OMC: NOUVELLES 2012

DIRECTEURS GÉNÉRAUX ADJOINTS

“Rapport de situation sur les consultations informelles visant à améliorer l’efficacité de la procédure des groupes spéciaux”


POUR EN SAVOIR PLUS:

> Pour en savoir plus sur les consultations visant à améliorer l’efficacité des groupes spéciaux

présenté par

M. Alejandro Jara, Directeur général adjoint de l’OMC,
à l’Institut de hautes études internationales et du développement de Genève, le 13 mars 2012

Le mécanisme de règlement des différends de l’OMC s’est forgé une réputation grâce à ses excellents résultats.  Mais cette réputation ne s’est pas faite spontanément.  Les Membres ont travaillé sans relâche pour garantir le respect des règles qu’ils ont établies et assurer le bon fonctionnement du système qu’ils ont créé.  Cette réputation résulte aussi de l’engagement des membres de l’Organe d’appel et des groupes spéciaux et de la mobilisation de ressources considérables par le Secrétariat de l’OMC.

Outre l’investissement humain, il y a un aspect financier.  Le règlement des différends coûte actuellement environ 30 millions de dollars par an.  Permettez-moi de donner quelques exemples:

  • Le coût des experts engagés pour un seul différend va de 3 000 CHF à 88 800 CHF.
  • Le coût annuel moyen de la distribution des documents imprimés aux membres des groupes spéciaux, aux parties et aux experts s’élève à 60 000 CHF.
  • Le coût de la traduction est estimé à 300 CHF la page.
  • Les cinq procédures de l’Organe d’appel menées en 2011 (compte non tenu des deux différends portant sur les aéronefs civils gros porteurs) ont entraîné la production de 8 244 pages.  Faites le calcul!1

Au-delà des coûts, les acteurs réguliers du système de règlement des différends de l’OMC reconnaissent largement que le déroulement des procédures des groupes spéciaux et de l’Organe d’appel est généralement très rapide, notamment par rapport à d’autres systèmes internationaux.  Mais, pour les entreprises concernées par un différend, l’attente d’un règlement pendant un ou deux ans semble très longue.  Nous avons également remarqué que les groupes spéciaux ont besoin de plus en plus de temps pour s’acquitter de leurs fonctions.  Cela a amené certains à suggérer d’accélérer le fonctionnement du système.

Compte tenu du coût croissant du règlement des différends et du fait que certains jugeaient le système trop lent, le Directeur général m’a demandé, en 2010, d’étudier les faits et de mener des consultations.  L’objectif était d’examiner s’il était possible de réaliser des gains d’efficacité dans les travaux des groupes spéciaux, de façon à réduire la charge financière et humaine.

J’ai consulté les délégations, les praticiens, les collègues du Secrétariat, le Centre consultatif sur le droit de l’OMC, l’Organe d’appel, d’anciens membres de groupes spéciaux, etc.  Aux fins de l’analyse, j’ai considéré trois phases:

    I) la sélection des membres des groupes spéciaux;

    II) les travaux des groupes spéciaux;

    III) les travaux menés après la remise des rapports des groupes spéciaux.

Je me suis concentré surtout sur la deuxième phase.

J’ai rapidement conclu que les groupes spéciaux prenaient plus de temps pour différentes raisons liées généralement à une combinaison de facteurs et, souvent, parce qu’ils répondaient aux souhaits du Membre plaignant ou à la stratégie que le Membre avait choisi d’adopter.  Bon nombre des personnes que j’ai consultées ont avancé des idées, et j’ai ensuite vérifié si elles étaient acceptables.  En un sens, j’ai fait office de mécanisme de centralisation sur le marché des idées.

Les idées devaient satisfaire à deux critères essentiels:

    I) elles devaient être compatibles avec les règles existantes;  en d’autres termes, des changements ne pourraient être envisagés que s’ils n’impliquaient pas un amendement du Mémorandum d’accord;

    II) les éventuels ajustements ne devaient pas compromettre l’excellente réputation et la qualité des résultats du système.

À cet égard, je me suis appuyé principalement sur la flexibilité prévue à l’article 12:1 et 12:2 du Mémorandum d’accord, qui exige que les groupes spéciaux suivent les procédures de travail énoncées dans l’Appendice 3 du Mémorandum d’accord “à moins qu’ils n’en décident autrement après avoir consulté les parties au différend”, et qui indique que la procédure des groupes spéciaux “devrait offrir une flexibilité suffisante pour que les rapports des groupes soient de haute qualité, sans toutefois retarder indûment les travaux des groupes”.

 

LES PROPOSITIONS

Il convient de garder à l’esprit que ces propositions émanent de parties prenantes représentant l’éventail des participants au règlement des différends.  Les propositions que j’ai reçues jusqu’à présent peuvent être classées dans trois grandes catégories.

La première catégorie contient les propositions qui visent à rendre plus efficace la première réunion de fond.  En voici deux exemples:

    I) la double présentation;

    II) la présentation préalable des questions.

