Règles de l'OMC et politiques environnementales: les principales disciplines du GATT

Note: La présente page Web est établie par le Secrétariat sous sa propre responsabilité et vise uniquement à donner une explication générale du sujet traité. Elle n'a nullement pour objectif d'offrir des indications juridiques sur les dispositions de tel ou tel accord de l'OMC ni d'en donner une interprétation juridique faisant autorité. D'autre part, aucun élément de la présente note n'affecte ni n'est censé affecter les droits et obligations des Membres de quelque façon que ce soit.

> Pour plus de détails sur les différends relatifs à l'environnement, voir Différends relatifs à l'environnement

> Index analytique de l'OMC, articles I, III et XI du GATT


Certaines mesures prises pour réaliser des objectifs de protection de l'environnement peuvent, de par leur nature même, restreindre le commerce et porter de ce fait atteinte aux droits d'autres Membres dans le cadre de l'OMC. Elles peuvent enfreindre des règles fondamentales du commerce, telles que l'obligation de non-discrimination et la prohibition des restrictions quantitatives. C'est pourquoi les exceptions à ces règles, énoncées à l'article XX, sont particulièrement importantes dans le contexte du commerce et de l'environnement. L'article XX étant une clause d'exception, il ne s'applique que lorsqu'une mesure a été jugée incompatible avec les règles du GATT.

Le principe de non-discrimination

Avant tout, le principe de non-discrimination interdit à un Membre d'opérer une discrimination:

  • entre des produits “similaires” originaires de différents partenaires commerciaux (qui bénéficient alors tous du traitement de la “nation la plus favorisée” ou traitement NPF, article premier du GATT); et
      
  • entre ses propres produits et les produits étrangers similaires (qui bénéficient alors tous du “traitement national”, article III du GATT).
  

Produits “similaires”

Pour que des mesures environnementales ou sanitaires liées au commerce soient compatibles avec les règles de l'OMC, elles ne doivent entraîner aucune discrimination entre des produits “similaires”. Le principe de la non-discrimination soulève donc deux questions fondamentales: les produits considérés sont-ils des produits “similaires” et, dans l'affirmative, le produit étranger est-il soumis à un traitement moins favorable que celui accordé au produit national ou à un autre produit étranger?

En ce qui concerne par exemple la protection de la santé publique, dans l'affaire CE — Amiante, qui portait sur des mesures (d'interdiction d'importer, de vendre et d'utiliser de l'amiante) visant à prévenir les risques que présentait pour la santé humaine l'exposition à l'amiante et aux produits contenant de l'amiante, le Canada — le plaignant — devait prouver que les produits (contenant de l'amiante) importés du Canada vers la France étaient similaires aux substituts nationaux français (fibres d'APV, de cellulose et de verre) et que la réglementation française accordait aux produits importés un “traitement moins favorable” que celui qui était accordé aux produits nationaux similaires.

De fait, le Groupe spécial chargé de cette affaire a constaté que les produits nationaux et les produits importés étaient “similaires”. Toutefois, l'Organe d'appel a infirmé cette constatation et expliqué que le Groupe spécial aurait dû tenir compte de plusieurs critères pour déterminer la similarité des produits, y compris le rapport compétitif entre les produits, mais aussi la “dangerosité” que les deux produits présentaient pour la santé, compte tenu de leurs caractéristiques physiques différentes.

Lorsqu'il est constaté que deux produits sont “similaires”, il reste à déterminer si les produits importés sont soumis à un traitement moins favorable que celui accordé aux produits nationaux. Dans l'affaire États-Unis — Essence, par exemple, le Groupe spécial a établi qu'une mesure prise par les États-Unis pour réglementer la composition de l'essence et les effets de ses émissions de manière à réduire la pollution atmosphérique sur leur territoire violait l'article III du GATT: elle avait pour effet d'empêcher que l'essence importée bénéficie de conditions de vente aussi favorables que l'essence nationale; le Groupe spécial a donc constaté que l'essence importée était soumise à un traitement moins favorable que celui accordé à l'essence nationale.

