DIRECTEUR GÉNÉRAL ADJOINT ALAN WM. WOLFF

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Cela fait 100 ans que la Conférence de Paix de Paris de 1919 a eu lieu, et ses effets se font encore sentir aujourd'hui. Les décisions et les mesures prises ou écartées à l'époque ont façonné le monde tel que nous le connaissons. Grâce aux enseignements tirés à Versailles, nous pouvons relever les défis auxquels nous devons maintenant faire face, comme la nécessité non seulement de rendre le multilatéralisme pertinent, mais aussi de le développer et de le renforcer pour le XXIe siècle. Ceux d'entre nous qui travaillent à Genève, où siège l'Organisation mondiale du commerce, en ressentent toute l'urgence. L'OMC se félicite d'être un partenaire institutionnel du Forum de Paris sur la paix pour témoigner du lien entre le commerce et la paix. J'apprécie tout particulièrement l'accent qui a été mis cette année sur le commerce par le Forum (grâce à Pascal Lamy), car “le commerce au service de la paix” est à nouveau au cœur des débats à Genève, et la guerre commerciale et les tensions exacerbées font les gros titres des journaux.

On risquerait de reproduire les erreurs du passé si l'on oubliait dans quelle mesure la paix et la prospérité, fondements du bien-être de l'humanité, reposent sur des liens économiques forts entre les nations. On reproche souvent aux artisans de la paix de 1919 d'avoir fait le lit des ambitions nationalistes de certaines nations européennes, qui ont finalement entraîné la Seconde Guerre mondiale.(1)  Au lendemain de la Grande guerre, les vainqueurs se sont réunis autour d'un programme en 14 points élaboré par le Président des États-Unis, Woodrow Wilson, pour rétablir la paix et la prospérité mondiales, dont le troisième point appelait à:        

“III. [la] suppression, dans toute la mesure du possible, des barrières économiques et [à l']établissement de conditions commerciales égales entre toutes les nations consentant à la paix et s'associant en vue de son maintien”.

Les points du Président Wilson ne se sont pas traduits en actions mais ils ont fait germer des idées dans l'esprit d'un jeune économiste, John Maynard Keynes, qui conseillait les Britanniques lors de la Conférence. Dans son ouvrage intitulé Les conséquences économiques de la paix, publié en 1919, Keynes avertissait que le traité de Versailles créait une paix carthaginoise visant à écraser les Puissances centrales vaincues, en particulier l'Allemagne. L'approche de Wilson a également marqué son Secrétaire adjoint à la Marine, Franklin Roosevelt. Quelques années plus tard, en 1941, Roosevelt, devenu Président, rencontrait le Premier Ministre britannique Winston Churchill dans la baie d'Argentia, où ils définirent ensemble six objectifs pour l'après-guerre, dont l'un prévoyait que les États-Unis et le Royaume-Uni

s'efforceraient, tout en respectant comme il se devait leurs obligations existantes, d'assurer, sur un pied d'égalité, à tous les États, grands et petits, vainqueurs ou vaincus, l'accès et la participation, dans le monde entier, au commerce et aux matières premières indispensables à leur prospérité économique.

En 1944, à la tête de la délégation britannique, Keynes a assisté à la Conférence de Bretton Woods où les enseignements tirés de la Conférence de Paris ont jeté les bases de l'ordre économique international dont nous bénéficions encore aujourd'hui — en particulier le système commercial multilatéral.

L'Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT) a été créé en 1947 pour augmenter les chances d'instaurer la paix en Europe après la Seconde Guerre mondiale. Les liens étroits entre le commerce et la paix ont été reconnus dans les premiers mots de la Charte de La Havane de 1948 instituant une Organisation internationale du commerce:

“Reconnaissant que les Nations Unies sont résolues à créer les conditions de stabilité et de bien-être qui sont nécessaires pour assurer des relations pacifiques et amicales entres les nations, ….”

