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ADPIC : PROPOSITION

Projet de déclaration ministérielle

Proposition d'un groupe de pays en développement.

IP/C/W/312
WT/GC/W/450
4 octobre 2001
(01-4803)
Conseil général
Conseil des aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce

Proposition du Bangladesh, de la Barbade, de la Bolivie, du Brésil, de Cuba, de l'Équateur, du Groupe africain, de Haïti, du Honduras, de l'Inde, de l'Indonésie, de la Jamaïque, du Pakistan, du Paraguay, du Pérou, des Philippines, de la République dominicaine, de Sri Lanka, de la Thaïlande et du Venezuela haut de page 

Au cours du débat spécial mené par le Conseil des ADPIC le 19 septembre 2001, le Zimbabwe, au nom des délégations susmentionnées, a communiqué la proposition ci-après au Secrétariat pour qu'il la distribue aux membres du Conseil. Lorsqu'elles ont présenté le texte, les délégations en question ont indiqué que c'était sans préjudice des positions des divers pays et de leur droit de présenter des propositions additionnelles.

Déclaration ministérielle concernant l'accord sur les ADPIC et la santé publique haut de page

Les Ministres, 

affirmant que la protection et la promotion de la santé publique et de la nutrition constituent une obligation et une prérogative fondamentales de l'État et que les Membres conservent leur pouvoir souverain à cet égard,

constatant que l'incapacité de larges segments de la population à obtenir des médicaments et des soins à des prix abordables menace l'intérêt vital des États pour ce qui est de protéger et de promouvoir le bien-être public, de préserver le droit et l'ordre et de maintenir la cohésion sociale,

s'acquittant de l'obligation de protéger et de promouvoir les droits fondamentaux des êtres humains à la vie et à la jouissance du meilleur état de santé physique et mentale qu'ils soient capables d'atteindre, y compris la prophylaxie et le traitement des maladies épidémiques, endémiques, professionnelles et autres, et la lutte contre ces maladies, ainsi que la création de conditions propres à assurer à tous des services médicaux et une aide médicale en cas de maladie, ainsi qu'il est énoncé dans le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels,

conscients des préoccupations exprimées par les organisations non gouvernementales, les défenseurs de la santé publique et le public partout dans le monde au sujet des conséquences potentielles de l'Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (l'Accord sur les ADPIC) sur la disponibilité et l'abordabilité des médicaments et autres produits de santé nécessaires;

préoccupés par l'absence d'activités de recherche-développement adéquates sur les médicaments destinés à la prévention et au traitement des maladies touchant principalement la population des pays en développement et des pays les moins avancés,

soulignant que la protection des droits de propriété intellectuelle, en particulier la protection conférée par les brevets, devrait encourager l'élaboration de nouveaux médicaments ainsi que le transfert international de technologies et l'accès à celles-ci en vue de promouvoir le développement et le maintien de capacités de fabrication nationales durables pour les médicaments et autres produits de santé,

reconnaissant que, dans la mise en œuvre des politiques intérieures en matière de santé, notamment pour ce qui est de la disponibilité et de l'abordabilité des médicaments et autres produits de santé, tant l'industrie pharmaceutique qui s'appuie sur la recherche que celle des produits génériques ont des rôles importants et complémentaires à jouer, en particulier dans les pays en développement et les pays les moins avancés,

soulignant l'importance de la participation des responsables de la santé publique au débat et à la prise de décisions sur les règles relatives à la propriété intellectuelle qui peuvent avoir un effet sur la disponibilité des produits de santé et l'accès à ces produits,

rappelant le Préambule de l'Accord sur les ADPIC qui, entre autres choses, prescrit que les mesures et les procédures visant à faire respecter les droits de propriété intellectuelle ne devraient pas devenir elles-mêmes des obstacles au commerce légitime et reconnaît les besoins spéciaux des pays les moins avancés Membres en ce qui concerne la mise en œuvre des lois et réglementations au plan intérieur avec un maximum de flexibilité pour que ces pays puissent se doter d'une base technologique solide et viable,

rappelant en outre l'article XI:2 de l'Accord de Marrakech instituant l'Organisation mondiale du commerce et la Décision sur les mesures en faveur des pays les moins avancés adoptée le 15 décembre 1993,

réaffirmant la décision du Conseil général des 7 et 8 février 2000 (WT/GC/M/53) selon laquelle l'examen prescrit de l'Accord sur les ADPIC, entre autres, devrait porter sur l'incidence de l'Accord sur les perspectives des pays en développement en matière de commerce et de développement,

reconnaissant la vulnérabilité des pays en développement et des pays les moins avancés Membres devant l'imposition ou la menace d'imposition de sanctions et la perspective d'être privés d'incitations ou autres avantages, y compris ceux qui sont imposés ou offerts, selon le cas, hors du cadre de l'OMC,

reconnaissant que les contestations dans le cadre du système de règlement des différends de l'OMC peuvent en soi entraver ou limiter la capacité des Membres d'élaborer et de mettre en œuvre des mesures visant à protéger et à promouvoir la santé publique,

notant l'examen en cours au Conseil des ADPIC sur la portée et les modalités de l'application éventuelle des alinéas 1 b) et 1 c) de l'article XXIII du GATT de 1994 au règlement des différends au titre de l'Accord sur les ADPIC,

reconnaissant que les pays en développement sont touchés dans le domaine de la santé publique par des crises d'une portée sans précédent, dont le VIH/sida est un exemple particulièrement dramatique,

prévoyant que le fait d'appeler l'attention sur le contexte de l'Accord sur les ADPIC et de certaines dispositions dudit accord et de réaffirmer ce contexte en tant que mesure concrète initiale encouragera davantage les Membres, en particulier les pays en développement et les pays les moins avancés Membres, à envisager toute option possible pour protéger et promouvoir la santé publique,

soulignant l'importance fondamentale des objectifs et principes de l'Accord sur les ADPIC,

Déclarent ce qui suit:

1.    Rien dans l'Accord sur les ADPIC n'empêchera les Membres de prendre des mesures pour protéger la santé publique.

2.    Chaque Membre conserve le droit d'établir sa propre politique et ses propres règles concernant l'épuisement des droits de propriété intellectuelle.

