RÉPERTOIRE DES RAPPORTS DE L’ORGANE D’APPEL

Accord sur les sauvegardes

SUR CETTE PAGE:

> Généralités
> Critère d’examen. Voir aussi Critère d’examen, article 11 du Mémorandum d’accord (S.7.2-6)
> Article 2:1 — “produits similaires ou directement concurrents”. Voir aussi Accord sur les sauvegardes, article 4:1 c) — branche de production nationale (S.1.25)
> Article 2:1 — prise de décisions au niveau national
> Articles 2:1 et 4:1 c) — application territoriale d’une mesure de sauvegarde
> Article 2:1 — importations accrues
> Article 2:1 — examen des tendances
> Article 2:1 — diminution à la fin d’une période d’examen
> Article 2:1 — augmentation par rapport à la production nationale
> Article 2:1 — dommage grave ou menace de dommage grave. Voir aussi Accord sur les sauvegardes, article 4:1 b) — menace de dommage grave (S.1.24)
> Article 2:1 — lien de causalité. Voir aussi Accord sur les sauvegardes, article 4:2 b) — lien de causalité (S.1.29-32)
> Article 2:1 — “à des conditions telles”
> Article 2 — parallélisme
> Article 4:2 — “facteurs autres qu’un accroissement des importations”
> Article 2 — déterminations séparées
> Article 2:1, note de bas de page 1 — union douanière. Voir aussi Accords commerciaux régionaux, article XXIV du GATT de 1994 (R.1.6)
> Article 2:2 — zone de libre-échange. Voir aussi Accords commerciaux régionaux, article XXIV du GATT de 1994 (R.1.6)
> Article 3:1 — généralités
> Article 3:1 — enquête
> Article 3:1 — constatations multiples
> Article 3:1 — publication d’un rapport
> Article 3:1 — conclusions motivées
> Article 4:1 a) — dommage grave
> Article 4:1 b) — menace de dommage grave. Voir aussi Accord sur les sauvegardes, article 2:1 — dommage grave ou menace de dommage grave (S.1.10)
> Article 4:1 c) — branche de production nationale
> Article 4:2 a) — évaluation des facteurs pertinents de dommage. Voir aussi Critère d’examen, article 11 du Mémorandum d’accord — évaluation objective de la question de savoir si l’explication de l’autorité chargée de l’enquête est motivée et adéquate (S.7.4)
> Article 4:2 a) — données pour l’évaluation du dommage
> Article 4:2 a) — données sur le dommage concernant le passé le plus récent
> Article 4:2 b) — dommage causé par un accroissement des importations
> Article 4:2 b) — dommage causé par un accroissement des importations ou par d’autres facteurs
> Article 4:2 b) — non-imputation du dommage causé par d’autres facteurs
> Article 4:2 b) — lien de causalité — hypothèses concernant l’accroissement des importations et le dommage
> Article 4:2 c) — Publication d’une analyse détaillée. Voir aussi Accord sur les sauvegardes, article 3:1 — généralités (S.1.18); Accord sur les sauvegardes, relation entre l’article XIX du GATT de 1994 et l’article 3:1 de l’Accord sur les sauvegardes (S.1.46); Accord sur les sauvegardes, relation entre l’article XIX du GATT de 1994 et l’article 4:2 c) de l’Accord sur les sauvegardes (S.1.47)
> Article 5:1 — application de la mesure de sauvegarde dans la mesure nécessaire pour prévenir ou réparer un dommage grave et faciliter l’ajustement. Voir aussi Principes et concepts de droit international public général, proportionnalité (P.3.6)
> Article 5:1 — justification de la portée nécessaire de l’application
> Relations entre les articles 5:1 et 4:2 b) de l’Accord sur les sauvegardes
> Article 5:2 b) — modulation des contingents
> Article 8:1 — niveau de concessions équivalent
> Article 9:1 — exclusion des pays en développement Membres de l’application de sauvegardes
> Article 12:1 — notification immédiate
> Article 12:2 — notification de tous les renseignements pertinents
> Article 12:3 — “possibilités adéquates de consultation préalable”
> Relation entre l’Accord sur les sauvegardes et l’Accord antidumping
> Relation entre l’Accord sur les sauvegardes et le GATT de 1994
> Article XIX du GATT de 1994 — généralités. Voir aussi Accord sur l’agriculture, article 5 — sauvegarde spéciale (A.1.14); Accord sur les sauvegardes, généralités (S.1.1); Accord sur les textiles et les vêtements, article 6 — sauvegarde transitoire (T.7.1)
> Relation entre l’article XIX du GATT de 1994 et l’article 3:1 de l’Accord sur les sauvegardes
> Relation entre l’article XIX du GATT de 1994 et l’article 4:2 c) de l’Accord sur les sauvegardes
> Article XIX du GATT de 1994 — “par suite de”
> Article XIX du GATT de 1994 — “ce produit”
> Article XIX du GATT de 1994 — “évolution imprévue des circonstances”
 

S.1.1 Généralités     haut de page

S.1.1.1 États-Unis — Tuyaux de canalisation, paragraphes 80, 82-84
(WT/DS202/AB/R)

… il est utile de rappeler que les mesures de sauvegarde sont des mesures correctives exceptionnelles qui ne doivent être prises que dans des situations d’urgence. En outre, ce sont des mesures correctives qui sont imposées sous la forme de restrictions à l’importation en l’absence d’allégation de pratique commerciale déloyale. En cela, les mesures de sauvegarde diffèrent, par exemple, des droits antidumping et des droits compensateurs destinés à lutter contre les subventions, qui sont deux types de mesures prises pour faire face à des pratiques commerciales déloyales. …

… une partie de la raison d’être de l’article XIX du GATT de 1994 et de l’Accord sur les sauvegardes est, sans conteste, de donner à un Membre de l’OMC la possibilité, alors que les échanges sont libéralisés, de recourir à une mesure corrective effective dans une situation d’urgence exceptionnelle qui, de l’avis de ce Membre, rend nécessaire la protection temporaire d’une branche de production nationale.

Il y a, par conséquent, une opposition naturelle entre, d’une part, le fait de définir l’étendue appropriée et légitime du droit d’appliquer des mesures de sauvegarde et, d’autre part, celui de faire en sorte que les mesures de sauvegarde ne soient pas appliquées à l’égard d’“échanges loyaux” au-delà de ce qui est nécessaire pour offrir une protection exceptionnelle et temporaire. Un Membre de l’OMC qui cherche à appliquer une mesure de sauvegarde fera valoir, à juste titre, qu’il faut respecter le droit d’appliquer de telles mesures afin de maintenir sur le plan interne l’élan et la motivation en faveur de la libéralisation des échanges en cours. Pour sa part, un Membre de l’OMC dont les échanges sont affectés par une mesure de sauvegarde fera valoir, à juste titre, que l’application de telles mesures doit être limitée afin de maintenir l’intégrité sur le plan multilatéral des concessions commerciales existantes. L’équilibre établi par les Membres de l’OMC pour s’accommoder de cette opposition naturelle en ce qui concerne les mesures de sauvegarde se retrouve dans les dispositions de l’Accord sur les sauvegardes.

Cette opposition naturelle est également inhérente aux deux questions fondamentales qu’il faut examiner pour interpréter l’Accord sur les sauvegardes. Ces deux questions fondamentales sont les suivantes: premièrement, y a-t-il un droit d’appliquer une mesure de sauvegarde? Et, deuxièmement, si c’est le cas, ce droit a-t-il été exercé, par l’application d’une telle mesure, dans les limites fixées par le traité? Ces deux questions sont séparées et distinctes. Elles ne doivent pas être confondues par celui qui interprète le traité. L’une précède nécessairement l’autre et y conduit. …

S.1.1.2 États-Unis — Sauvegardes concernant l’acier, paragraphe 264
(WT/DS248/AB/R, WT/DS249/AB/R, WT/DS251/AB/R, WT/DS252/AB/R, WT/DS253/AB/R, WT/DS254/AB/R, WT/DS258/AB/R, WT/DS259/AB/R)

… l’article XIX et l’Accord sur les sauvegardes confirment le droit des Membres de l’OMC d’appliquer des mesures de sauvegarde lorsque, par suite de l’évolution imprévue des circonstances et par l’effet des engagements, y compris les concessions tarifaires, qui ont été assumés, un produit est importé en quantités tellement accrues et à des conditions telles qu’il cause ou menace de causer un dommage grave à la branche de production nationale qui produit des produits similaires ou des produits directement concurrents. Toutefois, comme il est indiqué clairement à l’article 2:1 de l’Accord sur les sauvegardes, le droit d’appliquer de telles mesures n’existe “que” s’il est démontré que ces conditions préalables sont réunies.


S.1.2 Critère d’examen. Voir aussi Critère d’examen, article 11 du Mémorandum d’accord (S.7.2-6)     haut de page

S.1.2.1 États-Unis — Viande d’agneau, paragraphe 103
(WT/DS177/AB/R, WT/DS178/AB/R)

Ainsi, l’“évaluation objective” d’une allégation formulée au titre de l’article 4:2 a) de l’Accord sur les sauvegardes comporte, en principe, deux éléments: Un groupe spécial doit examiner, premièrement, la question de savoir si les autorités compétentes ont évalué tous les facteurs pertinents et, deuxièmement, la question de savoir si celles-ci ont fourni une explication motivée et adéquate de la façon dont les faits étayaient leur détermination. Ainsi, l’évaluation objective à laquelle doit procéder le groupe spécial comporte un aspect formel et un aspect fondamental. L’aspect formel a trait à la question de savoir si les autorités compétentes ont évalué “tous les facteurs pertinents”. L’aspect fondamental a trait à la question de savoir si les autorités compétentes ont donné une explication raisonnée et adéquate de leur détermination.

S.1.2.2 États-Unis — Viande d’agneau, paragraphes 106-107
(WT/DS177/AB/R, WT/DS178/AB/R)

Bien que les groupes spéciaux ne soient pas habilités à procéder à un examen de novo des éléments de preuve ni à substituer leurs propres conclusions à celles des autorités compétentes, nous tenons à souligner que cela ne signifie pas qu’ils doivent simplement accepter les conclusions des autorités compétentes. Au contraire, à notre avis, lorsqu’il examine une allégation formulée au titre de l’article 4:2 a), un groupe spécial n’est en mesure de se prononcer sur la question de savoir si l’explication donnée par les autorités compétentes pour leur détermination est motivée et adéquate que s’il examine cette explication en profondeur, de manière critique, à la lumière des faits dont il dispose. Les groupes spéciaux doivent donc examiner la question de savoir si l’explication fournie par les autorités compétentes tient pleinement compte de la nature et, notamment, de la complexité des données et si elle tient compte d’autres interprétations plausibles de ces données. En particulier, un groupe spécial doit constater qu’une explication n’est pas motivée ou qu’elle n’est pas adéquate si une autre explication des faits est plausible et que l’explication donnée par les autorités compétentes ne lui semble pas adéquate au vu de cette autre explication. Ainsi, lorsqu’ils procèdent à une “évaluation objective” d’une allégation formulée au titre de l’article 4:2 a), les groupes spéciaux doivent envisager la possibilité que l’explication donnée par les autorités compétentes ne soit pas motivée ou ne soit pas adéquate.

À cet égard, l’expression “examen de novo” ne devrait pas être employée de manière impropre. Si un groupe spécial conclut que les autorités compétentes, dans une affaire donnée, n’ont pas fourni une explication motivée ou adéquate de leur détermination, il n’a pas, de ce fait, procédé à un examen de novo. Il n’a pas non plus substitué ses propres conclusions à celles des autorités compétentes. Plus exactement, le groupe spécial, conformément à ses obligations au titre du Mémorandum d’accord, est simplement parvenu à la conclusion que la détermination établie par les autorités compétentes était incompatible avec les exigences particulières posées par l’article 4:2 de l’Accord sur les sauvegardes.

S.1.2.3 États-Unis — Sauvegardes concernant l’acier, paragraphe 276
(WT/DS248/AB/R, WT/DS249/AB/R, WT/DS251/AB/R, WT/DS252/AB/R, WT/DS253/AB/R, WT/DS254/AB/R, WT/DS258/AB/R, WT/DS259/AB/R)

Nous avons expliqué dans l’affaire États-Unis — Viande d’agneau, s’agissant d’une allégation au titre de l’article 4:2 a) de l’Accord sur les sauvegardes, que les autorités compétentes devaient fournir une “explication motivée et adéquate de la façon dont les faits étayaient leur détermination”. Plus récemment, dans le cadre de l’affaire États-Unis — Tubes et tuyaux de canalisation, s’agissant d’une allégation au titre de l’article 4:2 b) de l’Accord sur les sauvegardes, nous avons dit que les autorités compétentes devaient fournir de même une “explication motivée et adéquate, [afin d’établir] que le dommage causé par des facteurs autres qu’un accroissement des importations n’[était] pas imputé à un accroissement des importations”. Les constatations que nous avons formulées dans le cadre de ces affaires n’avaient pas pour but de traiter uniquement du critère d’examen qui est approprié en ce qui concerne les allégations relevant de l’article 4:2 de l’Accord sur les sauvegardes. Nous ne voyons aucune raison de ne pas appliquer le même critère d’une manière générale aux obligations énoncées dans l’Accord sur les sauvegardes ainsi qu’aux obligations énoncées à l’article XIX du GATT de 1994.


S.1.3 Article 2:1 — “produits similaires ou directement concurrents”.
Voir aussi Accord sur les sauvegardes, article 4:1 c) — branche de production nationale (S.1.25)     haut de page

S.1.3.1 États-Unis — Viande d’agneau, paragraphe 86
(WT/DS177/AB/R, WT/DS178/AB/R)

Ainsi, une mesure de sauvegarde est appliquée à un “produit” particulier, à savoir le produit importé. La mesure ne peut être appliquée que si ce produit particulier (“ce produit”) a les effets indiqués sur la “branche de production nationale de produits similaires ou directement concurrents”. (pas d’italique dans l’original) Les conditions énoncées à l’article 2:1 ont donc trait sous plusieurs aspects importants à des produits particuliers. Notamment, suivant l’article 2:1, le fondement juridique permettant d’appliquer une mesure de sauvegarde n’existe que si les importations d’un produit particulier ont des effets préjudiciables sur les producteurs nationaux de produits qui sont “similaires ou directement concurrents” par rapport au produit importé. À notre avis, il y aurait une nette dérogation au texte de l’article 2:1 si une mesure de sauvegarde pouvait être appliquée en raison des effets préjudiciables qu’un produit importé a sur les producteurs nationaux de produits qui ne sont pas “des produits similaires ou directement concurrents” par rapport au produit importé.


S.1.4 Article 2:1 — prise de décisions au niveau national     haut de page

S.1.4.1 États-Unis — Tuyaux de canalisation, paragraphe 158
(WT/DS202/AB/R)

… nous ne nous intéressons pas à la façon dont les autorités compétentes des Membres de l’OMC établissent leurs déterminations pour l’application de mesures de sauvegarde. L’Accord sur les sauvegardes ne prescrit pas le processus interne de prise de décisions pour faire une telle détermination. Cela est entièrement du ressort des Membres de l’OMC dans l’exercice de leur souveraineté. Nous nous intéressons uniquement à la détermination elle-même, qui est un acte singulier dont un Membre de l’OMC peut être redevable lors du règlement d’un différend dans le cadre de l’OMC. Peu nous importe de savoir si cet acte singulier résulte d’une décision prise par un, 100 ou — comme en l’espèce — six décideurs individuels en vertu du droit interne de ce Membre de l’OMC. Ce qui nous importe c’est de savoir si la détermination, quelle que soit la façon dont la décision s’y rapportant est prise au niveau national, satisfait aux prescriptions de l’Accord sur les sauvegardes.


S.1.5 Articles 2:1 et 4:1 c) — application territoriale d’une mesure de sauvegarde     haut de page

S.1.5.1 Argentine — Chaussures (CE), paragraphe 111
(WT/DS121/AB/R)

… Lues conjointement, les dispositions des articles 2:1 et 4:1 c) de l’Accord sur les sauvegardes démontrent qu’un Membre de l’OMC ne peut appliquer une mesure de sauvegarde qu’une fois que ce Membre a déterminé qu’un produit est importé sur son territoire en quantités tellement accrues et à des conditions telles qu’il cause ou menace de causer un dommage grave à sa branche de production nationale sur son territoire. Par conséquent, d’après les articles 2:1 et 4:1 c), c’est le Membre qui en fin de compte applique la mesure de sauvegarde qui doit s’occuper de tous les aspects pertinents de l’enquête en matière de sauvegardes, compte tenu des importations accrues qui entrent sur son territoire et causent ou menacent de causer un dommage grave à la branche de production nationale sur son territoire.


S.1.6 Article 2:1 — importations accrues     haut de page

S.1.6.1 Argentine — Chaussures (CE), paragraphe 131
(WT/DS121/AB/R)

Nous rappelons ici notre raisonnement et nos conclusions concernant le sens de l’expression “par suite de l’évolution imprévue des circonstances” utilisée à l’article XIX:1 a) du GATT de 1994. Nous avons conclu à ce sujet que les quantités accrues d’importations auraient dû être “imprévues” ou “inattendues”. Nous pensons par ailleurs que l’expression “en quantités tellement accrues” à l’article 2:1 de l’Accord sur les sauvegardes et à l’article XIX:1 a) du GATT de 1994 est importante pour cette détermination. À notre avis, déterminer si la condition relative aux importations “en quantités tellement accrues” est remplie n’est pas une simple question mathématique ou technique. En d’autres termes, il ne suffit pas qu’une enquête montre simplement qu’il y a eu davantage d’importations du produit concerné cette année que l’année passée — ou il y a cinq ans. Là encore, et cela mérite d’être répété, n’importe quel accroissement des quantités d’importations ne suffit pas. Pour que cette condition requise pour appliquer une mesure de sauvegarde soit remplie, il faut des importations “en quantités tellement accrues” qu’elles causent ou menacent de causer un dommage grave à la branche de production nationale. Et ce langage utilisé à la fois à l’article 2:1 de l’Accord sur les sauvegardes et à l’article XIX:1 a) du GATT de 1994, exige, selon nous, que l’accroissement des importations ait été assez récent, assez soudain, assez brutal et assez important, à la fois en quantité et en qualité, pour causer ou menacer de causer un “dommage grave”.

S.1.6.2 États-Unis — Sauvegardes concernant l’acier, paragraphe 346
(WT/DS248/AB/R, WT/DS249/AB/R, WT/DS251/AB/R, WT/DS252/AB/R, WT/DS253/AB/R, WT/DS254/AB/R, WT/DS258/AB/R, WT/DS259/AB/R)

… Dans [l’affaire Argentine — Chaussures (CE)], nous avons souligné qu’il importait d’interpréter la prescription imposant des “quantités tellement accrues” dans le contexte dans lequel elle figure à la fois dans l’article XIX:1 a) du GATT de 1994 et dans l’article 2:1 de l’Accord sur les sauvegardes. Ce contexte comprend les mots “cause ou menace de causer un dommage grave”. Au vu du contexte, il apparaît que “pour que cette condition requise pour appliquer une mesure de sauvegarde soit remplie, il faut des importations “en quantités tellement accrues” qu’elles causent ou menacent de causer un dommage grave à la branche de production nationale”. En effet, à notre avis, le terme “tellement”, qui figure dans l’expression “quantités tellement accrues” aux articles XIX:1 a) et 2:1, lie manifestement l’accroissement des importations pertinent à sa capacité de causer ou de menacer de causer un dommage grave. En conséquence, nous pensons comme les États-Unis que notre assertion dans l’affaire Argentine — Chaussures (CE) selon laquelle “l’accroissement des importations [doit avoir] été assez récent, assez soudain, assez brutal et assez important … pour causer ou menacer de causer un dommage grave”, était une assertion concernant “la totalité du pouvoir d’investigation des autorités compétentes au titre de l’Accord sur les sauvegardes” et que “[l]es questions de savoir si un accroissement des importations est assez récent, assez soudain, assez brutal et assez important pour causer ou menacer de causer un dommage grave sont des questions auxquelles il est répondu au moment où les autorités compétentes procèdent au reste de leur analyse (c’est-à-dire à l’examen du dommage grave/de la menace de dommage grave et du lien de causalité)”.