Le commerce au service de la paix grâce aux accessions à l'OMC

Le GATT est devenu l'OMC en 1995, pendant une époque pacifique qui a fait suite à la Guerre froide. La paix a conduit les Membres à oublier la raison d'être du système, ou à la tenir pour acquise, car leur nombre est passé de 23 en 1947 à 164 aujourd'hui. Toutefois, la vision selon laquelle là où il existe des échanges commerciaux, il y a plus de probabilités de vivre en paix, est très largement partagée aujourd'hui par les pays qui ont tout récemment accédé à l'OMC (le Libéria et l'Afghanistan, en 2015) et par ceux qui s'emploient activement à en faire partie. Actuellement, 22 pays ont engagé le processus d'accession. Treize d'entre eux sont fragiles et touchés par des conflits, comme les pays de la Corne de l'Afrique (Éthiopie, Somalie, Soudan du Sud, Soudan) et du Moyen-Orient (Algérie, Iraq, Liban, Libye, Syrie). Le processus d'accession est la preuve la plus éloquente de la viabilité et de l'importance de l'OMC.

Dans la Corne de l'Afrique, un certain nombre de pays s'efforcent de mettre le commerce au service de la paix grâce à l'accession à l'OMC. Cette partie du monde est depuis longtemps en proie à des guerres récurrentes, à des conflits nationaux, à des catastrophes naturelles et à la pauvreté qui en découle, ce qui l'a empêchée de concrétiser ses possibilités en matière de commerce et d'investissement. Toutefois, le discours est en train de changer radicalement, en particulier depuis la signature d'un accord de paix entre l'Éthiopie et l'Érythrée en juillet de l'année dernière. Désormais, le principe selon lequel “là où il y a du commerce, il y a de la paix” s'applique dans toute la région.

L'attribution du Prix Nobel de la paix au Premier Ministre éthiopien Abiy Ahmed en 2019 en est une puissante illustration. Ce dernier mène des réformes économiques intérieures, soutenues notamment par le processus d'accession à l'OMC, et il conduit des initiatives en faveur de l'intégration économique régionale afin d'ouvrir la voie à la paix et à la prospérité non seulement en Éthiopie, mais aussi plus largement dans la région de la Corne de l'Afrique — l'une des régions du monde qui a connu le plus de conflits au cours de son histoire, et qui compte parmi les plus stratégiques. Cette idée de mettre le commerce au service de la paix a également été reprise par l'un des voisins immédiats de l'Éthiopie, à savoir le Soudan. Le gouvernement de transition dirigé par le Premier Ministre Abdalla Hamdok, en place depuis août dernier, a également fait de l'intégration économique une priorité pour mettre fin à la guerre et aux conflits qui marquent son pays et la région depuis des dizaines d'années. Ces dirigeants ont compris que la libéralisation des échanges entre les pays de la Corne de l'Afrique pouvait aider à mettre les ressources disponibles non plus au service de la guerre et des conflits, mais plutôt au service du développement de relations commerciales fondées sur la confiance.

L'avenir des règles commerciales: la réforme de l'OMC

Permettez-moi maintenant d'aborder la question de l'avenir des règles commerciales, qui est l'objet principal de cette séance.

Remonter aux origines du système commercial multilatéral nous oblige à synthétiser son histoire, qui semble suivre une progression linéaire, alors qu'elle est autrement plus complexe. Comme je l'ai dit précédemment, tout a commencé avec le postulat wilsonien selon lequel le commerce équitable serait le fondement de la paix mondiale. Ce principe a été accepté par tous, mais personne ne l'a appliqué. La création du système commercial multilatéral a été précédée par un projet de création d'une Organisation internationale du commerce. L'OIC n'a toutefois jamais vu le jour. À la place, un contrat commercial international a été conclu entre une petite dizaine de pays, dans un premier temps: l'Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT), doté d'un secrétariat informel, a ainsi été fondé et installé dans trois villas situées sur les terrains de l'ONU, à Genève. Son existence était un tant soit peu précaire.

Il a fallu attendre encore une génération pour voir apparaître l'Organisation mondiale du commerce. Ceux qui étaient présent lors de sa création affirment que l'OMC n'est pas le résultat de nombreuses années de planification et de négociations. L'idée n'est apparue que vers la fin du dernier grand cycle de négociations commerciales, le Cycle d'Uruguay (1986-1993). Les motivations premières semblent avoir été doubles: d'une part, rendre les obligations commerciales contraignantes (d'où la création de la procédure de groupe spécial, qui ne peut être bloquée, et de l'Organe d'appel, pour remédier aux éventuelles erreurs flagrantes des groupes spéciaux dans leurs déterminations) et, d'autre part, donner un cadre aux accords relatifs aux services et à la propriété intellectuelle, pour lesquels le GATT — axé sur les marchandises et les droits de douane — ne semblait pas être l'instance appropriée.