I) Double présentation

La double présentation fait référence à un processus par lequel les communications écrites des parties (première communication écrite, réfutations et communications des tierces parties) sont présentées au groupe spécial avant la première audition des parties par le groupe spécial.  Cette approche s’inspire de l’expérience des groupes spéciaux de la mise en conformité établis au titre de l’article 21:5.

Je reconnais que cette approche retarderait probablement la première audition des parties.  Néanmoins, la double présentation pourrait accélérer les travaux du groupe spécial en faisant avancer les discussions des parties sur les questions pertinentes, ce qui éliminerait probablement certains échanges dans la phase des questions et réponses écrites.  Cela pourrait aussi éviter une deuxième audition.

II) Présentation préalable des questions (questions indicatives) pour la réunion du groupe spécial

Les groupes spéciaux utilisent généralement la première réunion de fond pour déterminer les questions factuelles et juridiques de base.  Parfois, les parties ne sont pas préparées à y répondre oralement, notamment parce qu’elles ne connaissent pas au préalable les préoccupations particulières du groupe spécial.  En outre, bien souvent, les déclarations orales des parties ne font que reprendre les éléments de leur première communication écrite.  Certains ont estimé que, pour cette raison, la première réunion de fond est plus longue que nécessaire, et le temps que le groupe spécial passe avec les parties n’est pas utilisé de manière optimale.

Il a donc été suggéré que les groupes spéciaux communiquent à l’avance aux parties la liste des questions qui pourraient être posées.  Cette pratique s’inspire de la procédure prévue à l’article 22:6 et elle a même déjà été appliquée dans de récentes procédures de groupes spéciaux, suscitant des réactions positives des participants.2

Dans la deuxième catégorie, j’ai reçu des propositions visant à améliorer l’efficacité du processus en termes de durée et de coûts.  Voici deux exemples de propositions de cette catégorie:

    I) limitation de la durée des déclarations orales;

    II) établissement d’un ordre du jour pour la réunion du groupe spécial.

I) Limitation de la durée des déclarations orales

Il a été suggéré que les groupes spéciaux s’inspirent de la pratique de l’Organe d’appel consistant à limiter la durée des déclarations orales des parties et des participants tiers.  Plusieurs groupes spéciaux ont déjà limité la durée des déclarations orales.3  

Il n’est guère utile de faire des déclarations orales qui reprennent ce qui est dit dans les communications écrites.

II) Établissement d’un ordre du jour pour la réunion du groupe spécial

Par ailleurs, les groupes spéciaux devraient proposer à l’avance aux parties un ordre du jour ou une structure pour la réunion, et ils devraient les informer du temps qu’ils entendent consacrer à chaque point de l’ordre du jour.

La troisième catégorie de propositions comprend des suggestions qui visent à améliorer la présentation des rapports des groupes spéciaux et à réduire leur coût.  Les rapports des groupes spéciaux sont de plus en plus volumineux, en raison de la complexité accrue des questions, de l’augmentation de la jurisprudence et du nombre croissant d’annexes aux rapports, sans parler de la longueur des sections descriptives.

Voici également deux exemples de propositions de cette troisième catégorie:

    I) limitation du nombre de pages des résumés analytiques;

    II) réduction du nombre d’annexes.

I) Limitation du nombre de pages des résumés analytiques

Il a été proposé que les groupes spéciaux fixent, dans leurs procédures de travail, une limite au nombre de pages des résumés analytiques.  Récemment, de nombreux groupes spéciaux ont adopté cette approche.

S’agissant toujours des résumés analytiques, il a été proposé que les rapports des groupes spéciaux contiennent seulement une description succincte des faits et des questions et que les résumés analytiques soient joints en annexe.  Vous aurez peut-être remarqué que cela a déjà été le cas pour plusieurs rapports distribués aux Membres en 2011.4

Il a été proposé par ailleurs que les parties présentent un seul résumé analytique intégré qui reprendrait les arguments contenus dans toutes les communications écrites présentées au groupe spécial, au lieu de présenter un résumé analytique distinct pour chaque communication.

II) Réduction du nombre d’annexes

La proposition suivante a trait à la réduction du nombre d’annexes jointes aux rapports des groupes spéciaux, telles que les demandes de consultations, les demandes d’établissement d’un groupe spécial ou les décisions préliminaires.  Dans la mesure où ces documents sont dans le domaine public bien avant la publication du rapport du groupe spécial, il a été proposé qu’ils ne soient pas annexés aux rapports.

Le procès-verbal de la réunion du groupe spécial avec les experts est habituellement joint au rapport du groupe spécial en tant qu’annexe.  En fait, il fait partie du dossier du groupe spécial.  Il a cependant été proposé qu’il ne soit plus annexé au rapport mais qu’il figure dans la version électronique du document disponible sur le site Web de l’OMC afin de préserver la transparence.

Une évolution, observée à cet égard dans des différends récents, est que les réponses des parties aux questions du groupe spécial ne sont généralement plus annexées à son rapport.  Il en va de même des réponses des experts aux questions du groupe spécial.