S.1.6.3 États-Unis — Sauvegardes concernant l’acier, paragraphe 350
(WT/DS248/AB/R, WT/DS249/AB/R, WT/DS251/AB/R, WT/DS252/AB/R, WT/DS253/AB/R, WT/DS254/AB/R, WT/DS258/AB/R, WT/DS259/AB/R)

… nous avons dit dans l’affaire Argentine — Chaussures (CE) que “les quantités accrues d’importations auraient dû être “imprévues” ou “inattendues”. Ce faisant, nous nous référions au fait que l’accroissement des importations doit, au titre de l’article XIX:1 a), résulter de “l’évolution imprévue des circonstances” pour justifier l’application d’une mesure de sauvegarde. L’“accroissement des importations” devant se produire “par suite” d’un événement qui était “imprévu” ou “inattendu”, il s’ensuit que l’accroissement des importations doit aussi être “imprévu” ou “inattendu”. Ainsi, le “caractère exceptionnel” de la réaction au niveau interne à l’accroissement des importations ne dépend pas des quantités absolues ou relatives du produit qui est importé. Il dépend plutôt du fait que l’accroissement des importations était imprévu ou inattendu.


S.1.7 Article 2:1 — examen des tendances     haut de page

S.1.7.1 Argentine — Chaussures (CE), paragraphe 129
(WT/DS121/AB/R)

Nous pensons comme le Groupe spécial que les articles 2:1 et 4:2 a) de l’Accord sur les sauvegardes n’exigent pas simplement la démonstration de n’importe quel accroissement des importations, mais exigent que soit démontré que le produit est importé “en quantités tellement accrues … et à des conditions telles qu’il cause ou menace de causer un dommage grave à la branche de production nationale”. En outre, nous pensons comme le Groupe spécial que les dispositions spécifiques de l’article 4:2 a) exigent que “le rythme d’accroissement des importations … et leur accroissement en volume, en termes absolus et relatifs” (pas d’italique dans l’original) soient évalués. Ainsi, nous ne contestons pas l’opinion et la conclusion finale du Groupe spécial selon lesquelles les autorités compétentes sont tenues d’examiner les tendances des importations sur l’ensemble de la période visée par l’enquête (au lieu de simplement comparer les points extrêmes) en vertu de l’article 4:2 a). …

S.1.7.2 États-Unis — Sauvegardes concernant l’acier, paragraphe 354
(WT/DS248/AB/R, WT/DS249/AB/R, WT/DS251/AB/R, WT/DS252/AB/R, WT/DS253/AB/R, WT/DS254/AB/R, WT/DS258/AB/R, WT/DS259/AB/R)

Dans l’affaire Argentine — Chaussures (CE), nous avons conclu ce qui suit: “les autorités compétentes sont tenues d’examiner les tendances des importations sur l’ensemble de la période visée par l’enquête (au lieu de simplement comparer les points extrêmes) en vertu de l’article 4:2 a)”. Une détermination sur le point de savoir s’il y a un accroissement des importations ne peut donc pas être faite simplement en comparant les points extrêmes de la période visée par l’enquête. En effet, dans les cas où un examen ne démontre pas, par exemple, l’existence d’une tendance à la hausse manifeste et ininterrompue des volumes des importations, une simple analyse d’un point extrême à l’autre pourrait facilement être manipulée pour aboutir à des résultats différents, selon le choix des points extrêmes. Une comparaison pourrait étayer une constatation de l’existence soit d’un accroissement soit d’une baisse des volumes des importations simplement par le choix de points de départ et d’arrivée différents.

S.1.7.3 États-Unis — Sauvegardes concernant l’acier, paragraphes 355-356
(WT/DS248/AB/R, WT/DS249/AB/R, WT/DS251/AB/R, WT/DS252/AB/R, WT/DS253/AB/R, WT/DS254/AB/R, WT/DS258/AB/R, WT/DS259/AB/R)

… une démonstration de l’existence de “n’importe quel accroissement” des importations entre deux moments quelconques n’est pas suffisante pour démontrer l’existence d’un “accroissement des importations” aux fins des articles XIX et 2:1. En fait, comme nous l’avons dit, les autorités compétentes sont tenues d’examiner les tendances des importations sur toute la période visée par l’enquête.

Nous rejetons donc l’affirmation des États-Unis selon laquelle “l’expression “en quantités tellement accrues” établit simplement la prescription voulant qu’en général le niveau des importations à la fin (ou à un moment raisonnablement proche de la fin) de la période visée par l’enquête soit plus élevé qu’à un moment précédent non spécifié”. …

S.1.7.4 États-Unis — Sauvegardes concernant l’acier, paragraphe 374
(WT/DS248/AB/R, WT/DS249/AB/R, WT/DS251/AB/R, WT/DS252/AB/R, WT/DS253/AB/R, WT/DS254/AB/R, WT/DS258/AB/R, WT/DS259/AB/R)

À notre avis, ce qui est requis dans chaque cas c’est une explication de la façon dont la tendance des importations étaye la constatation de l’autorité compétente selon laquelle la prescription imposant des “quantités tellement accrues” au sens des articles XIX:1 a) et 2:1 a été respectée. C’est cette explication concernant la tendance des importations — au cours de toute la période visée par l’enquête — qui permet à une autorité compétente de démontrer qu’“un produit est importé en quantités tellement accrues”.


S.1.8 Article 2:1 — diminution à la fin d’une période d’examen     haut de page

S.1.8.1 Argentine — Chaussures (CE), paragraphe 130
(WT/DS121/AB/R)

… À notre avis, l’utilisation du temps présent (“est importé”) à la fois à l’article 2:1 de l’Accord sur les sauvegardes et à l’article XIX:1 a) du GATT de 1994 indique qu’il faut que les autorités compétentes examinent les importations récentes et pas simplement les tendances des importations pendant les cinq dernières années — ni, d’ailleurs, pendant n’importe quelle autre période de plusieurs années. À notre avis, l’expression “est importée” suppose que l’accroissement des importations doit avoir été soudain et récent.

S.1.8.2 États-Unis — Sauvegardes concernant l’acier, paragraphe 367
(WT/DS248/AB/R, WT/DS249/AB/R, WT/DS251/AB/R, WT/DS252/AB/R, WT/DS253/AB/R, WT/DS254/AB/R, WT/DS258/AB/R, WT/DS259/AB/R)

… l’article 2:1 n’exige pas qu’il soit nécessaire que les importations soient croissantes au moment de la détermination. En fait, le sens courant du membre de phrase “est importé en quantités tellement accrues” donne simplement à penser que les importations doivent s’être accrues et que les produits pertinents continuent d’“[être] importé[s]” en quantités (tellement) accrues. Nous ne pensons pas non plus qu’une baisse des importations à la fin de la période visée par l’enquête empêcherait nécessairement l’autorité chargée de l’enquête de constater que, néanmoins, les produits continuent d’être importés “en quantités tellement accrues”.

S.1.8.3 États-Unis — Sauvegardes concernant l’acier, paragraphe 388
(WT/DS248/AB/R, WT/DS249/AB/R, WT/DS251/AB/R, WT/DS252/AB/R, WT/DS253/AB/R, WT/DS254/AB/R, WT/DS258/AB/R, WT/DS259/AB/R)

… nous notons ici également qu’en n’expliquant pas la “baisse la plus récente” des importations en termes absolus, l’USITC n’a pas, à notre avis, fourni une explication concernant la tendance générale des importations qui était intervenue pendant la période visée par l’enquête. … À notre avis, en ne tenant pas compte de la baisse des importations qui était intervenue entre la période intermédiaire de 2000 et la période intermédiaire de 2001, les États-Unis n’ont pas fourni — et ne pouvaient pas fournir — une explication motivée et adéquate de la façon dont les faits étayaient leur constatation selon laquelle les importations de barres laminées à chaud “s’étaient accrues”, comme l’exige l’article 2:1 de l’Accord sur les sauvegardes. Cette absence de prise en considération de la baisse des importations en termes absolus est d’autant plus préoccupante que la tendance intermédiaire dont l’USITC n’a pas tenu compte est intervenue à la toute fin de la période visée par l’enquête. Dans l’affaire États-Unis — Viande d’agneau, nous avons constaté que l’autorité compétente “[devait] évaluer” les données concernant le passé le plus récent “en tenant compte des données relatives à toute la période visée par l’enquête”. Comme le Groupe spécial l’a constaté, ce sont, précisément, ces données les plus récentes que l’USITC n’a pas prises en considération en ce qui concerne les importations en termes absolus.


S.1.9 Article 2:1 — augmentation par rapport à la production nationale     haut de page

S.1.9.1 États-Unis — Sauvegardes concernant l’acier, paragraphe 390
(WT/DS248/AB/R, WT/DS249/AB/R, WT/DS251/AB/R, WT/DS252/AB/R, WT/DS253/AB/R, WT/DS254/AB/R, WT/DS258/AB/R, WT/DS259/AB/R)

… l’article 2:1 dispose qu’un Membre pourra appliquer une mesure de sauvegarde après avoir déterminé que le produit pertinent est “importé … en quantités tellement accrues, dans l’absolu ou par rapport à la production nationale … qu’il cause ou menace de causer un dommage grave” (pas d’italique dans l’original). Par conséquent, une détermination de l’existence d’un accroissement soit absolu soit relatif des importations causant un dommage grave est suffisante pour autoriser un Membre à appliquer des mesures de sauvegarde. En conséquence, il peut être satisfait à la prescription imposant un accroissement des importations non seulement s’il y a un accroissement absolu des importations, mais aussi s’il y a un accroissement par rapport à la production nationale.


S.1.10 Article 2:1 — dommage grave ou menace de dommage grave.
Voir aussi Accord sur les sauvegardes, article 4:1 b) — menace de dommage grave (S.1.24)     haut de page

S.1.10.1 États-Unis — Tuyaux de canalisation, paragraphe 161
(WT/DS202/AB/R)

… précisément quel type de “constatation” sur ce “point de droit pertinent” doit apparaître dans le rapport publié des autorités compétentes? La question est la suivante: le membre de phrase “cause ou menace de causer” figurant à l’article 2:1 devrait-il être lu comme “cause ou menace de causer” au sens de soit l’un (“cause”) soit l’autre (“menace de causer”), mais pas les deux? Ou ce membre de phrase devrait-il être lu plutôt comme “cause ou menace de causer” au sens de soit l’un soit l’autre, ou les deux ensemble (“cause ou menace de causer”)?

S.1.10.2 États-Unis — Tuyaux de canalisation, paragraphes 163-164
(WT/DS202/AB/R)

Notre avis est que le membre de phrase “cause ou menace de causer” peut être lu de l’une ou l’autre façon. Selon la lecture que nous en faisons, la définition de “ou” donnée par le dictionnaire étaye l’une ou l’autre conclusion. …

… “ou” peut être exclusif et “ou” peut aussi être inclusif. Le texte de l’article 2:1 ne donne pas sur ce point d’indication décisive en matière d’interprétation. Cela ne veut pas dire que nous pensons qu’un “dommage grave” et une “menace de dommage grave” sont la même chose ou que les autorités compétentes peuvent faire une constatation établissant que les deux existent en même temps. Nous pensons plutôt que le texte de l’article 2:1 se prête à l’une ou l’autre interprétation.

S.1.10:3 États-Unis — Tuyaux de canalisation, paragraphe 167
(WT/DS202/AB/R)

… nous partageons l’avis du Groupe spécial selon lequel les définitions respectives des expressions “dommage grave” et “menace de dommage grave” constituent deux concepts distincts auxquels il faut donner des sens distinctifs lorsque l’on interprète l’Accord sur les sauvegardes. Toutefois, bien que nous partagions l’avis du Groupe spécial selon lequel l’Accord sur les sauvegardes établit une distinction entre un “dommage grave” et une “menace de dommage grave”, nous ne partageons pas son avis selon lequel il découle d’une telle distinction une prescription imposant de faire une constatation distincte soit de l’existence d’un “dommage grave” soit de l’existence d’une “menace de dommage grave” lorsque l’on fait une détermination concernant l’application d’une mesure de sauvegarde.

S.1.10.4 États-Unis — Tuyaux de canalisation, paragraphes 170-171
(WT/DS202/AB/R)

… Il s’agit pour nous de savoir si le droit [d’appliquer une mesure de sauvegarde] existe dans l’affaire particulière qui nous occupe. Et, puisque le droit existe s’il y a une constatation faite par les autorités compétentes de l’existence d’une “menace de dommage grave” ou — ce qui va au-delà — d’un “dommage grave”, il nous semble alors que peu importe, pour déterminer si le droit existe, s’il y a un “dommage grave” ou uniquement une “menace de dommage grave” — tant qu’il y a une détermination établissant qu’il y a au moins une “menace”. Eu égard à la progression continue d’une situation de dommage pour une branche de production nationale qui va d’une “menace de dommage grave” à un “dommage grave”, nous considérons qu’un “dommage grave” — parce que cela va au-delà d’une “menace” — inclut nécessairement le concept de “menace” et dépasse l’existence d’une “menace” aux fins de répondre à la question pertinente: y a-t-il un droit d’appliquer une mesure de sauvegarde?

Sur la base de cette analyse du contexte le plus pertinent du membre de phrase “cause ou menace de causer” figurant à l’article 2:1, nous ne pensons pas que ce membre de phrase signifie nécessairement l’un ou l’autre, mais pas les deux. En fait, cette clause pourrait également signifier soit l’un soit l’autre, ou les deux ensemble. Par conséquent, pour les raisons que nous avons exposées, nous ne pensons pas qu’il importe — aux fins de déterminer s’il y a un droit d’appliquer une mesure de sauvegarde au titre de l’Accord sur les sauvegardes — de savoir si une autorité nationale constate qu’il y a un “dommage grave”, une “menace de dommage grave” ou, comme l’USITC l’a constaté en l’espèce, “un dommage grave ou une menace de dommage grave”. Dans chacun de ces cas, le droit d’appliquer une sauvegarde est, à notre avis, établi.


S.1.11 Article 2:1 — lien de causalité.
Voir aussi Accord sur les sauvegardes, article 4:2 b) — lien de causalité (S.1.29-32)     haut de page

S.1.11.1 États-Unis — Gluten de forment, paragraphe 76
(WT/DS166/AB/R)

… En conséquence, en vertu de l’article 2:1, l’analyse du lien de causalité comporte deux éléments: le premier concerne spécifiquement l’accroissement des “importations” et le second concerne les “conditions” dans lesquelles les importations sont effectuées.


S.1.12 Article 2:1 — “à des conditions telles”     haut de page

S.1.12.1 États-Unis — Gluten de forment, paragraphe 78
(WT/DS166/AB/R)

… Par conséquent, l’expression “à des conditions telles” désigne d’une manière générale les “conditions” existant sur le marché du produit considéré lorsque l’accroissement des importations se produit. Interprétée de cette manière, l’expression “à des conditions telles” est une référence abrégée aux facteurs restants énumérés à l’article 4:2 a), qui concernent l’état général de la branche de production nationale et du marché intérieur, ainsi que d’autres facteurs “qui influent sur la situation de [la] branche”. L’expression “à des conditions telles” étaye donc le point de vue selon lequel, en vertu de l’article 4:2 a) et 4:2 b) de l’Accord sur les sauvegardes, les autorités compétentes devraient déterminer si l’accroissement des importations, non pas à lui seul, mais conjointement avec les autres facteurs pertinents, cause un dommage grave.


S.1.13 Article 2 — parallélisme     haut de page

S.1.13.1 généralités

S.1.13.1.1 États-Unis — Gluten de forment, paragraphe 96
(WT/DS166/AB/R)

La même expression — “produit … importé” — figure dans ces deux paragraphes de l’article 2. Compte tenu du fait que des termes identiques sont employés dans les deux dispositions, et en l’absence de toute indication contraire dans le contexte, nous estimons qu’il est approprié d’attribuer le même sens à cette expression tant à l’article 2:1 qu’à l’article 2:2. Inclure les importations de toutes provenances dans la détermination établissant que l’accroissement des importations cause un dommage grave, pour ensuite exclure les importations en provenance d’une source du champ d’application de la mesure, reviendrait à attribuer à l’expression “produit importé” un sens différent à l’article 2:1 et à l’article 2:2 de l’Accord sur les sauvegardes. À l’article 2:1, l’expression engloberait les importations de toutes provenances, tandis qu’à l’article 2:2, elle exclurait les importations en provenance de certaines sources. Cela serait incongru et injustifié. En temps normal, par conséquent, les importations incluses dans les déterminations établies au titre des articles 2:1 et 4:2 devraient correspondre aux importations incluses dans le champ d’application de la mesure, au titre de l’article 2:2.

S.1.13.1.2 États-Unis — Tuyaux de canalisation, paragraphes 179, 181, 194
(WT/DS202/AB/R)

La notion de parallélisme vient des libellés parallèles qui ont été employés dans le premier et le deuxième paragraphes de l’article 2 de l’Accord sur les sauvegardes. …

Comme nous l’avons dit à ce moment-là dans l’affaire États-Unis — Gluten de froment, “les importations incluses dans les déterminations établies au titre des articles 2:1 et 4:2 devraient correspondre aux importations incluses dans le champ d’application de la mesure, au titre de l’article 2:2”. Nous avons ajouté qu’un écart entre les importations visées par l’enquête et celles tombant sous le coup de la mesure ne pouvait être justifié que si les autorités compétentes avaient “établi explicitement” que les importations en provenance des sources visées par la mesure “répondaient aux conditions requises pour appliquer une mesure de sauvegarde, telles qu’elles sont énoncées à l’article 2:1 et précisées à l’article 4:2 de l’Accord sur les sauvegardes”. Et, comme nous l’avons expliqué plus avant dans l’affaire États-Unis — Viande d’agneau, au sujet d’une allégation formulée au titre de l’article 4:2 a) de l’Accord sur les sauvegardes, “établi[r] explicitement” signifie que les autorités compétentes doivent fournir une “explication motivée et adéquate de la façon dont les faits étayent leur détermination”.

… Pour être explicite, une déclaration doit énoncer distinctement tout ce qui est signifié; rien ne doit être simplement insinué ou sous-entendu; la déclaration doit être claire et non équivoque.

