RÈGLEMENT DES DIFFÉRENDS

DS: États-Unis — Mesures concernant l'importation, la commercialisation et la vente de thon et de produits du thon

Le présent état récapitulatif a été élaboré par le Secrétariat sous sa propre responsabilité. Il est établi uniquement à titre d’information générale et n’affecte en rien les droits et obligations des Membres.

  

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État du différend à ce jour

Le résumé ci-dessous a été actualisé le

Consultations

Plainte du Mexique. 

Le 24 octobre 2008, le Mexique a demandé l'ouverture de consultations avec les États-Unis au sujet des mesures suivantes:  i) l'article 1385 du Titre 16 du United States Code (“Loi visant à informer les consommateurs sur la protection des dauphins”);  ii) l'article 216.91 (“Règles en matière d'étiquetage Dolphin Safe”) et l'article 216.92 (“Prescriptions en matière d'étiquetage Dolphin Safe pour le thon capturé dans les eaux tropicales du Pacifique Est par de grands navires équipés de sennes coulissantes”), du Titre 50 du Code of Federal Regulations;  et iii) la décision rendue dans l'affaire Earth Island Institute c.  Hogarth, 494 F. 3d 757 (9th Cir. 2007). 

Le Mexique alléguait que les mesures en cause — qui fixaient les conditions d'utilisation d'un étiquetage “Dolphin Safe” pour les produits du thon et soumettaient l'accès à la marque Dolphin Safe officielle du Département du commerce des États-Unis à la présentation de certains éléments de preuves documentaires qui variaient en fonction de la zone de capture du thon contenu dans le produit du thon et de la méthode utilisée — étaient incompatibles avec, entre autres, les articles I:1 et III:4 du GATT de 1994 et l'article 2.1, 2.2 et 2.4 de l'Accord OTC.

Le 6 novembre 2008, les Communautés européennes ont demandé à participer aux consultations.  Le 7 novembre 2008, l'Australie a fait de même.

Le 9 mars 2009, le Mexique a demandé l'établissement d'un groupe spécial.  À sa réunion du 20 mars 2009, l'ORD a reporté l'établissement d'un groupe spécial.

 

Procédure de groupe spécial et procédure d'appel

À sa réunion du 20 avril 2009, l'ORD a établi un groupe spécial.  L'Argentine, l'Australie, la Chine, les Communautés européennes, la Corée, l'Équateur, le Guatemala, le Japon, la Nouvelle-Zélande, le Taipei chinois et la Turquie ont réservé leurs droits de tierces parties.  Le Brésil, le Canada, la Thaïlande et le Venezuela ont fait de même ultérieurement.  Le 2 décembre 2009, le Mexique a demandé au Directeur général de déterminer la composition du Groupe spécial.  Le 14 décembre 2009, le Directeur général a arrêté la composition du Groupe spécial.  Le 15 juin 2010, le Président du Groupe spécial a informé l'ORD que, conformément au calendrier adopté en consultation avec les parties au différend, le Groupe spécial comptait remettre son rapport final aux parties en février 2011.

À la suite du décès de M. Sivakant Tiwari le 26 juillet 2010, les parties sont convenues, le 12 août 2010, de la désignation d'un nouveau membre du Groupe spécial.

Le 24 février 2011, le Président du Groupe spécial a informé l'ORD que, en raison de la nécessaire modification du calendrier à la suite d'un changement imprévu dans la composition du Groupe spécial, ainsi que de la complexité d'un certain nombre de questions soulevées dans cette affaire, le Groupe spécial comptait maintenant remettre son rapport final aux parties pour le 8 juin 2011.

Le 15 septembre 2011, le rapport du Groupe spécial a été distribué aux Membres.

  • Ce différend concerne les mesures suivantes:  i) l'article 1385 du Titre 16 du United States Code (“Loi visant à informer les consommateurs sur la protection des dauphins”);  ii) l'article 216.91 (“Règles en matière d'étiquetage Dolphin Safe”) et l'article 216.92 (“Prescriptions en matière d'étiquetage Dolphin Safe pour le thon capturé dans les eaux tropicales du Pacifique Est par de grands navires équipés de sennes coulissantes”), du Titre 50 du Code of Federal Regulations;  et iii) la décision rendue dans l'affaire Earth Island Institute c. Hogarth, 494 F. 3d 757 (9th Cir. 2007).  Ces mesures fixent les conditions d'utilisation d'un étiquetage “Dolphin Safe” pour les produits du thon.  Elles soumettent l'accès à la marque Dolphin Safe officielle du Département du commerce des États-Unis à la présentation de certains éléments de preuves documentaires qui varient en fonction de la zone de capture du thon contenu dans le produit du thon et de la méthode utilisée.
     
  • Les principales allégations du Mexique étaient que les mesures étaient discriminatoires et qu'elles étaient aussi non nécessaires.
     
  • Le Groupe spécial a d'abord cherché à déterminer si les dispositions des États-Unis en matière d'étiquetage Dolphin Safe constituaient un règlement technique aux fins de l'Accord OTC.  Il a constaté que c'était le cas, et en particulier que les mesures étaient obligatoires au sens de l'Annexe 1.1 de l'Accord OTC.  L'un des membres du Groupe spécial a exprimé une opinion dissidente sur cette question, mais a souscrit à l'opinion de la majorité pour le reste du rapport.  Le Groupe spécial a ensuite examiné les allégations du Mexique au titre de l'article 2.1, 2.2 et 2.4 de l'Accord OTC.
       
  • Le Groupe spécial a rejeté la première allégation du Mexique en constatant que les dispositions des États-Unis en matière d'étiquetage Dolphin Safe n'établissaient pas de discrimination à l'égard des produits du thon mexicains et n'étaient donc pas incompatibles avec l'article 2.1 de l'Accord OTC.  Bien qu'il ait constaté que les produits du thon mexicains étaient similaires aux produits du thon originaires des États-Unis ou de tout autre pays au sens de l'article 2.1 de l'Accord OTC, le Groupe spécial a conclu qu'il n'était pas accordé aux produits du thon mexicains un traitement moins favorable qu'aux produits du thon originaires des États-Unis et d'autres pays en ce qui concerne les dispositions des États-Unis en matière d'étiquetage Dolphin Safe sur la base de leur origine.
     
  • S'agissant de l'allégation du Mexique au titre de l'article 2.2 de l'Accord OTC, le Groupe spécial a constaté que le Mexique avait démontré que les dispositions des États-Unis en matière d'étiquetage Dolphin Safe étaient plus restrictives pour le commerce qu'il n'était nécessaire pour réaliser les objectifs légitimes consistant à i) faire en sorte que les consommateurs ne soient pas trompés ou induits en erreur quant à la question de savoir si les produits du thon contenaient du thon capturé d'une manière qui avait des effets nuisibles sur les dauphins, et ii) contribuer à la protection des dauphins, en faisant en sorte que le marché des États-Unis ne soit pas utilisé pour encourager les flottilles de pêche à capturer le thon d'une manière qui avait des effets nuisibles sur les dauphins, compte tenu des risques que la non-réalisation de ces objectifs entraînerait.  La conclusion du Groupe spécial était fondée sur les deux constatations ci-après:  i) les dispositions des États-Unis en matière d'étiquetage Dolphin Safe ne répondaient que partiellement aux objectifs légitimes recherchés par les États-Unis, et ii) le Mexique avait indiqué au Groupe spécial une mesure de rechange moins restrictive pour le commerce qui permettrait d'obtenir le même niveau de protection que celui de l'objectif recherché par les dispositions des États-Unis en matière d'étiquetage Dolphin Safe.
     
  • En ce qui concerne l'allégation du Mexique au titre de l'article 2.4 de l'Accord OTC, le Groupe spécial a constaté que les dispositions des États-Unis en matière d'étiquetage Dolphin Safe ne constituaient pas une violation de cette disposition, qui exige que les règlements techniques soient basés sur les normes internationales pertinentes dans les cas où cela est possible.  Bien qu'il ait constaté que la norme à laquelle le Mexique faisait référence était une norme internationale pertinente aux fins des dispositions des États-Unis en matière d'étiquetage Dolphin Safe, et que les États-Unis ne l'avaient pas utilisée comme base pour leurs mesures, le Groupe spécial a conclu que cette norme ne serait ni appropriée ni efficace pour réaliser les objectifs des États-Unis.
     
  • Le Groupe spécial s'est abstenu par ailleurs de se prononcer sur les allégations du Mexique concernant la non-discrimination au titre du GATT de 1994 et a donc appliqué le principe d'économie jurisprudentielle en ce qui concerne les allégations du Mexique au titre des articles I:1 et III:4 du GATT.

