Questions couvertes par les comités et accords de l'OMC

MODULE DE FORMATION AU SYSTÈME DE RÈGLEMENT DES DIFFÉRENDS: CHAPITRE 10

Les questions de droit soulevées dans les procédures de règlement des différends

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10.6 La charge de la preuve

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Le Mémorandum d’accord ne renferme aucune règle expresse concernant la charge de la preuve dans une procédure de groupe spécial. Le concept de charge de la preuve revêt généralement deux aspects importants dans tout système judiciaire ou quasi judiciaire: i) Qui “perdrait” le différend si les faits n’étaient pas établis clairement? En faveur de qui un groupe spécial devrait-il se prononcer si, sur la base des éléments de preuve disponibles, il ne pouvait établir les faits nécessaires pour déterminer si le défendeur a enfreint ou non une disposition particulière des accords visés? Par exemple, l’article 11:3 de l’Accord sur les sauvegardes interdit aux Membres de l’OMC d’encourager ou de soutenir l’adoption ou le maintien en vigueur de mesures non gouvernementales équivalentes à des mesures d’autolimitation des importations ou des exportations. Comment le groupe spécial devrait-il trancher si les éléments de preuve disponibles ne répondaient pas à la question de savoir si un acte dont il était allégué qu’il constituait un soutien des pouvoirs publics avait eu lieu ou non? ii) Quel est le niveau de preuve suffisant pour permettre à un groupe spécial d’établir un fait? Au-delà de ce niveau, le groupe spécial estimerait que le fait en cause est établi et fonderait sa décision, entre autres choses, sur ce fait. De la même façon, en deçà de ce niveau, il ne pourrait pas considérer le fait comme étant établi; s’il s’agit d’un fait qui est nécessaire au respect de la disposition juridique, il se prononcerait contre la partie à qui incomberait la charge de la preuve.

L’Organe d’appel a reconnu que le concept de la charge de la preuve était implicite dans le système de règlement des différends de l’OMC. La simple formulation d’une allégation n’équivaut pas à une preuve. Conformément à la pratique suivie par divers tribunaux internationaux, l’Organe d’appel a approuvé la règle voulant qu’il appartienne à la partie qui affirme un fait, que ce soit le demandeur ou le défendeur, d’en apporter la preuve. La charge de la preuve incombe à la partie, qu’elle soit demanderesse ou défenderesse, qui établit, par voie d’affirmation, une allégation ou un moyen de défense particulier.1

Autrement dit, la partie alléguant qu’il y a eu violation d’une disposition de l’Accord sur l’OMC (c’est-à-dire le plaignant) doit soutenir et prouver son allégation. De même, la partie qui invoque pour sa défense une disposition constituant une exception à l’obligation qui, d’après les allégations, a été enfreinte (c’est-à-dire le défendeur) a la charge de prouver que les conditions fixées dans l’exception sont remplies.2 Ces exceptions sont, par exemple, les articles XX et XI:2 c)  i) du GATT de 1994.

En ce qui concerne le niveau de preuve requis, l’Organe d’appel a précisé que la partie à qui incombait la charge de la preuve devait présenter des éléments de preuve suffisants pour établir prima facie (ou établir une présomption) que ce qui était allégué était vrai. Cela fait, la charge de la preuve se déplace et incombe à l’autre partie, qui n’aura pas gain de cause si elle ne fournit pas des éléments de preuve suffisants pour réfuter l’allégation et par là même la présomption.3 La quantité et la nature précises des éléments de preuve qui seront nécessaires pour établir une présomption que ce qui est allégué est vrai (autrement dit ce qui est nécessaire pour établir prima facie le bien-fondé d’une allégation) varieront forcément d’une mesure à l’autre, d’une disposition à l’autre et d’une affaire à l’autre.4

 

Notes:

1. Rapport de l’Organe d’appel États-Unis — Chemises et blouses de laine, pages 15 et 16. retour au texte

2. Rapport de l’Organe d’appel États-Unis — Chemises et blouses de laine, page 18. retour au texte

3. Cela n’impose pas au groupe spécial l’obligation de se prononcer explicitement sur le point de savoir si le plaignant a établi prima facie l’existence d’une violation avant de pouvoir procéder à l’examen des moyens de défense et des éléments de preuve du défendeur (voir le rapport de l’Organe d’appel Corée — Produits laitiers). , paragraphe 145). La tâche du groupe spécial consiste à soupeser tous les éléments de preuve versés au dossier et à décider si le plaignant, en tant que partie à qui incombait la charge initiale de la preuve, l’a convaincu de la validité de ses allégations (voir le rapport du Groupe spécial États-Unis — Article 301, Loi sur le commerce extérieur, paragraphe 7.14). retour au texte

4.1 Rapport de l’Organe d’appel États-Unis — Chemises et blouses de laine, page 16. retour au texte

  

  

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Avertissement
Ce module de formation interactif est basé sur le “Guide sur le système de règlement des différends à l'OMC” publié en 2004. La deuxième édition de ce guide, publiée en 2017, est disponible ici.

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