S.1.13.1.3 États-Unis — Sauvegardes concernant l’acier, paragraphe 441
(WT/DS248/AB/R, WT/DS249/AB/R, WT/DS251/AB/R, WT/DS252/AB/R, WT/DS253/AB/R, WT/DS254/AB/R, WT/DS258/AB/R, WT/DS259/AB/R)

… quand, aux fins de l’application d’une mesure de sauvegarde, un Membre a mené une enquête portant sur les importations de toutes provenances (c’est-à-dire y compris tous membres d’une zone de libre-échange), ce Membre ne peut pas ensuite, sans aucune analyse complémentaire, exclure de l’application de la mesure de sauvegarde en résultant les importations en provenance de ses partenaires dans le cadre de la zone de libre-échange. Comme nous l’avons déclaré dans l’affaire États-Unis — Tubes et tuyaux de canalisation, si un Membre devait agir ainsi, il y aurait un “écart” entre, d’une part, les importations visées par l’enquête et, d’autre part, les importations tombant sous le coup de la mesure de sauvegarde. …

S.1.13.2 éléments prima facie

S.1.13.2.1 États-Unis — Tuyaux de canalisation, paragraphe 187
(WT/DS202/AB/R)

… la Corée a démontré que l’USITC avait tenu compte des importations de toutes provenances dans son enquête. Elle a également montré que les exportations en provenance du Canada et du Mexique avaient été soustraites à la mesure de sauvegarde en cause. Et, selon nous, cela est suffisant pour établir prima facie l’absence de parallélisme de la mesure concernant les tubes et tuyaux de canalisation. …


S.1.14 Article 4:2 — “facteurs autres qu’un accroissement des importations”     haut de page

S.1.14.1 États-Unis — Sauvegardes concernant l’acier, paragraphe 450
(WT/DS248/AB/R, WT/DS249/AB/R, WT/DS251/AB/R, WT/DS252/AB/R, WT/DS253/AB/R, WT/DS254/AB/R, WT/DS258/AB/R, WT/DS259/AB/R)

… l’expression “accroissement des importations” figurant à l’article 4:2 a) et 4:2 b) doit, selon nous, être comprise comme se référant au même ensemble d’importations que celui dont il est question à l’article 2:1, c’est-à-dire aux importations incluses dans la mesure de sauvegarde. Par conséquent, les importations exclues de l’application de la mesure de sauvegarde doivent être considérées comme un facteur “autre qu’un accroissement des importations” au sens de l’article 4:2 b). Les effets dommageables possibles que ces importations exclues peuvent avoir sur la branche de production nationale ne doivent pas être imputés aux importations incluses dans la mesure de sauvegarde conformément à l’article 4:2 b). La prescription définie par le Groupe spécial imposant “de tenir compte du fait que les importations exclues peuvent avoir une certaine incidence dommageable sur la branche de production nationale” n’est donc pas, comme les États-Unis le font valoir, une “étape analytique supplémentaire” que le Groupe spécial a ajoutée à l’analyse des importations de toutes provenances. Au contraire, cette prescription découle nécessairement de l’obligation énoncée à l’article 4:2 b) imposant à l’autorité compétente, en établissant l’existence d’un lien de causalité entre les importations incluses dans la mesure et le dommage grave ou la menace de dommage grave, de faire en sorte que les effets des facteurs autres qu’un accroissement des importations — ensemble de facteurs qui englobe les importations exclues de la mesure de sauvegarde — ne soient pas imputés aux importations incluses dans la mesure.

S.1.14.2 États-Unis — Sauvegardes concernant l’acier, paragraphe 452
(WT/DS248/AB/R, WT/DS249/AB/R, WT/DS251/AB/R, WT/DS252/AB/R, WT/DS253/AB/R, WT/DS254/AB/R, WT/DS258/AB/R, WT/DS259/AB/R)

Pour fournir une telle explication motivée et adéquate, l’autorité compétente doit expliquer comment elle a fait en sorte de ne pas imputer les effets dommageables des facteurs autres qu’un accroissement des importations — qui englobent les “importations exclues” — aux importations incluses dans la mesure. Comme nous l’avons expliqué dans l’affaire États-Unis — Tubes et tuyaux de canalisation et dans le contexte de l’article 3:1 et de l’“évolution imprévue des circonstances” dans le présent rapport, si l’autorité compétente ne fournit pas une telle explication, un groupe spécial n’est pas en mesure de constater qu’elle a veillé au respect de la prescription claire et expresse en matière de non-imputation énoncée à l’article 4:2 b) de l’Accord sur les sauvegardes.


S.1.15 Article 2 — déterminations séparées     haut de page

S.1.15.1 États-Unis — Sauvegardes concernant l’acier, paragraphes 465-466
(WT/DS248/AB/R, WT/DS249/AB/R, WT/DS251/AB/R, WT/DS252/AB/R, WT/DS253/AB/R, WT/DS254/AB/R, WT/DS258/AB/R, WT/DS259/AB/R)

… l’USITC a fait deux déterminations séparées — une détermination selon laquelle l’exclusion des importations en provenance du Canada et du Mexique ne modifierait pas son “analyse du dommage” et une autre détermination séparée selon laquelle l’exclusion des importations en provenance d’Israël et de la Jordanie ne modifierait pas ses conclusions.

Il ne peut être satisfait à la prescription énoncée dans l’Accord sur les sauvegardes imposant d’établir explicitement que les importations en provenance des sources visées par une mesure, à elles seules, répondent aux conditions requises pour appliquer une mesure de sauvegarde en procédant à une série de déterminations distinctes et partielles. Par exemple, quand un Membre de l’OMC cherche à établir explicitement que les importations en provenance de sources autres que A et B répondent aux conditions nécessaires à l’application d’une mesure de sauvegarde, si ce Membre mène une enquête séparée, et fait une détermination séparée, sur le point de savoir si les importations en provenance de sources autres que A répondent aux conditions pertinentes, puis, ensuite, mène une autre enquête séparée et distincte, et fait une détermination séparée, sur le point de savoir si les importations en provenance de sources autres que B répondent aux conditions pertinentes, alors ces deux déterminations séparées, selon nous, ne démontrent pas que les importations en provenance de sources autres que A et B ensemble satisfont aux prescriptions à remplir pour pouvoir imposer une mesure de sauvegarde. En faisant ces deux déterminations séparées, ce Membre fondera logiquement chacune d’elles, en partie, soit sur les importations en provenance de A, soit sur les importations en provenance de B. Si cela était autorisé, une détermination en vue de l’application d’une mesure de sauvegarde pourrait facilement faire l’objet d’une manipulation mathématique. Cela n’a pas pu avoir été l’intention des Membres de l’OMC quand ils ont rédigé et accepté l’Accord sur les sauvegardes.

S.1.15.2 États-Unis — Sauvegardes concernant l’acier, paragraphe 468
(WT/DS248/AB/R, WT/DS249/AB/R, WT/DS251/AB/R, WT/DS252/AB/R, WT/DS253/AB/R, WT/DS254/AB/R, WT/DS258/AB/R, WT/DS259/AB/R)

Cela n’a peut-être pas fait de différence en pratique dans l’application des mesures de sauvegarde en cause dans le présent appel dans la mesure où, d’après l’ensemble des faits de la cause, le volume des importations en provenance des pays exclus était négligeable ou virtuellement inexistant. Toutefois, nous estimons que, plutôt que de faire deux déterminations séparées — excluant soit le Canada et le Mexique, soit Israël et la Jordanie — à partir des données de base sur lesquelles elle a fondé sa détermination globale, l’USITC aurait dû, comme le Groupe spécial l’a constaté, fournir une seule détermination commune, explicitement étayée par une explication motivée et adéquate, sur le point de savoir si les importations en provenance de sources autres que le Canada, Israël, la Jordanie et le Mexique, en elles-mêmes, répondaient aux conditions nécessaires à l’application d’une mesure de sauvegarde.

S.1.15.3 États-Unis — Sauvegardes concernant l’acier, paragraphe 471
(WT/DS248/AB/R, WT/DS249/AB/R, WT/DS251/AB/R, WT/DS252/AB/R, WT/DS253/AB/R, WT/DS254/AB/R, WT/DS258/AB/R, WT/DS259/AB/R)

Quant à l’argument selon lequel le Groupe spécial aurait dû interpréter les constatations de l’USITC sur les importations en provenance de sources autres que le Canada et le Mexique comme s’appliquant simultanément aux importations en provenance de sources autres que le Canada, Israël, la Jordanie et le Mexique en raison des faibles volumes d’importation en cause, nous observons que l’Accord sur les sauvegardes ne prévoit aucune application différente de la prescription en matière de parallélisme fondée sur le volume des importations. Avec cet argument, les États-Unis nous demandent de donner de l’Accord sur les sauvegardes une lecture incluant quelque chose qui n’y figure pas et nous ne pouvons le faire.


S.1.16 Article 2:1, note de bas de page 1 — union douanière.
Voir aussi Accords commerciaux régionaux, article XXIV du GATT de 1994 (R.1.6)     haut de page

S.1.16.1 Argentine — Chaussures (CE), paragraphe 108
(WT/DS121/AB/R)

… au moment où les mesures de sauvegarde en cause dans la présente affaire ont été imposées par le gouvernement argentin, ces mesures n’étaient pas appliquées par le MERCOSUR “pour le compte de” l’Argentine, mais elles étaient appliquées par l’Argentine. C’est l’Argentine qui est Membre de l’OMC aux fins de l’article 2 de l’Accord sur les sauvegardes, et c’est l’Argentine qui a appliqué les mesures de sauvegarde après avoir mené une enquête sur les produits importés sur son territoire et sur les effets de ces importations sur sa branche de production nationale. Pour ces raisons, nous ne pensons pas que la note de bas de page 1 relative à l’article 2:1 s’applique aux mesures de sauvegarde imposées par l’Argentine en l’espèce. …

S.1.16.2 Argentine — Chaussures (CE), paragraphe 109
(WT/DS121/AB/R)

… nous ne sommes par ailleurs pas persuadés qu’une analyse de l’article XXIV du GATT de 1994 était pertinente pour l’examen de la question spécifique dont était saisi le Groupe spécial. Cette question, comme le Groupe spécial lui-même l’a fait observer, consistait à savoir si l’Argentine, après avoir inclus les importations de toutes provenances dans son enquête sur les “importations accrues” de produits de l’industrie de la chaussure sur son territoire et les effets de ces importations sur son industrie nationale de la chaussure, avait eu raison d’exclure les autres États membres du MERCOSUR de l’application des mesures de sauvegarde. Dans notre rapport sur l’affaire Turquie — Restrictions à l’importation de produits textiles et de vêtements [Rapport de l’Organe d’appel, paragraphe 58], nous avons déclaré que, dans certaines conditions, “l’article XXIV peut justifier une mesure qui est incompatible avec certaines autres dispositions du GATT”. Nous avons indiqué toutefois que ce moyen de défense ne peut être utilisé que lorsqu’il est démontré par le Membre imposant la mesure que “la mesure en cause est adoptée au moment de l’établissement d’une union douanière qui satisfait pleinement aux prescriptions des paragraphes 8 a) et 5 a) de l’article XXIV” et “qu’il serait fait obstacle à l’établissement de ladite union douanière si elle n’était pas autorisée à adopter la mesure en cause”.

S.1.16.3 Argentine — Chaussures (CE), paragraphe 114
(WT/DS121/AB/R)

… Nous concluons que l’Argentine, compte tenu des faits propres à la présente affaire, ne peut pas justifier l’imposition de ses mesures de sauvegarde uniquement aux sources d’approvisionnement des pays tiers non membres du MERCOSUR sur la base d’une enquête qui a établi l’existence d’un dommage grave ou d’une menace de dommage grave causé par les importations de toutes provenances, y compris les importations en provenance des autres États membres du MERCOSUR. Toutefois, comme nous l’avons dit, nous ne partageons pas le point de vue selon lequel le Groupe spécial avait affaire, compte tenu des faits propres à la présente affaire, à une mesure de sauvegarde appliquée par une union douanière pour le compte d’un État membre. Et nous tenons à souligner que, comme la question n’est pas soulevée dans le présent appel, nous ne nous prononçons pas sur la question de savoir si, en règle générale, un membre d’une union douanière peut exclure les autres membres de cette union douanière de l’application d’une mesure de sauvegarde.


S.1.17 Article 2:2 — zone de libre-échange.
Voir aussi Accords commerciaux régionaux, article XXIV du GATT de 1994 (R.1.6)     haut de page

S.1.17.1 États-Unis — Tuyaux de canalisation, paragraphe 198
(WT/DS202/AB/R)

… nous ne préjugeons pas de la question de savoir si l’article 2:2 de l’Accord sur les sauvegardes permet à un Membre d’exclure du champ d’application d’une mesure de sauvegarde les importations originaires des États membres d’une zone de libre-échange. Il n’est pas nécessaire que nous nous prononcions et, par conséquent, nous ne nous prononçons pas sur la question de savoir si l’article XXIV du GATT de 1994 permet de soustraire à une mesure des importations originaires d’un partenaire d’une zone de libre-échange, en dérogation à l’article 2:2 de l’Accord sur les sauvegardes. La question de savoir si l’article XXIV du GATT de 1994 sert d’exception à l’article 2:2 de l’Accord sur les sauvegardes ne peut se poser que dans deux seules circonstances. L’une de ces circonstances est lorsque, au cours de l’enquête menée par les autorités compétentes d’un Membre de l’OMC, les importations qui sont exemptées de la mesure de sauvegarde ne sont pas prises en considération aux fins de la détermination de l’existence d’un dommage grave. L’autre est lorsque, dans le cadre de ce genre d’enquête, les importations qui sont exemptées de la mesure de sauvegarde sont prises en considération aux fins de la détermination de l’existence d’un dommage grave et que, par ailleurs, les autorités compétentes établissent explicitement, en fournissant une explication motivée et adéquate, que les importations en provenance de sources extérieures à la zone de libre-échange répondent, à elles seules, aux conditions requises pour appliquer une mesure de sauvegarde, telles qu’elles sont énoncées à l’article 2:1 et précisées à l’article 4:2. …


S.1.18 Article 3:1 — généralités     haut de page

S.1.18.1 États-Unis — Sauvegardes concernant l’acier, paragraphe 304
(WT/DS248/AB/R, WT/DS249/AB/R, WT/DS251/AB/R, WT/DS252/AB/R, WT/DS253/AB/R, WT/DS254/AB/R, WT/DS258/AB/R, WT/DS259/AB/R)

… les Membres peuvent suspendre temporairement des concessions commerciales en appliquant des mesures de sauvegarde “que” conformément à l’article XIX du GATT de 1994 et à l’Accord sur les sauvegardes, y compris l’article 3:1 de cet accord. La dernière phrase de cette dernière disposition, telle qu’elle est développée à l’article 4:2 c) de cet accord, exige que:

a) les “autorités compétentes publie[--]nt un rapport”;
 

b) le rapport comporte “une analyse détaillée de l’affaire”;
 

c) le rapport “justifi[e le] caractère pertinent des facteurs examinés”;
 

d) le rapport “expos[e] les constatations et les conclusions motivées”; et
 

e) les “constatations et les conclusions motivées” portent sur “tous les points de fait et de droit pertinents” prescrits par l’article XIX du GATT de 1994 et les dispositions pertinentes de l’Accord sur les sauvegardes.

S.1.18.2 États-Unis — Sauvegardes concernant l’acier, paragraphe 331
(WT/DS248/AB/R, WT/DS249/AB/R, WT/DS251/AB/R, WT/DS252/AB/R, WT/DS253/AB/R, WT/DS254/AB/R, WT/DS258/AB/R, WT/DS259/AB/R)

… au titre de l’article 2:1 de l’Accord sur les sauvegardes, des mesures de sauvegarde ne peuvent être justifiées “que” lorsque, par suite de l’évolution imprévue des circonstances et par l’effet des engagements, y compris les concessions tarifaires, qui ont été assumés, un produit est importé en quantités tellement accrues et à des conditions telles qu’il cause ou menace de causer un dommage grave à la branche de production nationale de produits similaires ou directement concurrents. Ce n’est “que” s’il est démontré que ces conditions préalables énoncées à l’article XIX:1 a) du GATT de 1994 et dans l’Accord sur les sauvegardes sont réunies que le droit d’appliquer une mesure de sauvegarde existe. Le respect de chacune de ces conditions préalables est un “point[] de fait et de droit pertinent[]” au sujet duquel des “constatation[s] et [d]es conclusion[s] motivée[s]” doivent être incluses dans le rapport publié des autorités compétentes, comme l’exige l’article 3:1 de l’Accord sur les sauvegardes. …


S.1.19 Article 3:1 — enquête     haut de page

S.1.19.1 États-Unis — Gluten de forment, paragraphe 53
(WT/DS166/AB/R)

… Le sens ordinaire du mot “enquête” donne à penser que les autorités compétentes devraient procéder à un “examen systématique” ou à une “étude minutieuse” de la question dont elles sont saisies. Ce mot sous-entend donc un degré d’activité approprié de la part des autorités compétentes parce que les autorités chargées d’effectuer un examen ou une étude — une “enquête”, selon les termes du traité — doivent rechercher activement des renseignements pertinents.

S.1.19.2 États-Unis — Gluten de forment, paragraphe 54
(WT/DS166/AB/R)

… Les étapes de l’enquête mentionnées à l’article 3:1 visent essentiellement les “parties intéressées” qui doivent être informées de l’enquête et se voir ménager la possibilité de présenter des “éléments de preuve” ainsi que leurs “vues” aux autorités compétentes. Les parties intéressées doivent également se voir ménager la possibilité de “répondre aux exposés d’autres parties”. L’Accord sur les sauvegardes envisage donc que les parties intéressées jouent un rôle central dans l’enquête et qu’elles constituent une source essentielle de renseignements pour les autorités compétentes.

S.1.19.3 États-Unis — Gluten de forment, paragraphe 55
(WT/DS166/AB/R)

… nous notons que l’“enquête” menée par les autorités compétentes au titre de l’article 3:1 n’est pas limitée aux étapes mentionnées dans cette disposition, mais doit simplement “comprendre” ces étapes. En conséquence, les autorités compétentes doivent ajouter des étapes à l’enquête, lorsque les circonstances l’exigent, afin de s’acquitter de leur obligation d’évaluer tous les facteurs pertinents.

S.1.19.4 États-Unis — Viande d’agneau, paragraphe113
(WT/DS177/AB/R, WT/DS178/AB/R)

… Lorsqu’il fait valoir ses prétentions dans le cadre d’une procédure de règlement des différends, un Membre de l’OMC n’est pas tenu de répéter uniquement les arguments qui ont été présentés aux autorités compétentes par les parties intéressées au cours de la procédure d’enquête interne, même lorsque le Membre de l’OMC était lui-même une partie intéressée dans cette enquête. De même, les groupes spéciaux ne sont pas tenus de déterminer et de vérifier eux-mêmes la nature et le caractère des arguments présentés par les parties intéressées aux autorités compétentes. Les exigences découlant des procédures, des lois et des règlements nationaux peuvent influer sur les arguments avancés devant les autorités compétentes nationales et ceux-ci peuvent être axés sur ces exigences. Par contre, la procédure de règlement des différends engagée au titre du Mémorandum d’accord concernant des mesures de sauvegarde appliquées en vertu de l’Accord sur les sauvegardes peut faire intervenir des arguments qui n’ont pas été présentés aux autorités compétentes par les parties intéressées.

