ADPIC ET SANTÉ PUBLIQUE

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Au paragraphe 8 de la Décision ministérielle sur l'Accord sur les ADPIC, les Membres de l'OMC sont convenus de prendre une décision avant le 17 décembre 2022 sur l'opportunité d'étendre cette décision à la production et à la fourniture d'outils de diagnostic et de traitements contre la COVID-19, confirmant le droit des Membres, au cours des cinq prochaines années, de passer outre à l'effet exclusif des brevets et de ménager une plus grande marge de manœuvre pour prendre des mesures directes afin de diversifier la production de ces produits au moyen d'une clarification des flexibilités existantes et d'une dérogation ciblée.

Étant donné qu'il était difficile de parvenir à un consensus sur l'extension, le Conseil des ADPIC a décidé en décembre de l'année dernière de recommander au Conseil général de prolonger le délai pour la prise d'une telle décision. Le 19 décembre 2022, le Conseil général a approuvé cette recommandation et a décidé de revenir sur la question de la durée du délai à sa prochaine réunion, qui s'est tenue les 6 et 7 mars 2023. À cette réunion, les Membres sont de nouveau convenus de laisser ouvert l'examen de la question et de poursuivre les discussions de fond au sein du Conseil des ADPIC.

À cette réunion, la dernière animée par l'Ambassadeur Lansana Gberie (Sierra Leone) en tant que Président du Conseil, les Membres ont réitéré des positions bien connues sur cette question. Les pays en développement et pays les moins avancés (PMA) Membres ont exprimé leur déception face au non-respect de l'échéance de décembre 2022 fixée par les Ministres à la CM12. Certains Membres ont fait remarquer que l'extension de la Décision sur les ADPIC était une question de crédibilité pour l'OMC, une solution pour les seuls vaccins étant insuffisante pour apporter une contribution essentielle aux efforts visant à sauver la vie des patients atteints de la COVID-19.

Ils ont fait valoir que la concentration de la fabrication contribuait au déploiement inéquitable des outils de diagnostic et des traitements contre la COVID-19, ce qui menaçait de réduire à néant les progrès réalisés en matière de santé publique au cours de la pandémie. Ces Membres ont appelé à une solution multilatérale sous la forme d'un mécanisme prêt à être déclenché dans le cadre de la préparation aux futures pandémies.

D'autres Membres ont insisté sur la nécessité de tenir des discussions fondées sur des éléments de preuve et des faits avant de prendre une décision sur l'extension de la Décision sur les ADPIC, notant qu'une nouvelle évaluation et des consultations internes étaient en cours pour contribuer à éclairer le débat et à répondre aux questions en suspens. Certains se sont interrogés sur l'existence d'un problème d'accès aux traitement et aux outils de diagnostic induit par la propriété intellectuelle (PI) et ont mis en garde contre toute modification du cadre international de la PI sans éléments de preuve substantiels, car cela pourrait affaiblir l'investissement et l'innovation et mettre en péril la capacité des Membres à faire face aux situations d'urgence sanitaires et autres, aujourd'hui et à l'avenir.

L'Ambassadeur Gberie a remercié les Membres pour ce dialogue constructif et les a invités à planifier bien à l'avance s'ils voulaient obtenir des résultats et parvenir à une convergence dans les mois à venir. La prochaine réunion du Conseil des ADPIC est prévue pour les 14 et 15 juin.

Dans le cadre des discussions sur la PI et la COVID-19, les Membres ont examiné la compilation des mesures liées aux DPI prises dans le contexte de la COVID-19 établie par le Secrétariat. Ce point permet également de poursuivre ou d'entamer les travaux visant à analyser les enseignements tirés et les difficultés rencontrées pendant de la pandémie, comme indiqué au paragraphe 24 de la Déclaration ministérielle sur la réponse de l'OMC à la pandémie de COVID-19 et la préparation aux pandémies futures, et de traiter toute communication reçue des Membres au titre du paragraphe 5 de la Décision ministérielle sur l'Accord sur les ADPIC. En ce qui concerne ce dernier point, le Président a noté qu'aucune communication de ce type n'avait été reçue jusqu'à présent.

