PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE: NÉGOCIATIONS SUR LES INDICATIONS GÉOGRAPHIQUES

Le rapport du président au TNC, 22 mars 2010

“… La difficulté que nous rencontrons est l'absence de convergence sur une base textuelle unique pour les négociations, qui reflète à la fois les différences dans les positions des Membres et la nature différente des propositions qui sont sur la table. Par conséquent, l'approche “3 4 5” devrait aider à progresser vers un texte sur la base duquel tous les Membres pourront convenir de poursuivre les négociations. Je crois qu'un tel texte est possible ...” C'est ainsi que l'ambassadeur Darlington Mwape, qui préside les pourparlers dans le domaine de la propriété intellectuelle, a résumé la situation la plus récente dans son rapport au Comité des négociations commerciales le 22 mars 2010, alors que les Membres ont commencé à faire le point des négociations du Cycle de Doha.

 

> Le Programme de Doha pour le développement

TN/IP/20
22 mars 2010

Conseil des aspects des droits de propriété
intellectuelle qui touchent au commerce
Session extraordinaire

 

Système multilatéral de notification et d'enregistrement des indications géographiques pour les vins et les spiritueux

Rapport du Président, M. l'Ambassadeur Darlington Mwape (Zambie), au Comité des négociations commerciales aux fins du bilan dans le cadre du CNC

1. Le présent rapport sur les négociations concernant l'établissement d'un système multilatéral de notification et d'enregistrement (“le Registre”) des indications géographiques pour les vins et les spiritueux est présenté sous ma propre responsabilité et est sans préjudice des positions des délégations et du résultat des négociations.

I. ÉTAT D'AVANCEMENT DES TRAVAUX

2. Le 4 mars 2010, à sa 25ème réunion formelle, la Session extraordinaire du Conseil des ADPIC a confirmé ma nomination au poste de Président en remplacement de M. l'Ambassadeur C. Trevor Clarke (Barbade), qui avait quitté son poste à la fin de novembre 2009. Entre le 8 décembre 2009 et la date de ma nomination, la présidence intérimaire de la Session extraordinaire a été assurée par Mme l'Ambassadrice Karen Tan (Singapour).

3. Dès sa prise de fonctions le 29 octobre 2008, M. l'Ambassadeur Trevor Clarke, à la demande des Membres, avait intensifié les travaux de la Session extraordinaire, ce qui avait débouché sur la remise d'un rapport au Comité des négociations commerciales (CNC), reproduit sous la cote TN/IP/19 et daté du 25 novembre 2009 (pour plus de détails, voir l'annexe 1 du présent rapport). Pour certains aspects tels que la notification et l'enregistrement, ce rapport renvoie à un autre rapport, établi par son prédécesseur, M. l'Ambassadeur Manzoor Ahmad (Pakistan), reproduit sous la cote TN/IP/18 et daté du 9 juin 2008 (voir l'annexe 2 du présent rapport). Mme l'Ambassadrice Karen Tan a fait rapport, oralement, sur les consultations informelles qu'elle avait tenues pendant sa présidence intérimaire.1

4. À ma première réunion formelle, le 4 mars 2010, j'ai d'emblée clairement fait savoir que le mandat de négociation spécifique donné à la Session extraordinaire se limitait à la négociation d'un registre des indications géographiques pour les vins et les spiritueux, et que les autres questions liées aux ADPIC étaient traitées dans un autre cadre et à un niveau différent. Au cours de cette réunion, j'ai dit que, s'il se pouvait que je ne sois pas en mesure d'empêcher les délégations d'établir des liens, ma tâche en tant que Président était de rappeler aux Membres les limites fixées au mandat de la Session spécifique.