Le 31 octobre 2011, le Mexique et les États‑Unis ont demandé à l'ORD d'adopter un projet de décision prorogeant le délai de 60 jours prévu à l'article 16:4 du Mémorandum d'accord jusqu'au 20 janvier 2012.  À sa réunion du 11 novembre 2011, l'ORD est convenu, sur demande présentée par le Mexique ou les États‑Unis, d'adopter, au plus tard le 20 janvier 2012, le rapport du Groupe spécial, à moins que l'ORD ne décide par consensus de ne pas le faire ou que le Mexique ou les États‑Unis ne notifient à l'ORD leur décision de faire appel conformément à l'article 16:4 du Mémorandum d'accord sur les règles et procédures régissant le règlement des différends.

Le 20 janvier 2012, les États-Unis ont notifié à l'ORD leur décision de faire appel de certaines questions de droit et interprétations du droit formulées par le Groupe spécial.  Le 25 janvier 2012, le Mexique a notifié à l'ORD sa décision de faire appel de certaines questions de droit et interprétations du droit formulées par le Groupe spécial, ainsi que du manquement par le Groupe spécial à son obligation de procéder à une évaluation objective de la question comme le prescrit l'article 11 du Mémorandum d'accord.

Le 20 mars 2012, la Présidente de l'Organe d'appel a notifié l'ORD que l'Organe d'appel ne serait pas en mesure de distribuer son rapport dans le délai de 90 jours en raison en partie de l'ampleur de l'appel, y compris le nombre et la complexité des questions soulevées par les participants.  Cela était dû également au grand nombre d'affaires que l'Organe d'appel devait traiter et aux problèmes de calendrier qui en résultaient.  L'Organe d'appel prévoit que le rapport concernant cet appel sera distribué aux Membres le 16 mai 2012 au plus tard.

Le 16 mai 2012, le rapport de l'Organe d'appel a été distribué aux Membres.

Ce différend découle d'une contestation formulée par le Mexique à l'encontre de certains instruments juridiques des États-Unis (la “mesure en cause”) établissant les conditions d'utilisation d'un label Dolphin Safe pour les produits du thon.  Les instruments juridiques indiqués par le Mexique dans sa demande d'établissement d'un groupe spécial comprenaient l'article 1385 du Titre 16 du United States Code (la “Loi visant à informer les consommateurs sur la protection des dauphins” ou “DPCIA”), le règlement d'application et une décision rendue par une cour d'appel fédérale des États-Unis dans l'affaire Earth Island Institute c. Hogarth au sujet de l'application de la DPCIA.  La mesure en cause ne rend pas l'utilisation d'un label Dolphin safe obligatoire pour l'importation ou la vente de produits du thon aux États-Unis.  Les conditions établies dans la mesure en cause varient selon la zone dans laquelle le thon contenu dans le produit du thon a été capturé et le type de navire et la méthode de pêche utilisés pour la capture.  En particulier, les produits du thon fabriqués à partir de thon capturé par “encerclement” des dauphins (à savoir, le fait de chasser et d'encercler les dauphins au moyen d'un filet pour capturer le thon qui leur est associé) ne sont pas admissibles au bénéfice du label Dolphin safe aux États-Unis.  Devant le Groupe spécial, le Mexique a allégué que la mesure en cause était incompatible avec les articles I:1 et III:4 du GATT de 1994 et avec l'article 2.1, 2.2 et 2.4 de l'Accord OTC.

S'agissant de la question de savoir si la mesure en cause constituait un “règlement technique”, l'Organe d'appel a constaté que le Groupe spécial n'avait pas fait erreur en qualifiant la mesure en cause de “règlement technique” au sens de l'Annexe 1.1 de l'Accord OTC.  Il a noté que la mesure contestée était composée d'actes législatifs et réglementaires des autorités fédérales des États-Unis et incluait des dispositions administratives.  Il a ajouté que la mesure énonçait une définition unique et prescrite juridiquement d'un produit du thon Dolphin Safe et prohibait l'utilisation d'autres labels sur les produits du thon qui utilisaient l'expression Dolphin Safe et les termes “dauphins”, “marsouins” et “mammifères marins” et qui ne répondaient pas à cette définition.  Ce faisant, la mesure des États-Unis prescrit d'une manière large et exhaustive les conditions qui s'appliquent pour la formulation de toute affirmation concernant un produit du thon quant à son “caractère Dolphin Safe”, indépendamment de la manière dont cette déclaration est faite.

S'agissant de l'allégation formulée par le Mexique au titre de l'article 2.1 de l'Accord OTC, l'Organe d'appel a infirmé la constatation du Groupe spécial selon laquelle les dispositions des États-Unis en matière d'étiquetage Dolphin Safe n'étaient pas incompatibles avec l'article 2.1 de l'Accord OTC et a constaté, au lieu de cela, que la mesure des États-Unis était incompatible avec l'article 2.1.  L'Organe d'appel a d'abord fait le raisonnement selon lequel, en empêchant la plupart des produits du thon mexicains d'accéder au label Dolphin Safe et en donnant accès à la plupart des produits du thon des États-Unis et des produits du thon provenant d'autres pays, la mesure modifiait les conditions de concurrence sur le marché des États-Unis au détriment des produits du thon mexicains.  L'Organe d'appel a ensuite analysé si, compte tenu des constatations de fait formulées par le Groupe spécial et des faits non contestés versés au dossier, l'effet préjudiciable de la mesure découlait exclusivement d'une distinction réglementaire légitime.  En particulier, l'Organe d'appel a examiné si les différentes conditions d'accès au label Dolphin Safe étaient “adaptées” en fonction des risques présentés pour les dauphins par différentes méthodes de pêche dans différentes zones de l'océan, comme l'avaient allégué les États-Unis.  Il a noté la constatation du Groupe spécial selon laquelle la technique de pêche par encerclement des dauphins était particulièrement dommageable pour ces derniers et selon laquelle cette méthode de pêche avait la capacité d'avoir des effets nuisibles observés et non observés sur les dauphins.  Dans le même temps, le Groupe spécial n'était pas convaincu que les risques posés pour les dauphins par d'autres techniques de pêche étaient négligeables et n'atteignaient pas, dans certaines circonstances, le même niveau que les risques résultant de l'encerclement des dauphins.  L'Organe d'appel a noté en outre la constatation du Groupe spécial selon laquelle, la mesure des États-Unis prenait pleinement en compte les effets nuisibles (y compris les effets observés et non observés) résultant pour les dauphins de leur encerclement dans l'ETP, alors qu'elle ne visait pas la mortalité découlant des méthodes de pêche autres que l'encerclement des dauphins dans d'autres zones de l'océan.  Dans ces circonstances, l'Organe d'appel a constaté que la mesure en cause n'était pas impartiale dans la manière dont elle remédiait aux risques présentés pour les dauphins par différentes techniques de pêche dans différentes zones de l'océan.

S'agissant de l'allégation formulée par le Mexique au titre de l'article 2.2 de l'Accord OTC, l'Organe d'appel a infirmé la constatation du Groupe spécial selon laquelle le Mexique avait démontré que les dispositions des États-Unis en matière d'étiquetage Dolphin Safe étaient plus restrictives pour le commerce qu'il n'était nécessaire pour réaliser les objectifs légitimes des États-Unis.  Ce faisant, il a fait, entre autres, le raisonnement selon lequel le Groupe spécial avait effectué une analyse et une comparaison viciées entre la mesure contestée et la mesure de rechange proposée par le Mexique et il a également noté que cette dernière n'apporterait pas une contribution à la réalisation des objectifs des États-Unis équivalente à celle apportée par la mesure des États-Unis dans toutes les zones océaniques.  Sur cette base, l'Organe d'appel a infirmé la constatation du Groupe spécial selon laquelle la mesure était incompatible avec l'article 2.2 de l'Accord OTC.

Le Mexique a formé un autre appel conditionnel au cas où l'Organe d'appel infirmerait la constatation du Groupe spécial selon laquelle la mesure en cause était incompatible avec l'article 2.2 de l'Accord OTC.  Étant donné que la condition sur laquelle reposait la demande du Mexique a été remplie, l'Organe d'appel a examiné l'autre appel présenté par le Mexique et a rejeté les deux motifs d'appel, à savoir, l'allégation du Mexique selon laquelle le Groupe spécial a fait erreur en constatant que l'objectif de protection des dauphins des États-Unis était un objectif légitime, et l'allégation du Mexique selon laquelle le Groupe spécial a fait erreur en examinant s'il y avait une mesure de rechange moins restrictive pour le commerce après avoir constaté que la mesure en cause ne pouvait, dans le meilleur des cas, que réaliser partiellement les objectifs des États-Unis.

