DIXIÈME CONFÉRENCE CONFÉRENCE MINISTÉRIELLE DE L'OMC, NAIROBI 2015

Déclaration Ministérielle de Nairobi

Adoptée le 19 décembre 2015 : WT/MIN(15)/DEC

PARTIE I

Préambule

    1. Nous, les Ministres, nous sommes réunis à Nairobi (Kenya) du 15 au 18 décembre 2015 à l'occasion de notre dixième session. Alors que cette session s'achève, nous souhaitons exprimer notre profonde reconnaissance au gouvernement et au peuple kényans pour l'excellente organisation de la Conférence et pour l'accueil chaleureux que nous avons reçu à Nairobi.

    2. Nous notons que notre dixième session se tient alors que nous célébrons le vingtième anniversaire de la création de l'OMC. À cette occasion, nous insistons sur l'importance cruciale du système commercial multilatéral fondé sur des règles et réaffirmons les principes et objectifs énoncés dans l'Accord de Marrakech instituant l'Organisation mondiale du commerce.

    3. Nous réaffirmons la prééminence de l'OMC en tant qu'instance mondiale pour l'établissement des règles commerciales et la gouvernance du commerce. Nous reconnaissons la contribution que le système commercial multilatéral fondé sur des règles a apportée à la solidité et à la stabilité de l'économie mondiale. Nous réaffirmons la valeur de notre pratique qui consiste à toujours prendre les décisions dans le cadre d'un processus transparent, inclusif, basé sur le consensus et conduit par les Membres.

    4. Nous notons avec inquiétude la lenteur et l'irrégularité de la reprise après la grave crise économique et financière de 2008, qui ont eu pour conséquences un affaiblissement de la croissance économique mondiale, une baisse des prix des produits agricoles et autres produits de base, une aggravation des inégalités et du chômage, et un ralentissement sensible de l'expansion du commerce international ces dernières années. Nous reconnaissons que le commerce international peut contribuer à assurer une croissance durable, solide et équilibrée pour tous.

    5. Nous nous engageons à renforcer le système commercial multilatéral afin qu'il stimule vigoureusement une prospérité et un bien‑être généralisés pour tous les Membres et qu'il réponde aux besoins de développement spécifiques des pays en développement Membres, en particulier les pays les moins avancés Membres.

    6. Nous reconnaissons que le commerce international peut jouer un rôle majeur dans la promotion du développement économique et la réduction de la pauvreté. Nous reconnaissons la nécessité pour toutes nos populations de tirer parti des possibilités accrues et des gains de bien‑être que le système commercial multilatéral génère. La majorité des Membres de l'OMC sont des pays en développement Membres. Nous nous employons à mettre leurs besoins et leurs intérêts au centre des travaux de l'OMC.

    7. Nous réaffirmons le caractère central du développement dans les travaux de l'OMC et nous engageons à continuer de faire des efforts positifs pour que les pays en développement Membres et, en particulier les pays les moins avancés Membres, s'assurent une part de la croissance du commerce mondial qui corresponde aux besoins de leur développement économique.

    8. Nous reconnaissons le rôle que l'OMC peut jouer s'agissant de contribuer à la réalisation des Objectifs de développement durable à l'horizon 2030, dans la mesure où ils relèvent du mandat de l'OMC, et compte tenu de l'autorité de la Conférence ministérielle de l'OMC.

    9. Nous reconnaissons l'importance d'une cohérence renforcée dans l'élaboration des politiques économiques au niveau mondial. Nous insistons sur le mandat relatif à la cohérence établi à Marrakech et encourageons les initiatives de coopération avec d'autres organisations internationales en vue d'atteindre nos objectifs communs, tout en respectant la compétence de chaque organisation.

Vingtième anniversaire de l'OMC – réalisations et défis

    10. À l'occasion du vingtième anniversaire de l'OMC, nous reconnaissons les importants résultats obtenus dans le cadre des fonctions de l'Organisation décrites à l'article III de l'Accord de Marrakech.

    11. Nous réaffirmons l'importance des travaux des organes ordinaires pour promouvoir la réalisation des objectifs des Accords de l'OMC et favoriser un échange fructueux de renseignements et de données d'expérience sur l'efficacité de la mise en œuvre et du fonctionnement des dispositions desdits accords. Nous notons que l'activité de suivi du commerce menée par l'OMC, y compris les examens des politiques commerciales, a toujours contribué au fonctionnement du système commercial multilatéral, en assurant une plus grande transparence et une meilleure compréhension des politiques et pratiques commerciales des Membres.