5. Les trois principales propositions qui ont été discutées restent sur la table. 2

6. Au cours des dernières années, et plus récemment sous la présidence de M. l'Ambassadeur Clarke, des discussions techniques vives, mais utiles, ont été menées sur les trois groupes de questions mis en évidence dans les rapports de mes prédécesseurs, à savoir:

1) les effets/conséquences juridiques de l'enregistrement et de la participation, au sujet desquels des divergences profondes subsistent;

2) la notification et l'enregistrement, pour lesquels des travaux techniques assez importants ont été effectués, mais ces travaux doivent à l'évidence être poursuivis car les positions sur ces points sont liées à la résolution des deux principales questions du groupe 1 susmentionné; et

3) d'autres questions, qui ont été moins discutées, telles que les taxes, les frais et les charges administratives et autres, en particulier pour les pays en développement et les pays les moins avancés, et le traitement spécial et différencié,

7. Afin de centrer les discussions sur ces groupes de questions et de les doter d'une structure allant au-delà de la simple expression par les délégations de leurs vues sur leurs propositions divergentes, M. l'Ambassadeur Clarke a distribué, le 2 octobre 2009, une liste de quatre questions:

i) Quelles obligations juridiques seraient acceptables pour le Registre afin de faciliter la protection des indications géographiques pour les vins et les spiritueux prescrite par l'article 23:4 de l'Accord sur les ADPIC?

ii) Au moment de prendre des décisions concernant l'enregistrement et la protection de marques de fabrique ou de commerce et d'indications géographiques, quelle importance et quel poids les autorités nationales devraient-elles accorder aux renseignements figurant dans le Registre?

iii) En matière de participation, y a-t-il d'autres options que la participation volontaire ou obligatoire? Dans l'affirmative, quels critères pourraient être envisagés?

iv) Quelle forme pourrait prendre le traitement spécial et différencié en ce qui concerne le Registre?

8. Je crois comprendre que cette liste de questions a été une excellente base de discussion pour les délégations. Si ces discussions n'ont pas mis fin aux principales divergences, elles ont certainement permis aux Membres de se concentrer sur les questions essentielles. Il me semble que, grâce aux précisions, aux études de cas et aux exposés présentés par les délégations en réponse à ces questions, nous disposons désormais de bien plus de renseignements techniques sur le fonctionnement et la mise en œuvre des différentes propositions dans les systèmes juridiques nationaux des Membres. C'est probablement sur ce type de discussions techniques que M. l'Ambassadeur Clarke s'est fondé pour formuler des suggestions concernant la voie à suivre, y compris cinq principes directeurs pour les travaux futurs, énoncés comme suit au paragraphe 16 du document TN/IP/19:

i) L'objectif du Registre est de faciliter, non d'accroître, la protection des indications géographiques pour les vins et les spiritueux.

ii) Le Registre devrait être utile et efficace à la fois pour les Membres présentant des notifications et pour les Membres le consultant.

iii) Le caractère territorial des droits de propriété intellectuelle devrait être préservé.

iv) Le Registre ne devrait pas imposer de charges financières et administratives inutiles aux Membres.

v) Le traitement spécial et différencié devrait être précis, effectif et opérationnel.

9. D'après ce que je crois comprendre, le document TN/IP/19 a été bien accueilli par les Membres, qui ont jugé qu'il reflétait d'une manière juste et équilibrée les travaux entrepris et l'état d'avancement des discussions sur les questions. Pour ce qui est de la voie à suivre, les points de vue pourraient être nuancés sur l'évaluation des principaux problèmes restants faite par M. l'Ambassadeur Clarke, par exemple en ce qui concerne la participation (devrait elle être volontaire, obligatoire ou conditionnelle?). S'agissant de la question la plus difficile, c'est à dire les effets/conséquences juridiques de l'enregistrement, des délégations ayant bien voulu apporter des éclaircissements et des descriptions concrètes quant à la façon dont une proposition pourrait en pratique être mise en œuvre dans les systèmes internes — ce qu'on a appelé les “réalités” — mon prédécesseur avait le sentiment que “les efforts de négociation pourraient déboucher sur une formulation acceptable pour une obligation qui refléterait les réalités mises en évidence par les Membres en ce qui concerne la façon dont les autorités nationales traiteraient les renseignements qu'elles auraient obtenus en consultant le Registre, et que d'autres négociations [étaient] requises pour définir les lignes directrices relatives à une telle obligation”.

