SERVICES: AGCS

L'Accord général sur le commerce des services (AGCS): objectifs, champ d'application et disciplines

Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur l'Accord général sur le commerce des services et que vous n'avez jamais osé demander...

1. Quel est le principal objectif de l'AGCS? 

La conclusion de l'AGCS constitue l'une des principales réalisations du Cycle d'Uruguay, dont les résultats sont entrés en vigueur en janvier 1995. L'AGCS répond à des objectifs semblables, pour l'essentiel, à ceux de l'instrument qui lui fait pendant pour le commerce des marchandises, l'Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT): établir un système crédible et fiable de règles pour le commerce international, assurer à tous les participants un traitement juste et équitable (principe de non-discrimination), stimuler l'activité économique grâce à des consolidations garanties et promouvoir le commerce et le développement par le biais d'une libéralisation progressive.

Bien que les services contribuent actuellement pour plus de deux tiers de l'ensemble de la production et de l'emploi, ils ne représentent pas plus de 25% du commerce total sur la base de la balance des paiements.  Cette part, en apparence modeste, ne saurait cependant être sous-estimée.  En effet, les statistiques de la balance des paiements ne prennent pas en compte un des modes de fourniture de services prévu dans l'AGCS, la fourniture par l'intermédiaire d'une présence commerciale dans un autre pays (mode 3).  En outre, si les services sont toujours plus échangés en tant que tels, ils constituent également des intrants essentiels pour la production de marchandises et représentent par conséquent environ 50% du commerce mondial en termes de valeur ajoutée. 

2. Qui participe?

Tous les Membres de l'OMC sont en même temps Membres de l'AGCS et ont contracté, à des degrés divers, des engagements pour différents secteurs de services.

3. Quels sont les services visés?

L'AGCS s'applique en principe à tous les secteurs de services, à deux exceptions près.

L'article I:3 de l'AGCS exclut les services fournis "dans l'exercice du pouvoir gouvernemental", c'est-à-dire les services qui ne sont fournis ni sur une base commerciale, ni en concurrence avec d'autres fournisseurs. Les activités faisant partie d'un régime de sécurité sociale et les autres services publics, comme les services de santé et d'éducation, qui ne sont pas fournis dans les conditions commerciales, en sont de bons exemples.

Par ailleurs, l'Annexe sur les services de transport aérien exclut du champ d'application de l'Accord les mesures qui affectent les droits de trafic et les services directement liés à l'exercice de ces droits.

4. Est-il vrai que l'AGCS s'applique non seulement aux flux de services transfrontières, mais aussi à d'autres modes de fourniture?

L'AGCS distingue quatre modes de fourniture de services: la fourniture transfrontières, la consommation à l'étranger, la présence commerciale et la présence de personnes physiques.

La fourniture transfrontières s'entend des flux de services en provenance du territoire d'un Membre et à destination du territoire d'un autre Membre (par exemple, des services bancaires ou d'architecture peuvent être transmis par voie de télécommunication ou par courrier postal);

La consommation à l'étranger s'entend des situations dans lesquelles un consommateur de services (par exemple, un touriste ou un patient) se rend sur le territoire d'un autre Membre pour obtenir un service;

La présence commerciale suppose qu'un fournisseur de services d'un Membre établit une présence commerciale, y compris en devenant propriétaire ou locataire de locaux, sur le territoire d'un autre Membre, pour fournir un service (par exemple, filiales nationales de compagnies d'assurance ou de chaînes d'hôtels étrangères); et

La présence de personnes physiques concerne l'entrée de personnes d'un Membre sur le territoire d'un autre Membre dans le but d'y fournir un service (par exemple, comptables, médecins ou enseignants). L'Annexe sur le mouvement des personnes physiques précise toutefois que les Membres sont libres d'appliquer des mesures concernant la citoyenneté, la résidence ou l'accès au marché du travail à titre permanent.

5. Pourquoi a-t-il fallu ajouter au concept traditionnel de commerce transfrontières trois autres modes de fourniture?

La fourniture de nombreux services requiert souvent la présence physique simultanée du producteur et du consommateur. Dans bien des cas, pour être utiles d'un point de vue commercial, les engagements commerciaux doivent donc être étendus aux mouvements transfrontières du consommateur, à l'établissement d'une présence commerciale à l'intérieur d'un marché ou au mouvement temporaire du fournisseur de services.

6. L'AGCS compromet-il la faculté qu'ont les Membres de poursuivre les objectifs et les priorités de la politique nationale?

L'AGCS reconnaît expressément le droit des Membres de réglementer la fourniture de services dans la poursuite de leurs propres objectifs. Toutefois, l'Accord contient des dispositions garantissant que les réglementations applicables aux services soient administrées d'une manière raisonnable, objective et impartiale.  