    12. Nous réaffirmons que l'OMC restera la principale instance de négociation des règles commerciales multilatérales. Nous avons fait quelques progrès dans les négociations. À notre quatrième session, nous avons lancé pour la première fois dans l'histoire du GATT et de l'OMC un cycle consacré au développement: le Programme de travail de Doha. Nous rappelons l'adoption du Protocole portant amendement de l'Accord sur les ADPIC. Nous appelons l'attention en particulier sur l'adoption de l'Accord sur la facilitation des échanges (AFE) en tant que premier accord multilatéral adopté depuis la création de l'OMC. Nous félicitons les Membres qui ont déjà accepté les Protocoles respectifs et espérons que d'autres acceptations vont suivre. Nous saluons les Décisions et la Déclaration mentionnées dans les parties I et II de la Déclaration ministérielle de Bali, et la Décision adoptée ensuite par le Conseil général en novembre 2014 au sujet de la détention de stocks publics à des fins de sécurité alimentaire. Nous notons cependant que beaucoup moins de progrès ont été accomplis dans le domaine de l'agriculture et pour d'autres éléments centraux du programme de négociation de l'OMC, à savoir l'AMNA, les services, les règles et le développement.

    13. Nous notons que le Mémorandum d'accord sur le règlement des différends (Mémorandum d'accord) continue d'offrir un moyen de régler les différends entre les Membres qui est unique dans les accords internationaux. Le système a traité un nombre important et croissant de différends, ce qui montre que les Membres continuent de lui faire confiance. Nous reconnaissons que l'augmentation du nombre et de la complexité des différends représente un défi pour le système. Nous nous engageons donc à poursuivre et à renouveler nos efforts pour relever le défi actuel et pour renforcer encore le système, y compris par une mise en œuvre effective des décisions et des recommandations de l'Organe de règlement des différends (ORD).

    14. Nous rappelons les engagements pris par les Ministres lors de toutes les sessions précédentes, ainsi que par la communauté internationale à la quatrième Conférence des Nations Unies sur les pays les moins avancés (PMA) à Istanbul, pour aider les PMA à parvenir à une intégration fructueuse et significative dans le système commercial multilatéral et l'économie mondiale. Nous reconnaissons que les PMA restent vulnérables et demeurent confrontés à des difficultés structurelles dans l'économie mondiale. Nous soulignons l'importance continue des initiatives visant à intégrer pleinement et véritablement les PMA dans le système commercial multilatéral d'une manière plus efficace.

    15. Nous reconnaissons la contribution du Cadre intégré renforcé (CIR) à l'intégration du commerce dans les politiques de développement des PMA et au renforcement de leurs capacités commerciales. Ce rôle important pour aider les PMA à atteindre leurs objectifs de développement est dûment reconnu dans le Programme de développement durable à l'horizon 2030. Nous sommes déterminés à intensifier encore nos efforts pour assurer le niveau nécessaire de contributions financières au programme en vue de permettre la fourniture aux PMA d'un soutien lié au commerce prévisible, sur la base des besoins du programme énoncés dans le Programme‑cadre pour la deuxième phase du CIR.

    16. Nous reconnaissons l'importance de l'Initiative Aide pour le commerce pour aider les pays en développement Membres à renforcer leurs capacités du côté de l'offre ainsi que leur infrastructure liée au commerce et nous accorderons la priorité aux besoins des PMA. Nous prenons note des résultats des examens globaux de l'Aide pour le commerce organisés par l'OMC, en particulier le cinquième Examen global, et reconnaissons que cette initiative reste nécessaire.

    17. Nous prenons note des progrès substantiels concernant l'assistance technique et le renforcement des capacités assurés par l'OMC, qui sont axés sur les besoins et priorités des Membres bénéficiaires. Nous reconnaissons que les mécanismes spécifiques comme le Fonds pour l'application des normes et le développement du commerce et le Mécanisme pour l'Accord sur la facilitation des échanges contribuent grandement à aider les pays en développement Membres et les PMA à mettre en œuvre les accords pertinents de l'OMC. Nous réaffirmons aussi l'importance de programmes ciblés et durables d'assistance financière, technique et de renforcement des capacités pour aider les pays en développement Membres, en particulier les PMA, à mettre en œuvre leurs accords, à s'ajuster au processus de réforme et à tirer parti des opportunités offertes.

