DIRECTRICE GÉNÉRALE ADJOINTE ANGELA ELLARD

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Chers parlementaires,
Mesdames et Messieurs,
Bonjour,

Je vous remercie pour l'invitation M. le Président Lange.

Lors de ma vie d'avant, j'ai occupé pendant 25 ans le poste de Conseillère commerciale principale au sein d'une assemblée législative.  J'ai donc énormément d'admiration et de respect pour le travail que vous accomplissez. Compte tenu du lien essentiel que les parlements assurent entre les institutions internationales et le grand public, votre engagement sur les questions de l'OMC est vital pour que nos travaux soient efficaces, concrets et significatifs.

C'est un plaisir et un honneur de m'adresser à vous aujourd'hui pour vous parler de l'état d'avancement des négociations à l'OMC alors que nous nous préparons pour la 13ème Conférence ministérielle, qui se tiendra à Abou Dhabi en février prochain.

L'an dernier, je m'étais livrée à un exercice similaire en faisant le point sur nos travaux à l'approche de la 12ème Conférence ministérielle (CM12).  Il s'est passé beaucoup de choses depuis.  Malgré un climat géopolitique difficile et des pronostics pessimistes avant la CM12, la conférence a été un véritable succès et a permis d'obtenir six résultats importants, y compris un Accord contraignant sur les subventions à la pêche, une décision ministérielle visant à réduire les obstacles à l'utilisation des licences obligatoires pour les vaccins contre la COVID, une prorogation du moratoire sur le recouvrement des droits de douane sur le commerce électronique, des décisions et des déclarations sur des sujets tels que la sécurité alimentaire et les instruments commerciaux permettant de faire face aux pandémies et des positions convenues s'agissant des prochaines étapes de la réforme du système de règlement des différends.

Dans une large mesure, les progrès accomplis à la CM12 sont le moteur de notre programme de négociation actuel alors que les Membres de l'OMC s'efforcent de mettre en œuvre ces résultats et de les compléter.  La CM13 constituera un test décisif pour l'engagement des Membres à revitaliser et redynamiser l'OMC afin de faire en sorte qu'au lieu d'être une exception, le succès de la CM12 fasse partie de notre ADN.

Permettez-moi de vous parler plus en détail des quelques axes de travail sur lesquels les Membres de l'OMC se penchent à l'heure actuelle.

L'une des grandes réalisations de la CM12 a été la conclusion de l'Accord sur les subventions à la pêche, qui est contraignant et qui est le premier Accord de l'OMC à être centré sur la durabilité environnementale. L'Accord interdit les subventions à la pêche illicite, non déclarée et non réglementée - ou pêche INN - ainsi que les subventions à la pêche visant les stocks surexploités et les subventions à la pêche en haute mer non réglementée.

Mais l'adoption de l'Accord n'a pas mis fin aux travaux de l'OMC sur la pêche. Bien au contraire, maintenant que l'Accord est conclu, les Membres de l'OMC sont engagés dans deux processus parallèles pour faire avancer les travaux.

Le premier consiste à accepter le nouvel Accord.  Pour que ses avantages bénéficient aux océans, l'Accord doit entrer en vigueur, ce qui nécessite que les deux tiers des Membres déposent leurs instruments d'acceptation auprès de l'OMC.  Quatre Membres de l'OMC — la Suisse, Singapour, les Seychelles et les États-Unis — ont déjà achevé leurs procédures internes et présenté leurs instruments d'acceptation. De nombreux autres Membres sont bien avancés dans leurs processus d'acceptation.  Je remercie en particulier le Parlement européen pour le vote massif en faveur de l'Accord qui a eu lieu la semaine dernière.  Nous attendons avec intérêt de recevoir l'instrument d'acceptation de l'UE une fois que les procédures du Conseil auront été menées à terme.

Je souhaite lancer un appel à l'intention des parlementaires de tous les Membres de l'OMC qui exigent une ratification par leur parlement: dites “oui” à cet accord pour qu'il puisse au plus vite commencer à porter ses fruits pour la durabilité des océans.  C'est clairement à nous qu'il appartient de traduire cet accord en actions significatives.  Même si une approbation par le Parlement n'est pas exigée dans le cadre de votre système, je vous encourage à exhorter vos autorités compétentes à prendre rapidement des mesures pour le bien des poissons et de ceux qui dépendent de la pêche pour leurs moyens de subsistance.