L'Organe d'appel ne contestait pas la conclusion du Groupe spécial selon laquelle la mesure en cause des États-Unis n'était pas incompatible avec l'article 2.4 de l'Accord OTC.  Il a cependant infirmé la constatation intermédiaire du Groupe spécial selon laquelle la définition de la notion de “Dolphin Safe” et la certification Dolphin Safe élaborées dans le cadre de l'Accord relatif au Programme international pour la conservation des dauphins (“AIDCP”) étaient une “norme internationale pertinente” au sens de l'article 2.4 de l'Accord OTC.  En particulier, l'Organe d'appel a conclu que le Groupe spécial avait fait erreur en constatant que l'AIDCP, auquel des nouvelles parties pouvaient accéder uniquement sur invitation, était “ouvert à l'organisme compétent de tout pays et [était] donc une organisation internationale à activités normatives” aux fins de l'article 2.4 de l'Accord OTC.

L'Organe d'appel a constaté que le Groupe spécial avait agi d'une manière incompatible avec l'article 11 du Mémorandum d'accord en appliquant le principe d'économie jurisprudentielle en ce qui concerne les allégations formulées par le Mexique au titre des articles I:1 et III:4 du GATT de 1994.

À sa réunion du 13 juin 2012, l'ORD a adopté le rapport de l'Organe d'appel et le rapport du Groupe spécial, modifié par le rapport de l'Organe d'appel.

 

Délai raisonnable

À la réunion de l'ORD du 25 juin 2012, les États-Unis ont fait savoir qu'ils avaient l'intention de mettre en œuvre les recommandations et décisions de l'ORD d'une manière qui respecte leurs obligations et qu'ils auraient besoin d'un délai raisonnable pour ce faire. Le 17 septembre 2012, les États-Unis et le Mexique ont informé l'ORD qu'ils étaient convenus que le délai raisonnable imparti aux États-Unis pour mettre en œuvre les recommandations et décisions de l'ORD serait de 13 mois. Ce délai est donc arrivé à expiration le 13 juillet 2013.

 

Mise en œuvre des rapports adoptés

À la réunion de l'ORD du 23 juillet 2013, les États-Unis ont noté que, le 13 juillet 2013, ils avaient rendu exécutoire une règle finale qui modifiait certaines prescriptions en matière d'étiquetage Dolphin Safe et avaient mis ces prescriptions en conformité avec les recommandations et décisions de l'ORD. La règle finale a assuré la mise en conformité des États-Unis avec les recommandations et décisions de l'ORD dans le délai raisonnable.

Le 2 août 2013, le Mexique et les États-Unis ont informé l'ORD des procédures convenues au titre des articles 21 et 22 du Mémorandum d'accord.

 

Procédure de mise en conformité

Le 14 novembre 2013, le Mexique a demandé l'établissement d'un groupe spécial de la mise en conformité. À sa réunion du 25 novembre 2013, l'ORD a reporté l'établissement d'un groupe spécial. À sa réunion du 22 janvier 2014, l'ORD est convenu de soumettre, si possible, au Groupe spécial initial la question soulevée par le Mexique. Le Canada, la Chine, la Corée, le Guatemala, le Japon, la Norvège, la Thaïlande et l'Union européenne ont réservé leurs droits de tierces parties. Ultérieurement, l'Australie et la Nouvelle-Zélande ont fait de même. Le 27 janvier 2014, la composition du Groupe spécial de la mise en conformité a été arrêtée. Le 16 avril 2014, le Président du Groupe spécial de la mise en conformité a informé l'ORD que celui-ci comptait remettre son rapport final aux parties pour décembre 2014, conformément au calendrier adopté après consultation des parties. Le 28 janvier 2015, le Président du Groupe spécial de la mise en conformité a informé l'ORD que ce groupe spécial comptait remettre son rapport final aux parties pour le 30 janvier 2015.

Le 14 avril 2015, le rapport du Groupe spécial de la mise en conformité a été distribué aux Membres.

En réponse aux rapports du Groupe spécial et de l'Organe d'appel publiés dans le cadre des procédures initiales, les États-Unis ont modifié certaines des réglementations qui faisaient partie de la mesure initiale concernant le thon. Ces modifications exigeaient que tous les thons dont l'importation aux États-Unis avec étiquetage Dolphin safe était demandée, indépendamment de l'endroit où ils avaient été capturés et de la nationalité du navire de pêche, devaient être accompagnés d'une certification indiquant a) qu'aucun filet n'avaient été délibérément déployé sur les dauphins lors de l'opération au cours de laquelle le thon avait été capturé; et b) qu'aucun dauphin n'avait été tué ou gravement blessé lors des opérations au cours desquelles le thon avait été capturé. Cependant, les autres prescriptions concernant la documentation, le repérage et la vérification continuaient à varier suivant l'endroit où le thon avait été capturé. De plus, la mesure continuait à interdire l'étiquetage Dolphin safe pour le thon capturé par encerclement des dauphins. Les réglementations modifiées ainsi que la législation d'habilitation non modifiée (Loi visant à informer les consommateurs sur la protection des dauphins) et la décision du 9ème circuit dans l'affaire Earth Island Institute c. Hogarth ont été désignées par le Groupe spécial comme étant la “mesure modifiée concernant le thon”.

Le Mexique s'est plaint de ce que la mesure modifiée concernant le thon ne mettait pas les États-Unis en conformité avec leurs obligations découlant de l'Accord sur l'OMC. En particulier, il a fait valoir que cette mesure violait:

  1. l'article 2.1 de l'Accord OTC;
  2. l'article I:1 du GATT de 1994; et
  3. l'article III du GATT de 1994.

Les États-Unis ont fait valoir que la mesure modifiée concernant le thon les avait mis en conformité avec les décisions et recommandations formulées par l'ORD dans la procédure initiale. De plus, ils ont fait valoir que certains aspects de la plainte du Mexique ne relevaient pas du mandat du Groupe spécial parce qu'ils concernaient des aspects de la mesure qui étaient restés inchangés depuis la procédure initiale.

Article 2.1 de l'Accord OTC

Le Groupe spécial a rejeté l'allégation du Mexique selon laquelle la mesure modifiée concernant le thon était incompatible avec l'article 2.1 de l'Accord OTC parce qu'elle interdisait l'accès à l'étiquetage Dolphin safe pour les thons capturés par encerclement des dauphins. Il a admis que cet aspect de la mesure avait un effet préjudiciable sur les possibilités de concurrence pour le thon et les produits du thon mexicains aux États-Unis. Cependant, d'après le Groupe spécial, l'Organe d'appel avait déjà constaté, dans la procédure initiale, que les différents dommages causés par l'encerclement des dauphins, d'une part, et les autres méthodes de pêche du thon, d'autre part, justifiaient la décision des États-Unis de traiter ces méthodes de pêche de manière différente. Selon le Groupe spécial, aucun des nouveaux éléments de preuve présentés par le Mexique ne soulevait de doute concernant cette conclusion de l'Organe d'appel.

Le Groupe spécial a ensuite rappelé que, dans la procédure originale, l'Organe d'appel avait constaté que la mesure concernant le thon était incompatible avec l'article 2.1 de l'Accord OTC parce qu'elle imposait une charge discriminatoire pour certains thons suivant l'endroit où ils avaient été capturés. Il a ensuite examiné si cette discrimination avait été supprimée dans la mesure modifiée concernant le thon.

Le Groupe spécial a estimé, comme le Mexique, que la mesure modifiée concernant le thon restait incompatible avec l'article 2.1 de l'Accord OTC parce qu'elle imposait des prescriptions différentes, en ce qui concerne la documentation, le repérage et la vérification, suivant la pêcherie où le thon avait été capturé. Ces différences établissaient de facto une discrimination à l'encontre du thon et des produits du thon mexicains en soumettant ce thon à des charges additionnelles qui ne visaient par le thon capturé par les autres Membres. En particulier, le thon capturé par la pêcherie des grands navires équipés de sennes coulissantes des eaux tropicales du Pacifique Est (ETP), où la majeure partie de la flottille mexicaine pêche, ne pouvait être étiqueté Dolphin safe que si à la fois le capitaine et un observateur indépendant certifiaient que le thon avait été capturé sans dommages aux dauphins; alors que, pour le thon capturé dans toutes les autres pêcheries, seule une certification du capitaine était nécessaire. De plus, les prescriptions en matière de repérage et de vérification pour le thon capturé dans la pêcherie des grands navires équipés de sennes coulissantes de l'ETP étaient plus astreignantes que celles qui étaient imposées pour le thon capturé dans les autres pêcheries. Le Groupe spécial a constaté que ces différences modifiaient les conditions de concurrence au détriment du thon et des produits du thon mexicains. En outre, il a conclu que ce traitement préjudiciable ne découlait pas exclusivement d'une distinction réglementaire légitime et n'était pas impartial. Selon le Groupe spécial, cela tenait au fait que les États-Unis ne s'étaient pas acquittés de la charge de la preuve qui leur incombait, consistant à expliquer en quoi ces prescriptions réglementaires différentes se rapportaient aux objectifs généraux de protection des dauphins et de fourniture de renseignements exacts aux consommateurs ou étaient justifiées par ces objectifs.

