une réunion dinformation avec les secrétariats des accords environnementaux multilatéraux présentant un intérêt pour ses travaux afin dexaminer les faits nouveaux en rapport avec le commerce intervenus dans le cadre de ces accords. Des exposés et des notes ont été présentés par les secrétariats de la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées dextinction, du Protocole de Montréal relatif à des substances qui appauvrissent la couche dozone, de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, du Forum intergouvernemental sur les forêts et de lOrganisation internationale des bois tropicaux. Cette réunion a permis de montrer comment fonctionnent les mesures liées au commerce dans les AEM et de mieux faire comprendre les liens entre ces accords et le système commercial multilatéral.
haut de pageRèglement des différends
Une question connexe concerne le cadre approprié pour le règlement des différends qui pourraient survenir au sujet des mesures commerciales appliquées en vertu dAEM. Ces différends devraient-ils être traités à lOMC ou au moyen des procédures de règlement des différends prévues par les accords eux-mêmes? On saccorde généralement à reconnaître que, en cas de différend entre des Membres de lOMC également signataires dun AEM, les parties concernées devraient dans un premier temps sefforcer de le régler en recourant aux mécanismes de règlement des différends prévus par lAEM en question. En cas de différend avec un État non partie à un AEM mais qui est Membre de lOMC, celle-ci constituerait le seul cadre possible pour régler ce différend.
Le CCE estime quune meilleure coordination des politiques entre les responsables de la politique commerciale et les responsables de la politique environnementale au niveau national pourrait aider à prévenir les situations dans lesquelles lapplication de mesures commerciales en vertu des AEM pourrait donner lieu à des différends. Il est par ailleurs peu probable que des problèmes surgissent à lOMC au sujet de mesures commerciales convenues et appliquées entre les parties à un AEM. Toutefois, en cas de différend, les Membres de lOMC sont convaincus que le mécanisme de règlement des différends de lOrganisation permettrait de traiter tous les types de problèmes qui se posent dans ce domaine, y compris les affaires qui requièrent le concours dexperts en matière denvironnement.
haut de pageÉco-étiquetage
Les programmes déco-étiquetage sont dimportants instruments de politique environnementale. La question de léco-étiquetage a fait lobjet de débats approfondis au GATT et a servi de base, au CCE, à un examen détaillé de questions connexes. Lessentiel, selon lOMC, est que les mesures environnementales qui comprennent des dispositions commerciales ou qui affectent notablement les échanges nétablissent pas de discrimination entre les produits dorigine nationale et les importations, pas plus quentre les partenaires commerciaux, à limportation ou lexportation. La non-discrimination est fondamentale pour un accès aux marchés sûr et prévisible et la libre concurrence: elle garantit aux consommateurs un plus grand choix et aux producteurs un meilleur accès aux divers débouchés commerciaux. Dès lors que ce principe est respecté, les règles de lOMC ne limitent pratiquement en rien les choix qui soffrent à un pays pour protéger son propre environnement contre les dommages causés par la production intérieure ou par la consommation de produits dorigine nationale ou importés.
Le CCE a reconnu que des programmes déco-étiquetage bien conçus pouvaient être des instruments de politique environnementale efficaces. Il fait observer que ces programmes ont parfois suscité dimportantes préoccupations au sujet de leurs effets possibles sur les échanges. Pour traiter certains de ces effets, il importe au départ dassurer une transparence suffisante dans la préparation, ladoption et la mise en uvre des programmes déco-étiquetage. Les parties intéressées dautres pays devraient également pouvoir faire part de leurs préoccupations. Les débats se poursuivent sur la manière dont lutilisation, dans les programmes déco-étiquetage, de critères fondés sur des procédés et méthodes de production sans rapport avec les caractéristiques des produits devrait être traitée au regard des règles de lAccord de lOMC sur les obstacles techniques au commerce.
haut de pageDispositions de lOMC en matière de transparence
Les dispositions de lOMC en matière de transparence jouent un rôle important pour ce qui est dassurer le bon fonctionnement du système commercial multilatéral. Elles contribuent à empêcher les restrictions et les distorsions non nécessaires des échanges et permettent dobtenir de la part des Membres de lOMC des renseignements sur les modifications quils apportent à leurs réglementations. Elles peuvent également constituer un point de départ utile en vue de lélaboration et de la mise en uvre de politiques commerciales et de politiques environnementales qui soient complémentaires. Les mesures environnementales liées au commerce ne devraient pas être soumises à des prescriptions en matière de transparence plus rigoureuses que les autres mesures qui affectent les échanges. Le CCE a indiqué quil nétait pas nécessaire de modifier les règles de lOMC pour assurer une transparence adéquate des mesures environnementales liées au commerce. Par ailleurs, en 1998, il a établi une base de données de lOMC sur lenvironnement à laquelle les Membres de lOrganisation peuvent accéder par voie électronique. Le Secrétariat de lOMC actualisera cette base de données chaque année en procédant à lexamen de toutes les notifications concernant lenvironnement. La base de données sur lenvironnement est considérée comme un pas important vers lamélioration de la transparence des mesures environnementales liées au commerce qui sont notifiées par les Membres de lOMC.