Vingt-cinq années se sont maintenant écoulées; non seulement une nouvelle génération de leaders mondiaux et de négociateurs commerciaux a pris la relève, mais le paysage commercial mondial a aussi changé.

Dans ce contexte, certains principes fondateurs établis en 1947 sont souvent considérés comme des exceptions plutôt que comme des règles. La non-discrimination, c'est-à-dire le fait que les mesures commerciales s'appliquent en principe à tous au titre des obligations découlant du traitement de la nation la plus favorisée et du traitement national, semble de plus en plus subordonnée aux arrangements bilatéraux et régionaux. Les niveaux tarifaires consolidés de façon contractuelle sont souvent ignorés ou considérés comme non pertinents car ils sont très différents des taux réellement appliqués. Les subventions internes créent davantage d'effets de distorsion des échanges que les subventions soumises aux disciplines strictes.(2) La réglementation du commerce au nom de la sécurité nationale est de moins en moins rare. Les dispositions du GATT relatives aux pratiques en matière de taux de change, qui peuvent facilement éclipser les engagements tarifaires, étaient et sont restées caduques.

Cela étant dit, des efforts héroïques sont déployés pour mettre en place des règles sur l'économie numérique, définir des disciplines concernant les subventions à la pêche, et envisager activement la prorogation du moratoire sur les droits de douane sur les transmissions électroniques et de la dérogation concernant la non-violation dans le cadre de l'Accord sur les ADPIC, entre autres initiatives. D'importants efforts sont faits pour rétablir la légitimité et l'efficacité du système de règlement des différends de l'OMC. Sur bien d'autres aspects toutefois, le système commercial multilatéral existant ne fait l'objet d'aucun examen. Les défis d'aujourd'hui occultent en grande partie la nécessité de prêter davantage attention au système tel qu'il existe aujourd'hui et aux moyens éventuels de l'améliorer.

Il n'y a pas de solution qui pourrait être rapidement mise en œuvre à la prochaine Conférence ministérielle, à Nour-Soultan, pour résoudre de nombreuses questions d'organisation touchant l'OMC. Des questions plus larges nécessitent des enquêtes et une réflexion. Il n'est pas déraisonnable de fixer 2025 comme échéance pour passer à l'OMC 2.0 — objectif à adopter lors de la CM15.

Un certain nombre de questions se posent d'elles-mêmes dans le contexte d'un programme fixé dans un forum en faveur de la paix, comme celui dans lequel nous nous rencontrons aujourd'hui:

  • Le temps est-il venu d'élaborer une nouvelle charte du système commercial multilatéral:
    • dans laquelle les parties réaffirment en premier lieu leur engagement en faveur de la poursuite d'idéaux et d'objectifs communs;
    • qui repose sur la participation, basée sur une contribution positive nette de tous les Membres, sans exception, au service du bien commun;
    • qui reconnaît le droit de toutes les nations à participer au commerce sur un pied d'égalité (comme l'avaient prévu Churchill et Roosevelt dans la baie d'Argentia en 1941);
    • qui établit de nouveau, de manière explicite, les liens inextricables qui existent entre la cause de la paix et celle des marchés libres, comme cela avait été fait en 1947 dans la première phrase de la Charte de la Havane instituant une Organisation internationale du commerce;
    • qui évoque l'engagement de tous à faire en sorte que les forces du marché déterminent les résultats en matière de compétitivité;
    • dans laquelle les parties renouvellent leur engagement à appliquer les trois premiers articles de l'Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce, concernant:
      • la non-discrimination à l'égard des importations provenant d'autres pays Membres;
      • les engagements contractuels en faveur de faibles droits de douane et de leur diminution progressive;
      • le traitement national accordé aux importations;
    • dans laquelle l'objectif affirmé de l'OMC est la participation universelle;
    • dans laquelle les obligations ont pleinement force exécutoire, comme cela avait été prévu à la création de l'OMC;
    • qui prévoit de remédier aux activités commerciales ayant des répercussions sur l'environnement (par exemple la présence de matières plastiques dans les océans) en tenant compte des objectifs environnementaux;
    • qui prévoit que toutes les parties adhèrent à l'Accord sur les marchés publics et l'appliquent pleinement, notamment pour lutter contre le fléau de la corruption;
    • qui encourage le développement durable dans toutes les activités et de manière bien plus efficace, directement dans le cadre de formations, et indirectement en étroite coordination avec d'autres organisations internationales;
    • qui prévoit que tous les Membres acceptent un même niveau d'obligations, sauf s'il est avéré que leurs capacités sont limitées;
    • qui prévoit que les pays touchés par des conflits, dont beaucoup sont candidats à l'accession à l'OMC, puissent bénéficier plus rapidement des avantages du système grâce à l'adoption d'un protocole général d'accession provisoire pour les pays touchés par des conflits et les économies fragiles, établi sur la base du principe de l'effort maximal par les Membres existants, qui s'engageront à appliquer, dans la mesure du possible, les dispositions des Accords de l'OMC à ces pays (contrairement à aujourd'hui, où le traitement qui leur est réservé est ad hoc et incohérent);
    • qui prévoit, à des fins de transparence:
      • que toute instruction ayant une incidence importante sur le commerce, émise par les pouvoirs publics d'un Membre à l'intention d'un de ses organismes gouvernementaux, soit communiquée au Secrétariat de l'OMC, qui sera chargé de la transmettre à tous les Membres, et publiée;
      • que le Secrétariat de l'OMC recueille et publie toutes les informations possibles pour faciliter le commerce (sur la base d'un abonnement, dont l'accès serait réservé aux pays qui contribuent pleinement à alimenter l''ensemble de données);
      • que la propriété, le contrôle ou l'influence par l'État d'une entité qui participe au commerce international ne soit pas pour autant moins transparente qu'une entité entièrement privée;
    • qui établisse une nouvelle structure de gouvernance telle que:
      • le système de règlement des différends soit amené à rendre compte efficacement aux Membres de l'OMC, et que les jugements individuels demeurent indépendants;
      • les Membres adoptent un système de gouvernance (gestion) de leurs fonctions qui soit viable et efficace, en prenant l'exemple de l'organisation de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international, et en reconnaissant que, dans son format actuel, un Comité plénier composé de tous les Membres de l'OMC ne peut pas assumer les responsabilités qui lui incombent en vertu de la nouvelle charte;
      • en sus de leurs prérogatives existantes, les Membres chargent le Secrétariat:
        • de proposer des thèmes de négociation;
        • de vérifier et de garantir le respect des obligations existantes;
        • de fournir les analyses pertinentes;
        • de formuler des recommandations pour faire en sorte que l'examen des politiques commerciales soit davantage susceptible d'avoir des effets positifs sur les politiques et mesures des Membres concernés, en particulier en ce qui concerne les grandes économies; et
        • de formuler des recommandations concernant des mesures visant à promouvoir les objectifs de la nouvelle charte de l'OMC.
      • qui prévoit que les accords commerciaux bilatéraux et régionaux soient examinés afin de déterminer s'ils ont plutôt tendance à créer des échanges que des effets de distorsion(3);
        • qui fasse en sorte que les distorsions des échanges causées par les préférences et autres mesures discriminatoires soient réduites au minimum, si elles devaient être autorisées; et
        • qui veille à ce que les accords sous-multilatéraux aient pour objectifs:
        • d'assurer une plus grande intégration économique fondée sur la proximité géographique; et
        • de montrer la marche à suivre pour progresser sur des questions spécifiques en proposant des modèles d'amélioration du système commercial multilatéral.

Conclusion

Seuls les Membres peuvent présenter des propositions pour examen. La liste ci-dessus, reprenant des éléments issus de divers échanges de vues informels entre les Membres, a été établie uniquement afin de susciter le débat à l'occasion de la présente conférence, dans le cadre de notre table ronde consacrée à l'avenir des règles commerciales.

Avant de terminer, j'aimerais m'arrêter un instant non pas sur les objectifs de la future réforme des règles du système commercial multilatéral, mais sur les besoins immédiats de ce système géré par l'Organisation mondiale du commerce. Les impératifs à court terme peuvent être regroupés en deux catégories: d'une part, la possibilité, pour les Membres de l'OMC, de conclure de nouveaux accords commerciaux ayant force exécutoire (y compris les disciplines nécessaires concernant les subventions à la pêche et le commerce électronique) et, d'autre part, la nécessité de restaurer le système de règlement des différends de l'OMC, qui perdra sa fonction d'organe d'appel pour toute nouvelle question dans moins d'un mois. D'importants efforts sont déployés pour progresser sur ces deux fronts. S'il s'avère impossible de conclure de nouveaux accords, ou si l'on ne peut plus compter sur l'application des Accords existants de l'OMC, le rôle de l'Organisation dans le commerce international s'affaiblira, ce qui pourrait être lourd de conséquences pour tous.