Notifications des lois et réglementations nationales en matière de propriété intellectuelle

Conformément à l'obligation de transparence prévue dans l'Accord sur les ADPIC en vertu de laquelle les Membres sont tenus de notifier les lois et réglementations nationales en matière de propriété intellectuelle, le Conseil a reçu plus de 120 nouvelles notifications de plus de 20 Membres différents, dont la plupart ont fourni des renseignements détaillés sur la législation qu'ils avaient partagée. Le Secrétariat a également présenté son Rapport annuel sur les notifications et autres renseignements, qui fait état de la situation et des taux de présentation et identifie les tendances des activités des Membres dans le cadre des mécanismes de transparence de l'Accord sur les ADPIC.

PI et innovation

Pour donner suite à l'examen de points antérieurs concernant la PI et l'innovation ajoutés régulièrement à l'ordre du jour du Conseil des ADPIC depuis 2012, les coauteurs, à savoir l'Australie, le Canada, les États-Unis, Hong Kong, Chine, le Japon, le Royaume-Uni, Singapour, la Suisse, le Taipei chinois et l'Union européenne, ont présenté une communication (IP/C/W/697) sur la coopération transfrontières entre les offices de propriété intellectuelle. Le document souligne le fait que le développement des systèmes de libre-échange et l'évolution des technologies de l'information ont accru les flux transfrontières de renseignements, de personnes, de services, de marchandises et de capitaux, rendant les activités économiques des entreprises de plus en plus mondialisées.

La communication indique que du point de vue de la propriété intellectuelle, le nombre total de demandes de brevet déposées par les innovateurs du monde entier est passé de près d'un millions dans les années 1990 à plus de 3,4 millions en 2021. Cette tendance à la hausse vaut aussi pour les marques de fabrique ou de commerce et les dessins et modèles, un nombre record de 13,9 millions de demandes de marques et de 1,2 million de demandes de dessins et modèles ayant été déposées dans le monde en 2021.

En outre, le nombre des demandes et enregistrements internationaux effectués dans le cadre des systèmes du PCT (brevets), de Madrid (marques) et de La Haye (dessins et modèles) de l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle, en tant qu'indicateur des activités multilatérales en matière de propriété industrielle, a atteint des niveaux records en 2021. Même au milieu de la récession économique causée par la pandémie de COVID-19, le document montre que les entreprises, les créateurs et les innovateurs sont restés très investis dans les activités liées à la propriété industrielle, aidant ainsi le monde à se remettre de la pandémie de manière résiliente.

Dans ce contexte, les coauteurs ont souligné qu'il était vital pour les déposants de demandes de brevets qu'il y ait un cadre établi dans lequel ils pourraient obtenir des droits de propriété industrielle facilement et de manière prévisible lorsqu'ils cherchaient à obtenir une protection de la propriété industrielle dans le monde entier. Reconnaissant le rôle important que jouent les offices de PI pour assurer, promouvoir et protéger les droits de propriété industrielle, les coauteurs ont souligné que le partage des efforts de coopération entre les offices de chaque région et pays servirait de référence pour chaque Membre examinant les politiques et les efforts à déployer dans le futur pour élaborer un système de propriété industrielle plus mondialisé.

Les Membres ont donné des exemples d'avantages qui pourraient découler d'une coopération entre les offices de PI, des formes de coopération qui profiteraient directement aux utilisateurs du système de propriété industrielle et des tentatives de coopération infructueuses. Ils ont aussi fait part de leurs vues sur les points à améliorer dans les efforts de coopération actuels entre les offices de PI et de leurs projets de coopération à l'avenir.

Plaintes en situation de non-violation ou motivées par une autre situation

Pour donner suite à une autre décision prise à la CM12, les Membres ont discuté d'un point inscrit à l'ordre du jour depuis longtemps, à savoir l'examen de la porté et des modalités pour les plaintes en situation de non-violation ou motivées par une autre situation dans le cadre de l'Accord sur les ADPIC. En juin 2022, les Ministres ont adopté une Décision sur les plaintes en situation de non-violation dans le domaine des ADPIC, donnant pour instruction au Conseil des ADPIC de poursuivre son examen de cette question et de faire des recommandations à la treizième Conférence ministérielle prévue en février 2024. Il a aussi été convenu que, dans l'intervalle, les Membres ne déposeraient pas de telles plaintes au titre de l'Accord sur les ADPIC.