Le deuxième axe des travaux en cours sur la pêche consiste à poursuivre les négociations en vue de régler les questions en suspens qui n'ont pas pu faire l'objet d'un accord à la CM12, notamment l'établissement de disciplines pour les subventions contribuant à la surcapacité et à la surpêche ainsi que le traitement spécial et différencié approprié et effectif en faveur des pays en développement et des pays les moins avancés Membres.  Les délégations à Genève travaillent déjà activement sur cette deuxième vague de négociations.  En réalité, au moment même où je vous parle, se tient à Genève une semaine de négociations sur la pêche mobilisant beaucoup d'énergie et de détermination en vue de conclure la deuxième vague de négociations d'ici à la CM13.

Un dernier point, mais non moins important, concerne la façon dont l'OMC aidera les pays en développement et les pays les moins avancés Membres à mettre en œuvre les nouvelles disciplines.  À cet égard, l'Accord prévoit l'établissement d'un mécanisme de financement spécifique pour aider ces Membres dans le cadre de la mise en œuvre, une fois qu'ils auront ratifié formellement l'Accord. Le Fonds est en place et il fonctionne et nous avons déjà commencé à recevoir des dons, tout d'abord ceux du Japon et du Canada, auxquels viendront s'ajouter ceux de plusieurs pays européens.  Ces actions démontrent aux pays en développement et aux pays les moins avancés Membres qu'ils recevront l'aide dont ils ont besoin pour la mise en œuvre de l'Accord: nous ne les laisserons pas sur le bord de la route. 

Un autre domaine de travail important est celui de la réforme de l'OMC.  À la CM12, les Membres de l’OMC se sont engagés à réformer l'Organisation dans l'ensemble de ses trois fonctions — négociation, surveillance et règlement des différends.

S'agissant du règlement des différends, les Ministres ont fixé une date butoir, l'objectif étant de disposer d'“un système de règlement des différends pleinement opérationnel et qui fonctionne bien, accessible à tous les Membres, pour 2024.”  Une réforme dans ce domaine est essentielle parce que la crédibilité de l'ordre commercial international fondé sur des règles dépend de la possibilité de faire respecter ces règles.

Le processus informel mené par les États-Unis au sujet de la réforme du règlement des différends qui a démarré l'été dernier a cédé la place à un processus mené par un facilitateur.  Les Membres participent très activement à ces discussions qui portent sur un large éventail de questions.  La prochaine étape consiste à passer à des propositions fondées sur des textes concernant des réformes spécifiques.

Entre-temps, l'activité de règlement des différends à l'OMC ne s'est pas arrêtée.  Les Membres continuent d'engager de nouveaux différends et 18 procédures de groupe spécial sont actuellement en cours.

Une autre question que nos Membres devront traiter à la CM13 est celle de la prorogation du moratoire multilatéral sur la perception de droits de douane sur les transmissions électroniques transfrontières.

Le principal point de désaccord entre ceux qui soutiennent la prorogation du moratoire et ceux qui s'y opposent concerne sa portée et ses éventuels effets économiques. Certains pays en développement estiment que le moratoire les empêche de recouvrer des recettes douanières.  Au contraire, les pays développés et de nombreux pays en développement avancent que toute augmentation des recettes tarifaires serait annulée par les conséquences économiques négatives que les pays ressentiraient sous la forme d'une hausse des prix et d'une baisse de la consommation, qui entraîneraient un ralentissement de la croissance du PIB et une contraction des recettes fiscales.

Les discussions se poursuivront dans les prochains mois afin de rapprocher ces deux positions.

À la CM12, les Ministres sont également convenus de redynamiser les travaux au titre du programme de travail sur le commerce électronique, un cadre établi de longue date pour faciliter les discussions des Membres sur toutes les questions liées au commerce qui concernent le commerce électronique mondial. Les questions liées au développement occupent une large place dans ces travaux.  Par exemple, les Membres examinent la question de la fracture numérique du point de vue des infrastructures numériques, de la connectivité, de l'accessibilité financière et du renforcement des capacités.