3.    Chaque Membre a le droit de permettre d'autres utilisations(1) de l'objet d'un brevet sans l'autorisation du détenteur du droit, y compris l'utilisation par les pouvoirs publics ou des tiers autorisés par ceux-ci, et de déterminer les motifs pour lesquels de telles utilisations sont permises.

4.    Dans des situations d'urgence nationale ou d'autres circonstances d'extrême urgence ou en cas d'utilisation publique à des fins non commerciales, les Membres peuvent accorder des licences obligatoires sans que l'utilisateur se soit efforcé préalablement d'obtenir l'autorisation du détenteur du droit.

5.    Lorsqu'une licence obligatoire est délivrée par un Membre, un autre Membre peut lui donner effet. Cet autre Membre peut autoriser un fournisseur sur son territoire à fabriquer et à exporter le produit visé par la licence principalement pour l'approvisionnement du marché intérieur du Membre qui a accordé la licence. La production et l'exportation effectuées dans ces conditions ne portent pas atteinte aux droits du détenteur du brevet.

6.    Les Membres ne sont pas tenus d'appliquer les conditions énoncées aux alinéas b) et f) de l'article 31 de l'Accord sur les ADPIC dans les cas où l'utilisation de l'objet d'un brevet est permise pour remédier à une pratique jugée anticoncurrentielle à l'issue d'une procédure judiciaire ou administrative.

7.    Rien dans l'Accord sur les ADPIC n'empêchera les Membres d'établir ou de maintenir des procédures d'approbation de la commercialisation pour les médicaments, et autres produits de santé génériques, ou d'appliquer des procédures d'approbation de la commercialisation sommaires ou abrégées fondées sur des approbations de commercialisation accordées précédemment pour des produits équivalents.

8.    Rien dans l'Accord sur les ADPIC n'empêchera les Membres de divulguer ou d'utiliser des renseignements détenus par les autorités de ces Membres ou par le détenteur d'un brevet dans les cas où l'intérêt public l'exige, y compris lorsqu'une telle divulgation ou utilisation est nécessaire pour mettre effectivement en œuvre toute licence obligatoire ou autres mesures adoptées par les autorités publiques dans l'intérêt public.

9.    En vertu de l'article 30 de l'Accord sur les ADPIC, les Membres peuvent, entre autres choses, autoriser la production et l'exportation de médicaments par des personnes autres que les détenteurs des brevets relatifs à ces médicaments pour répondre aux besoins de santé publique des Membres importateurs.

10.    Chaque Membre s'abstiendra, dans le cadre ou au-delà du cadre de l'OMC, d'imposer ou de menacer d'imposer des sanctions et s'abstiendra de recourir à l'octroi d'incitations ou d'autres avantages d'une manière qui pourrait limiter la capacité des pays en développement et des pays les moins avancés Membres de se prévaloir de toute option possible pour protéger et promouvoir la santé publique.

11.    Les Membres feront preuve de la plus grande modération pour ce qui est d'engager et de poursuivre des procédures de règlement des différends relatives aux mesures adoptées ou mises en œuvre, en particulier par les pays en développement et les pays les moins avancés Membres, pour protéger et promouvoir la santé publique.

12.    Dans l'examen de la portée et des modalités de l'application éventuelle des alinéas 1 b) et 1 c) de l'article XXIII du GATT de 1994 au règlement des différends au titre de l'Accord sur les ADPIC, et sans préjudice des recommandations que le Conseil des ADPIC pourra adopter et présenter à la Conférence ministérielle sur d'autres aspects pertinents, les alinéas susmentionnés ne seront en aucun cas rendus applicables aux mesures adoptées et mises en œuvre, en particulier par les pays en développement et les pays les moins avancés Membres, pour protéger et promouvoir la santé publique.

13.    Étant donné les besoins et impératifs spéciaux des pays en développement et des pays les moins avancés Membres, leurs contraintes économiques, financières et administratives et le fait qu'ils ont besoin de flexibilité pour se doter d'une base technologique viable, la période de transition dont ces pays peuvent bénéficier au titre des articles 65:4 et 66:1 de l'Accord sur les ADPIC sera prorogée pour une nouvelle période de cinq (5) ans à compter de l'expiration des périodes de transition prévues par ces articles, en particulier pour ce qui concerne l'obligation d'accorder la possibilité de bénéficier de la protection conférée par les brevets pour des produits ou procédés se rapportant à la santé publique, sans préjudice de nouvelles prorogations.

14.    Le Conseil des ADPIC surveillera et évaluera de manière suivie continue, en collaboration avec les organisations internationales pertinentes, les effets de l'Accord sur les ADPIC sur la santé, en mettant l'accent sur l'accès aux médicaments et la recherche-développement sur les médicaments pour la prévention et le traitement des maladies touchant principalement la population des pays en développement et des pays les moins avancés.

Note:

1. On entend par “autres utilisations” les utilisations autres que celles qui sont autorisées en vertu de l'article 30 de l'Accord sur les ADPIC. retour au texte