    18. Nous saluons l'élargissement de l'Organisation au moyen des accessions conformément à l'article XII de l'Accord de Marrakech. Nous notons que les accessions à l'OMC de la République du Yémen, de la République des Seychelles et de la République du Kazakhstan ont été achevées depuis notre dernière session. En particulier, nous notons avec satisfaction que la présente Conférence a achevé les procédures d'accession de deux pays moins avancés, à savoir la République du Libéria et la République islamique d'Afghanistan. Nous reconnaissons les engagements de vaste portée pris par les Membres relevant de l'article XII et leur contribution au renforcement du système commercial multilatéral résultant de leur accession. Nous travaillerons de concert pour achever rapidement les accessions en cours. Nous restons attachés aux efforts visant à faciliter les accessions et à fournir une assistance technique aux pays accédants, y compris pendant la phase qui suit l'accession.

    19. Tout en reconnaissant le caractère central et la primauté du système commercial multilatéral, nous notons que des Membres de l'OMC sont également parvenus à travailler et à conclure des accords suivant des configurations plurilatérales.

    20. Nous prenons note des rapports du Conseil général et de ses organes subsidiaires. Nous nous félicitons des progrès que ces rapports, et les Décisions qui en découlent, font apparaître s'agissant de renforcer l'efficacité de l'OMC en tant qu'organisation et le système commercial multilatéral dans son ensemble.

     

PARTIE II

Travaux ordinaires dans le cadre du Conseil général

    21. Nous nous félicitons des Décisions suivantes que nous avons adoptées à la présente session:

    • Programme de travail sur les petites économies – Décision ministérielle – WT/MIN(15)/40-WT/L/975
    • Plaintes en situation de non‑violation ou motivées par une autre situation dans le domaine des ADPIC – Décision ministérielle – WT/MIN(15)/41-WT/L/976
    • Programme de travail sur le commerce électronique – Décision ministérielle – WT/MIN(15)/42-WT/L/977

    22. Nous nous félicitons en outre de l'adoption par le Conseil des ADPIC de la Décision sur la prorogation de la période de transition prévue à l'article 66:1 de l'Accord sur les ADPIC en faveur des pays les moins avancés Membres pour certaines obligations en ce qui concerne les produits pharmaceutiques, ainsi que de la Décision de dérogation connexe adoptée par le Conseil général en ce qui concerne les obligations des pays les moins avancés Membres au titre de l'article 70:8 et 70:9 de l'Accord sur les ADPIC.

    Programme de Doha pour le développement

    23. Nous nous félicitons des progrès du PDD, consacrés dans les Décisions et Déclarations ci‑après que nous avons adoptées à notre dixième session:

    Agriculture

    • Mécanisme de sauvegarde spéciale en faveur des pays en développement Membres – Décision ministérielle du 19 décembre 2015 – WT/MIN(15)/43-WT/L/978
    • Détention de stocks publics à des fins de sécurité alimentaire – Décision ministérielle du 19 décembre 2015 – WT/MIN(15)/44-WT/L/979
    • Concurrence à l'exportation – Décision ministérielle du 19 décembre 2015 – WT/MIN(15)/45-WT/L/980

    Coton

    • Coton – Décision ministérielle du 19 décembre 2015 – WT/MIN(15)/46-WT/L/981

    Questions concernant les PMA

    • Règles d'origine préférentielles pour les pays les moins avancés – Décision ministérielle – WT/MIN(15)/47-WT/L/917/Add.1
    • Mise en œuvre du traitement préférentiel en faveur des services et fournisseurs de services des pays les moins avancés et participation croissante des PMA au commerce des services – Décision ministérielle – WT/MIN(15)/48-WT/L/982

     

PARTIE III

    24. Nous nous engageons fermement à traiter la marginalisation des PMA dans le commerce international et à améliorer leur participation effective au système commercial multilatéral. À cette fin, nous veillerons à ce que toutes les questions présentant un intérêt spécifique pour les PMA soient traitées à titre prioritaire, en vue d'être renforcées, rendues significatives sur le plan commercial et, le cas échéant, juridiquement contraignantes.