7. Quelles sont les obligations fondamentales découlant de l'AGCS?

Les obligations contenues dans l'AGCS peuvent être classées en deux grands groupes: les obligations générales, qui s'appliquent à tous les Membres et à tous les secteurs de services, et les obligations qui ne s'appliquent qu'aux secteurs inscrits dans les listes d'engagements des Membres. Ces engagements sont énoncés dans les listes des pays, dont la portée peut varier considérablement d'un Membre à l'autre. Les termes et les concepts pertinents sont semblables, mais pas nécessairement identiques, à ceux qui sont utilisés dans le cadre du GATT; ainsi, le traitement national est une obligation générale applicable au commerce des marchandises et ne peut pas être négocié dans le cadre de l'AGCS.  

a) Obligations générales

Traitement NPF: En vertu de l'article II de l'AGCS, les Membres sont tenus d'accorder immédiatement et sans condition aux services et fournisseurs de services de tout autre Membre "un traitement non moins favorable que celui qu'il[s] accorde[nt] aux services similaires et fournisseurs de services similaires de tout autre pays". Cela équivaut à interdire, en principe, les arrangements préférentiels entre des groupes de Membres dans des secteurs déterminés ou les clauses de réciprocité réservant les avantages en matière d'accès aux partenaires qui accordent un traitement similaire.

Des dérogations sont possibles, sous la forme de ce que l'on appelle des exemptions des obligations énoncées à l'article II. Les Membres ont été autorisés à demander des exemptions avant que l'Accord n'entre en vigueur. De nouvelles exemptions peuvent être accordées uniquement aux nouveaux Membres à l'occasion de leur accession ou, dans le cas des Membres actuels, au moyen d'une dérogation au titre de l'article IX:3 de l'Accord sur l'OMC. Toutes les exemptions sont soumises à un réexamen; elles ne devraient pas en principe durer plus de dix ans. En outre, l'AGCS permet à des groupes de Membres de conclure des accords d'intégration économique ou de reconnaître réciproquement des normes réglementaires, des certificats et autres pièces analogues, si certaines conditions sont réunies.

Transparence: Les Membres de l'AGCS sont tenus, entre autres choses, de publier toutes les mesures d'application générale et d'établir des points d'information nationaux chargés de répondre aux demandes de renseignements des autres Membres.

Parmi les autres obligations d'application générale figure l'établissement de procédures de révision administrative et de recours, et de disciplines régissant les opérations des monopoles et des fournisseurs exclusifs.

b) Engagements spécifiques

Accès aux marchés: L'accès aux marchés est un engagement négocié dans des secteurs déterminés. Il peut être assujetti à divers types de limitations, qui sont énumérés à l'article XVI:2. Par exemple, des limitations peuvent être imposées en ce qui concerne le nombre de fournisseurs de services, d'opérations de services ou d'employés dans le secteur, la valeur des transactions, la forme juridique du fournisseur de services ou la participation de capital étranger.

Traitement national: Un engagement en matière de traitement national signifie que le Membre concerné s'abstient d'appliquer des mesures discriminatoires favorisant les services ou les fournisseurs de services nationaux. Le Membre ne doit en aucun cas modifier, en droit ou en fait, les conditions de la concurrence en faveur de son propre secteur des services. Là encore, il est possible d'assujettir l'octroi du traitement national dans un secteur donné à diverses conditions et restrictions.

Les Membres sont libres de déterminer comme ils l'entendent la portée sectorielle et la teneur de fond de ces engagements. Ainsi, les engagements tendent à refléter les objectifs et les contraintes des politiques nationales, d'une manière globale et dans des secteurs déterminés. Si certains Membres n'ont inscrit dans leurs listes qu'un petit nombre de services, d'autres ont assumé des disciplines en matière d'accès aux marchés et de traitement national dans plus de 120 services sur un total de quelque 160.

L'existence des listes d'engagements spécifiques donne effet à d'autres obligations concernant, entre autres, la notification des nouvelles mesures qui ont une incidence notable sur les échanges et le non-recours à des restrictions en matière de paiements et de transferts internationaux.

8. Quels renseignements les "listes" concernant les services contiennent-elles?

Chaque Membre de l'OMC est tenu d'avoir une liste d'engagements spécifiques qui recense les services pour lesquels le Membre garantit l'accès aux marchés et le traitement national, ainsi que toute éventuelle limitation y relative. Cette liste peut également servir à contracter des engagements additionnels en ce qui concerne, par exemple, l'application de normes ou de principes réglementaires précis. Des engagements sont pris pour chacun des quatre modes de fourniture de services.