L’application de ces mesures éviterait au Secrétariat de passer du temps à préparer ces annexes, notamment en insérant les numéros exacts des affaires et en reformatant les documents, en cas de besoin, pour les mettre aux normes de l’OMC du point de vue des programmes utilisés et de la mise en page.  Le fait de réduire la longueur des rapports des groupes spéciaux permettrait évidemment de réduire les coûts d’impression et de publication et cela réduirait aussi sensiblement les coûts de traduction.

 

Dépôt électronique au Greffe du règlement des différends

Puisque nous parlons d’idées novatrices, je saisis cette occasion pour présenter une initiative différente.  En 2010, en consultation avec les Membres, l’OMC a commencé à moderniser le système de règlement des différends en créant une base de données numérique qui rassemble les renseignements sur toutes les affaires antérieures examinées par des groupes spéciaux et par l’Organe d’appel.  L’objectif est de simplifier la recherche par les Membres et le public des rapports et des autres documents publics relatifs au règlement des différends et de faciliter l’accès à ces documents.  Nous voulons aussi donner aux Membres la possibilité de déposer leurs communications par voie électronique au moyen d’un système de dépôt en ligne sécurisé.  Comme vous le savez, à l’heure actuelle, la plupart des communications sont actuellement transmises par courrier électronique.  Le nouveau système fonctionnera de manière analogue, mais il devrait être plus efficace à la fois pour les Membres et pour le Secrétariat, et permettre de réduire les frais d’envoi, d’entreposage et de photocopie.  En outre, cette méthode de présentation des communications sera plus sûre que celle que nous utilisons actuellement et n’obligera pas les Membres à disposer de matériel spécialisé.  S’ils peuvent envoyer un courrier électronique, ils peuvent déposer une communication par voie électronique.  Pour le moment, nous numérisons les rapports des groupes spéciaux et de l’Organe d’appel qui n’existent pas en version électronique ou qui se présentent sous une forme qui n’est plus lisible, afin de mettre en ligne ces documents dans les archives électroniques facilement consultables.  À terme, les documents qui seront déposés par voie électronique grâce au système en ligne seront automatiquement incorporés dans les archives et pourront être consultés par les personnes autorisées (les parties au différend en question, par exemple).  Un prototype du système proposé a été testé à la huitième Conférence ministérielle, en décembre 2011.  Les Membres ont eu la possibilité de rechercher et de télécharger des documents.  Nous travaillons actuellement avec eux pour finaliser la conception du système pour qu’il comporte les fonctionnalités les plus utiles aux parties aux différends.

 

CONCLUSION

Vous vous demandez peut-être quand ce processus de consultations prendra fin et portera ses fruits (ou peut-être vous demandez-vous simplement quand se terminera mon exposé!).  D’une certaine façon, il porte déjà ses fruits puisque certaines innovations ont été adoptées par certains groupes spéciaux.  La mise en œuvre plus large sera déterminée par les Membres de concert avec les membres des groupes spéciaux.  Je reste disposé à entendre d’autres points de vue et d’autres idées, et je serai heureux d’aider les Membres à améliorer l’efficacité d’un mécanisme de règlement des différends qui fonctionne déjà très bien mais qui peut sans nul doute être perfectionné.  Cela devrait être considéré, à plusieurs égards, comme un exercice permanent et continu:  il faut toujours tirer parti de l’expérience et être ouvert aux changements, même minimes, qui permettent d’améliorer le système.

Je vous remercie.

 

Notes:

1. Dans son discours devant le Comité du budget en 2011, le Directeur général a indiqué que, si l’on excluait les dépenses de personnel, l’OMC dépensait 3 millions de francs suisses par an pour l’impression des documents et pour leur distribution par voie postale aux quatre coins du globe. En outre, plus de 70 millions de pages sont imprimées chaque année! (Déclaration du Directeur général sur le projet de budget à la réunion du Comité du budget du 11 octobre 2011). Back to text

2. Des questions préalables ont été communiquées aux parties par les groupes spéciaux dans les affaires Chine — Matières premières et Philippines — Spiritueux distillés. Back to text

3.Bien avant l’ouverture de ce processus de consultations, le Groupe spécial États-Unis — Viande d’agneau avait limité à 30 minutes chacune la durée des déclarations orales des parties.  De même, le Groupe spécial CE — Subventions à l’exportation de sucre avait limité la durée des déclarations orales des tierces parties.  Du fait du renforcement des droits de tierce partie, les tierces parties ont été autorisées à assister à la deuxième réunion de fond, mais seulement en tant qu’observateurs.  Voir le rapport du Groupe spécial CE — Subventions à l’exportation de sucre, paragraphes 2.8 et 2.9.  Plus récemment, après le lancement du processus de consultations, le Groupe spécial États-Unis — Thon II (Mexique) a limité la durée des déclarations orales des tierces parties.  Des limites ont également été fixées pour les déclarations faites à l’automne dernier pendant les réunions du Groupe spécial Chine — Services de paiement électronique. Back to text

4.Il s’agit notamment des rapports des groupes spéciaux suivants:  Chine — Matières premières;  République dominicaine — Sauvegardes;  UE — Chaussures (Chine);  Philippines — Spiritueux distillés;  États-Unis — Cigarettes aux clous de girofle;  et États-Unis — EPO. Back to text

 

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