S.1.19.5 États-Unis — Viande d’agneau, paragraphe115
(WT/DS177/AB/R, WT/DS178/AB/R)

Nous tenons à souligner que la liberté d’appréciation dont jouissent les Membres de l’OMC lorsqu’il s’agit de faire valoir leurs prétentions dans le cadre d’une procédure de règlement des différends de la manière qu’ils jugent appropriée ne leur permet pas, bien entendu, de se soustraire à l’obligation qui leur est faite à l’article 3:10 du Mémorandum d’accord d’“engager des procédures de règlement des différends “de bonne foi dans un effort visant à régler [l]e différend”. Il s’ensuit que les Membres de l’OMC ne peuvent omettre indûment de présenter des arguments aux autorités compétentes dans le dessein de soulever plus tard ces mêmes arguments devant un groupe spécial. …


S.1.20 Article 3:1 — constatations multiples     haut de page

S.1.20.1 États-Unis — Sauvegardes concernant l’acier, paragraphe 414
(WT/DS248/AB/R, WT/DS249/AB/R, WT/DS251/AB/R, WT/DS252/AB/R, WT/DS253/AB/R, WT/DS254/AB/R, WT/DS258/AB/R, WT/DS259/AB/R)

… nous notons que l’article 3:1 de l’Accord sur les sauvegardes dispose que l’autorité compétente, entre autres choses, “publier[a] un rapport exposant les constatations et les conclusions motivées auxquelles elle[ ] ser[a] arrivée[ ] sur tous les points de fait et de droit pertinents”. Nous n’interprétons pas l’article 3:1 comme excluant nécessairement la possibilité d’établir des constatations multiples à la place d’une constatation unique afin d’étayer une détermination au titre des articles 2:1 et 4 de l’Accord sur les sauvegardes. De même, aucune autre disposition de l’Accord sur les sauvegardes n’exclut expressément une telle possibilité. En conséquence, à notre avis, l’Accord sur les sauvegardes n’empiète pas sur la faculté discrétionnaire d’un Membre de l’OMC de choisir d’étayer la détermination de son autorité compétente par une explication unique ou, au contraire, par des explications multiples des membres de l’autorité compétente. Cette faculté discrétionnaire tient au fait que, comme nous l’avons déclaré dans l’affaire États-Unis — Tubes et tuyaux de canalisation [Rapport de l’Organe d’appel, paragraphe 158], “l’Accord sur les sauvegardes ne prescrit pas le processus interne de prise de décisions pour faire une […] détermination [dans une enquête nationale en matière de sauvegardes]”.

S.1.20.2 États-Unis — Sauvegardes concernant l’acier, paragraphe 418 et note de la bas de page 388
(WT/DS248/AB/R, WT/DS249/AB/R, WT/DS251/AB/R, WT/DS252/AB/R, WT/DS253/AB/R, WT/DS254/AB/R, WT/DS258/AB/R, WT/DS259/AB/R)

… lorsqu’il examine si l’un des multiples ensembles d’explications exposées par l’autorité compétente, pris individuellement, fournit une explication motivée et adéquate pour la détermination de l’autorité compétente, un groupe spécial peut devoir traiter, entre autres choses, la question de savoir si, s’agissant des obligations dans le cadre de l’OMC, les constatations formulées par les différents commissaires sur la base d’un large groupement de produits peuvent fournir une explication motivée et adéquate pour une “détermination institutionnelle unique” de l’USITC concernant un groupement de produits restreint.388 En conséquence, nous ne laissons pas entendre que le champ des produits visés par une constatation positive formulée par tel ou tel commissaire n’est pas pertinent pour l’examen du point de savoir si cette constatation fournit ou non une explication motivée et adéquate pour la détermination de l’autorité compétente. En fait, notre constatation implique qu’un groupe spécial ne peut pas conclure qu’il n’y a pas d’explication motivée et adéquate pour la détermination d’une autorité compétente en invoquant simplement le fait que les explications multiples et distinctes données par l’autorité compétente ne sont pas fondées sur un produit similaire défini de manière identique.


S.1.21 Article 3:1 — publication d’un rapport     haut de page

S.1.21.1 États-Unis — Viande d’agneau, paragraphe 72
(WT/DS177/AB/R, WT/DS178/AB/R)

… La première clause [de l’article XIX:1 a du GATT de 1994 ], comme nous l’avons fait remarquer, décrit en partie les “circonstances” dans lesquelles s’inscrit l’“évolution imprévue des circonstances”. La deuxième clause, comme nous l’avons dit, a trait aux trois “conditions” régissant l’application des mesures de sauvegarde, lesquelles sont également reprises à l’article 2:1 de l’Accord sur les sauvegardes. Manifestement, l’élément central du rapport des autorités compétentes, qui doit être publié conformément à l’article 3:1 de l’Accord sur les sauvegardes, doit être la question de savoir si ces conditions sont remplies.

S.1.21.2 États-Unis — Viande d’agneau, paragraphe 76
(WT/DS177/AB/R, WT/DS178/AB/R)

… nous observons que l’article 3:1 oblige les autorités compétentes à exposer des constatations et des conclusions motivées sur “tous les points de fait et de droit pertinents” dans le rapport qu’elles publient. Comme l’article XIX:1 a) du GATT de 1994 exige que l’“évolution imprévue des circonstances” soit démontrée en fait pour qu’une mesure de sauvegarde puisse être appliquée, l’existence d’une “évolution imprévue des circonstances” est, à notre avis, un “point de fait et de droit pertinent”, aux termes de l’article 3:1, pour qu’une mesure de sauvegarde puisse être appliquée, et il s’ensuit que le rapport publié par les autorités compétentes conformément à cet article doit renfermer une “constatation” ou une “conclusion motivée” concernant l’“évolution imprévue des circonstances”.

S.1.21.3 États-Unis — Tuyaux de canalisation, paragraphe 160
(WT/DS202/AB/R)

Nous partageons l’avis du Groupe spécial selon lequel le respect des conditions fondamentales énoncées à l’article 2:1 est un “point[ ] de droit pertinent[ ]” au sujet duquel des “constatation[s]” ou des “conclusion[s] motivée[s]” doivent être incluses dans le rapport publié des autorités compétentes, comme l’exige l’article 3:1. Nous partageons également l’avis du Groupe spécial selon lequel un de ces “points” est la condition voulant que le “produit” soit “importé … en quantités tellement accrues, … et à des conditions telles qu’il cause ou menace de causer un dommage grave”.

S.1.21.4 États-Unis — Sauvegardes concernant l’acier, paragraphe 295
(WT/DS248/AB/R, WT/DS249/AB/R, WT/DS251/AB/R, WT/DS252/AB/R, WT/DS253/AB/R, WT/DS254/AB/R, WT/DS258/AB/R, WT/DS259/AB/R)

… Bien que nous nous accordions à penser comme les États-Unis que les autorités compétentes “peuvent choisir la structure, l’ordre d’analyse et le format qui leur convient pour [leur] explication, du moment que le rapport défère” à l’article 3:1, nous ne pensons pas que le Groupe spécial exigeait que le rapport revête une forme particulière. …


S.1.22 Article 3:1 — conclusions motivées     haut de page

S.1.22.1 États-Unis — Sauvegardes concernant l’acier, paragraphes 286-288
(WT/DS248/AB/R, WT/DS249/AB/R, WT/DS251/AB/R, WT/DS252/AB/R, WT/DS253/AB/R, WT/DS254/AB/R, WT/DS258/AB/R, WT/DS259/AB/R)

… L’article 3:1 exige que “les autorités compétentes publient un rapport exposant les constatations et les conclusions motivées auxquelles elles sont arrivées sur tous les points de fait et de droit pertinents”. Le sens de l’article 3:1 doit être établi en examinant le sens ordinaire des termes de l’article 3:1, lus dans leur contexte et à la lumière de l’objet et du but de l’Accord sur les sauvegardes. Ainsi, au lieu de fonder une interprétation de l’article 3:1 — comme le font les États-Unis — entièrement sur le sens de un mot — “motivées” — figurant dans cette disposition, il convient à notre avis d’interpréter l’article 3:1 en examinant le sens ordinaire de tous les mots qui énoncent ensemble l’obligation pertinente figurant dans cet article.

Ce faisant, nous notons que la définition de “conclusion” est: “résultat d’un débat sur une question ou de l’examen d’une question” ou “jugement ou prise de position qui suit un raisonnement: inférence; déduction”. Ainsi, la “conclusion” requise par l’article 3:1 est un “jugement ou [une] prise de position qui suit un raisonnement”. Nous notons par ailleurs que le mot “motivées/reasoned”, que les États-Unis définissent par rapport au verbe “raisonner”, est employé en fait dans la dernière phrase de l’article 3:1 comme adjectif pour qualifier le terme “conclusion”. La définition pertinente du verbe intransitif “raisonner” est: “penser d’une manière logique ou réfléchie; se servir de sa raison pour former des conclusions”. La définition du verbe transitif “raisonner” est: “organiser la pensée d’une manière logique, justifier quelque chose; exprimer sous une forme logique.” Ainsi, pour qu’une conclusion soit “motivée”, le “jugement ou [la] prise de position” doit être un jugement ou une prise de position auquel on est arrivé d’une manière logique ou réfléchie ou qui est exprimé sous une forme logique. L’article 3:1 exige par ailleurs que les autorités compétentes “exposent” la “conclusion motivée” dans leur rapport. La définition du verbe “exposer” est: “présenter en ordre, distinctement ou en détail; expliquer, relater, raconter, dire, décrire.” Ainsi, les autorités compétentes sont tenues, aux termes de la dernière phrase de l’article 3:1, de “présenter” un “jugement ou [une] prise de position auquel elles sont arrivées d’une manière logique ou réfléchie ou qui est exprimé sous une forme logique”, “distinctement ou en détail”.

Dans le cadre du mécanisme de règlement des différends de l’OMC, les groupes spéciaux ont la responsabilité d’évaluer si les autorités compétentes se sont conformées à l’obligation qui leur est faite à l’article 3:1 de l’Accord sur les sauvegardes d’“exposer” des “constatations et conclusions motivées” à l’appui de leurs déterminations. Les Communautés européennes et la Norvège font valoir que les groupes spéciaux ne pourraient s’acquitter de cette responsabilité s’ils devaient “déduire eux-mêmes” à partir du rapport des autorités compétentes la “justification des déterminations d’après les faits et les données consignés dans le rapport des autorités compétentes”. Nous sommes d’accord.

S.1.22.2 États-Unis — Sauvegardes concernant l’acier, paragraphes 326, 329
(WT/DS248/AB/R, WT/DS249/AB/R, WT/DS251/AB/R, WT/DS252/AB/R, WT/DS253/AB/R, WT/DS254/AB/R, WT/DS258/AB/R, WT/DS259/AB/R)

L’article 3:1 de l’Accord sur les sauvegardes oblige les autorités compétentes à exposer des “conclusions motivées” sur tous “les points de fait et de droit pertinents”. L’un de ces “points de droit” est l’obligation de démontrer l’existence d’une “évolution imprévue des circonstances” qui a entraîné un accroissement des importations causant un dommage grave. Par conséquent, il incombait à l’USITC, à notre avis, de présenter une “conclusion motivée” au sujet de l’“évolution imprévue des circonstances”. …

… Il ne revient pas au Groupe spécial de faire le raisonnement pour le compte ou à la place des autorités compétentes, mais plutôt d’évaluer dans quelle mesure ce raisonnement satisfait à la prescription pertinente. En conséquence, nous ne pouvons convenir avec les États-Unis que le Groupe spécial était “tenu” de prendre en considération les données pertinentes auxquelles l’USITC s’est référée dans d’autres sections de son rapport pour étayer la constatation de l’USITC selon laquelle l’“évolution imprévue des circonstances” avait entraîné un accroissement des importations; …

S.1.22.3 États-Unis — Sauvegardes concernant l’acier, paragraphe 506
(WT/DS248/AB/R, WT/DS249/AB/R, WT/DS251/AB/R, WT/DS252/AB/R, WT/DS253/AB/R, WT/DS254/AB/R, WT/DS258/AB/R, WT/DS259/AB/R)

… Comme les États-Unis eux-mêmes le reconnaissent, “l’article 3:1 impose aux autorités compétentes — et non pas au groupe spécial — l’obligation de “publier[ ] un rapport exposant les constatations et les conclusions motivées auxquelles elles seront arrivées sur tous les points de fait et de droit pertinents”. Par conséquent, il appartenait à l’USITC, et non au Groupe spécial, d’expliquer comment les faits étayaient sa détermination concernant l’évolution imprévue des circonstances”. Avec l’argument qu’ils présentent dans le présent appel, les États-Unis cherchent à faire passer la charge de cette démonstration au Groupe spécial, dont la fonction, à cet égard, se limite à évaluer l’adéquation des “conclusions motivées” énoncées par l’autorité compétente. Nous convenons avec le Groupe spécial que la démonstration de l’USITC était insuffisante et nous ne constatons aucune erreur dans l’explication de cette constatation donnée par le Groupe spécial.


S.1.23 Article 4:1 a) — dommage grave     haut de page

S.1.23.1 États-Unis — Viande d’agneau, paragraphe 124
(WT/DS177/AB/R, WT/DS178/AB/R)

Le critère du “dommage grave” énoncé à l’article 4:1 a) est, à première vue, très strict. De fait, dans l’affaire États-Unis — Sauvegardes concernant le gluten de froment [Rapport de l’Organe d’appel, paragraphe 149], nous avons dit que ce critère était “rigoureux”. En outre, à cet égard, nous relevons que le terme “dommage” est qualifié par l’adjectif “grave”, qui, à notre avis, souligne l’importance et le degré de la “dégradation générale notable” que la branche de production est en train de subir, ou doit être sur le point de subir, pour que le critère soit rempli. Nous sommes confortés dans notre idée que le critère du “dommage grave” figurant dans l’Accord sur les sauvegardes est très strict lorsque nous comparons ce critère avec le critère du “dommage important” figurant dans l’Accord antidumping, l’Accord sur les subventions et les mesures compensatoires (l’“Accord SMC”) et le GATT de 1994. Nous estimons que le terme “grave” dénote un critère beaucoup plus strict concernant le dommage que le terme “important”. De plus, nous considérons qu’il est conforme à l’objet et au but de l’Accord sur les sauvegardes que le critère du dommage aux fins de l’application d’une mesure de sauvegarde devrait être plus strict que le critère du dommage applicable aux mesures antidumping ou compensatoires …

S.1.23.2 États-Unis — Tuyaux de canalisation, paragraphe 168
(WT/DS202/AB/R)

… Dans la chronologie des événements auxquels une branche de production nationale est confrontée, on peut raisonnablement supposer que, souvent, il y a une progression continue d’effets dommageables finissant par apparaître et par déboucher sur ce que l’on peut déterminer comme étant un “dommage grave”. En général, un dommage grave ne se produit pas soudainement. Un dommage grave existant est souvent précédé dans le temps par un dommage qui menace d’une manière évidente et imminente de devenir un dommage grave, comme nous l’avons indiqué dans l’affaire États-Unis — Viande d’agneau. En d’autres termes, un dommage grave est souvent la concrétisation d’une menace de dommage grave. Même si, dans chaque affaire, l’autorité chargée de l’enquête arrive à la conclusion qui découle de l’enquête menée conformément à l’article 3 de l’Accord sur les sauvegardes, le point précis où une “menace de dommage grave” devient un “dommage grave” peut parfois être difficile à discerner. Mais, à l’évidence, un “dommage grave” est quelque chose qui va au-delà d’une “menace de dommage grave”.

S.1.23.3 États-Unis — Tuyaux de canalisation, paragraphe 170
(WT/DS202/AB/R)

… Eu égard à la progression continue d’une situation de dommage pour une branche de production nationale qui va d’une “menace de dommage grave” à un “dommage grave”, nous considérons qu’un “dommage grave” — parce que cela va au-delà d’une “menace” — inclut nécessairement le concept de “menace” et dépasse l’existence d’une “menace” … .


S.1.24 Article 4:1 b) — menace de dommage grave.
Voir aussi Accord sur les sauvegardes, article 2:1 — dommage grave ou menace de dommage grave (S.1.10)     haut de page

S.1.24.1 États-Unis — Viande d’agneau, paragraphe 125
(WT/DS177/AB/R, WT/DS178/AB/R)

Nous revenons maintenant à l’expression “menace de dommage grave”, et nous relevons que cette expression concerne un “dommage grave” qui ne s’est pas encore produit, mais demeure un phénomène futur dont la concrétisation effective ne peut pas, en fait, être assurée avec certitude. Nous observons, en outre, que l’article 4:1 b) développe la définition du “dommage grave” en établissant que, pour constituer une “menace”, le dommage grave doit présenter une “imminence évidente”. Le terme “imminence” a trait au moment où la “menace” est susceptible de se concrétiser. L’utilisation de ce terme signifie que le “dommage grave” escompté doit être tout près de se produire. De plus, nous considérons que le terme “évidente”, qui qualifie le terme “imminence”, indique qu’il doit y avoir un degré élevé de probabilité que le dommage grave escompté se concrétisera dans un avenir très proche. Nous observons également que l’article 4:1 b) dispose que toute détermination de l’existence d’une menace de dommage grave “se fondera sur des faits, et non pas seulement sur des allégations, des conjectures ou de lointaines possibilités”. (pas d’italique dans l’original) À notre sens, le mot “évidente” a également trait à la démonstration factuelle de l’existence de la “menace”. Ainsi, l’expression “imminence évidente” indique que, en fait, il doit être manifeste que la branche de production nationale est sur le point de subir un dommage grave.

S.1.24.2 États-Unis — Tuyaux de canalisation, paragraphe 169
(WT/DS202/AB/R)

À notre avis, définir l’expression “menace de dommage grave” séparément de l’expression “dommage grave” sert à fixer un seuil plus bas pour établir le droit d’appliquer une mesure de sauvegarde. La façon dont nous interprétons l’équilibre réalisé dans l’Accord sur les sauvegardes nous amène à conclure que c’est ce qu’ont fait les Membres lorsqu’ils ont conclu l’Accord, et cela afin qu’un Membre importateur puisse agir plus tôt à titre préventif lorsqu’un accroissement des importations constitue une “menace” de “dommage grave” pour une branche de production nationale, mais n’a pas encore causé un “dommage grave”. Et puisqu’une “menace” de “dommage grave” est définie comme étant “l’imminence évidente” d’un “dommage grave”, il s’ensuit logiquement, à notre avis, que le “dommage grave” est une condition qui est au-dessus du seuil plus bas correspondant à une “menace”. Un “dommage grave” va au-delà d’une “menace” et, par conséquent, est au-dessus du seuil correspondant à une “menace” qui est requis pour établir un droit d’appliquer une mesure de sauvegarde.


S.1.25 Article 4:1 c) — branche de production nationale     haut de page

S.1.25.1 États-Unis — Viande d’agneau, paragraphe 84
(WT/DS177/AB/R, WT/DS178/AB/R)

Dans cette disposition, la définition de “branche de production nationale” comporte deux éléments. Premièrement, la branche de production comprend les “producteurs”. Comme le Groupe spécial l’a indiqué, les “producteurs” sont ceux qui cultivent ou fabriquent un article; les “producteurs” sont ceux qui font exister une chose. Ce sens de “producteurs” est toutefois qualifié par le second élément de la définition de “branche de production nationale”. Cet élément indique quels sont les produits particuliers qui doivent être produits par les “producteurs” nationaux pour que ceux-ci puissent être inclus dans la “branche de production nationale”. Suivant le libellé explicite et clair du texte de l’article 4:1 c), l’expression “branche de production nationale” s’entend exclusivement des “producteurs des produits similaires ou directement concurrents”. (pas d’italique dans l’original) La définition est donc axée exclusivement sur les producteurs d’un groupe très précis de produits. Les producteurs de produits qui ne sont pasdes produits similaires ou directement concurrents” ne font pas partie, suivant le texte du traité, de la branche de production nationale.