    25. Nous réaffirmons notre engagement de mettre pleinement en œuvre la Décision sur les mesures concernant les effets négatifs possibles du Programme de réforme sur les pays les moins avancés et les pays en développement importateurs nets de produits alimentaires, y compris le traitement différencié conformément à la Décision de Marrakech dans le contexte des négociations sur l'agriculture, compte tenu des problèmes auxquels ces Membres restent confrontés.

    26. Nous réaffirmons notre engagement de continuer à traiter dans chaque domaine des travaux de l'OMC, de manière approfondie et sérieuse, les besoins des petites économies vulnérables (PEV) et d'envisager favorablement l'adoption de mesures qui faciliteraient l'intégration plus complète de ces économies dans le système commercial multilatéral. Nous tiendrons compte des besoins des PEV dans tous les domaines des négociations, sans créer une sous‑catégorie de Membres de l'OMC.

    27. Nous reconnaissons la situation spéciale des Membres ayant accédé au titre de l'article XII de l'Accord instituant l'Organisation mondiale du commerce qui ont pris des engagements de vaste portée en matière d'accès aux marchés au moment de leur accession. Cette situation sera prise en compte dans les négociations.

    28. Nous réaffirmons la nécessité de faire en sorte que les accords commerciaux régionaux (ACR) restent un complément, et non un substitut, du système commercial multilatéral. À cet égard, nous donnons pour instruction au Comité des accords commerciaux régionaux (CACR) d'examiner les implications systémiques des ACR pour le système commercial multilatéral et leur lien avec les règles de l'OMC. Afin d'assurer une plus grande transparence et une meilleure compréhension des ACR et de leurs effets, nous convenons de nous employer à transformer le mécanisme provisoire pour la transparence en un mécanisme permanent conformément à la Décision du Conseil général du 14 décembre 2006, sans préjudice des questions relatives aux prescriptions en matière de notification.

    29. Nous convenons de redynamiser les travaux ordinaires des Comités et donnons pour instruction au Conseil général de réfléchir à la nécessité d'apporter des ajustements à la structure de leurs organes subsidiaires en fonction de leur pertinence pour la mise en œuvre et le fonctionnement des Accords visés.

    30. Nous reconnaissons que de nombreux Membres réaffirment le Programme de Doha pour le développement et les Déclarations et Décisions adoptées à Doha et lors des Conférences ministérielles tenues ensuite, et réaffirment leur engagement sans réserve de conclure le PDD sur cette base. D'autres Membres ne réaffirment pas les mandats de Doha, car ils estiment que de nouvelles approches sont nécessaires pour obtenir des résultats significatifs dans les négociations multilatérales. Les Membres ont des vues différentes sur la façon d'aborder les négociations. Nous reconnaissons la solide structure juridique de cette Organisation.

    31. Néanmoins, tous les Membres restent fermement déterminés à faire avancer les négociations sur les questions de Doha restantes. Il s'agit de faire progresser les travaux en ce qui concerne les trois piliers de l'agriculture, à savoir soutien interne, accès aux marchés et concurrence à l'exportation, ainsi qu'en ce qui concerne l'accès aux marchés pour les produits non agricoles, les services, le développement, les ADPIC et les règles. Les travaux sur toutes les Décisions ministérielles adoptées dans la partie II de la présente Déclaration demeureront un élément important de notre programme futur.

    32. Le développement restera au centre de ces travaux et nous réaffirmons que l'intégrité des dispositions relatives au traitement spécial et différencié sera maintenue. Les Membres continueront aussi de donner la priorité aux préoccupations et aux intérêts des pays les moins avancés. De nombreux Membres veulent mener les travaux sur la base de la structure de Doha, tandis que certains veulent explorer de nouvelles architectures.

    33. Conscients de cette situation et compte tenu de notre volonté commune de voir cette réunion à Nairobi, notre première Conférence ministérielle en Afrique, jouer un rôle central dans les efforts déployés pour préserver et renforcer encore la fonction de négociation de l'OMC, nous convenons par conséquent que nos représentants devraient s'employer à trouver des moyens de faire progresser les négociations et demandons au Directeur général de rendre compte régulièrement de ces efforts au Conseil général.

    34. Nous sommes d'accord pour dire que nos représentants devraient accorder la priorité aux travaux qui n'ont pas encore abouti à des résultats, mais certains souhaitent identifier et examiner d'autres questions à négocier; d'autres pas. Toute décision de lancer des négociations au niveau multilatéral sur ces questions devrait être convenue par la totalité des Membres.