haut de pageExportation de produits interdits sur le marché intérieur
Au milieu des années 80, plusieurs pays en développement qui étaient parties contractantes au GATT se sont dits préoccupés par le fait quils importaient certains produits dangereux ou toxiques sans connaître tous les dangers que ces produits pouvaient présenter pour lenvironnement ou la santé publique. À la fin des années 80, un groupe de travail du GATT sest penché sur les différentes manières de traiter le commerce des produits dont la vente était interdite ou strictement réglementée sur le marché intérieur dun pays exportateur. Un des éléments-clés à prendre en considération était que le pays importateur devrait être pleinement informé au sujet des produits quil recevait et devrait avoir le droit de les refuser sil estimait quils posaient des problèmes pour lenvironnement ou la santé publique.
Plusieurs AEM ont été négociés ces dernières années pour traiter des problèmes du commerce des produits dangereux pour lenvironnement (Convention de Bâle et Directives de Londres, par exemple). LOMC na pas lintention de refaire ce qui a déjà été fait ailleurs en ce qui concerne les produits interdits sur le marché intérieur. Les Membres de lOMC, dans le cadre du CCE, sont convenus de soutenir les efforts des organisations intergouvernementales spécialisées à vocation environnementale qui semploient à résoudre ces problèmes. Ils ont néanmoins indiqué que lOMC pourrait avoir un rôle complémentaire à jouer dans ce domaine.
haut de pageLibéralisation des échanges et développement durable
Une libéralisation accrue du commerce international, tant des marchandises que des services, a un rôle-clé à jouer pour ce qui est de la poursuite des objectifs de la politique économique des pays Membres. À cet égard, les Membres de lOMC ont déjà apporté une contribution importante au développement durable et à une meilleure protection de lenvironnement à léchelle de la planète grâce à la conclusion des négociations du Cycle dUruguay. Cette contribution ne cessera daugmenter à mesure que lon sacheminera vers une mise en uvre complète des résultats de ces négociations. La Conférence des Nations Unies sur lenvironnement et le développement (Sommet Planète Terre) a par ailleurs reconnu quun système commercial ouvert et non discriminatoire était une des conditions préalables à une action efficace pour protéger lenvironnement et créer un développement durable. Ce constat repose sur lidée que les pays, en particulier les pays en développement, sont tributaires principalement des échanges commerciaux pour le maintien de leur croissance et de leur prospérité.
Le CCE poursuit lexamen de ce point de son programme de travail dans le cadre du programme incorporé concernant les initiatives en vue dune libéralisation accrue du commerce figurant dans les résultats des négociations du Cycle dUruguay. Il a indiqué que la suppression des restrictions et des distorsions des échanges - en particulier les droits de douane élevés, la progressivité des droits, les restrictions à lexportation, les subventions et les obstacles non tarifaires - pouvait avoir des effets bénéfiques tant pour le système commercial multilatéral que pour lenvironnement. En 1999, les discussions ont porté sur les secteurs de lagriculture et de la pêche, de lénergie, de la foresterie, des métaux non ferreux, des textiles et des vêtements, du cuir et des services concernant lenvironnement. Elles ont permis de faire ressortir les domaines dans lesquels la suppression des restrictions et des distorsions des échanges pouvait profiter à la fois à lenvironnement, au commerce et au développement, créant ainsi des circonstances favorables sur les trois plans.
haut de pageCommerce des services et ADPIC
Le CCE est également chargé dexaminer le rôle de lOMC eu égard aux liens qui existent entre les mesures environnementales et les nouveaux accords commerciaux qui ont été conclus au cours des négociations du Cycle dUruguay sur les services et la propriété intellectuelle. Les discussions sur ces deux points du programme de travail ont permis davancer étant donné quon ne comprenait pas très bien comment les règles du système commercial pourraient affecter les politiques environnementales dans ces domaines ou être affectées par ces dernières.
En ce qui concerne lAccord général sur le commerce des services (AGCS) et lenvironnement, le CCE a indiqué que, jusquici, ses discussions navaient pas permis didentifier la moindre mesure susceptible, selon les Membres, dêtre appliquée au commerce des services à des fins environnementales qui ne soit pas déjà dûment prise en compte par les dispositions de lAGCS. Dans le cas des droits de propriété intellectuelle, les Membres de lOMC ont reconnu que lAccord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC) jouait un rôle essentiel pour ce qui est de faciliter laccès aux technologies et produits respectueux de lenvironnement ainsi que leur transfert. Il est néanmoins nécessaire de poursuivre les travaux dans ce domaine, afin notamment de clarifier les rapports qui existent entre lAccord sur les ADPIC et la Convention sur la diversité biologique.