S.1.25.2 États-Unis — Viande d’agneau, paragraphe 86
(WT/DS177/AB/R, WT/DS178/AB/R)

Ainsi, une mesure de sauvegarde est appliquée à un “produit” particulier, à savoir le produit importé. La mesure ne peut être appliquée que si ce produit particulier (“ce produit”) a les effets indiqués sur la “branche de production nationale de produits similaires ou directement concurrents”. (pas d’italique dans l’original) Les conditions énoncées à l’article 2:1 ont donc trait sous plusieurs aspects importants à des produits particuliers. Notamment, suivant l’article 2:1, le fondement juridique permettant d’appliquer une mesure de sauvegarde n’existe que si les importations d’un produit particulier ont des effets préjudiciables sur les producteurs nationaux de produits qui sont “similaires ou directement concurrents” par rapport au produit importé. À notre avis, il y aurait une nette dérogation au texte de l’article 2:1 si une mesure de sauvegarde pouvait être appliquée en raison des effets préjudiciables qu’un produit importé a sur les producteurs nationaux de produits qui ne sont pas “des produits similaires ou directement concurrents” par rapport au produit importé.

S.1.25.3 États-Unis — Viande d’agneau, paragraphe 87
(WT/DS177/AB/R, WT/DS178/AB/R)

Par conséquent, la première étape de la détermination de l’étendue de la branche de production nationale consiste à définir les produits qui sont “similaires ou directement concurrents” par rapport au produit importé. Ce n’est que lorsque ces produits auront été définis qu’il sera possible de définir les “producteurs” de ces produits.

S.1.25.4 États-Unis — Viande d’agneau, paragraphe 90
(WT/DS177/AB/R, WT/DS178/AB/R)

… Dès lors qu’un produit utilisé comme intrant et qu’un produit final ne sont pas “similaires” ou “directement concurrents”, il est sans intérêt, au regard de l’Accord sur les sauvegardes, qu’il y ait une chaîne continue de production entre un produit utilisé comme intrant et un produit final, que le produit utilisé comme intrant représente une proportion élevée de la valeur du produit final, que le produit utilisé comme intrant n’ait d’autre usage que de servir d’intrant pour un produit final donné ou qu’il y ait une concordance substantielle d’intérêts économiques entre les producteurs de ces produits. Faute d’un rapport de “similarité ou de concurrence directe”, nous ne voyons aucun motif, dans l’article 4:1 c) ni dans aucune autre disposition de l’Accord sur les sauvegardes, d’accorder du mérite à l’un ou l’autre de ces critères lorsqu’il s’agit de définir une “branche de production nationale”.

S.1.25.5 États-Unis — Viande d’agneau, paragraphe 91
(WT/DS177/AB/R, WT/DS178/AB/R)

… Les mots “l’ensemble” s’appliquent aux “producteurs” et, lorsqu’on les rapproche des termes “productions additionnées” et “proportion majeure” qui viennent par la suite, il est évident qu’ils désignent le nombre et la nature représentative des producteurs qui forment la branche de production nationale. …


S.1.26 Article 4:2 a) — évaluation des facteurs pertinents de dommage.
Voir aussi Critère d’examen, article 11 du Mémorandum d’accord — évaluation objective de la question de savoir si l’explication de l’autorité chargée de l’enquête est motivée et adéquate (S.7.4)     haut de page

S.1.26.1 Argentine — Chaussures (CE), paragraphe 139
(WT/DS121/AB/R)

À notre avis, c’est uniquement lorsque la situation générale de la branche de production nationale est évaluée, à la lumière de tous les facteurs pertinents qui influent sur cette situation, que l’on peut déterminer s’il y a “une dégradation générale notable” de ladite situation. Bien que l’article 4:2 a) exige techniquement que certains facteurs énumérés soient évalués, et que tous les autres facteurs pertinents le soient, cette disposition ne précise pas ce qu’une telle évaluation doit démontrer. De toute évidence, une telle évaluation sera différente pour différentes branches de production dans différents cas, selon les faits de la cause et la situation de la branche concernée. Une évaluation de chaque facteur énuméré ne devra pas nécessairement montrer que chacun de ces facteurs est “en baisse”. Dans un cas par exemple, il pourra y avoir des baisses importantes des ventes, de l’emploi et de la productivité qui indiqueront une “dégradation générale notable” de la situation de la branche de production, et par conséquent justifieront une constatation de l’existence d’un dommage grave. Dans un autre cas, tel ou tel facteur ne sera peut-être pas en baisse, mais le bilan global démontrera peut-être néanmoins l’existence d’une “dégradation générale notable” de la branche de production. Par conséquent, outre qu’il doit procéder à un examen technique pour établir si les autorités compétentes dans un cas particulier ont évalué tous les facteurs énumérés et tous autres facteurs pertinents, un groupe spécial doit, et c’est essentiel selon nous, tenir compte de la définition du “dommage grave” contenue à l’article 4:1 a) de l’Accord sur les sauvegardes dans son examen de toute détermination de l’existence d’un “dommage grave”.

S.1.26.2 États-Unis — Gluten de forment, paragraphe 55
(WT/DS166/AB/R)

… Les autorités compétentes doivent, dans chaque cas, procéder à une enquête complète pour pouvoir effectuer une évaluation appropriée de tous les facteurs pertinents expressément mentionnés à l’article 4:2 a) de l’Accord sur les sauvegardes. En outre, l’article 4:2 a) exige que les autorités compétentes — et non les parties intéressées — évaluent pleinement la pertinence, éventuelle, d’“autres facteurs”. Si les autorités compétentes considèrent qu’un “autre facteur” particulier peut être pertinent pour la situation de la branche de production nationale, au sens de l’article 4:2 a), leurs devoirs en matière d’enquête et d’évaluation les empêchent de rester passives face à d’éventuelles carences des éléments de preuve présentés et des vues exprimées par les parties intéressées. En pareils cas, lorsque les autorités compétentes ne disposent pas de renseignements suffisants pour évaluer la pertinence que peut avoir un tel “autre facteur”, elles doivent étudier pleinement cet “autre facteur” afin qu’elles puissent s’acquitter de leurs obligations en matière d’évaluation au titre de l’article 4:2 a). À cet égard, nous notons que l’“enquête” menée par les autorités compétentes au titre de l’article 3:1 n’est pas limitée aux étapes mentionnées dans cette disposition, mais doit simplement “comprendre” ces étapes. En conséquence, les autorités compétentes doivent ajouter des étapes à l’enquête, lorsque les circonstances l’exigent, afin de s’acquitter de leur obligation d’évaluer tous les facteurs pertinents.

S.1.26.3 États-Unis — Gluten de forment, paragraphe 71
(WT/DS166/AB/R)

… Pour évaluer la pertinence d’un facteur particulier, les autorités compétentes doivent donc évaluer l’“influence”, ou l’“incidence” ou l’“effet” que ce facteur a sur la situation générale de la branche de production nationale, compte tenu de tous les autres facteurs pertinents.

S.1.26.4 États-Unis — Gluten de forment, paragraphe 72
(WT/DS166/AB/R)

… Nous considérons donc que l’article 4:2 a) n’étaye pas la conclusion du Groupe spécial selon laquelle certains des “facteurs pertinents” — ceux qui concernent exclusivement l’accroissement des importations — devraient être pris en compte pour établir une détermination positive de l’existence d’un dommage grave, tandis que d’autres — ceux qui ne concernent pas l’accroissement des importations — devraient être exclus de cette détermination.

S.1.26.5 États-Unis — Viande d’agneau, paragraphe 103
(WT/DS177/AB/R, WT/DS178/AB/R)

… l’“évaluation objective” d’une allégation formulée au titre de l’article 4:2 a) de l’Accord sur les sauvegardes comporte, en principe, deux éléments: Un groupe spécial doit examiner, premièrement, la question de savoir si les autorités compétentes ont évalué tous les facteurs pertinents et, deuxièmement, la question de savoir si celles-ci ont fourni une explication motivée et adéquate de la façon dont les faits étayaient leur détermination. Ainsi, l’évaluation objective à laquelle doit procéder le groupe spécial comporte un aspect formel et un aspect fondamental. L’aspect formel a trait à la question de savoir si les autorités compétentes ont évalué “tous les facteurs pertinents”. L’aspect fondamental a trait à la question de savoir si les autorités compétentes ont donné une explication raisonnée et adéquate de leur détermination.

S.1.26.6 États-Unis — Viande d’agneau, paragraphe 104
(WT/DS177/AB/R, WT/DS178/AB/R)

… Conformément à l’article 4:2 a), les autorités compétentes doivent, sur le plan formel, évaluer “tous les facteurs pertinents”. Toutefois, cette évaluation n’est pas une simple question de forme, et la liste des facteurs pertinents qui doivent être évalués n’est pas une simple “liste de pointage”. …


S.1.27 Article 4:2 a) — données pour l’évaluation du dommage     haut de page

S.1.27.1 États-Unis — Viande d’agneau, paragraphe 130
(WT/DS177/AB/R, WT/DS178/AB/R)

Nous reconnaissons que la clause “de nature objective et quantifiable” fait expressément référence à des “facteurs”, mais pas expressément à des données. Nous sommes convaincus, cependant, que des facteurs ne peuvent être “de nature objective et quantifiable” que s’ils permettent l’établissement d’une détermination, comme l’exige l’article 4:2 b) de l’Accord sur les sauvegardes, sur la base d’“éléments de preuve objectifs”. Ces éléments de preuve sont, en principe, des données objectives. L’expression “facteurs … de nature objective et quantifiable” implique, par conséquent, une évaluation de données objectives qui permette de mesurer et de quantifier ces facteurs.

S.1.27.2 États-Unis — Viande d’agneau, paragraphe 131
(WT/DS177/AB/R, WT/DS178/AB/R)

… les autorités compétentes doivent disposer d’une base factuelle suffisante pour leur permettre de tirer des conclusions motivées et adéquates au sujet de la situation de la “branche de production nationale”. La nécessité d’avoir une telle base factuelle suffisante implique, de même, que les données examinées, concernant les facteurs pertinents, doivent être représentatives de la “branche de production nationale”. De fait, une détermination établie sur la base de données insuffisantes ne serait pas une détermination concernant la situation de la “branche de production nationale”, telle qu’elle est définie dans l’Accord, mais serait, en réalité, une détermination portant sur des producteurs représentant moins d’“une proportion majeure de la production nationale totale” des produits en cause. …

S.1.27.3 États-Unis — Viande d’agneau, paragraphe 132
(WT/DS177/AB/R, WT/DS178/AB/R)

Nous ne voulons pas donner à penser que les autorités compétentes doivent, dans chaque cas, effectivement disposer de données relatives à tous les producteurs nationaux dont les productions, prises ensemble, constituent une proportion majeure de la branche de production nationale. Il ne fait aucun doute que, dans certains cas, une telle prescription serait à la fois inapplicable et irréaliste. En fait, les données dont disposent les autorités compétentes doivent être suffisamment représentatives pour donner une idée exacte de la “branche de production nationale”. Ce qui est suffisant dans un cas donné dépendra des particularités de la “branche de production nationale” considérée. …

S.1.27.4 États-Unis — Viande d’agneau, la note de bas de page 99 du paragraphe 144
(WT/DS177/AB/R, WT/DS178/AB/R)

… Nous notons que, plus haut dans son rapport, le Groupe spécial a indiqué ce qui suit: les autorités compétentes peuvent “arriver à une détermination de l’existence d’une menace même si la majorité des entreprises de la branche de production concernée n’est pas confrontée à une baisse de rentabilité, à condition qu’une évaluation des facteurs relatifs au dommage dans leur ensemble fasse apparaître une menace de dommage grave”. (Rapport du Groupe spécial, paragraphe 7.188, pas d’italique dans l’original) Dans l’affaire Argentine — Sauvegardes concernant les chaussures, nous avons dit que la détermination par les autorités compétentes de l’existence d’un “dommage grave” devait être fondée sur “la situation générale” de la branche de production nationale et que la détermination devait être établie “à la lumière de tous les facteurs pertinents”. Ainsi, pour évaluer “la situation générale de la branche de production nationale”, on ne peut pas accorder une importance décisive à un seul facteur pertinent; au lieu de cela, tous les facteurs doivent être examinés et évalués ensemble. (Rapport de l’Organe d’appel Argentine — Sauvegardes concernant les chaussures, supra, note de bas de page 15, paragraphe 139)

Il s’ensuit que le Groupe spécial a eu raison de dire que la détermination des autorités compétentes devait être fondée sur “une évaluation des facteurs relatifs au dommage dans leur ensemble”. En outre, il est théoriquement possible, comme l’a dit le Groupe spécial, qu’il puisse y avoir menace de dommage grave pour une branche de production, même si “la majorité des entreprises … n’est pas confrontée à une baisse de rentabilité”. Les profits sont simplement l’un des facteurs pertinents mentionnés à l’article 4:2 a) et accorder à ce facteur une importance décisive reviendrait à faire abstraction des autres facteurs pertinents. Cependant, à notre avis, il serait vraiment étonnant que les facteurs pertinents dans leur ensemble indiquent qu’il y a une menace de dommage grave, même si la “majorité des entreprises de la branche de production” n’est pas confrontée à une baisse de rentabilité.


S.1.28 Article 4:2 a) — données sur le dommage concernant le passé le plus récent     haut de page

S.1.28.1 États-Unis — Viande d’agneau, paragraphe 137
(WT/DS177/AB/R, WT/DS178/AB/R)

… nous relevons que l’Accord sur les sauvegardes ne prévoit pas de méthode particulière à suivre pour déterminer l’existence d’un dommage grave ou d’une menace de dommage grave. Cependant, quelle que soit la méthode choisie, nous pensons que les données relatives au passé le plus récent constitueront pour les autorités compétentes une base essentielle, et, généralement, la base la plus fiable, pour déterminer l’existence d’une menace de dommage grave. Les données concernant le passé le plus récent permettent le mieux d’évaluer la situation probable de la branche de production nationale dans un avenir très proche. …

S.1.28.2 États-Unis — Viande d’agneau, paragraphe 138
(WT/DS177/AB/R, WT/DS178/AB/R)

Cependant, nous estimons que, bien que les données concernant le passé le plus récent aient une importance particulière, les autorités compétentes ne devraient pas les examiner séparément des données relatives à l’ensemble de la période visée par l’enquête. L’importance réelle des tendances à court terme dégagées par les données les plus récentes, que l’on observe à la fin de la période visée par l’enquête, ne peut se dessiner que lorsque ces tendances à court terme sont évaluées à la lumière des tendances à long terme dégagées par les données relatives à toute la période visée par l’enquête. Si les données les plus récentes sont évaluées séparément, l’image de la branche de production nationale qui en résulte peut être très trompeuse. …


S.1.29 Article 4:2 b) — dommage causé par un accroissement des importations     haut de page

S.1.29.1 Argentine — Chaussures (CE), paragraphe 144
(WT/DS121/AB/R)

Nous notons que l’article 4:2 a) exige que les autorités compétentes évaluent “le rythme d’accroissement des importations du produit considéré et leur accroissement en volume”, “la part du marché intérieur absorbée par les importations accrues”, ainsi que les “variations” du niveau de facteurs tels que les ventes, la production, la productivité, l’utilisation de la capacité et d’autres encore. Nous ne voyons aucune raison de rejeter l’interprétation du Groupe spécial selon laquelle les termes “rythme et volume” et “variations” utilisés à l’article 4:2 a) signifient que “les tendances — à la fois des facteurs relatifs au dommage et des importations — importent autant que leurs niveaux absolus”. Nous sommes par ailleurs d’accord avec le Groupe spécial lorsqu’il dit que, dans une analyse du lien de causalité, “c’est le lien entre l’évolution des importations (volume et part de marché) et l’évolution des facteurs relatifs au dommage qui doit être essentiel” (pas d’italique dans l’original). …

S.1.29.2 États-Unis — Gluten de forment, paragraphe 67
(WT/DS166/AB/R)

… l’article 4:2 b) ne donne pas à penser que l’accroissement des importations doit être la seule et unique cause du dommage grave ou que d’“autres facteurs” causant le dommage doivent être exclus de la détermination de l’existence d’un dommage grave. Au contraire, le libellé de l’article 4:2 b), dans son ensemble, donne à penser que le “lien de causalité” entre l’accroissement des importations et le dommage grave peut exister, même si d’autres facteurs contribuent également, “en même temps”, à la situation de la branche de production nationale.

S.1.29.3 États-Unis — Gluten de forment, paragraphe 70
(WT/DS166/AB/R)

… la nécessité d’établir une distinction entre les effets dus à l’accroissement des importations et les effets dus à d’autres facteurs n’implique pas forcément, comme le Groupe spécial l’a dit, que l’accroissement des importations en lui-même doit pouvoir causer un dommage grave ni que le dommage causé par d’autres facteurs doit être exclu de la détermination de l’existence d’un dommage grave.


S.1.30 Article 4:2 b) — dommage causé par un accroissement des importations ou par d’autres facteurs     haut de page

S.1.30.1 États-Unis — Gluten de forment, paragraphe 69
(WT/DS166/AB/R)

L’article 4:2 b) présuppose donc que la première étape de l’examen du lien de causalité par les autorités compétentes consiste à établir une distinction entre les effets dommageables pour la branche de production nationale dus à l’accroissement des importations et les effets dommageables dus à d’autres facteurs. Les autorités compétentes peuvent ensuite, ce qui constitue la deuxième étape de leur examen, imputer à l’accroissement des importations, d’une part, et, par déduction, à d’autres facteurs pertinents, d’autre part, le “dommage” causé par tous ces facteurs différents, y compris l’accroissement des importations. Au cours de ce processus en deux temps, les autorités compétentes se conforment à l’article 4:2 b) en s’assurant que tout dommage qui a été effectivement causé à la branche de production nationale par des facteurs autres que l’accroissement des importations n’est pas “imputé” à l’accroissement des importations et n’est donc pas traité comme s’il s’agissait d’un dommage causé par l’accroissement des importations, lorsque ce n’est pas le cas. De cette manière, les autorités compétentes déterminent, et c’est la dernière étape, si le “lien de causalité” existe entre l’accroissement des importations et le dommage grave, et si ce lien de causalité implique un rapport réel et substantiel de cause à effet entre ces deux éléments, comme l’exige l’Accord sur les sauvegardes.

S.1.30.2 États-Unis — Viande d’agneau, paragraphes 178-181
(WT/DS177/AB/R, WT/DS178/AB/R)

Nous soulignons que ces trois étapes décrivent simplement un processus logique devant permettre de respecter les obligations relatives au lien de causalité qui sont énoncées à l’article 4:2 b). Ces étapes ne sont pas des “critères” juridiques prescrits par le texte de l’Accord sur les sauvegardes; il n’est pas non plus impératif que chaque étape fasse l’objet d’une constatation distincte ou d’une conclusion motivée de la part des autorités compétentes. En fait, ces étapes laissent sans réponse de nombreuses questions méthodologiques en rapport avec l’obligation de non-imputation énoncée dans la seconde phrase de l’article 4:2 b).

Le principal objectif du processus que nous avons décrit dans l’affaire États-Unis — Sauvegardes concernant le gluten de froment consiste, bien entendu, à déterminer s’il existe “un rapport réel et substantiel de cause à effet” entre l’accroissement des importations et le dommage grave ou la menace de dommage grave. Dans le cadre de cette détermination, l’article 4:2 b) dispose expressément que le dommage causé à la branche de production nationale par des facteurs autres qu’un accroissement des importations “ne sera pas imputé à un accroissement des importations”. Dans une situation où plusieurs facteurs causent un dommage “en même temps”, une détermination finale concernant les effets dommageables dus à un accroissement des importations ne peut être établie que si les effets dommageables dus à tous les différents facteurs causals sont distingués et dissociés. Sinon, une conclusion fondée exclusivement sur l’évaluation d’un seul des facteurs causals — l’accroissement des importations — repose sur une assise incertaine, parce qu’elle part de l’hypothèse que les autres facteurs causals ne causent pas le dommage qui a été attribué à l’accroissement des importations. Le libellé de l’article 4:2 b) concernant la non-imputation exclut une telle hypothèse, mais exige que les autorités compétentes évaluent dûment les effets dommageables des autres facteurs, de manière que ces effets puissent être différenciés des effets dommageables de l’accroissement des importations. De cette façon, la détermination finale repose, comme il se doit, sur le rapport réel et substantiel de cause à effet entre l’accroissement des importations et le dommage grave.

