Questions couvertes par les comités et accords de l'OMC

MODULE DE FORMATION AU SYSTÈME DE RÈGLEMENT DES DIFFÉRENDS: CHAPITRE 6

Le processus — Étapes d’une affaire type de règlement des différends

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6.5 L’examen en appel

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Participants tiers à la procédure d’appel

Les tierces parties ne peuvent pas faire appel d’un rapport de groupe spécial.1 Toutefois, les tierces parties à la procédure du groupe spécial peuvent aussi participer à la procédure d’appel en tant que “participant tiers”. L’article 17:4 du Mémorandum d’accord dispose que les tierces parties peuvent présenter des communications à l’Organe d’appel et ont la possibilité de se faire entendre par lui.

Un Membre de l’OMC qui n’a pas été tierce partie à la procédure du groupe spécial, en revanche, n’est pas autorisé à participer à l’examen en appel. Il ne peut pas “prendre le train en marche”, s’il détermine qu’il a un intérêt dans le différend, par exemple, par rapport au contenu du rapport du groupe spécial. En vertu de la pratique actuelle, toutefois, ce Membre peut demander à présenter ce que l’on appelle un mémoire d’amicus curiae, que l’Organe d’appel est habilité à accepter, mais n’est pas obligé de prendre en considération.2

Pendant les premières années de fonctionnement du système de règlement des différends de l’OMC, les tierces parties qui entendaient participer à la procédure d’appel en tant que participants tiers devaient déposer une communication écrite faisant état de cette intention et contenant les motifs et arguments juridiques à l’appui de leur position, dans un délai de 25 jours après la date du dépôt de la déclaration d’appel. Les tierces parties qui ne l’avaient pas fait n’avaient pas le droit de participer à l’audience devant l’Organe d’appel. Au fil des années toutefois ces tierces parties ont été, dans la pratique, admises en tant qu’“observateurs passifs” à l’audience, avec l’accord (explicite ou tacite) des participants. C’est compte tenu de cette pratique et dans le but d’accroître la participation des tierces parties aux appels que les Procédures de travail ont récemment été modifiées. Elles n’exigent plus qu’une tierce partie dépose une communication en tant que participant tiers afin d’être autorisée à assister à l’audience devant l’Organe d’appel. Désormais, une tierce partie peut, si elle le souhaite, participer à des degrés divers à un examen en appel en tant que participant tiers. Elle dispose pour cela des options suivantes:

  • déposer une communication en tant que participant tiers dans les 25 jours suivant le dépôt de la déclaration d’appel, comparaître à l’audience et faire une déclaration orale, si elle le désire (règles 24 1) et 27 3) a) des Procédures de travail); ou
     
  • ne pas déposer de communication, mais notifier au secrétariat de l’Organe d’appel, par écrit et dans les 25 jours, son intention de comparaître à l’audience et de faire une déclaration orale, si elle le désire (règles 24 2) et 27 3) a) des Procédures de travail);
     
  • ne pas déposer de communication ni présenter de notification dans les 25 jours, mais notifier au secrétariat de l’Organe d’appel, de préférence par écrit et le plus tôt possible, son intention de comparaître à l’audience et demander à faire une déclaration orale, et faire une telle déclaration si l’Organe d’appel a accédé à sa demande (règles 24 4) et 27 3) b) et c) des Procédures de travail);
     
  • ne pas déposer de communication ni présenter de notification dans les 25 jours, mais notifier au secrétariat de l’Organe d’appel, de préférence par écrit et le plus tôt possible, son intention de comparaître à l’audience, et comparaître en tant qu’observateur passif (règles 24 4) et 27 3) b) des Procédures de travail).

 

Objet d’un appel  haut de page

Les appels sont limités aux questions de droit. Ils ne peuvent que porter sur les questions de droit couvertes par le rapport du groupe spécial et les interprétations du droit données par celui-ci (article 17:6 du Mémorandum d’accord). Un appel ne peut pas porter sur les faits sur lesquels repose le rapport du groupe spécial, autrement dit, par exemple, demander l’examen de nouveaux éléments de preuve factuels ou le réexamen des éléments de preuve existants. C’est aux groupes spéciaux qu’il appartient d’évaluer les éléments de preuve et d’établir les faits dans le système de règlement des différends. La distinction entre les questions de droit et les questions de fait est donc importante s’agissant de définir la portée de l’examen en appel. En théorie, il semble facile de distinguer le droit des faits: par exemple, la question de savoir si une autorité nationale a appliqué ou non un droit de douane de 30 pour cent au lieu d’un droit de 20 pour cent à l’importation d’une certaine cargaison de marchandises et la question de savoir si la vodka et le shochu sont ou non produits par distillation de féculents fermentés sont manifestement d’ordre factuel. Plus généralement, un fait est la survenue d’un certain événement dans le temps et dans l’espace.3