Un membre du Groupe spécial n'estimait pas que la mesure modifiée concernant le thon violait l'article 2.1 de l'Accord OTC parce qu'elle exigeait la certification d'un observateur indépendant pour le thon capturé dans la pêcherie des grands navires équipés de sennes coulissantes de l'ETP, mais pas pour le thon capturé dans les autres pêcheries. D'après lui, cette distinction était justifiée par le fait que l'encerclement des dauphins impliquait toujours un niveau de risque plus élevé pour les dauphins que les autres méthodes de pêche. Cependant, ce membre est convenu que les prescriptions en matière de repérage et de vérification, qui étaient différentes, contrevenaient à l'article 2.1.

Article I:1 du GATT de 1994

Le Groupe spécial a constaté que la mesure modifiée concernant le thon subordonnait l'accès du thon capturé dans la pêcherie des grands navires équipés de sennes coulissantes de l'ETP à l'étiquetage Dolphin safe, à certaines prescriptions additionnelles qui n'étaient pas imposées au thon capturé dans les autres pêcheries. Il a constaté que, en tant que telle, la mesure était incompatible avec l'article I:1 du GATT de 1994.

Article III:4 du GATT de 1994

Le Groupe spécial a constaté que la mesure modifiée concernant le thon modifiait les conditions de concurrence sur le marché des États-Unis au détriment du thon et des produits dérivés du thon mexicains. Dans le cadre de cette mesure, l'accès à l'étiquetage Dolphin safe était refusé au thon capturé par encerclement des dauphins, la principale méthode de pêche du Mexique, et des prescriptions additionnelles et contraignantes en matière de certification, de repérage et de vérification étaient imposées pour le thon capturé dans la pêcherie des grands navires équipés de sennes coulissantes de l'ETP, où la majeure partie de la flottille mexicaine pêchait. En conséquence, la mesure était incompatible avec l'article III:4 du GATT de 1994.

Le moyen de défense des États-Unis au titre de l'article XX b) et g)

Les États-Unis ont fait valoir que, si la mesure modifiée concernant le thon était incompatible avec le GATT de 1994, elle était justifiée au titre de l'article XX b) et g).

Le Groupe spécial est convenu, comme les États-Unis, que l'interdiction de cet étiquetage pour le thon capturé par encerclement des dauphins était justifiée au titre de l'article XX g), n'était pas appliquée d'une manière qui constituait une discrimination arbitraire ou injustifiable et n'était pas une restriction déguisée au commerce. Cet aspect de la mesure modifiée concernant le thon était donc justifié au titre de l'alinéa g) et du texte introductif de l'article XX.

Le Groupe spécial est convenu, comme les États-Unis, que les différentes prescriptions en matière de certification “se rapportaient à” la conservation au sens de l'article XX g). Cependant, la majorité des membres du Groupe spécial ont estimé que ces prescriptions étaient appliquées d'une manière arbitrairement discriminatoire, ce qui était contraire au texte introductif. Un membre du Groupe spécial a exprimé son désaccord et estimait que les différentes prescriptions en matière de certification étaient conformes au texte introductif.

Enfin, le Groupe spécial a estimé que les différentes prescriptions en matière de repérage et de vérification “se rapportaient à” la conservation au sens de l'article XX g). Néanmoins, il estimait que ces prescriptions étaient appliquées d'une manière qui constituait une discrimination arbitraire ou injustifiable et, en conséquence, étaient incompatibles avec le texte introductif de l'article XX.

Le Groupe spécial a appliqué le principe d'économie jurisprudentielle en ce qui concerne le moyen de défense des États-Unis au titre de l'article XX b), puisqu'il n'a pas considéré comme nécessaire de rendre une décision au titre de cette disposition pour régler le différend.

Le 5 juin 2015, les États-Unis ont notifié à l'ORD leur décision de faire appel de certaines questions de droit couvertes par le rapport du Groupe spécial de la mise en conformité. Le 10 juin 2015, le Mexique a déposé une déclaration d'un autre appel dans le même différend.

Le 3 août 2015, à l'expiration du délai de 60 jours prévu à l'article 17:5 du Mémorandum d'accord, l'Organe d'appel a informé l'ORD que son rapport sur cette affaire serait distribué aux Membres de l'OMC au plus tard le vendredi 20 novembre 2015.

Le 20 novembre 2015, le rapport l'Organe d'appel a été distribué aux Membres.

Cette procédure concerne le régime des États-Unis établissant les conditions applicables pour l'étiquetage Dolphin Safe des produits du thon. La mesure modifiée des États-Unis est constituée de trois ensembles principaux de conditions d'étiquetage, à savoir les “critères d'admissibilité” (c'est-à-dire l'exclusion des produits du thon obtenus à partir de thon capturé par encerclement des dauphins de l'accès au label Dolphin Safe, ainsi que l'admission au bénéfice de ce label des produits du thon capturé au moyen d'autres méthodes de pêche), les “prescriptions concernant la certification” (exigeant la certification du statut Dolphin Safe du thon qui doit, à l'intérieur de la pêcherie des grands navires équipés de sennes coulissantes de l'ETP, être fournie à la fois par le capitaine du navire et par un observateur indépendant se trouvant à bord du navire et, à l'extérieur de la pêcherie des grands navires équipés de sennes coulissantes de l'ETP, doit être fournie uniquement par le capitaine du navire), et les “prescriptions concernant le repérage et la vérification” (exigeant que les produits du thon soient accompagnés de certains documents attestant que le thon Dolphin Safe a été séparé du thon non-Dolphin Safe depuis le moment de la capture jusqu'au bout de la chaîne de transformation). Les “prescriptions concernant la certification” comprennent aussi les “dispositions relatives aux déterminations”, en vertu desquelles l'Administrateur adjoint du NMFS peut, si certaines conditions sont remplies, aussi exiger la certification du statut Dolphin Safe du thon par un observateur indépendant se trouvant à bord pour le thon capturé dans une pêcherie spécifique à l'extérieur de la pêcherie des grands navires équipés de sennes coulissantes de l'ETP.

Les États-Unis ont fait appel des constatations du Groupe spécial de la mise en conformité selon lesquelles les “prescriptions concernant la certification” ainsi que les “prescriptions concernant le repérage et la vérification” prévues par la mesure modifiée étaient incompatibles avec l'article 2.1 de l'Accord OTC et les articles I:1 et III:4 du GATT de 1994 et n'étaient pas justifiées au regard du texte introductif de l'article XX. Le Groupe spécial a aussi constaté que les “critères d'admissibilité” prévus par cette mesure étaient compatibles avec l'article 2.1 de l'Accord OTC et, bien qu'ils soient incompatibles avec les articles I:1 et III:4 du GATT de 1994, étaient justifiés au regard du texte introductif de l'article XX. Le Mexique a fait appel de ces constatations du Groupe spécial et a aussi allégué que le Groupe spécial avait fait erreur en formulant ses constatations au sujet des éléments distincts de la mesure modifiée au lieu d'évaluer la mesure dans son ensemble.

L'Organe d'appel a souligné que le Groupe spécial avait effectué des analyses segmentées et formulé des constatations séparées en ce qui concerne les “critères d'admissibilité”, les “prescriptions concernant la certification” et les “prescriptions concernant le repérage et la vérification” prévus par la mesure modifiée concernant le thon, sans tenir compte de la façon dont ces éléments étaient corrélés. L'Organe d'appel s'est abstenu de se prononcer sur les conséquences de cette approche dans l'absolu, et il a, au lieu de cela, tenu compte de l'analyse segmentée du Groupe spécial lorsqu'il a examiné les constatations spécifiques contestées en appel.

Article 2.1 de l'Accord OTC

S'agissant de la question de savoir si la mesure modifiée concernant le thon avait un effet préjudiciable sur les produits du thon mexicains, l'Organe d'appel a constaté que le Groupe spécial avait fait erreur, entre autres choses, en: i) effectuant des analyses segmentées pour chacune des conditions d'étiquetage prévues par la mesure modifiée des États-Unis, sans évaluer la façon dont ces conditions d'étiquetage fonctionnaient conjointement d'une manière qui affectait les conditions de concurrence pour les produits du thon mexicains sur le marché des États-Unis; ii) en faisant porter son analyse des prescriptions concernant la certification ainsi que le repérage et la vérification sur un sous-ensemble des groupes pertinents de produits similaires.