Comme nous l’avons dit dans notre rapport sur l’affaire États-Unis — Sauvegardes concernant le gluten de froment, le libellé de l’article 4:2 b) relatif à la non-imputation indique que, logiquement, l’identification finale des effets dommageables dus à l’accroissement des importations doit intervenir après dissociation préalable des effets dommageables des différents facteurs causals. Si les effets des différents facteurs ne sont pas dissociés et distingués des effets de l’accroissement des importations, il ne peut y avoir une évaluation appropriée du dommage causé par ce seul facteur décisif. Comme nous l’avons aussi indiqué, la détermination finale concernant l’existence “du lien de causalité” entre l’accroissement des importations et le dommage grave ne peut être établie qu’après que les effets de l’accroissement des importations ont été dûment évalués, et cette évaluation fait pour sa part suite à la dissociation des effets dus à tous les différents facteurs causals.

Nous soulignons que la méthode et l’approche que les Membres de l’OMC ont choisies pour procéder à la dissociation des effets de l’accroissement des importations et des effets des autres facteurs causals ne sont pas spécifiées par l’Accord sur les sauvegardes. Ce que cet accord exige, c’est simplement que les obligations énoncées à l’article 4:2 doivent être respectées lorsqu’une mesure de sauvegarde est appliquée.


S.1.31 Article 4:2 b) — non-imputation du dommage causé par d’autres facteurs     haut de page

S.1.31.1 États-Unis — Tuyaux de canalisation, paragraphe 208
(WT/DS202/AB/R)

L’article 4:2 b) de l’Accord sur les sauvegardes établit deux prescriptions juridiques distinctes aux fins de l’application d’une mesure de sauvegarde par les autorités compétentes. Premièrement, il faut démontrer l’“existence du lien de causalité entre l’accroissement des importations du produit considéré et le dommage grave ou la menace de dommage grave”. Deuxièmement, le dommage causé par des facteurs autres que l’accroissement des importations ne doit pas être imputé à un accroissement des importations.

S.1.31.2 États-Unis — Gluten de forment, paragraphe 68
(WT/DS166/AB/R)

… À l’évidence, le processus d’imputation du “dommage”, envisagé par cette phrase, ne peut être réalisé qu’après une dissociation du “dommage” qui doit ensuite être dûment “imputé”. Ce qui importe dans ce processus c’est de dissocier ou de distinguer les effets dus aux différents facteurs qui ont entraîné le “dommage”.

S.1.31.3 États-Unis — Viande d’agneau, paragraphe 185
(WT/DS177/AB/R, WT/DS178/AB/R)

… pour être certaine que le dommage causé par ces autres facteurs, quelle que soit son importance, n’avait pas été imputé à l’accroissement des importations, l’ITC aurait aussi dû évaluer, dans une certaine mesure, les effets dommageables de ces autres facteurs. …

S.1.31.4 États-Unis — Viande d’agneau, paragraphe 186
(WT/DS177/AB/R, WT/DS178/AB/R)

En l’absence d’explication valable quant à la nature et à l’importance des effets dommageables de ces six “autres” facteurs, il est impossible de déterminer si l’ITC a dûment dissocié les effets dommageables de ces autres facteurs des effets dommageables de l’accroissement des importations. Il est donc impossible également de déterminer si le dommage causé par ces autres facteurs a été imputé à l’accroissement des importations. En résumé, sans rien savoir de la nature et de l’importance du dommage causé par les six autres facteurs, nous ne pouvons nous assurer que le dommage dont l’ITC a considéré qu’il avait été causé par l’accroissement des importations n’inclut pas un dommage qui, en réalité, avait été causé par ces facteurs.

S.1.31.5 États-Unis — Tuyaux de canalisation, paragraphes 215, 217
(WT/DS202/AB/R)

… les autorités compétentes doivent dissocier et distinguer les effets dommageables de l’accroissement des importations des effets dommageables des autres facteurs. … les autorités compétentes sont tenues de déterminer la nature et l’importance des effets dommageables des facteurs connus autres que l’accroissement des importations, ainsi que d’expliquer de façon satisfaisante la nature et l’importance des effets dommageables de ces autres facteurs par opposition aux effets dommageables de l’accroissement des importations.

Ainsi, pour remplir la prescription énoncée à l’article 4:2 b), dernière phrase, les autorités compétentes doivent établir explicitement, en fournissant une explication motivée et adéquate, que le dommage causé par des facteurs autres qu’un accroissement des importations n’est pas imputé à un accroissement des importations. Cette explication doit être claire et non équivoque. Elle ne doit pas être simplement insinuée ou sous-entendue. Il doit s’agir d’une explication directe formulée en termes exprès.

S.1.31.6 États-Unis — Tuyaux de canalisation, paragraphe 262
(WT/DS202/AB/R)

… Car même si l’USITC n’avait pas dissocié et distingué les effets dommageables des importations des effets dommageables des autres facteurs, il était encore possible que la mesure de sauvegarde puisse être appliquée de manière à ne remédier qu’à une portion des effets dommageables qui avaient été identifiés, à savoir la portion qui était égale ou inférieure aux effets dommageables d’un accroissement des importations. Les États-Unis n’ont pas réfuté l’allégation prima facie de la Corée en démontrant qu’il en était ainsi. Nous formulons cette observation uniquement pour souligner que nous ne disons pas qu’une violation des dispositions de la dernière phrase de l’article 4:2 b) implique une violation automatique des dispositions de la première phrase de l’article 5:1 de l’Accord sur les sauvegardes.

S.1.31.7 États-Unis — Sauvegardes concernant l’acier, paragraphe 489
(WT/DS248/AB/R, WT/DS249/AB/R, WT/DS251/AB/R, WT/DS252/AB/R, WT/DS253/AB/R, WT/DS254/AB/R, WT/DS258/AB/R, WT/DS259/AB/R)

… l’Accord sur les sauvegardes — dans son article 2:1, tel qu’il a été précisé par l’article 4:2 et conjointement avec l’article 3:1 — exige que les autorités compétentes démontrent l’existence d’un “lien de causalité” entre l’“accroissement des importations” et le “dommage grave” (ou la menace de dommage grave) sur la base d’éléments de preuve objectifs”. En outre, les autorités compétentes doivent fournir une explication motivée et adéquate de la façon dont les faits (c’est-à-dire les “éléments de preuve objectifs” susmentionnés) étayent leur détermination. S’il n’est pas satisfait à ces prescriptions, le droit d’appliquer une mesure de sauvegarde n’existe pas.


S.1.32 Article 4:2 b) — lien de causalité — hypothèses concernant l’accroissement des importations et le dommage     haut de page

S.1.32.1 États-Unis — Sauvegardes concernant l’acier, la note de bas de page 494 du paragraphe 481
(WT/DS248/AB/R, WT/DS249/AB/R, WT/DS251/AB/R, WT/DS252/AB/R, WT/DS253/AB/R, WT/DS254/AB/R, WT/DS258/AB/R, WT/DS259/AB/R)

Au paragraphe 10.278 de ses rapports, le Groupe spécial a indiqué qu’il “[avait] supposé aux fins de son examen de la question du lien de causalité” que les producteurs nationaux pertinents avaient été correctement définis et qu’il existait un dommage grave ou une menace de dommage grave. Nous notons que le Groupe spécial n’a pas constaté d’accroissement des importations” pour cinq catégories de produits — CPLPAC, barres laminées à chaud, fil machine en aciers inoxydables, produits étamés ou chromés et fils en aciers inoxydables. Toutefois, il a dû aussi supposer tacitement qu’aux fins de son analyse du lien de causalité, les importations s’étaient accrues pour ces cinq produits. Nous ne voyons rien d’inapproprié en soi à ce que des groupes spéciaux fassent de telles suppositions, en particulier quand, en agissant ainsi, ils peuvent formuler des constatations qu’ils n’auraient pas faites autrement, facilitant ainsi l’examen en appel. Nous sommes conscients du fait que le volume et la complexité du dossier en l’espèce ont pu inciter le Groupe spécial à appliquer le principe d’économie jurisprudentielle pour plusieurs questions et à s’appuyer sur les suppositions interdépendantes correspondantes. Nous relevons toutefois que le cumul de plusieurs suppositions liées entre elles aurait pu compromettre notre capacité d’achever l’analyse juridique du Groupe spécial si nous avions voulu nous prononcer sur la question du lien de causalité.

S.1.32.2 États-Unis — Sauvegardes concernant l’acier, la note de bas de page 495 du paragraphe 481
(WT/DS248/AB/R, WT/DS249/AB/R, WT/DS251/AB/R, WT/DS252/AB/R, WT/DS253/AB/R, WT/DS254/AB/R, WT/DS258/AB/R, WT/DS259/AB/R)

… Nous relevons que le “dommage grave” est l’effet supposé que l’autorité compétente devrait rattacher par un lien de causalité à l’accroissement des importations”. Quand la détermination de l’existence d’un “dommage grave” est contestée, un groupe spécial peut seulement conclure de façon certaine que “l’existence du lien de causalité” a été démontrée de façon adéquate après avoir établi que l’existence d’un “accroissement des importations” et l’existence d’un “dommage grave” ont été déterminées de façon adéquate pendant l’enquête.

S.1.32.3 États-Unis — Sauvegardes concernant l’acier, paragraphe 483
(WT/DS248/AB/R, WT/DS249/AB/R, WT/DS251/AB/R, WT/DS252/AB/R, WT/DS253/AB/R, WT/DS254/AB/R, WT/DS258/AB/R, WT/DS259/AB/R)

Étant donné que nous avons déjà constaté que les mesures soumises à notre examen étaient incompatibles avec l’article XIX:1 a) du GATT de 1994 et avec les articles 2:1, 3:1 et 4:2 de l’Accord sur les sauvegardes, il n’est pas nécessaire, afin de régler le présent différend, de nous prononcer sur la question de savoir si le Groupe spécial a eu raison de constater que les États-Unis avaient aussi agi d’une manière incompatible avec les articles 2:1 et 4:2 de l’Accord sur les sauvegardes parce que l’USITC n’avait pas démontré dans son rapport l’existence d’un “lien de causalité” entre l’accroissement des importations de toutes provenances (c’est-à-dire les importations visées par les mesures et les importations non visées par les mesures) et le dommage grave subi par la branche de production nationale. Nous refusons donc de nous prononcer sur la question du lien de causalité. En conséquence, et puisque nous n’avons pas examiné les constatations du Groupe spécial sur le lien de causalité pour les sept produits sur lesquels porte l’allégation des États-Unis — CPLPAC, barres laminées à chaud, barres parachevées à froid, barres d’armature, tubes soudés, ABJT et barres en aciers inoxydables — nous n’infirmons ni ne confirmons ces constations.


S.1.33 Article 4:2 c) — Publication d’une analyse détaillée.
Voir aussi Accord sur les sauvegardes, article 3:1 — généralités (S.1.18); Accord sur les sauvegardes, relation entre l’article XIX du GATT de 1994 et l’article 3:1 de l’Accord sur les sauvegardes (S.1.46); Accord sur les sauvegardes, relation entre l’article XIX du GATT de 1994 et l’article 4:2 c) de l’Accord sur les sauvegardes (S.1.47)     haut de page

S.1.33.1 États-Unis — Sauvegardes concernant l’acier, paragraphes 289-290
(WT/DS248/AB/R, WT/DS249/AB/R, WT/DS251/AB/R, WT/DS252/AB/R, WT/DS253/AB/R, WT/DS254/AB/R, WT/DS258/AB/R, WT/DS259/AB/R)

… nous estimons que l’article 4:2 c) est l’élaboration de la prescription énoncée dans la dernière phrase de l’article 3:1 et voulant qu’une “conclusion motivée” soit fournie dans un rapport publié.

Les États-Unis ont fait valoir à l’audience que “l’article 4:2 c) ne s’applique pas à la justification par les autorités compétentes de l’évolution imprévue des circonstances” dont il est fait mention à l’article XIX:1 a) du GATT de 1994. Nous ne sommes pas de cet avis. L’article 4:2 c) est un développement de l’article 3; en outre, l’évolution imprévue des circonstances” dont il est fait mention à l’article XIX:1 a) du GATT de 1994 est l’un des “points de fait et de droit pertinents” dont il est fait état dans la dernière phrase de l’article 3:1. Il s’ensuit que l’article 4:2 c) s’applique également à la justification par les autorités compétentes de l’évolution imprévue des circonstances” dont il est fait mention à l’article XIX:1 a).


S.1.34 Article 5:1 — application de la mesure de sauvegarde dans la mesure nécessaire pour prévenir ou réparer un dommage grave et faciliter l’ajustement.
Voir aussi Principes et concepts de droit international public général, proportionnalité (P.3.6)     haut de page

S.1.34.1 Corée — Produits laitiers, paragraphe 96
(WT/DS98/AB/R)

… Nous pensons comme le Groupe spécial que le libellé de cette disposition ne laisse subsister aucun doute quant au fait qu’elle impose à un Membre qui applique une mesure de sauvegarde l’obligation de faire en sorte que cette mesure soit proportionnée aux objectifs consistant à prévenir ou à réparer le dommage grave et à faciliter l’ajustement. Nous pensons aussi que cette obligation s’applique quelle que soit la forme particulière qu’une mesure de sauvegarde peut prendre. Qu’elle prenne la forme d’une restriction quantitative, d’un droit de douane ou d’un contingent tarifaire, la mesure en question ne doit être appliquée “que dans la mesure nécessaire” pour réaliser les objectifs énoncés dans la première phrase de l’article 5:1.

S.1.34.2 États-Unis — Tuyaux de canalisation, paragraphe 84
(WT/DS202/AB/R)

… [si] il y a un droit d’appliquer une mesure de sauvegarde dans ce cas particulier, l’interprète doit alors examiner si le Membre n’a appliqué cette mesure de sauvegarde “que dans la mesure nécessaire pour prévenir ou réparer un dommage grave et faciliter l’ajustement”, comme l’exige la première phrase de l’article 5:1 de l’Accord sur les sauvegardes. Ainsi, le droit d’appliquer une mesure de sauvegarde — même s’il a été établi qu’il existe dans un cas particulier et peut donc être exercé — n’est pas illimité. …

S.1.34.3 États-Unis — Tuyaux de canalisation, paragraphe 172
(WT/DS202/AB/R)

… la portée admissible d’une mesure de sauvegarde est définie par la part du dommage grave qui est imputée à un accroissement des importations, non par la façon dont l’autorité compétente qualifie la situation de la branche de production. …


S.1.35 Article 5:1 — justification de la portée nécessaire de l’application     haut de page

S.1.35.1 États-Unis — Tuyaux de canalisation, paragraphes 233-234, 236
(WT/DS202/AB/R)

… mis à part une exception, l’article 5:1, y compris la première phrase, n’oblige pas un Membre à justifier, au moment de l’application, que la mesure de sauvegarde en cause n’est appliquée “que dans la mesure nécessaire”. L’exception dont nous avons fait état dans l’affaire Corée — Produits laitiers est énoncée dans la deuxième phrase de l’article 5:1. [Rapport de l’Organe d’appel, paragraphes 98-99] Cette exception concerne les mesures de sauvegarde qui prennent la forme de restrictions quantitatives qui ramènent les quantités importées au-dessous de la moyenne des importations effectuées pendant les trois dernières années représentatives. Cette exception ne s’applique pas à la mesure concernant les tubes et tuyaux de canalisation.

Ainsi, nos constatations dans l’affaire Corée — Produits laitiers établissent que l’article 5:1 impose une obligation de fond de nature générale, à savoir n’appliquer des mesures de sauvegarde que dans la mesure admissible, ainsi qu’une obligation de forme de nature particulière, à savoir fournir une justification claire dans le cas précis des restrictions quantitatives qui ramènent le volume des importations au-dessous de la moyenne des importations effectuées pendant les trois dernières années représentatives. L’article 5:1 n’établit pas une obligation de forme de nature générale prescrivant que soit démontrée la conformité avec l’article 5:1, première phrase, au moment où la mesure est appliquée.

Cela ne signifie pas, comme la Corée semble l’affirmer, que la mesure peut être dénuée de justification ou que la vérification multilatérale de la conformité de la mesure avec l’Accord sur les sauvegardes est entravée. Le Membre qui impose une mesure de sauvegarde doit, quoi qu’il en soit, exécuter plusieurs obligations au titre de l’Accord sur les sauvegardes. Et l’exécution de ces obligations devrait avoir l’effet d’expliquer et de “justifier” clairement la portée de l’application de la mesure. En dissociant et en distinguant les effets dommageables des facteurs autres qu’un accroissement des importations de ceux causés par un accroissement des importations, comme l’exige l’article 4:2 b), et en incluant cette analyse détaillée dans le rapport dans lequel sont exposées les constatations et conclusions motivées, comme l’exigent les articles 3:1 et 4:2 c), un Membre qui se propose d’appliquer une mesure de sauvegarde devrait fournir des motifs suffisants pour cette mesure. Le respect des dispositions des articles 3:1, 4:2 b) et 4:2 c) de l’Accord sur les sauvegardes devrait avoir pour effet accessoire de fournir une “justification” suffisante pour une mesure et, comme nous l’expliquerons, devrait aussi fournir un point de repère au regard duquel la portée admissible de la mesure devrait être déterminée.

S.1.35.2 États-Unis — Tuyaux de canalisation, paragraphes 242-243
(WT/DS202/AB/R)

… Lorsque nous avons dit que l’article 4:2 b) ne devait pas être interprété comme impliquant forcément que l’accroissement des importations, en lui-même, doit pouvoir causer un dommage grave ni que le dommage causé par d’autres facteurs doit être exclu de la détermination de l’existence d’un dommage grave, nous examinions la question de savoir si le droit d’appliquer une mesure de sauvegarde existait; nous n’examinions pas la mesure dans laquelle une mesure de sauvegarde pouvait être appliquée.

Par conséquent, les États-Unis se méprennent lorsqu’ils maintiennent que la décision que nous avons rendue dans l’affaire États-Unis — Gluten de froment étaye l’idée que l’article 5:1, première phrase, permet à un Membre d’appliquer une mesure de sauvegarde pour prévenir ou réparer “l’intégralité du dommage grave subi par la branche de production nationale”. Ils prétendent que parce que nous “avons décidé que, conformément à l’article 4:2 a), le dommage grave s’étendait à l’ensemble de la situation de la branche de production”, il s’ensuit que le dommage grave dont il est question à l’article 5:1, première phrase, doit correspondre à l’intégralité” du dommage grave. Toutefois, dans la décision que nous avons rendue dans l’affaire États-Unis — Gluten de froment, il n’est pas fait mention de la mesure dans laquelle une mesure de sauvegarde peut être appliquée, ni de l’intégralité” du dommage grave dans son rapport avec cette mesure admissible. La mesure dans laquelle une mesure de sauvegarde peut être appliquée est le sujet de l’article 5:1, première phrase. Le sens de l’article 5:1, première phrase, n’était pas en cause dans l’affaire États-Unis — Gluten de froment; il est en cause en l’espèce.