En revanche, la façon dont l’expression “produits similaires” figurant dans l’article III:2 du GATT de 1994 doit être interprétée est manifestement une question de droit. Toutefois, nombreuses sont les questions plus complexes surgissant régulièrement dans les différends qui mêlent le droit et les faits, c’est-à-dire auxquelles on ne peut répondre qu’au moyen d’une évaluation à la fois factuelle et juridique. Par exemple, la question de savoir si le shochu et la vodka sont des “produits similaires” au sens de l’article III:2 du GATT de 1994 est d’ordre à la fois juridique et factuel. Dans ces cas, l’identification de la question de droit pouvant faire l’objet d’un appel repose sur une analyse plus détaillée et sélective de la question en cause. La jurisprudence établie par l’Organe d’appel à ce jour donne des indications à cet égard.

Par exemple, l’appréciation juridique des faits, ou, en d’autres termes, l’application par un groupe spécial d’une règle juridique à des faits particuliers, est une question de droit pouvant faire l’objet d’un examen en appel. Comme l’Organe d’appel l’a indiqué, “la compatibilité ou l’incompatibilité d’un fait ou d’un ensemble de faits donné avec les prescriptions d’une disposition conventionnelle donnée est, toutefois, une question de qualification juridique. C’est une question de droit”.4

En revanche, l’examen des éléments de preuve présentés et l’importance à leur accorder, ainsi que l’établissement des faits, sont laissés à la discrétion du groupe spécial, à qui il appartient de juger les faits, et ne relèvent pas normalement de l’examen en appel.5 Toutefois, il y a des limites au pouvoir discrétionnaire du groupe spécial, à tel point que l’examen des faits par le groupe spécial est assujetti à des prescriptions judiriques, dont le respect est une question de droit qui peut être soulevée en appel. On trouve une telle règle juridique dans l’article 11 du Mémorandum d’accord qui fait obligation aux groupes spéciaux de “procéder à une évaluation objective de la question dont il est saisi, y compris une évaluation objective des faits de la cause”. La question de savoir “si un groupe spécial a procédé ou non à une évaluation objective des faits dont il était saisi, comme le prescrit l’article 11 du Mémorandum d’accord, est une question de droit qui, si elle est soulevée correctement en appel, entre dans le champ de l’examen en appel”.6 Ainsi, l’Organe d’appel peut examiner l’appréciation des éléments de preuve faite par le groupe spécial lorsque celui-ci a outrepassé les limites du pouvoir discrétionnaire dont il dispose.7 Il reste à étudier de plus près quelles sont exactement ces limites. L’Organe d’appel a déjà eu l’occasion de donner plusieurs exemples, qui sont loin d’épuiser la masse des erreurs de droit possibles dans l’établissement des faits.8 L’Organe d’appel a décidé que le fait pour un groupe spécial d’“ignorer”, de “fausser” ou de “déformer” les éléments de preuve, ce qui constituait une “erreur fondamentale” mettant en question la bonne foi dudit groupe spécial, relevait de l’examen en appel.9

L’article 11 du Mémorandum d’accord est également pertinent dans les cas où la question est de savoir si le groupe spécial a appliqué le bon critère d’examen. Il s’agit toutefois manifestement d’une question de droit et non d’une question relative à l’établissement des faits, dans la mesure où il s’agit de déterminer le critère juridique que les groupes spéciaux doivent appliquer. Cela permet de déterminer ensuite quels faits sur quel laps de temps sont pertinents pour l’examen juridique.

 

Notes:

1. Les tierces parties ne sont pas directement touchées par la décision: ce n’est pas leur mesure dont il a été constaté qu’elle contrevenait au droit de l’OMC ou annulait ou compromettait des avantages, et ce n’est pas davantage leur contestation de la mesure qui a été rejetée. retour au texte

2. Rapport de l’Organe d’appel CE — Sardines, paragraphes 161 à 167. Dans l’affaire CE — Sardines, le Maroc a précisément opté pour cette forme d’action afin de présenter ses vues à l’Organe d’appel. retour au texte

3. Rapport de l’Organe d’appel CE — Hormones, paragraphe 132. retour au texte

4. Rapport de l’Organe d’appel CE — Hormones, paragraphe 132. retour au texte

5. Rapport de l’Organe d’appel Corée — Boissons alcooliques, paragraphe 161. retour au texte

6. Rapport de l’Organe d’appel CE — Hormones, paragraphe 132. retour au texte

7. Rapport de l’Organe d’appel États-Unis — Gluten de froment, paragraphe 151. retour au texte

8. Rapport de l’Organe d’appel CE — Hormones, paragraphe 133. retour au texte

9. Rapport de l’Organe d’appel CE — Hormones, paragraphe 133. retour au texte

  

  

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Avertissement
Ce module de formation interactif est basé sur le “Guide sur le système de règlement des différends à l'OMC” publié en 2004. La deuxième édition de ce guide, publiée en 2017, est disponible ici.

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