S'agissant de la question de savoir si l'effet préjudiciable sur les produits du thon mexicains découlait exclusivement d'une distinction réglementaire légitime, l'Organe d'appel a constaté que le Groupe spécial n'avait pas fait erreur dans son énonciation du critère juridique. Il a toutefois constaté que le Groupe spécial avait fait erreur en appliquant ce critère à la mesure en cause: i) en réaffirmant la “constatation” supposée de l'Organe d'appel selon laquelle les critères d'admissibilité étaient impartiaux et n'étaient pas incompatibles avec l'article 2.1; et ii) en n'examinant pas si les différences dans les risques relatifs de dommage pour les dauphins dans différentes pêcheries expliquaient ou justifiaient les différences dans les prescriptions concernant la certification et les prescriptions concernant le repérage et la vérification appliquées à l'intérieur et à l'extérieur de la pêcherie des grands navires équipés de sennes coulissantes de l'ETP.

Sur la base de ce qui précède, l'Organe d'appel a infirmé la constatation du Groupe spécial selon laquelle les “critères d'admissibilité” n'accordaient pas aux produits du thon mexicains un traitement moins favorable que celui qui était accordé aux produits similaires en provenance des États-Unis et d'autres pays et étaient, par conséquent, compatibles avec l'article 2.1, et il a également infirmé les constatations séparées du Groupe spécial selon lesquelles les “prescriptions concernant la certification” et les “prescriptions concernant le repérage et la vérification” accordaient aux produits du thon mexicains un traitement moins favorable que celui qui était accordé aux produits similaires en provenance des États-Unis et d'autres pays et étaient, par conséquent, incompatibles avec l'article 2.1.

L'Organe d'appel a ensuite complété l'analyse juridique et a constaté que, en excluant la plupart des produits du thon mexicains de l'accès au label Dolphin Safe, tout en accordant un accès conditionnel à ce label aux produits similaires des États-Unis et d'autres pays, la mesure modifiée concernant le thon, comme la mesure initiale, modifiait les conditions de concurrence au détriment des produits du thon mexicains sur le marché des États-Unis. En l'absence d'une évaluation appropriée par le Groupe spécial des risques pour les dauphins à l'intérieur et à l'extérieur de la pêcherie des grands navires équipés de sennes coulissantes de l'ETP, l'Organe d'appel n'a pas été en mesure d'évaluer pleinement si toutes les distinctions réglementaires établies au titre de la mesure modifiée concernant le thon pouvaient être expliquées et justifiées compte tenu des différences dans les risques relatifs pour les dauphins dans ces différentes pêcheries. Néanmoins, l'Organe d'appel a été en mesure de constater que les “dispositions relatives aux déterminations” ne prévoyaient pas une certification par l'observateur dans toutes les circonstances où les risques étaient d'ampleur comparable et n'étaient donc pas conciliables avec les objectifs de la mesure des États-Unis. Sur cette base, l'Organe d'appel a constaté que la mesure modifiée était incompatible avec l'article 2.1.

Articles I:1, III:4 et XX du GATT de 1994

S'agissant de la compatibilité de la mesure modifiée concernant le thon avec les articles I:1 et III:4 du GATT de 1994, l'Organe d'appel a constaté que le Groupe spécial avait fait erreur, entre autres choses: i) en effectuant des analyses segmentées pour chacune des conditions d'étiquetage prévues par la mesure modifiée des États-Unis, sans évaluer la façon dont ces conditions d'étiquetage fonctionnaient conjointement d'une manière qui affectait les conditions de concurrence pour les produits du thon mexicains sur le marché des États-Unis; ii) en faisant porter son analyse des prescriptions concernant la certification ainsi que le repérage et la vérification sur un sous-ensemble des groupes pertinents de produits similaires. Ainsi, l'Organe d'appel a infirmé les constatations du Groupe spécial selon lesquelles les trois ensembles de prescriptions prévus par la mesure modifiée des États-Unis étaient les uns comme les autres incompatibles avec les articles I:1 et III:4.

S'agissant du texte introductif de l'article XX du GATT de 1994, l'Organe d'appel a fait part de ses préoccupations au sujet du raisonnement du Groupe spécial sur le point de savoir si les conditions pertinentes qui existaient étaient “les mêmes”, y compris son point de vue selon lequel les conditions pertinentes n'étaient pas les mêmes pour les critères d'admissibilité, mais étaient les mêmes pour les prescriptions concernant la certification. L'Organe d'appel a constaté que le Groupe spécial n'avait pas fait erreur dans son énonciation du critère juridique, ou du fait qu'il s'était appuyé sur des éléments du raisonnement qu'il avait fait dans son analyse au titre de l'article 2.1 de l'Accord OTC. Toutefois, pour des raisons analogues à celles qui l'avaient conduit à constater que le Groupe spécial avait fait erreur dans son analyse du point de savoir si l'effet préjudiciable découlait exclusivement d'une distinction réglementaire légitime au titre de l'article 2.1, l'Organe d'appel a constaté que le Groupe spécial avait fait erreur et, par conséquent, il a infirmé sa constatation selon laquelle les critères d'admissibilité étaient compatibles avec le texte introductif, ainsi que ses constatations séparées selon lesquelles les prescriptions différentes concernant la certification et les prescriptions différentes concernant le repérage et la vérification étaient les unes et les autres incompatibles avec le texte introductif.

Pour compléter l'analyse juridique au titre du GATT de 1994, l'Organe d'appel a constaté que la mesure modifiée modifiait les conditions de concurrence au détriment des produits du thon mexicains, d'une manière incompatible avec les articles I:1 et III:4.

S'agissant de l'article XX, il n'a pas été fait appel des constatations du Groupe spécial de la mise en conformité selon lesquelles les dauphins constituaient une “ressource naturelle épuisable” ni des constatations selon lesquelles les diverses prescriptions prévues par la mesure modifiée concernant le thon étaient provisoirement justifiées au titre de l'alinéa g) de l'article XX. Pour compléter l'analyse concernant le texte introductif, l'Organe d'appel a constaté que les conditions pertinentes qui existaient entre les pays, à savoir le risque de dommages présenté pour les dauphins par les pratiques de pêche au thon, étaient les mêmes aux fins du texte introductif de l'article XX. En l'absence d'une évaluation appropriée par le Groupe spécial des risques pour les dauphins à l'intérieur et à l'extérieur de la pêcherie des grands navires équipés de sennes coulissantes de l'ETP, l'Organe d'appel n'a pas été en mesure de compléter l'analyse du point de savoir si la discrimination au titre de la mesure modifiée concernant le thon pouvait être expliquée et justifiée compte tenu des différences dans les risques relatifs pour les dauphins dans ces différentes pêcheries. Pourtant, il a été en mesure de compléter l'analyse concernant la conception des dispositions relatives aux déterminations. En particulier, il a constaté que ces dispositions ne prévoyaient pas que les conditions de fond régissant l'accès au label Dolphin Safe soient renforcées par une certification par l'observateur dans toutes les circonstances où les risques étaient d'ampleur comparable, et que cela pouvait aussi entraîner des prescriptions concernant le repérage et la vérification différentes de celles qui s'appliquaient à l'intérieur de la pêcherie des grands navires équipés de sennes coulissantes de l'ETP. L'Organe d'appel a constaté, par conséquent, que la mesure modifiée n'était pas appliquée d'une manière compatible avec le texte introductif de l'article XX.

À sa réunion du 3 décembre 2015, l'ORD a adopté les rapports de l'Organe d'appel au titre de l'article 21:5 et les rapports du Groupe spécial au titre dudit article, modifiés par les rapports de l'Organe d'appel.

 

Procédure au titre de l'article 22 du Mémorandum d'accord (mesures correctives)

Le 10 mars 2016, le Mexique a demandé à l'ORD l'autorisation de suspendre des concessions ou d'autres obligations au titre de l'article 22:2 du Mémorandum d'accord. Le 22 mars 2016, les États-Unis ont contesté le niveau de la suspension de concessions ou d'autres obligations proposé par le Mexique et ont demandé que la question soit soumise à arbitrage au titre de l'article 22:6 du Mémorandum d'accord. À la réunion de l'ORD du 23 mars 2016, il a été convenu que la question était soumise à arbitrage conformément à l'article 22:6 du Mémorandum d'accord. Les Membres suivants ont envoyé une communication à l'ORD afin de réserver leurs droits de tierces parties, dans la mesure où la procédure d'arbitrage visait un désaccord entre les parties au sujet de la mise en conformité: l'Union européenne (le 31 mars 2016), le Canada (le 11 avril 2016) et le Brésil (le 29 avril 2016).

L'arbitrage a été mené à bien par deux membres du Groupe spécial initial, avec un nouveau Président, le Président du groupe spécial initial n'étant pas disponible.