10. En ce qui concerne les principes directeurs énoncés au paragraphe 16 du document TN/IP/19, j'ai pleinement conscience des positions des délégations. Toutes conviennent que ces principes sont utiles pour nos travaux, mais certaines pensent qu'ils ne devraient servir ni de base pour les négociations, ni d'excuse pour poursuivre des débats rhétoriques sur des concepts bien connus comme “multilatéral” ou “facilitation”.

II. TRAVAUX FUTURS

11. 11. Compte tenu de tout cela, j'ai suggéré à ma première réunion formelle que nous fassions fond sur ce qui avait été effectué au lieu de tout recommencer. Je propose donc d'adopter l'approche “3 4 5 à savoir:
a) continuer d'articuler nos travaux autour des trois groupes de questions mises en évidence par mes prédécesseurs;

b) parallèlement, continuer d'utiliser la liste de quatre questions posées par Trevor Clarke sur les effets juridiques, la participation et le traitement spécial et différencié;

c) dans le cadre des discussions sur chaque question, nous devrions essayer de voir comment prendre en compte nos préoccupations:

à la lumière des explications que les Membres continueront de donner sur la façon dont ils mettraient concrètement en œuvre différentes options dans leurs systèmes nationaux,

et en gardant à l'esprit les cinq principes directeurs énoncés dans le document TN/IP/19, sans négocier sur ces principes en tant que tels et en reconnaissant que les délégations pourraient avoir des réserves concernant certains aspects de ces principes.

12. S'agissant du paragraphe 11 b) ci dessus, je n'exclus pas la possibilité de poser d'autres questions à mesure que nous progresserons dans les discussions afin de maintenir les négociations sur la bonne voie.

13. Mon impression après ma première réunion formelle est que ce sont la question des effets/conséquences juridiques de l'enregistrement et celle de la participation qui font problème, et que la résolution de ces questions, en particulier pour ce qui est des effets/conséquences juridiques de l'enregistrement, aidera à progresser dans les autres domaines, y compris celui du traitement spécial et différencié. À mon sens, il y a un réel désir de progresser encore dans les négociations, ce qu'illustre le fait que certaines délégations continuent d'apporter des éclaircissements et des exemples utiles quant à la façon dont les propositions qui ont été présentées seraient mises en œuvre au niveau interne, et d'autres se disent disposées à faire des contributions similaires ou à compléter les contributions existantes.

14. Globalement, la difficulté que nous rencontrons est l'absence de convergence sur une base textuelle unique pour les négociations, qui reflète à la fois les différences dans les positions des Membres et la nature différente des propositions qui sont sur la table.3 Par conséquent, l'approche “3 4 5” devrait aider à progresser vers un texte sur la base duquel tous les Membres pourront convenir de poursuivre les négociations. Je crois qu'un tel texte est possible et qu'étudier les flexibilités qui existent déjà ou qui pourraient être envisagées dans les systèmes nationaux des Membres est un pas important vers la réalisation de cet objectif. Une possibilité serait d'établir à un certain moment — strictement en phase avec l'ensemble du processus — un texte à partir d'éléments venant des délégations elles mêmes.

15. Les travaux techniques devraient être axés sur les questions de fond, y compris en particulier la question des implications d'un enregistrement, tout en utilisant la base que constituent les travaux de M. l'Ambassadeur Clarke pour aller de l'avant. Il pourrait y avoir davantage d'échanges de renseignements techniques sur la façon dont les autorités nationales chargées des marques de fabrique ou de commerce et des indications géographiques fonctionnent actuellement et dont les différentes manières de “tenir compte” des renseignements figurant dans le registre qui ont été proposées affecteraient ce fonctionnement.

16. Une réunion formelle de la Session extraordinaire a été provisoirement fixée au 10 juin 2010. Cependant, je n'exclus pas la tenue de consultations et de réunions sous différentes formes avant cette date, suivant l'avancement du processus dans son ensemble.