Exception faite de la réponse urgente à l'insécurité alimentaire, la réforme de l'agriculture est l'un des domaines dans lesquels aucun résultat n'a été obtenu à la CM12. De nombreux Membres ont dit qu'ils étaient disposés à actualiser les règles du commerce mondial des produits alimentaires et agricoles.  Mais les vues des Membres divergent sur la nature des changements qui seraient requis.  La transformation de cet objectif commun en action concrète sera l'un des principaux défis des négociations à venir.  La sécurité alimentaire est en train de devenir un élément essentiel des négociations en cours compte tenu de la situation difficile dans de nombreuses régions du monde et nous espérons qu'un résultat sur cette question pourra être obtenu à la CM13.

Des efforts visant à mettre à jour les règles de l'OMC sont également déployés dans le cadre d'initiatives conjointes, parmi des groupes de Membres, ou “coalitions de volontaires”.   Les négociateurs adoptent une approche plurilatérale car l'ampleur et l'étendue de la portée qu'ils visent se sont avérées difficile à atteindre au niveau multilatéral; cependant, les participants espèrent que tous les Membres finiront par se joindre au processus.

Trois initiatives conjointes sont menées à l'OMC en vue d'élaborer de nouvelles disciplines concernant les services, le commerce numérique et l'investissement.  Tout d'abord, en 2021, 70 Membres de l'OMC représentant 92,5% des échanges mondiaux de services ont conclu des négociations sur la réglementation intérieure dans le domaine des services, et ils mettent actuellement en œuvre cet accord. Deuxièmement, 88 Membres de l'OMC, y compris de nombreux pays en développement et quelques PMA, participent à l'initiative sur le commerce électronique qui vise à élaborer des règles de base régissant l'économie numérique mondiale.  Les participants entendent conclure l'essentiel de ces négociations d'ici à la fin de l'année.  Troisièmement, plus des deux tiers des Membres de l'OMC travaillent sans relâche pour parvenir à un accord sur la facilitation de l'investissement pour le développement qui permettrait aux Membres, en particulier aux pays en développement Membres, d'améliorer le climat de l'investissement sur leur territoire et d'attirer, de retenir et d'accroître l'investissement étranger direct.  Nous pourrions parvenir assez rapidement à un accord, étant donné que les Membres participants entendent conclure les négociations sur le texte à la mi-2023.

En outre, les Membres de l'OMC reconnaissent de plus en plus que le commerce est une composante essentielle de la durabilité environnementale et de la lutte contre le changement climatique.  Pour aller dans ce sens, bon nombre de nos Membres participent à trois initiatives environnementales importantes qui visent à donner à l'environnement une place centrale dans les discussions commerciales. Il s'agit: i) des discussions structurées sur le commerce et la durabilité environnementale (74 Membres); ii) du dialogue sur la pollution par les plastiques (76 Membres); et iii) de l'initiative sur la réforme des subventions aux combustibles fossiles (48 Membres). 

Nous avons également entendu dire que certains souhaitaient relancer les négociations sur un accord sur les biens environnementaux.  D'après les recherches que nous avons menées, l'élimination des droits de douane et la réduction des obstacles non tarifaires pourraient entraîner une hausse de 5% des exportations de ce type de biens d'ici à 2030 ainsi qu'une réduction des émissions mondiales de 0,6%. Cela permettrait de contribuer d'une manière substantielle à limiter le réchauffement climatique.

Chers parlementaires,

À l'OMC, nous attendons avec intérêt de renforcer encore nos relations avec les parlements et les parlementaires dans le monde entier. Dans l'immédiat, nous avons besoin de votre aide pour faire entrer en vigueur l'Accord sur les subventions à la pêche pour qu'il puisse commencer à produire des résultats.  Nous devons en outre faire progresser les autres domaines de travail que je viens de présenter.  

Je vous demande donc de poursuivre les discussions avec vos gouvernements respectifs et les législateurs d'autres pays, pour nous aider à accomplir notre mission essentielle.

Je vous remercie et me réjouis à l'idée d'échanger sur ces sujets avec vous.

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