Le 25 avril 2017, l'arbitre a distribué sa décision aux Membres. Il a déterminé que le niveau de l'annulation ou de la réduction d'avantages subie par le Mexique du fait de la mesure concernant le thon de 2013 était de 163,23 millions de dollars EU par an. Il a conclu que, conformément à l'article 22:4 du Mémorandum d'accord, le Mexique pouvait demander à l'ORD l'autorisation de suspendre des concessions ou d'autres obligations, comme il était indiqué dans le document WT/DS381/29, pour un montant ne dépassant pas 163,23 millions de dollars EU par an.

Le 11 mai 2017, le Mexique a demandé à l'ORD l'autorisation de suspendre, à l'égard des États-Unis, l'application de certaines concessions tarifaires et obligations connexes au titre du GATT de 1994 pour un montant annuel de 163,23 millions de dollars EU, conformément aux décisions de l'arbitre en vertu de l'article 22:7 du Mémorandum d'accord. À sa réunion du 22 mai 2017, l'ORD a autorisé le Mexique à suspendre, à l'égard des États-Unis, l'application de concessions ou d'autres obligations.

 

Procédure de mise en conformité (recours des États-Unis)

Le 11 avril 2016, les États-Unis ont demandé l'établissement d'un groupe spécial de la mise en conformité, puisqu'ils estimaient que la règle finale provisoire du 22 mars 2016 avait mis la mesure en matière d'étiquetage Dolphin Safe visée par les recommandations de l'ORD en conformité avec l'Accord OTC et le GATT de 1994.

À sa réunion du 22 avril 2016, l'ORD a reporté l'établissement d'un groupe spécial de la mise en conformité. À sa réunion du 9 mai 2016, conformément à l'article 21:5 du Mémorandum d'accord, l'ORD est convenu de porter devant le Groupe spécial initial, si possible, la question soulevée par les États-Unis. L'Australie, le Brésil, le Canada, la Chine, la Corée, l'Équateur, le Guatemala, l'Inde, le Japon, la Norvège, la Nouvelle-Zélande et l'Union européenne ont réservé leurs droits de tierces parties. Le 27 mai 2016, la composition du Groupe spécial de la mise en conformité a été arrêtée, avec un nouveau Président, le Président du groupe spécial initial n'étant pas disponible.

Le 18 novembre 2016, le Président du Groupe spécial de la mise en conformité a informé l'ORD que, en raison de la complexité des questions qui faisaient l'objet du différend, ainsi que de la procédure d'arbitrage au titre de l'article 22:6 du Mémorandum d'accord qui était en cours en ce qui concerne cette affaire et à laquelle les membres du Groupe spécial chargé de la présente procédure au titre de l'article 21:5 participaient également, le Groupe spécial de la mise en conformité comptait remettre son rapport final aux parties pour la mi-mai 2017. Le 13 avril 2017, le Président du Groupe spécial de la mise en conformité a informé l'ORD que, en raison de la complexité des questions faisant l'objet du différend, le Groupe spécial de la mise en conformité comptait remettre son rapport final aux parties pour la mi-juillet 2017.

Le 26 octobre 2017, le rapport du Groupe spécial de la mise en conformité a été distribué aux Membres.

Contexte

La procédure engagée par les États-Unis et celle qui a été engagée par le Mexique concernent toutes deux la mesure de 2016 concernant le thon. Cette mesure spécifie les conditions devant être respectées pour que les produits du thon vendus aux États-Unis soient étiquetés Dolphin Safe ou que des assertions similaires soient inscrites sur leurs étiquettes. Les États-Unis ont demandé aux Groupes spéciaux chargés de ces deux procédures au titre de l'article 21:5 de constater que les États-Unis s'étaient conformés aux recommandations et décisions de l'ORD et que la mesure de 2016 concernant le thon était compatible avec l'article 2.1 de l'Accord OTC et justifiée au regard de l'article XX du GATT de 1994. Le Mexique a demandé que les Groupes spéciaux chargés de ces deux procédures rejettent les allégations des États-Unis dans leur intégralité et constatent que la mesure de 2016 concernant le thon était incompatible avec l'article 2.1 de l'Accord OTC et avec les articles I:1 et III:4 du GATT de 1994, et ne pouvait pas être justifiée au regard de l'article XX du GATT de 1994:

 

Constatations des Groupes spéciaux

Les Groupes spéciaux ont défini leur tâche comme consistant à évaluer si la mesure de 2016 concernant le thon était adaptée aux différences dans les risques globaux présentés pour les dauphins par l'utilisation de différentes méthodes de pêche au thon dans différentes zones de l'océan. En particulier, ils ont défini leur tâche comme consistant à examiner si les différents éléments de la mesure de 2016 concernant le thon, à savoir a) les critères d'admissibilité, b) les prescriptions concernant la certification, c) les prescriptions concernant le repérage et la vérification et d) les dispositions en matière de détermination, étaient adaptés aux différences dans les risques globaux pour les dauphins. Les Groupes spéciaux ont également souligné qu'en examinant si chacun de ces éléments était adapté, ils n'"isol[aient] [pas] l'examen de chaque élément" et qu'il faudrait accorder toute l'attention voulue aux façons dont chacun de ces éléments “ étaient corrél[és] entre [eux]”.

En développant leur analyse, les Groupes spéciaux ont formulé des constatations factuelles détaillées sur les risques présentés pour les dauphins par différentes méthodes de pêche au thon dans différentes parties de l'océan — ce que le premier Groupe spécial de la mise en conformité n'avait pas fait, s'attirant les critiques de l'Organe d'appel. Sur la base de ces constatations factuelles, les Groupes spéciaux ont conclu que les différents éléments de la mesure de 2016 concernant le thon étaient adaptés aux différences dans les profils de risques globaux des méthodes de pêche analysées. De plus, gardant à l'esprit la critique formulée par l'Organe d'appel dans la première procédure de mise en conformité concernant le caractère inapproprié d'une analyse segmentée des divers éléments de la mesure concernant le thon, les Groupes spéciaux ont présenté une analyse globale, tenant compte des liens existants entre ces éléments. Sur cette base, ils sont parvenus à la conclusion générale que la mesure de 2016 concernant le thon, dans son ensemble, était adaptée.

À la suite de leur conclusion selon laquelle la mesure de 2016 concernant le thon était adaptée, les Groupes spéciaux ont constaté que les distinctions faites par cette mesure entre l'encerclement des dauphins et les autres méthodes de pêche au thon découlaient exclusivement de distinctions réglementaires légitimes. Par conséquent, ils ont constaté que la mesure accordait aux produits du thon mexicains un traitement non moins favorable que celui qui était accordé aux produits similaires provenant des États-Unis et d'autres pays, et était donc compatible avec les prescriptions énoncées dans l'article 2.1 de l'Accord OTC. Ils ont également constaté que la mesure de 2016 concernant le thon était justifiée au regard de l'article XX du GATT de 1994.

Le 1er décembre 2017, le Mexique a notifié à l'ORD sa décision de faire appel de certaines questions de droit et interprétations du droit formulées par le Groupe spécial de la mise en conformité.

Le 29 janvier 2018, à l'expiration du délai de 60 jours prévu à l'article 17:5 du Mémorandum d'accord, l'Organe d'appel a informé l'ORD qu'il ne serait pas en mesure de distribuer son rapport concernant cet appel pour la fin du délai de 60 jours, ni dans le délai de 90 jours prévu à l'article 17:5 du Mémorandum d'accord. Il a fait état de la charge de travail considérablement accrue à laquelle il avait été confronté en 2018, de l'existence de plusieurs procédures d'appel en parallèle et du chevauchement croissant dans la composition des sections connaissant des différents appels en raison des postes vacants à l'Organe d'appel. Il a également mentionné les problèmes de calendrier découlant de ces circonstances, le nombre et la complexité des questions soulevées dans cette procédure et les procédures d'appel concomitantes, ainsi que la charge que celles-ci représentaient pour les services de traduction du Secrétariat de l'OMC, et le manque de personnel au secrétariat de l'Organe d'appel. L'Organe d'appel a également informé l'ORD que la date de distribution de son rapport concernant cet appel serait communiquée aux participants et aux participants tiers après l'audience.

Bien que l'appel dans ce différend ait été formé le 1er décembre 2017 en raison des multiples appels en instance à l'Organe d'appel, du nombre réduit de membres de l'Organe d'appel et du manque de personnel au secrétariat de l'Organe d'appel, les travaux dans le cadre de cet appel n'ont pu avancer qu'à partir de mai 2018. Le 20 novembre 2018, le Président de l'Organe d'appel a informé la Présidente de l'ORD que le rapport concernant ces procédures serait distribué au plus tard le 14 décembre 2018.

Le 14 décembre 2018, le rapport l'Organe d'appel de la mise en conformité a été distribué aux Membres.