La plupart des listes se composent à la fois de sections sectorielles et de sections horizontales. La section relative aux engagements horizontaux contient des entrées qui s'appliquent à tous les secteurs énumérés dans la liste. Les limitations relatives aux engagements horizontaux concernent souvent un mode de fourniture donné, notamment la présence commerciale et la présence de personnes physiques. La section relative aux engagements sectoriels contient des entrées qui s'appliquent uniquement à un service particulier.

Toutes les listes peuvent être consultées sur le site Web de l'OMC.

9. Quand les engagements spécifiques des Membres sont-ils entrés en vigueur?

La plupart des engagements actuels sont entrés en vigueur le 1er janvier 1995, soit à la date à laquelle l'OMC a été instituée. Depuis lors, de nouveaux engagements ont été inscrits dans des listes par les participants pendant les négociations prolongées (voir ci-après) et par de nouveaux Membres ayant accédé à l'OMC.

10. Des engagements peuvent-ils être introduits ou améliorés en dehors du cadre des négociations multilatérales?

Oui, les Membres peuvent à tout moment étendre ou renforcer leurs engagements existants.

11. Les engagements spécifiques peuvent-ils être retirés ou modifiés?

En application de l'article XXI, les engagements spécifiques peuvent être modifiés moyennant certaines procédures. Les pays qui pourraient être concernés par de telles modifications peuvent demander au Membre apportant la modification de négocier une compensation; celle-ci doit être accordée sur une base NPF.

12. Existe-t-il des exemptions spécifiques dans le cadre de l'AGCS pour prendre en compte les intérêts importants en matière de politique nationale?

L'AGCS autorise les Membres à prendre ou à maintenir, dans des circonstances déterminées, des mesures en violation des obligations qui leur incombent au titre de l'Accord, y compris l'obligation NPF ou les engagements spécifiques. L'article pertinent porte, notamment, sur les mesures nécessaires pour:

  • protéger la moralité publique ou préserver l'ordre public;
  • protéger la santé et la vie des personnes et des animaux ou préserver les végétaux; et
  • assurer le respect des lois ou réglementations qui ne sont pas incompatibles avec l'Accord et, entre autres, les mesures nécessaires à la prévention des pratiques de nature à induire en erreur et frauduleuses.

En outre, l'Annexe sur les services financiers autorise les Membres, nonobstant les autres dispositions de l'AGCS, à prendre des mesures pour des raisons prudentielles, y compris pour la protection des investisseurs, des déposants, des titulaires de polices ou des personnes à qui un droit de garde est dû par un fournisseur de services financiers, ou pour assurer l'intégrité et la stabilité du système financier.

Enfin, en cas de graves difficultés de balance des paiements, les Membres sont autorisés à restreindre les échanges, à titre temporaire, d'une manière non discriminatoire, malgré l'existence d'engagements spécifiques.

13. Existe-t-il des dispositions spéciales pour les pays en développement?

Les intérêts des pays en développement sont pris en compte à la fois dans la structure générale de l'Accord et dans divers articles. En particulier, l'objectif consistant à favoriser une participation croissante de ces pays au commerce des services est énoncé dans le Préambule de l'Accord et sous-tend les dispositions de l'article IV. Ce dernier oblige les Membres, entre autres, à négocier des engagements spécifiques se rapportant au renforcement de la capacité nationale des pays en développement de fournir des services, à l'amélioration de leur accès aux circuits de distribution et aux réseaux d'information, et à la libéralisation de l'accès aux marchés dans les domaines qui les intéressent du point de vue des exportations.

Bien que la notion de libéralisation progressive soit l'un des principes de base de l'AGCS, l'article XIX prévoit que la libéralisation respectera dûment les objectifs de politique nationale et le niveau de développement des Membres, tant d'une manière globale que dans les différents secteurs. Les pays en développement ont donc la liberté d'ouvrir moins de secteurs, de libéraliser moins de types de transactions et d'élargir progressivement l'accès à leurs marchés en fonction de la situation de leur développement. D'autres dispositions leur offrent une plus grande flexibilité dans l'application de leurs politiques d'intégration économique, le maintien de restrictions pour des raisons de balance des paiements et la détermination de l'accès et du recours à leurs réseaux et services de transport des télécommunications. En outre, les pays en développement peuvent demander une assistance technique au Secrétariat de l'OMC.

14. Les résultats des négociations sectorielles prolongées dans le domaine des télécommunications et des services financiers sont-ils juridiquement différents des autres engagements sectoriels?

Non. Les résultats des négociations sectorielles constituent de nouveaux engagements spécifiques et/ou de nouvelles exemptions de l'obligation NPF dans les secteurs visés. Ils ne sont donc pas juridiquement indépendants des autres engagements sectoriels ni ne constituent des accords différents de l'AGCS. Les nouveaux engagements et exemptions de l'obligation NPF ont été incorporés dans les Listes d'engagements et les Listes d'exemptions existantes au moyen de Protocoles distincts annexés à l'AGCS.