S.1.35.3 États-Unis — Tuyaux de canalisation, paragraphe 257
(WT/DS202/AB/R)

… Si la peine infligée aux exportateurs par une mesure de sauvegarde pouvait avoir des effets qui vont au-delà de la part du dommage causé par un accroissement des importations, cela signifierait qu’une mesure corrective exceptionnelle, qui n’a pas pour objet de protéger la branche de production du pays importateur de pratiques commerciales déloyales ou illégales, pourrait s’appliquer d’une manière plus restrictive pour le commerce que les droits antidumping et les droits compensateurs. En fonction de quoi l’Accord sur l’OMC devrait-il être interprété pour qu’une contre-mesure soit limitée à l’étendue du dommage causé par des pratiques déloyales ou une violation du traité, mais pour qu’elle ne soit pas limitée de la sorte lorsqu’il n’y a même pas une allégation de violation ou une pratique déloyale?

S.1.35.4 États-Unis — Tuyaux de canalisation, paragraphe 258
(WT/DS202/AB/R)

L’objet et le but de l’Accord sur les sauvegardes étayent cette interprétation du contexte de l’article 5:1, première phrase. L’Accord sur les sauvegardes ne traite que des importations. Il ne traite que des mesures qui, sous réserve de certaines conditions, peuvent être appliquées aux importations. L’intitulé de l’article XIX du GATT de 1994 est “Mesures d’urgence concernant l’importation de produits particuliers”. (pas d’italique dans l’original) Il nous semble évident que l’objet et le but tant de l’article XIX du GATT de 1994 que de l’Accord sur les sauvegardes étayent la conclusion voulant que les mesures de sauvegarde ne devraient être appliquées que de manière à remédier aux conséquences des importations. Et, par conséquent, il nous semble évident également que l’objectif limité de l’article 5:1, première phrase, est limité par les conséquences des importations.


S.1.36 Relations entre les articles 5:1 et 4:2 b) de l’Accord sur les sauvegardes     haut de page

S.1.36.1 États-Unis — Tuyaux de canalisation, paragraphes 234, 236
(WT/DS202/AB/R)

… L’article 5:1 n’établit pas une obligation de forme de nature générale prescrivant que soit démontrée la conformité avec l’article 5:1, première phrase, au moment où la mesure est appliquée.

Cela ne signifie pas, comme la Corée semble l’affirmer, que la mesure peut être dénuée de justification ou que la vérification multilatérale de la conformité de la mesure avec l’Accord sur les sauvegardes est entravée. Le Membre qui impose une mesure de sauvegarde doit, quoi qu’il en soit, exécuter plusieurs obligations au titre de l’Accord sur les sauvegardes. Et l’exécution de ces obligations devrait avoir l’effet d’expliquer et de “justifier” clairement la portée de l’application de la mesure. En dissociant et en distinguant les effets dommageables des facteurs autres qu’un accroissement des importations de ceux causés par un accroissement des importations, comme l’exige l’article 4:2 b), et en incluant cette analyse détaillée dans le rapport dans lequel sont exposées les constatations et conclusions motivées, comme l’exigent les articles 3:1 et 4:2 c), un Membre qui se propose d’appliquer une mesure de sauvegarde devrait fournir des motifs suffisants pour cette mesure. Le respect des dispositions des articles 3:1, 4:2 b) et 4:2 c) de l’Accord sur les sauvegardes devrait avoir pour effet accessoire de fournir une “justification” suffisante pour une mesure et, comme nous l’expliquerons, devrait aussi fournir un point de repère au regard duquel la portée admissible de la mesure devrait être déterminée.

S.1.36.2 États-Unis — Tuyaux de canalisation, paragraphe 252
(WT/DS202/AB/R)

… la non-imputation qui figure dans la deuxième phrase de l’article 4:2 b) a deux objectifs. Premièrement, dans les situations où plusieurs facteurs causent le dommage en même temps, il vise à empêcher les autorités chargées de l’enquête d’inférer que le “lien de causalité” requis entre l’accroissement des importations et le dommage grave ou la menace de dommage grave existe à partir des effets dommageables causés par des facteurs autres qu’un accroissement des importations. Deuxièmement, c’est un point de repère qui garantit que seule une part appropriée de l’ensemble du dommage est imputée à un accroissement des importations. Selon la lecture que nous faisons de l’Accord, ce deuxième objectif nous renseigne à son tour sur la mesure dans laquelle une mesure de sauvegarde peut être appliquée conformément à l’article 5:1, première phrase. D’ailleurs, selon nous, c’est la seule interprétation possible de l’obligation énoncée à l’article 4:2 b), dernière phrase, qui garantisse la compatibilité de cet article avec l’article 5:1, première phrase. Il serait illogique de demander aux autorités chargées de l’enquête de veiller à ce que l’existence d’un “lien de causalité” entre l’accroissement des importations et le dommage grave ne soit pas établie en fonction de la part du dommage imputée à des facteurs autres qu’un accroissement des importations, tout en permettant en même temps à un Membre d’appliquer une mesure de sauvegarde qui remédie au dommage causé par tous les facteurs.

S.1.36.3 États-Unis — Tuyaux de canalisation, paragraphes 261-262
(WT/DS202/AB/R)

… nous concluons que, en établissant que les États-Unis avaient contrevenu à l’article 4:2 b) de l’Accord sur les sauvegardes, la Corée a établi prima facie que l’application de la mesure concernant les tubes et tuyaux de canalisation n’était pas limitée à la mesure admissible au titre de l’article 5:1. Comme les États-Unis n’ont pas réfuté cette allégation prima facie formulée par la Corée, nous constatons qu’ils ont appliqué la mesure concernant les tubes et tuyaux de canalisation en allant au-delà de la “mesure nécessaire pour prévenir ou réparer un dommage grave et faciliter l’ajustement”. …

… Car même si l’USITC n’avait pas dissocié et distingué les effets dommageables des importations des effets dommageables des autres facteurs, il était encore possible que la mesure de sauvegarde puisse être appliquée de manière à ne remédier qu’à une portion des effets dommageables qui avaient été identifiés, à savoir la portion qui était égale ou inférieure aux effets dommageables d’un accroissement des importations. Les États-Unis n’ont pas réfuté l’allégation prima facie de la Corée en démontrant qu’il en était ainsi. Nous formulons cette observation uniquement pour souligner que nous ne disons pas qu’une violation des dispositions de la dernière phrase de l’article 4:2 b) implique une violation automatique des dispositions de la première phrase de l’article 5:1 de l’Accord sur les sauvegardes.


S.1.37 Article 5:2 b) — modulation des contingents     haut de page

S.1.37.1 États-Unis — Tuyaux de canalisation, paragraphe 173
(WT/DS202/AB/R)

… nous contestons la référence que le Groupe spécial fait au contexte de l’article 5:2 b) de l’Accord sur les sauvegardes pour étayer ses conclusions sur cette question. L’article 5:2 b) exclut la modulation des contingents en cas de menace de dommage grave. C’est, à notre avis, la seule disposition de l’Accord sur les sauvegardes qui établit une différence entre les effets juridiques d’un “dommage grave” et ceux d’une “menace de dommage grave”. En vertu de l’article 5:2 b), pour qu’un Membre importateur puisse adopter une mesure de sauvegarde sous la forme d’un contingent à répartir d’une manière dérogeant à la règle générale énoncée à l’article 5:2 a), ce Membre doit avoir déterminé qu’il y a un “dommage grave”. Un Membre ne peut pas procéder à des modulations de contingents s’il y a uniquement une “menace de dommage grave”. C’est une exception qui doit être respectée. Mais nous ne jugeons pas approprié de généraliser à partir d’une exception si limitée pour justifier une règle générale. En tout état de cause, cette circonstance exceptionnelle n’est pas pertinente pour la mesure concernant les tubes et tuyaux de canalisation. Nous ne trouvons rien dans l’article 5:2 b), considéré comme faisant partie du contexte de l’article 2:1, qui étayerait une constatation selon laquelle, dans la présente affaire, l’USITC a agi d’une manière incompatible avec l’Accord sur les sauvegardes en faisant en l’espèce une détermination non distincte.


S.1.38 Article 8:1 — niveau de concessions équivalent     haut de page

S.1.38.1 États-Unis — Gluten de forment, paragraphes 145-146
(WT/DS166/AB/R)

L’article 8:1 impose aux Membres l’obligation de “s’[efforcer] de maintenir” des concessions équivalentes avec les Membres exportateurs affectés. Les efforts déployés par un Membre à cette fin doivent l’être “conformément aux dispositions” de l’article 12:3 de l’Accord sur les sauvegardes.

Compte tenu de ce lien explicite entre les articles 8:1 et 12:3 de l’Accord sur les sauvegardes, un Membre ne peut pas, à notre avis, “s’[efforcer] de maintenir” un équilibre des concessions adéquat s’il n’a pas, dans un premier temps, ménagé des possibilités adéquates de consultation préalable au sujet d’une mesure projetée.

S.1.38.2 États-Unis — Tuyaux de canalisation, paragraphe 109
(WT/DS202/AB/R)

Nous notons qu’arriver à un tel “accord” [sur les façons de réaliser l’objectif pose à l’article 8:1] est dans l’intérêt non seulement des Membres exportateurs, mais aussi du Membre importateur, qui souhaitera éviter des mesures compensatoires excessives en réponse à la mesure de sauvegarde. Comme nous l’avons dit, l’Accord sur les sauvegardes permet aux Membres d’imposer des mesures à l’égard d’“échanges loyaux”. En conséquence, les Membres à l’égard desquels ces mesures sont imposées se trouvent dans l’impossibilité de tirer pleinement profit des concessions commerciales. Pour cette raison, l’article 8:1 de l’Accord sur les sauvegardes dispose que “les Membres concernés pourront convenir de tout moyen adéquat pour compenser au plan commercial les effets défavorables de la mesure sur leurs échanges commerciaux”. Si aucun accord n’intervient concernant la compensation, l’article 8:2 dispose qu’“il sera loisible aux Membres … affectés de suspendre, dans un délai de 90 jours à compter de l’application de cette mesure …, l’application au commerce du Membre qui applique cette mesure de concessions ou d’autres obligations substantiellement équivalentes résultant du GATT de 1994”. Il est donc dans l’intérêt à la fois du Membre exportateur et du Membre importateur appliquant la mesure de sauvegarde d’engager des “consultations préalables” en vue d’arriver à un accord sur l’importance de la mesure.

S.1.38.3 États-Unis — Tuyaux de canalisation, paragraphe 119
(WT/DS202/AB/R)

À notre avis, le raisonnement que nous avons fait dans l’affaire États-Unis — Gluten de froment est aussi applicable en l’espèce. Par conséquent, nous partageons l’avis du Groupe spécial selon lequel les États-Unis, “en ne s’acquittant pas de leurs obligations au titre de l’article 12:3, ont également agi de manière incompatible avec les obligations, qu’ils ont au titre de l’article 8:1, de s’efforcer de maintenir un niveau de concessions … substantiellement équivalent.” …


S.1.39 Article 9:1 — exclusion des pays en développement Membres de l’application de sauvegardes     haut de page

S.1.39.1 États-Unis — Tuyaux de canalisation, paragraphes 127-128
(WT/DS202/AB/R)

… l’article 9:1 n’indique pas la façon dont un Membre doit respecter cette obligation. Il n’y a rien, par exemple, dans le texte de l’article 9:1 qui indique que les pays auxquels la mesure ne s’appliquera pas doivent être expressément exclus de son application. Le Groupe spécial peut avoir raison de dire qu’il est “raisonnable de s’attendre à” une exclusion expresse, mais nous ne voyons rien dans l’article 9:1 qui en exige une.

… il est possible de se conformer à l’article 9:1 sans établir une liste spécifique des Membres qui soit sont inclus dans le champ d’application de la mesure soit en sont exclus. Quand bien même une telle liste pourrait être, et serait, à la fois utile et efficace en assurant la transparence dans l’intérêt de tous les Membres concernés, nous ne voyons rien dans l’article 9:1 qui en prescrive une.

S.1.39.2 États-Unis — Tuyaux de canalisation, paragraphe 129
(WT/DS202/AB/R)

… nous notons que l’article 9:1 concerne l’application d’une mesure de sauvegarde à un produit. Et nous notons également qu’un droit, comme le droit supplémentaire imposé par la mesure concernant les tubes et tuyaux de canalisation, n’a pas besoin en fait d’être exigé et perçu pour être “appliqué” à un produit. À notre avis, des droits sont “appliqué[]s à l’égard d’un produit” lorsqu’un Membre impose les conditions dans lesquelles ce produit peut être admis sur son marché — y compris lorsqu’un Membre établit, comme les États-Unis l’ont fait en l’espèce, un droit devant être imposé sur les importations hors contingent. Ainsi, à notre avis, des droits sont “appliqués” indépendamment du point de savoir s’ils ont pour effet de rendre les importations plus coûteuses, de décourager les importations parce qu’elles deviennent plus coûteuses ou d’empêcher totalement les importations.

S.1.39.3 États-Unis — Tuyaux de canalisation, paragraphe 130-131
(WT/DS202/AB/R)

… selon les données les plus récentes disponibles au moment où la mesure concernant les tubes et tuyaux de canalisation a pris effet — données figurant dans le dossier du Groupe spécial et non contestées par les États-Unis — les 9 000 tonnes courtes visées par l’exemption de l’application du droit hors contingent imposé par la mesure concernant les tubes et tuyaux de canalisation ne représentaient pas 3 pour cent des importations totales. En fait, elles ne représentaient que 2,7 pour cent des importations totales. … [L]’exemption était, au vue des éléments de preuve, trop faible.

… les États-Unis ont fait valoir devant le Groupe spécial qu’ils “s’attendaient” à ce que la mesure entraîne une diminution du volume total des importations … Mais des attentes ne se concrétisent pas “automatiquement”. Les faits indiquent que, lorsque la mesure a été adoptée, les 9 000 tonnes visées par l’exclusion représentaient moins de 3 pour cent des importations totales sur le marché des États-Unis. Le droit hors contingent s’appliquait aux importations qui dépassaient les 9 000 tonnes courtes visées par l’exemption, quelle que soit leur origine.


S.1.40 Article 12:1 — notification immédiate     haut de page

S.1.40.1 États-Unis — Gluten de forment, paragraphe 102
(WT/DS166/AB/R)

… l’article 12:1 de l’Accord sur les sauvegardes énonce trois obligations distinctes d’adresser une notification au Comité des sauvegardes, chacune étant déclenchée “au moment où” survient un événement spécifié dans l’un des trois alinéas. Le texte introductif de l’article 12:1 dispose que les notifications doivent être adressées “immédiatement” au moment où surviennent les événements en question. (pas d’italique dans l’original)

S.1.40.2 États-Unis — Gluten de forment, paragraphes 105-106
(WT/DS166/AB/R)

S’agissant du sens du terme “immédiatement” figurant dans le texte introductif de l’article 12:1, nous partageons l’avis du Groupe spécial selon lequel le sens ordinaire du terme “[dénote] une certaine urgence”. Le degré d’urgence ou d’immédiateté prescrit dépend d’une évaluation au cas par cas, compte tenu des difficultés administratives que comporte l’établissement de la notification, et aussi de la nature des renseignements communiqués. Comme l’ont reconnu des groupes spéciaux antérieurs, les facteurs pertinents à cet égard peuvent inclure la complexité de la notification et la nécessité de la traduire dans l’une des langues officielles de l’OMC. Cependant, il est clair que le temps consacré à l’établissement de la notification doit, dans tous les cas, être réduit au minimum, étant donné que l’obligation considérée est de notifier “immédiatement”.

Une notification “immédiate” est une notification qui accorde au Comité des sauvegardes, et aux Membres, la période la plus complète possible pour examiner une enquête en cours en matière de sauvegardes et réagir par rapport à celle-ci. Tout ce qui est en deçà d’une notification “immédiate” raccourcit cette période. Par conséquent, nous ne partageons pas l’avis des États-Unis selon lequel l’obligation de notification “immédiate” est satisfaite du moment que le Comité des sauvegardes et les Membres de l’OMC disposent d’un délai suffisant pour examiner cette notification. Pour nous, la question de savoir si un Membre a fait une notification “immédiate” ne dépend pas des éléments de preuve attestant la façon dont le Comité des sauvegardes et les différents Membres de l’OMC utilisent effectivement cette notification. L’obligation de notification “immédiate” ne dépend pas non plus d’une évaluation ex post facto du point de savoir si les différents Membres ont subi un préjudice effectif du fait d’une insuffisance de la période de notification.

S.1.40.3 États-Unis — Gluten de forment, paragraphe 120
(WT/DS166/AB/R)

En examinant le sens ordinaire de l’article 12:1 c), nous faisons observer que l’événement pertinent qui déclenche l’obligation est la “prise” d’une décision. Pour nous, l’article 12:1 c) vise essentiellement le point de savoir si une “décision” est intervenue, ou a été “prise”, et non pas si l’on a donné effet à cette décision. Tel que le texte se présente à première vue, la question de savoir si une notification au titre de l’article 12:1 c) a été adressée en temps voulu revient uniquement à savoir si cette notification a été immédiate.


S.1.41 Article 12:2 — notification de tous les renseignements pertinents     haut de page

S.1.41.1 Corée — Produits laitiers, paragraphe 107
(WT/DS98/AB/R)

… Le texte de l’article12:2 indique clairement qu’un Membre qui projette d’appliquer une mesure de sauvegarde est tenu de communiquer au Comité des sauvegardes tous les renseignements pertinents, et pas seulement des renseignements pertinents. En outre, il prévoit que ces renseignements comprendront certains éléments indiqués immédiatement après l’expression “tous les renseignements pertinents”, à savoir les éléments de preuve de l’existence d’un dommage grave ou d’une menace de dommage grave causé par un accroissement des importations, la désignation précise du produit en cause et de la mesure projetée, la date projetée pour l’introduction de la mesure, sa durée probable et le calendrier établi pour sa libéralisation progressive. Ces éléments, qui sont énumérés comme devant obligatoirement faire partie de “tous les renseignements pertinents”, constituent une prescription de notification minimale à laquelle il doit être satisfait pour que la notification soit conforme aux prescriptions de l’article12.

S.1.41.2 Corée — Produits laitiers, paragraphe 108
(WT/DS98/AB/R)

… Nous pensons que “les éléments de preuve de l’existence d’un dommage grave” au sens de l’article 12:2 devraient, au minimum, porter sur tous les facteurs relatifs au dommage devant être évalués au titre de l’article 4:2 a). Autrement dit, suivant le texte et le contexte de l’article 12:2, un Membre doit, au minimum, traiter dans ses notifications, conformément au paragraphe 1 b) et 1 c) de l’article 12, de tous les éléments spécifiés à l’article 12:2 comme constituant “tous les renseignements pertinents”, ainsi que les facteurs énumérés à l’article 4:2, qui doivent être évalués dans une enquête en matière de sauvegarde. Nous estimons que le critère établi par l’article 12 pour ce qui est de la teneur de “tous les renseignements pertinents” à notifier au Comité des sauvegardes est un critère objectif indépendant de l’évaluation subjective du Membre qui adresse la notification.

S.1.41.3 États-Unis — Gluten de forment, paragraphes 123-125
(WT/DS166/AB/R)

L’article 12:2 est lié à l’article 12:1 de l’Accord sur les sauvegardes et le complète. Tandis que l’article 12:1 établit à quel moment les notifications doivent être faites au cours d’une enquête, l’article 12:2 précise quels renseignements détaillés doivent être contenus dans les notifications au titre de l’article 12:1 b) et 12:1 c). Toutefois, nous ne pensons pas que les prescriptions relatives au contenu énoncées à l’article 12:2 fixent à quel moment la notification au titre de l’article 12:1 c) doit intervenir. À notre avis, le fait qu’une notification au titre de l’article 12:1 c) est adressée en temps voulu ou non est plutôt déterminé par la question de savoir si une décision d’appliquer ou de proroger une mesure de sauvegarde est notifiée “immédiatement”. Une question distincte se pose quant au point de savoir si les notifications faites par le Membre satisfont aux prescriptions relatives au contenu énoncées à l’article 12:2. Pour répondre à cette question distincte, il faut examiner si, dans ses notifications au titre soit de l’article 12:1 b), soit de l’article 12:1 c), le Membre qui projette d’appliquer une mesure de sauvegarde a notifié “tous les renseignements pertinents”, y compris les “éléments […] devant obligatoirement [en] faire partie” expressément énumérés à l’article 12:2.