 

Annexe 1

Document TN/IP/19, 25 novembre 2009

 

Annexe 2

Document TN/IP/18, 9 juin 2008

_____________________________________

 

Notes:
1.
Il en sera fait état dans le compte rendu de la réunion formelle du 4 mars. En attendant, voir: http://www.wto.org/french/news_f/news10_f/trip_04mar10_f.htm retour au texte
2. Le document TN/IP/W/8, présenté en avril 2003, contient la proposition de Hong Kong, Chine. Le document TN/IP/W/10, présenté en mars 2005, contient la “proposition conjointe” et a été révisé pour faire apparaître des coauteurs additionnels. Les coauteurs actuels du document TN/IP/W/10/Rev.2, daté du 24 juillet 2008, sont les Membres suivants: Afrique du Sud, Argentine, Australie, Canada, Chili, Corée, Costa Rica, El Salvador, Équateur, États-Unis, Guatemala, Honduras, Japon, Mexique, Nouvelle-Zélande, Nicaragua, Paraguay, République dominicaine et Taipei chinois (“Groupe de la proposition conjointe”). Le document TN/C/W/52, daté du 19 juillet 2008, et ses addenda 1 à 3, contiennent une proposition intitulée “Projet de modalités concernant les questions liées aux ADPIC”, dont les coauteurs sont l'Albanie, le Brésil, la Chine, la Colombie, les Communautés européennes, la Croatie, l'Équateur, l'ex-République yougoslave de Macédoine, la Géorgie, l'Islande, l'Inde, l'Indonésie, le Liechtenstein, Moldova, le Pakistan, le Pérou, la République kirghize, Sri Lanka, la Suisse, la Thaïlande, la Turquie, le Groupe ACP et le Groupe africain. Dans une sous-partie intitulée “Registre des indications géographiques: projet de modalité”, les paragraphes 1 à 3 du document TN/C/W/52 traitent spécifiquement des questions relatives au Registre des indications géographiques pour les vins et les spiritueux. Le paragraphe 9 du document TN/C/W/52 fait référence au traitement spécial et différencié. retour au texte
3. Deux propositions, celle de Hong Kong, Chine, figurant dans le document TN/IP/W/8, et celle du Groupe de la proposition conjointe, figurant dans le document TN/IP/W/10/Rev.2, ont la forme de textes juridiques, tandis que le document TN/C/W/52 est une proposition de modalités. retour au texte

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LE MANDAT DE DOHA 
18. En vue d'achever les travaux entrepris au Conseil des aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (Conseil des ADPIC) sur la mise en œuvre de l'article 23:4, nous convenons de négocier l'établissement d'un système multilatéral de notification et d'enregistrement des indications géographiques pour les vins et spiritueux d'ici à la cinquième session de la Conférence ministérielle. Nous notons que les questions relatives à l'extension de la protection des indications géographiques prévue à l'article 23 à des produits autres que les vins et spiritueux seront traitées au Conseil des ADPIC conformément au paragraphe 12 de la présente déclaration.

> Déclaration ministérielle de Doha (2001)

 

COMPRENDRE LE JARGON 

• Indications géographiques (IG): Noms de lieux (ou mots associés à un lieu) utilisés pour identifier des produits (par exemple “Champagne”, “Tequila” ou “Roquefort”) ayant une qualité, une réputation ou une autre caractéristique particulières parce qu’ils viennent de ce lieu.

• Modalités: Manière ou méthode de faire quelque chose — dans le cadre des négociations de Doha, il s’agit des schémas retenus pour l’accord final, par exemple comment abaisser les droits de douane et réduire les subventions et le soutien à l’agriculture et flexibilités pour tenir compte des diverses questions sensibles. Une fois les modalités convenues, les pays pourront appliquer les formules aux droits de douane sur des milliers de produits et aux divers programmes de soutien.

• Sessions extraordinaires: Réunions des conseils et comités de l’OMC consacrées uniquement aux négociations au titre du Programme de Doha pour le développement.

• ADPIC: Aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce.

> Mieux comprendre le jargon: glossaire