En appel, le Mexique a affirmé que les Groupes spéciaux s'étaient appuyés sur un critère juridique qui ne tenait pas compte du point de savoir si les distinctions réglementaires établies par la mesure de 2016 concernant le thon étaient rationnellement liées à ses objectifs, et que, par conséquent, les Groupes spéciaux avaient fait erreur dans leur analyse de l'adaptation parce qu'ils n'avaient pas pris en compte les risques d'étiquetage inexact dans le cadre de la mesure de 2016 concernant le thon. Le Mexique a par ailleurs soutenu que les Groupes spéciaux avaient fait erreur dans leur application de l'article 2.1 en limitant des aspects de leur analyse de l'adaptation à une comparaison des profils de risque de différentes méthodes de pêche, en n'évaluant pas correctement les risques différents présentés pour les dauphins par l'utilisation de différentes méthodes de pêche dans différentes zones océaniques, et en constatant que la mesure de 2016 concernant le thon était adaptée en fonction des risques présentés pour les dauphins par l'utilisation de différentes méthodes de pêche dans différentes zones océaniques.

L'Organe d'appel a constaté qu'un examen de la question de savoir si la mesure de 2016 concernant le thon était compatible avec l'article 2.1 de l'Accord OTC impliquait d'évaluer: i) les risques relatifs généraux de dommage présentés pour les dauphins par l'utilisation de différentes méthodes de pêche dans différentes zones océaniques; et ii) la question de savoir si les différences dans les conditions d'étiquetage Dolphin Safe prévues par la mesure étaient bien adaptées ou proportionnées à ces risques respectifs. Si elle était effectuée correctement, cette évaluation engloberait un examen du lien rationnel entre les distinctions réglementaires établies par la mesure de 2016 concernant le thon et les objectifs de celle-ci. L'Organe d'appel a en outre considéré que la nature de l'analyse de l'adaptation à effectuer était éclairée par la nature des distinctions réglementaires établies par la mesure elle-même, et que c'étaient les distinctions réglementaires causant l'effet préjudiciable sur les produits importés qui devaient être adaptées en fonction des différents risques pour les dauphins. Il a également constaté que les distinctions réglementaires pertinentes qui devaient être examinées aux fins de l'adaptation dans le présent différend comprenaient la distinction entre l'encerclement des dauphins et les autres méthodes de pêche (dans le contexte des critères d'admissibilité) et la distinction entre la pêcherie des grands navires équipés de sennes coulissantes de l'ETP et toutes les autres pêcheries (dans le contexte des prescriptions concernant la certification ainsi que le repérage et la vérification).

L'Organe d'appel a constaté que les Groupes spéciaux avaient passé en revue tous les éléments de preuve pertinents concernant les risques pour les dauphins que les parties leur avaient fournis, et pris en compte de manière appropriée tous les types pertinents de dommages causés aux dauphins. Il n'a constaté aucune erreur dans l'évaluation par les Groupes spéciaux des risques présentés pour les dauphins par l'utilisation de différentes méthodes de pêche dans différentes zones océaniques, ni dans les conclusions concernant les profils de risque des méthodes de pêche pertinentes qu'ils avaient tirées sur la base de cette évaluation. Selon l'Organe d'appel, le Mexique n'a pas démontré que les Groupes spéciaux avaient fait erreur: i) en formulant les constatations intermédiaires selon lesquelles les critères d'admissibilité, les prescriptions concernant la certification et les prescriptions concernant le repérage et la vérification étaient adaptés en fonction des risques présentés pour les dauphins par l'utilisation de différentes méthodes de pêche dans différentes zones océaniques; ou ii) en constatant que la mesure de 2016 concernant le thon, dans son ensemble, était adaptée en fonction des risques présentés pour les dauphins par l'utilisation de différentes méthodes de pêche dans différentes zones océaniques.

Par conséquent, l'Organe d'appel a confirmé la conclusion du Groupe spécial selon laquelle l'effet préjudiciable causé par la mesure de 2016 concernant le thon sur les produits du thon mexicains découlait exclusivement d'une distinction réglementaire légitime et que, par conséquent, cette mesure était compatible avec l'article 2.1 de l'Accord OTC. De plus, l'Organe d'appel a constaté que les Groupes spéciaux n'avaient pas fait erreur en s'appuyant sur le raisonnement développé dans le cadre de leur analyse de l'adaptation au titre de l'article 2.1 de l'Accord OTC pour évaluer la conformité de la mesure de 2016 concernant le thon avec le texte introductif de l'article XX du GATT de 1994. Ainsi, l'Organe d'appel a également confirmé la conclusion du Groupe spécial selon laquelle la mesure de 2016 concernant le thon n'était pas appliquée de façon à constituer un moyen de discrimination arbitraire ou injustifiable et était donc justifiée au regard de l'article XX du GATT de 1994.

À sa réunion du 11 janvier 2019, l'ORD a adopté le rapport de l'Organe d'appel et le rapport du Groupe spécial, confirmé par le rapport de l'Organe d'appel.

 

Procédure de mise en conformité (deuxième recours du Mexique)

Le 13 mai 2016, le Mexique a demandé l'ouverture de consultations conformément à l'article 21:5 du Mémorandum d'accord, au sujet de certaines mesures qui, selon lui, constituaient la mesure de 2016 concernant le thon. Le 9 juin 2016, le Mexique a demandé, conformément à l'article 21:5 du Mémorandum d'accord, l'établissement d'un deuxième groupe spécial de la mise en conformité. Le Mexique estimait que les États-Unis n'avaient pas mis les dispositions en matière d'étiquetage Dolphin Safe en conformité avec les recommandations et décisions de l'ORD et que la mesure de 2016 concernant le thon était incompatible avec les obligations qui résultent pour les États-Unis des Accords visés.

À sa réunion du 22 juin 2016, l'ORD est convenu, conformément à l'article 21:5 du Mémorandum d'accord, de renvoyer au Groupe spécial initial, si possible, la question soulevée par le Mexique. L'Australie, le Brésil, le Canada, la Chine, la Corée, l'Équateur, le Guatemala, le Japon, la Norvège, la Nouvelle-Zélande et l'Union européenne ont réservé leurs droits de tierces parties. Le 11 juillet 2016, la composition du Groupe spécial de la mise en conformité a été arrêtée, avec un nouveau Président, le Président du Groupe spécial initial n'étant pas disponible.

Le 18 novembre 2016, le Président du Groupe spécial de la mise en conformité a informé l'ORD que, en raison de la complexité des questions qui faisaient l'objet du différend, ainsi que de la procédure d'arbitrage au titre de l'article 22:6 du Mémorandum d'accord qui était en cours en ce qui concerne cette affaire et à laquelle les membres du Groupe spécial chargé de la présente procédure au titre de l'article 21:5 participaient également, le Groupe spécial de la mise en conformité comptait remettre son rapport final aux parties pour la mi-mai 2017. Le 13 avril 2017, le Président du Groupe spécial de la mise en conformité a informé l'ORD que, en raison de la complexité des questions faisant l'objet du différend, le Groupe spécial de la mise en conformité comptait remettre son rapport final aux parties pour la mi-juillet 2017.

Le 26 octobre 2017, le rapport du Groupe spécial de la mise en conformité a été distribué aux Membres.

Contexte

La procédure engagée par les États-Unis et celle qui a été engagée par le Mexique concernent toutes deux la mesure de 2016 concernant le thon. Cette mesure spécifie les conditions devant être respectées pour que les produits du thon vendus aux États-Unis soient étiquetés Dolphin Safe ou que des assertions similaires soient inscrites sur leurs étiquettes. Les États-Unis ont demandé aux Groupes spéciaux chargés de ces deux procédures au titre de l'article 21:5 de constater que les États-Unis s'étaient conformés aux recommandations et décisions de l'ORD et que la mesure de 2016 concernant le thon était compatible avec l'article 2.1 de l'Accord OTC et justifiée au regard de l'article XX du GATT de 1994. Le Mexique a demandé que les Groupes spéciaux chargés de ces deux procédures rejettent les allégations des États-Unis dans leur intégralité et constatent que la mesure de 2016 concernant le thon était incompatible avec l'article 2.1 de l'Accord OTC et avec les articles I:1 et III:4 du GATT de 1994, et ne pouvait pas être justifiée au regard de l'article XX du GATT de 1994:

 

Constatations des Groupes spéciaux

Les Groupes spéciaux ont défini leur tâche comme consistant à évaluer si la mesure de 2016 concernant le thon était adaptée aux différences dans les risques globaux présentés pour les dauphins par l'utilisation de différentes méthodes de pêche au thon dans différentes zones de l'océan. En particulier, ils ont défini leur tâche comme consistant à examiner si les différents éléments de la mesure de 2016 concernant le thon, à savoir a) les critères d'admissibilité, b) les prescriptions concernant la certification, c) les prescriptions concernant le repérage et la vérification et d) les dispositions en matière de détermination, étaient adaptés aux différences dans les risques globaux pour les dauphins. Les Groupes spéciaux ont également souligné qu'en examinant si chacun de ces éléments était adapté, ils n'"isol[aient] [pas] l'examen de chaque élément" et qu'il faudrait accorder toute l'attention voulue aux façons dont chacun de ces éléments “ étaient corrél[és] entre [eux]”.