Il existe une corrélation avérée entre la paix et l'ouverture commerciale. Le commerce ne garantit pas la paix, mais il constitue un fondement essentiel de la stabilité économique, laquelle favorise la paix. De même, des relations pacifiques favorisent l'expansion du commerce.

Que se passe-t-il si l'on ne peut plus faire appel d'un rapport de groupe spécial chargé du règlement des différends? Plusieurs possibilités se dessinent: une situation apocalyptique, l'ouverture d'hostilités commerciales plus ou moins importantes, divers degrés de dystopie ou un recours au pragmatisme. Le scénario apocalyptique pourrait se produire si chaque partie ayant gain de cause devant un groupe spécial est contrariée lorsque la partie perdante, au lieu de se conformer aux conclusions du groupe spécial, décide de faire appel de la décision, alors que cette procédure est impossible, pour tenter de bloquer l'adoption du rapport du groupe spécial. Si cela se produit et que la partie gagnante décide d'appliquer des mesures de rétorsion, la partie perdante pourrait prendre des mesures de contre-rétorsion.

Toutefois, le scénario apocalyptique (ou chaos total), ou même une grave dystopie, ne sont pas les situations les plus probables pour la période dans laquelle nous entrerons très bientôt, lorsqu'il n'y aura plus d'Organe d'appel pour examiner les nouvelles décisions des groupes spéciaux. En revanche, il y aura sans doute une période de recours à diverses approches pragmatiques. Il existe déjà un certain nombre d'exemples de mesures visant à corriger le système existant: ainsi, deux Membres sont déjà convenus qu'en l'absence d'Organe d'appel fonctionnel pour leur affaire en instance, ils considéreront la décision du groupe spécial comme étant la résolution définitive de leur différend. D'autres Membres ont conclu des accords visant à reproduire le système d'appel existant pour tout futur différend les opposant tant que l'on ne sera pas sorti de l'impasse concernant la désignation des membres de l'Organe d'appel.

Les arrangements ad hoc ne sauraient constituer un bon substitut pour un système d'appel fonctionnel, qui soit en mesure de garantir une plus grande cohérence dans l'interprétation des accords et de remédier aux éventuelles erreurs flagrantes commises par un groupe spécial (bien que cela soit assez rare). Afin de maintenir des relations harmonieuses entre les pays commerçants, il est indispensable de disposer d'un système unique de règlement des différends, comme cela avait été prévu lors de la création de l'OMC en 1995, avec la mise en place d'un système de règlement des différends à deux niveaux, composé de groupes spéciaux et d'un mécanisme d'appel.

L'une des particularités de l'OMC est que ses accords ont force exécutoire. Tout doit être fait pour que cela reste le cas. Si tout système juridique dépend en première instance du respect volontaire des lois, l'existence d'un mécanisme de soutien permettant de maintenir la paix est un moyen efficace de régler les différends lorsqu'ils surviennent. Si le scénario apocalyptique est peu probable, il n'en demeure pas moins qu'une dégradation de la primauté du droit ou, dans le cas des accords commerciaux internationaux, l'application des obligations découlant des accords sur le commerce, conduiraient inévitablement à un recul de la croissance du commerce international sur lequel repose le bien-être économique de l'ensemble de la planète.

Avant d'envisager l'avenir, nous devons relever les défis d'aujourd'hui. À défaut, nous prendrions des risques inacceptables.

Notes

  1. Margaret Macmillan & Richard Holbrooke, ‘Paris 1919: Six Months That Changed the World’ . Retour au texte
  2. L'article XV de l'AGCS donne pour mandat aux Membres d'engager des négociations sur les subventions en rapport avec les services. 1. Les Membres reconnaissent que, dans certaines circonstances, les subventions peuvent avoir des effets de distorsion sur le commerce des services. Les Membres engageront des négociations en vue d'élaborer les disciplines multilatérales nécessaires pour éviter ces effets de distorsion. Retour au texte
  3. Dans la version 2.0 du Mécanisme pour la transparence des accords commerciaux régionaux (ACR) (qui n'est appliqué qu'à titre conservatoire), il n'est question que de “prise en considération” et non d'“examen”. Retour au texte

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