Une question connexe: celle des procédés et méthodes de production (PMP)

Une question importante liée aux mesures environnementales est celle de savoir si des produits peuvent être soumis à un traitement différent en fonction de la manière dont ils ont été produits, même si la méthode de production utilisée ne laisse pas de traces dans le produit final, c'est-à-dire même si les caractéristiques physiques du produit final demeurent identiques (c'est ce que l'on appelle les procédés et méthodes de production non liés aux produits).

Aux fins de la comparaison de deux produits, le fait que des procédés ou méthodes de production (PMP) différents soient employés pour leur fabrication n'en fait pas en soi des produits non “similaires”.

Des gouvernements pourraient par exemple vouloir opérer une discrimination entre des produits du bois provenant d'une forêt exploitée selon des méthodes durables et du bois dont la méthode de production est inconnue. En pareil cas, il pourrait être particulièrement délicat de déterminer si les deux types de bois sont similaires. C'est pourquoi, la similarité de deux produits doit être analysée au cas par cas, comme l'Organe d'appel l'a fait observer dans l'affaire CE — Amiante.

Bien qu'il ne soulève pas de telles questions dans le cadre des articles I ou III du GATT (la mesure en cause était une interdiction d'importer jugée incompatible avec l'article XI), le différend États-Unis — Crevettes offre un exemple intéressant d'une discrimination entre produits justifiables sur la base des PMP. Le différend portait sur la manière dont étaient pêchées les crevettes. Certaines méthodes de production, à l'aide de filets de pêche et de chalutiers crevettiers, entraînaient un taux élevé de tortues marines tuées accidentellement, les tortues risquant d'être piégées dans les filets utilisés pour pêcher les crevettes et de se noyer. Les États-Unis entendaient lutter contre le massacre des tortues en interdisant l'importation des crevettes pêchées selon des méthodes pouvant entraîner la mort accidentelle de tortues marines. Pour éviter l'interdiction, les exportateurs devaient prouver l'utilisation d'un DET (dispositif limitant la prise accidentelle des tortues marines menacées) ou de matériel similaire lors de la pêche à la crevette. L'Organe d'appel a considéré que la mesure prise par les États-Unis était directement liée à la politique de conservation des tortues marines. La mesure a donc été considérée comme provisoirement justifiée au titre de l'article XX g).

 

La prohibition des restrictions quantitatives

Certaines mesures environnementales (telles que les interdictions) peuvent aussi violer la deuxième grande discipline du GATT, énoncée à l'article XI, qui dispose, entre autres, que les restrictions à l'importation ou à la vente de produits originaires du territoire d'autres Membres de l'OMC sont prohibées. Dans l'affaire États-Unis — Crevettes, il a été constaté que l'embargo appliqué par les États-Unis était incompatible avec l'article XI: les États-Unis avaient interdit l'importation de crevettes originaires de pays non certifiés, c'est-à-dire des pays n'utilisant pas la technologie désignée sous le nom de DET.

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> Exceptions prévues dans le GATT
> Autres dispositions pertinentes de l'OMC
> Différends relatifs à l'environnement

Critères permettant de déterminer la similarité des produits

Dans la jurisprudence de l'OMC, quatre critères ont été utilisés pour déterminer si des produits étaient “similaires”:

i) les propriétés physiques des produits;

ii) la mesure dans laquelle ils peuvent avoir les mêmes utilisations finales ou des utilisations finales semblables;

iii) la mesure dans laquelle les consommateurs les perçoivent et les considèrent comme d'autres moyens de remplir des fonctions particulières pour satisfaire à un désir ou à une demande spécifique; et

iv) leur classification internationale à des fins tarifaires.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Qu'est-ce qu'un DET?

Un DET (dispositif d'exclusion des tortues marines) est une trappe installée à l'intérieur d'un chalut qui permet le passage des crevettes vers le fond du filet, tout en évacuant vers l'extérieur les tortues marines et d'autres objets de grande dimension involontairement pris.