En développant leur analyse, les Groupes spéciaux ont formulé des constatations factuelles détaillées sur les risques présentés pour les dauphins par différentes méthodes de pêche au thon dans différentes parties de l'océan — ce que le premier Groupe spécial de la mise en conformité n'avait pas fait, s'attirant les critiques de l'Organe d'appel. Sur la base de ces constatations factuelles, les Groupes spéciaux ont conclu que les différents éléments de la mesure de 2016 concernant le thon étaient adaptés aux différences dans les profils de risques globaux des méthodes de pêche analysées. De plus, gardant à l'esprit la critique formulée par l'Organe d'appel dans la première procédure de mise en conformité concernant le caractère inapproprié d'une analyse segmentée des divers éléments de la mesure concernant le thon, les Groupes spéciaux ont présenté une analyse globale, tenant compte des liens existants entre ces éléments. Sur cette base, ils sont parvenus à la conclusion générale que la mesure de 2016 concernant le thon, dans son ensemble, était adaptée.

À la suite de leur conclusion selon laquelle la mesure de 2016 concernant le thon était adaptée, les Groupes spéciaux ont constaté que les distinctions faites par cette mesure entre l'encerclement des dauphins et les autres méthodes de pêche au thon découlaient exclusivement de distinctions réglementaires légitimes. Par conséquent, ils ont constaté que la mesure accordait aux produits du thon mexicains un traitement non moins favorable que celui qui était accordé aux produits similaires provenant des États-Unis et d'autres pays, et était donc compatible avec les prescriptions énoncées dans l'article 2.1 de l'Accord OTC. Ils ont également constaté que la mesure de 2016 concernant le thon était justifiée au regard de l'article XX du GATT de 1994.

Le 1er décembre 2017, le Mexique a notifié à l'ORD sa décision de faire appel de certaines questions de droit et interprétations du droit formulées par le Groupe spécial de la mise en conformité.

Le 29 janvier 2018, à l'expiration du délai de 60 jours prévu à l'article 17:5 du Mémorandum d'accord, l'Organe d'appel a informé l'ORD qu'il ne serait pas en mesure de distribuer son rapport concernant cet appel pour la fin du délai de 60 jours, ni dans le délai de 90 jours prévu à l'article 17:5 du Mémorandum d'accord. Il a fait état de la charge de travail considérablement accrue à laquelle il avait été confronté en 2018, de l'existence de plusieurs procédures d'appel en parallèle et du chevauchement croissant dans la composition des sections connaissant des différents appels en raison des postes vacants à l'Organe d'appel. Il a également mentionné les problèmes de calendrier découlant de ces circonstances, le nombre et la complexité des questions soulevées dans cette procédure et les procédures d'appel concomitantes, ainsi que la charge que celles-ci représentaient pour les services de traduction du Secrétariat de l'OMC, et le manque de personnel au secrétariat de l'Organe d'appel. L'Organe d'appel a également informé l'ORD que la date de distribution de son rapport concernant cet appel serait communiquée aux participants et aux participants tiers après l'audience.

Bien que l'appel dans ce différend ait été formé le 1er décembre 2017 en raison des multiples appels en instance à l'Organe d'appel, du nombre réduit de membres de l'Organe d'appel et du manque de personnel au secrétariat de l'Organe d'appel, les travaux dans le cadre de cet appel n'ont pu avancer qu'à partir de mai 2018. Le 20 novembre 2018, le Président de l'Organe d'appel a informé la Présidente de l'ORD que le rapport concernant ces procédures serait distribué au plus tard le 14 décembre 2018.

Le 14 décembre 2018, le rapport l'Organe d'appel de la mise en conformité a été distribué aux Membres.

En appel, le Mexique a affirmé que les Groupes spéciaux s'étaient appuyés sur un critère juridique qui ne tenait pas compte du point de savoir si les distinctions réglementaires établies par la mesure de 2016 concernant le thon étaient rationnellement liées à ses objectifs, et que, par conséquent, les Groupes spéciaux avaient fait erreur dans leur analyse de l'adaptation parce qu'ils n'avaient pas pris en compte les risques d'étiquetage inexact dans le cadre de la mesure de 2016 concernant le thon. Le Mexique a par ailleurs soutenu que les Groupes spéciaux avaient fait erreur dans leur application de l'article 2.1 en limitant des aspects de leur analyse de l'adaptation à une comparaison des profils de risque de différentes méthodes de pêche, en n'évaluant pas correctement les risques différents présentés pour les dauphins par l'utilisation de différentes méthodes de pêche dans différentes zones océaniques, et en constatant que la mesure de 2016 concernant le thon était adaptée en fonction des risques présentés pour les dauphins par l'utilisation de différentes méthodes de pêche dans différentes zones océaniques.

L'Organe d'appel a constaté qu'un examen de la question de savoir si la mesure de 2016 concernant le thon était compatible avec l'article 2.1 de l'Accord OTC impliquait d'évaluer: i) les risques relatifs généraux de dommage présentés pour les dauphins par l'utilisation de différentes méthodes de pêche dans différentes zones océaniques; et ii) la question de savoir si les différences dans les conditions d'étiquetage Dolphin Safe prévues par la mesure étaient bien adaptées ou proportionnées à ces risques respectifs. Si elle était effectuée correctement, cette évaluation engloberait un examen du lien rationnel entre les distinctions réglementaires établies par la mesure de 2016 concernant le thon et les objectifs de celle-ci. L'Organe d'appel a en outre considéré que la nature de l'analyse de l'adaptation à effectuer était éclairée par la nature des distinctions réglementaires établies par la mesure elle-même, et que c'étaient les distinctions réglementaires causant l'effet préjudiciable sur les produits importés qui devaient être adaptées en fonction des différents risques pour les dauphins. Il a également constaté que les distinctions réglementaires pertinentes qui devaient être examinées aux fins de l'adaptation dans le présent différend comprenaient la distinction entre l'encerclement des dauphins et les autres méthodes de pêche (dans le contexte des critères d'admissibilité) et la distinction entre la pêcherie des grands navires équipés de sennes coulissantes de l'ETP et toutes les autres pêcheries (dans le contexte des prescriptions concernant la certification ainsi que le repérage et la vérification).

L'Organe d'appel a constaté que les Groupes spéciaux avaient passé en revue tous les éléments de preuve pertinents concernant les risques pour les dauphins que les parties leur avaient fournis, et pris en compte de manière appropriée tous les types pertinents de dommages causés aux dauphins. Il n'a constaté aucune erreur dans l'évaluation par les Groupes spéciaux des risques présentés pour les dauphins par l'utilisation de différentes méthodes de pêche dans différentes zones océaniques, ni dans les conclusions concernant les profils de risque des méthodes de pêche pertinentes qu'ils avaient tirées sur la base de cette évaluation. Selon l'Organe d'appel, le Mexique n'a pas démontré que les Groupes spéciaux avaient fait erreur: i) en formulant les constatations intermédiaires selon lesquelles les critères d'admissibilité, les prescriptions concernant la certification et les prescriptions concernant le repérage et la vérification étaient adaptés en fonction des risques présentés pour les dauphins par l'utilisation de différentes méthodes de pêche dans différentes zones océaniques; ou ii) en constatant que la mesure de 2016 concernant le thon, dans son ensemble, était adaptée en fonction des risques présentés pour les dauphins par l'utilisation de différentes méthodes de pêche dans différentes zones océaniques.

Par conséquent, l'Organe d'appel a confirmé la conclusion du Groupe spécial selon laquelle l'effet préjudiciable causé par la mesure de 2016 concernant le thon sur les produits du thon mexicains découlait exclusivement d'une distinction réglementaire légitime et que, par conséquent, cette mesure était compatible avec l'article 2.1 de l'Accord OTC. De plus, l'Organe d'appel a constaté que les Groupes spéciaux n'avaient pas fait erreur en s'appuyant sur le raisonnement développé dans le cadre de leur analyse de l'adaptation au titre de l'article 2.1 de l'Accord OTC pour évaluer la conformité de la mesure de 2016 concernant le thon avec le texte introductif de l'article XX du GATT de 1994. Ainsi, l'Organe d'appel a également confirmé la conclusion du Groupe spécial selon laquelle la mesure de 2016 concernant le thon n'était pas appliquée de façon à constituer un moyen de discrimination arbitraire ou injustifiable et était donc justifiée au regard de l'article XX du GATT de 1994.

 

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