Les Membres ont réitéré leurs positions bien connues qui, historiquement, divergent sur le point de savoir si la notion de plaintes en situation de non-violation est applicable dans le domaine des ADPIC. Certaines délégations considèrent que les plaintes en situation de non-violation et celles motivées par une autre situation sont essentielles pour maintenir le bon équilibre des droits et obligations dans le cadre de l'Accord sur les ADPIC et qu'elles contribuent à garantir que les obligations légitimes ne sont pas contournées ou évitées. D'autres estiment que l'application des plaintes en situation de non-violation ou motivées par une autre situation n'a pas sa place dans le domaine de la propriété intellectuelle en raison de l'insécurité juridique et de la réduction des flexibilités qu'elle pourrait engendrer, et ils préfèrent l'interdiction totale de ces plaintes dans le domaine des ADPIC.

Les plaintes en situation de non-violation et les plaintes motivées par une autre situation concernent le point de savoir si, et dans quelles conditions, les Membres devraient pouvoir déposer des plaintes à l'OMC lorsqu'ils estiment que l'action d'un autre Membre, ou une situation particulière, les a privés d'un avantage attendu au titre d'un Accord de l'OMC, bien qu'aucune obligation au titre de cet accord n'ait été violée.

Coopération technique et renforcement des capacités

Avant la réunion du Conseil des ADPIC, 30 fonctionnaires gouvernementaux de 18 PMA ont assisté à un atelier visant à analyser et à renforcer les avantages du mécanisme de transparence concernant les transferts de technologie établi au titre de l'article 66:2 de l'Accord sur les ADPIC. L'article 66:2 prévoit que les pays développés Membres doivent offrir des incitations aux entreprises et institutions sur leur territoire afin de promouvoir et d'encourager le transfert de technologie vers les PMA pour leur permettre de se doter d'une base technologique solide et viable.

L'événement a permis aux participants de mieux comprendre les domaines prioritaires pour les PMA en matière de développement technologique et d'améliorer la coordination entre les PMA et leurs partenaires de coopération pour soutenir les projets de transfert de technologie, conformément aux travaux de divers organes de l'OMC et aux faits nouveaux qui y sont survenus. Dans le cadre du programme de l'atelier, certains participants ont assisté en présentiel à la réunion du Conseil des ADPIC.

Suite aux demandes formulées lors des réunions précédentes, il est envisagé d'organiser un atelier annuel spécifique, similaire à celui qui avait été organisé au sujet de l'article 66:2, afin de permettre un dialogue sur la coopération technique en matière de PI au titre de l'article 67de l'Accord sur les ADPIC. Le Secrétariat prévoit d'organiser cet atelier les 12-14 juin 2023. Le programme comprendra deux volets: un volet consistant en la tenue d'un atelier de deux jours, les 12 et 13 juin, et un volet final, le 14 juin, offrant la possibilité de participer aux discussions du Conseil des ADPIC.

Autres points

Partageant des renseignements sur les différends de l'OMC concernant l'Accord sur les ADPIC, le Président a informé les Membres de l'existence d'une communication présentée par la Chine dans laquelle elle demandait des consultations avec les États-Unis au sujet des les mesures de contrôle des exportations et les mesures connexes des États-Unis en ce qui concerne certaines puces semi-conductrices informatiques de pointe et certains produits de fabrication de semi-conducteurs, certains articles pour superordinateurs, ainsi que les technologies et services connexes, à destination de la Chine ou en relation avec celle-ci.

Le Président a également rappelé que la période actuelle de dépôt de l'instrument d'acceptation du Protocole portant amendement de l'Accord sur les ADPIC allait jusqu'au 31 décembre 2023. À ce jour, 136 Membres ont accepté l'amendement de l'Accord sur les ADPIC. L'Ambassadeur Gberie a encouragé les 28 Membres restants à mener à bien leurs procédures internes et à déposer leur instrument d'acceptation auprès de la Directrice générale de l'OMC dès que possible.

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