Ainsi, les obligations énoncées à l’article 12:1 b), 12:1 c) et 12:2 se rapportent à différents aspects du processus de notification. Bien que liées, ces obligations sont séparées. Un Membre pourrait notifier “tous les renseignements pertinents” dans ses notifications au titre de l’article 12:1 b) et 12:1 c) et ainsi se conformer à l’article 12:2, mais agir quand même d’une manière incompatible avec l’article 12:1 parce que les notifications considérées n’ont pas été adressées “immédiatement”. De même, un Membre pourrait satisfaire à l’obligation de notification “immédiate” énoncée à l’article 12:1, mais agir d’une manière incompatible avec l’article 12:2 si le contenu de ses notifications présentait des carences.

À notre avis, lorsqu’il a constaté que les États-Unis avaient agi d’une manière incompatible avec l’article 12:1 c) uniquement parce que la décision d’appliquer une mesure de sauvegarde avait été notifiée après que cette décision avait été mise en œuvre, le Groupe spécial a confondu les obligations distinctes imposées aux Membres en vertu de l’article 12:1 c) et de l’article 12:2 et, par la même, a ajouté une autre prescription aux obligations de notifier en temps voulu figurant à l’article 12:1 c). Au lieu d’insister sur la notification “immédiate”, telle qu’elle est prévue par l’article 12:1 c), le Groupe spécial a exigé que la notification soit faite à la fois “immédiatement” et avant la mise en œuvre de la mesure de sauvegarde. Nous ne voyons à l’article 12:1 c) aucun élément sur lequel fonder cette conclusion.


S.1.42 Article 12:3 — “possibilités adéquates de consultation préalable”     haut de page

S.1.42.1 États-Unis — Gluten de forment, paragraphes 136-137
(WT/DS166/AB/R)

Nous relevons, tout d’abord, que l’article 12:3 exige qu’un Membre qui projette d’appliquer une mesure de sauvegarde ménage des “possibilités adéquates de consultation préalable” aux Membres ayant un intérêt substantiel dans l’exportation du produit considéré. L’article 12:3 dispose que des “possibilités adéquates” de consultation doivent être ménagées “afin”: d’examiner les renseignements fournis conformément à l’article 12:2; d’échanger des vues au sujet de la mesure; et d’arriver à un accord avec les Membres exportateurs sur un niveau de concessions équivalent. Compte tenu de ces objectifs, nous considérons que l’article 12:3 exige qu’un Membre qui projette d’appliquer une mesure de sauvegarde communique aux Membres exportateurs des renseignements suffisants et leur accorde un délai suffisant pour permettre, par le biais de consultations, un échange de vues utile sur les questions identifiées. Pour nous, il découle du texte de l’article 12:3 lui-même que les renseignements concernant la mesure projetée doivent être communiqués avant les consultations, de façon que ces dernières permettent d’examiner cette mesure de manière adéquate. En outre, la référence, faite à l’article 12:3, aux “renseignements communiqués au titre” de l’article 12:2, indique que l’article 12:2 identifie les renseignements qui sont nécessaires pour que des consultations utiles puissent avoir lieu au titre de l’article 12:3. Dans la liste des “éléments … devant obligatoirement faire partie” des renseignements identifiés à l’article 12:2 figurent: une désignation précise de la mesure projetée et la date projetée pour son introduction.

Ainsi, à notre avis, un Membre exportateur n’aura pas de “possibilités adéquates” au titre de l’article 12:3 de négocier des concessions globalement équivalentes par le biais de consultations, à moins que, préalablement à ces consultations, il n’ait obtenu, entre autres choses, des renseignements suffisamment détaillés sur la forme de la mesure projetée, y compris la nature de la mesure corrective.

S.1.42.2 États-Unis — Tuyaux de canalisation, paragraphes 103-104
(WT/DS202/AB/R)

Les notifications qui ont été à la base des consultations tenues le 24 janvier 2000 décrivaient les mesures projetées par l’USITC. Le Groupe spécial a constaté, en fait, que ces mesures projetées “différai[ent] nettement” de celle qui avait été annoncée par le Président le 11 février 2000 et finalement appliquée par les États-Unis, à compter du 1er mars 2000. Pour cette raison, nous ne pensons pas que les notifications faites en l’espèce par les États-Unis au titre de l’article 12:1 b) étaient suffisamment précises pour permettre à la Corée de mener des consultations utiles sur la mesure en cause.

Nous ne voulons pas dire par là que les “consultation[s] préalable[s]” envisagées à l’article 12:3 doivent porter sur une mesure projetée qui est identique, à tous égards, à celle qui est finalement appliquée. Vraisemblablement, les “consultation[s] préalable[s]” entraîneront, de temps à autre, certaines modifications d’une mesure projetée. Mais lorsque, comme en l’espèce, la mesure projetée “différait nettement” de la mesure qui a été ultérieurement appliquée, et non par suite de “consultation[s] préalable[s]”, nous ne voyons pas comment il aurait pu y avoir des “consultation[s] préalable[s]” utiles, comme l’exige l’article 12:3. …

S.1.42.3 États-Unis — Tuyaux de canalisation, paragraphes 106-108
(WT/DS202/AB/R)

… l’article 12:3 exige “qu’un Membre qui projette d’appliquer une mesure de sauvegarde communique aux Membres exportateurs des renseignements suffisants et leur accorde un délai suffisant pour permettre, par le biais de consultations, un échange de vues utile”. …

L’article 12:3 n’indique pas précisément combien de temps il faudrait prévoir pour les consultations. En conséquence, une constatation sur le caractère adéquat du délai accordé dans une affaire particulière exige nécessairement un examen au cas par cas. …

… il doit y avoir un délai suffisant “pour permettre … un échange de vues utile”. Cette prescription présuppose que les Membres exportateurs obtiendront les renseignements pertinents suffisamment à l’avance pour permettre l’analyse de la mesure et suppose en outre que les Membres exportateurs auront des possibilités adéquates d’examiner les conséquences probables de la mesure avant que cette dernière prenne effet. Car c’est uniquement dans de telles circonstances qu’un Membre exportateur sera en mesure, comme l’exige l’article 12:3, d’“arriver à un accord sur les moyens d’atteindre l’objectif énoncé au paragraphe 1 de l’article 8” qui est de “maintenir un niveau de concessions et d’autres obligations substantiellement équivalent à celui qui existe en vertu du GATT de 1994”. Nous jugeons particulièrement important ce lien textuel spécifique entre l’article 12:3 et le paragraphe 1 de l’article 8.

S.1.42.4 États-Unis — Tuyaux de canalisation, paragraphes 109-110
(WT/DS202/AB/R)

Nous notons qu’arriver à un tel “accord” est dans l’intérêt non seulement des Membres exportateurs, mais aussi du Membre importateur, qui souhaitera éviter des mesures compensatoires excessives en réponse à la mesure de sauvegarde. Comme nous l’avons dit, l’Accord sur les sauvegardes permet aux Membres d’imposer des mesures à l’égard d’“échanges loyaux”. En conséquence, les Membres à l’égard desquels ces mesures sont imposées se trouvent dans l’impossibilité de tirer pleinement profit des concessions commerciales. Pour cette raison, l’article 8:1 de l’Accord sur les sauvegardes dispose que “les Membres concernés pourront convenir de tout moyen adéquat pour compenser au plan commercial les effets défavorables de la mesure sur leurs échanges commerciaux”. Si aucun accord n’intervient concernant la compensation, l’article 8:2 dispose qu’“il sera loisible aux Membres … affectés de suspendre, dans un délai de 90 jours à compter de l’application de cette mesure …, l’application au commerce du Membre qui applique cette mesure de concessions ou d’autres obligations substantiellement équivalentes résultant du GATT de 1994”. Il est donc dans l’intérêt à la fois du Membre exportateur et du Membre importateur appliquant la mesure de sauvegarde d’engager des “consultations préalables” en vue d’arriver à un accord sur l’importance de la mesure.

Enfin, la notion d’échange de vues utile, telle que nous la comprenons, suppose que le Membre importateur engagera des consultations de bonne foi et prendra le temps approprié pour examiner comme il convient toutes observations communiquées par les Membres exportateurs avant de mettre en œuvre la mesure. Comme toujours, nous devons partir du principe que les Membres de l’OMC s’efforcent de remplir leurs obligations dans le cadre de l’OMC de bonne foi.


S.1.43 Relation entre l’Accord sur les sauvegardes et l’Accord antidumping     haut de page

S.1.43.1 États-Unis — Tuyaux de canalisation, paragraphe 214
(WT/DS202/AB/R)

… Comme nous l’avons fait observer dans cet appel [États-Unis — Acier laminé à chaud]: “[b]ien que le texte de l’Accord sur les sauvegardes concernant le lien de causalité ne soit aucunement identique à celui de l’Accord antidumping, il existe d’importantes similarités entre les deux accords pour ce qui est du libellé concernant la non-imputation”. [Rapport de l’Organe d’appel, paragraphe 230] Nous avons alors ajouté que “les rapports adoptés de groupes spéciaux et de l’Organe d’appel traitant du libellé de l’Accord sur les sauvegardes concernant la non-imputation peuvent donner des indications pour l’interprétation du libellé de l’article 3.5 de l’Accord antidumping concernant la non-imputation”. Nous sommes d’avis que ce raisonnement est valable dans les deux sens. Les déclarations que nous avons faites dans l’affaire États-Unis — Acier laminé à chaud concernant l’article 3.5 de l’Accord antidumping donnent pareillement des indications aux fins de l’interprétation du libellé similaire figurant à l’article 4:2 b) de l’Accord sur les sauvegardes.


S.1.44 Relation entre l’Accord sur les sauvegardes et le GATT de 1994     haut de page

S.1.44.1 Argentine — Chaussures (CE), paragraphe 81
(WT/DS121/AB/R)

Ainsi, le GATT de 1994 n’est pas le GATT de 1947. Il est “juridiquement distinct” du GATT de 1947. Le GATT de 1994 et l’Accord sur les sauvegardes sont tous deux des accords multilatéraux sur le commerce des marchandises figurant à l’Annexe 1A de l’Accord sur l’OMC et, en tant que tels, font tous deux “partie intégrante” du même traité, l’Accord sur l’OMC, et sont “contraignants pour tous les Membres”. Par conséquent, les dispositions de l’article XIX du GATT de 1994 et les dispositions de l’Accord sur les sauvegardes sont toutes des dispositions d’un seul traité, l’Accord sur l’OMC. Elles sont entrées en vigueur, en tant qu’éléments de ce traité, à la même date. Elles s’appliquent de la même façon et sont également contraignantes pour tous les Membres de l’OMC. En outre, puisque ces dispositions concernent la même chose, à savoir l’application de mesures de sauvegarde par les Membres, le Groupe spécial a eu raison d’indiquer que “l’article XIX du GATT et l’Accord sur les sauvegardes [devaient] a fortiori être vus comme représentant un ensemble indissociable de droits et de disciplines qui [devaient] être considérés conjointement”. Cependant, celui qui interprète un traité doit lire toutes les dispositions applicables du traité de façon à donner un sens à toutes, harmonieusement. Et une lecture appropriée de cet “ensemble indissociable de droits et de disciplines” doit en conséquence donner un sens à toutes les dispositions pertinentes de ces deux accords également contraignants.

S.1.44.2 Argentine — Chaussures (CE), paragraphes 83-84
(WT/DS121/AB/R)

Nous ne voyons rien dans le texte de l’article premier ni de l’article 11:1 a) de l’Accord sur les sauvegardes qui donne à entendre que les négociateurs du Cycle d’Uruguay avaient eu l’intention d’englober les prescriptions de l’article XIX du GATT de 1994 dans l’Accord sur les sauvegardes et ainsi, de faire en sorte que ces prescriptions ne soient plus applicables. L’article premier indique que le but de l’Accord sur les sauvegardes est d’établir “des règles pour l’application des mesures de sauvegardes, qui s’entendent des mesures prévues à l’article XIX du GATT de 1994” (pas d’italique dans l’original). Cela donne à entendre que l’article XIX continue d’être pleinement en vigueur et de produire tous ses effets et, en fait, établit certaines conditions préalables à l’imposition de mesures de sauvegarde. En outre, dans l’article 11:1 a), il est clair que le membre de phrase “que si de telles mesures sont conformes aux dispositions de cet article appliquées conformément aux dispositions du présent accord” (pas d’italique dans l’original) signifie, suivant son sens ordinaire, et que toute mesure de sauvegarde doit être conforme aux dispositions de l’article XIX du GATT de 1994 ainsi qu’aux dispositions de l’Accord sur les sauvegardes. Aucune de ces dispositions n’indique qu’une mesure de sauvegarde prise après l’entrée en vigueur de l’Accord sur l’OMC doit seulement être conforme aux dispositions de l’Accord sur les sauvegardes.

Ainsi, nous concluons que toute mesure de sauvegarde imposée après l’entrée en vigueur de l’Accord sur l’OMC doit être conforme à la fois aux dispositions de l’Accord sur les sauvegardes et à celles de l’article XIX du GATT de 1994.

S.1.44.3 Corée — Produits laitiers, paragraphe 75
(WT/DS98/AB/R)

… L’Accord sur les sauvegardes est l’un des 13 Accords multilatéraux sur le commerce des marchandises figurant à l’Annexe 1A de l’Accord sur l’OMC. Il est important de comprendre que l’Accord sur l’OMC est un traité. Le GATT de 1994 et l’Accord sur les sauvegardes sont tous deux des Accords multilatéraux sur le commerce des marchandises figurant à l’Annexe 1A, qui font partie intégrante de ce traité et sont également contraignants pour tous les Membres conformément à l’article II:2 de l’Accord sur l’OMC.

S.1.44.4 Corée — Produits laitiers, paragraphe 77
(WT/DS98/AB/R)

L’article premier indique que l’objet de l’Accord sur les sauvegardes est d’établir “des règles pour l’application des mesures de sauvegarde, qui s’entendent des mesures prévues à l’article XIX du GATT de 1994”. (pas d’italique dans l’original) Le sens ordinaire des termes figurant à l’article 11:1 a) — “que si de telles mesures sont conformes aux dispositions de cet article appliquées conformément aux dispositions du présent accord” — est qu’une mesure de sauvegarde doit être conforme aux dispositions de l’article XIX du GATT de 1994 ainsi qu’aux dispositions de l’Accord sur les sauvegardes. Ainsi, toute mesure de sauvegarde imposée après l’entrée en vigueur de l’Accord sur l’OMC doit être conforme à la fois aux dispositions de l’Accord sur les sauvegardes et à celles de l’article XIX du GATT de 1994.


S.1.45 Article XIX du GATT de 1994 — généralités.
Voir aussi Accord sur l’agriculture, article 5 — sauvegarde spéciale (A.1.14); Accord sur les sauvegardes, généralités (S.1.1); Accord sur les textiles et les vêtements, article 6 — sauvegarde transitoire (T.7.1)     haut de page

S.1.45.1 Corée — Produits laitiers, paragraphe 86
(WT/DS98/AB/R)

… À notre avis, le texte de l’article XIX:1 a) du GATT de 1994, lu dans son sens ordinaire et dans son contexte, montre que l’intention des rédacteurs du GATT était que les mesures de sauvegarde soient quelque chose sortant de l’ordinaire, concernant des situations d’urgence, bref, des “mesures d’urgence”. Et il ne doit être recouru à ces “mesures d’urgence” que dans les situations où, par suite d’engagements assumés en vertu du GATT de 1994, un Membre importateur se trouve confronté à une évolution qu’il n’avait pas “prévue” ni “attendue” au moment où il a assumé cet engagement. La mesure corrective que l’article XIX:1 a) autorise dans cette situation est temporairement “de suspendre l’engagement en totalité ou en partie, de retirer ou de modifier la concession”. Ainsi, l’article XIX est à l’évidence une mesure corrective exceptionnelle.

S.1.45.2 États-Unis — Sauvegardes concernant l’acier, paragraphe 347
(WT/DS248/AB/R, WT/DS249/AB/R, WT/DS251/AB/R, WT/DS252/AB/R, WT/DS253/AB/R, WT/DS254/AB/R, WT/DS258/AB/R, WT/DS259/AB/R)

… Du fait que les mesures de sauvegarde sont des “mesures d’urgence”, nous avons noté également qu’“en interprétant les conditions préalables régissant l’adoption de telles mesures, il [fallait] prendre en considération leur caractère exceptionnel”. La prescription relative à l’“accroissement des importations” énoncée aux articles XIX:1 a) et 2:1 doit donc être interprétée dans le contexte du “caractère exceptionnel” des “mesures d’urgence” qui sont autorisées par l’article XIX:1 a) du GATT de 1994. Même ainsi, le fait que des mesures de sauvegarde sont des “mesures d’urgence” et que les conditions préalables régissant l’adoption de telles mesures devraient donc être interprétées compte tenu du “caractère exceptionnel” des mesures de sauvegarde, n’implique pas que les conditions préalables régissant l’adoption de telles mesures, en elles-mêmes et à elles seules, doivent nécessairement être “anormales” ou “exceptionnelles”. La question concerne les “conditions” dans lesquelles des importations en quantités “tellement” accrues se produisent.


S.1.46 Relation entre l’article XIX du GATT de 1994 et l’article 3:1 de l’Accord sur les sauvegardes     haut de page

S.1.46.1 États-Unis — Viande d’agneau, paragraphe 76
(WT/DS177/AB/R, WT/DS178/AB/R)

… nous observons que l’article 3:1 oblige les autorités compétentes à exposer des constatations et des conclusions motivées sur “tous les points de fait et de droit pertinents” dans le rapport qu’elles publient. Comme l’article XIX:1 a) du GATT de 1994 exige que l’“évolution imprévue des circonstances” soit démontrée en fait pour qu’une mesure de sauvegarde puisse être appliquée, l’existence d’une “évolution imprévue des circonstances” est, à notre avis, un “point de fait et de droit pertinent”, aux termes de l’article 3:1, pour qu’une mesure de sauvegarde puisse être appliquée, et il s’ensuit que le rapport publié par les autorités compétentes conformément à cet article doit renfermer une “constatation” ou une “conclusion motivée” concernant l’“évolution imprévue des circonstances”.

S.1.46.2 États-Unis — Sauvegardes concernant l’acier, paragraphe 279
(WT/DS248/AB/R, WT/DS249/AB/R, WT/DS251/AB/R, WT/DS252/AB/R, WT/DS253/AB/R, WT/DS254/AB/R, WT/DS258/AB/R, WT/DS259/AB/R)

Nous ne voyons pas comment un groupe spécial pourrait examiner objectivement la compatibilité d’une détermination avec l’article XIX du GATT de 1994 si les autorités compétentes n’ont pas fourni une explication à l’appui de leurs conclusions au sujet de l’“évolution imprévue des circonstances”. En effet, pour qu’un groupe spécial soit en mesure de déterminer si ont été remplies les conditions préalables qui doivent être réunies avant qu’une mesure de sauvegarde puisse être appliquée, les autorités compétentes doivent fournir une “explication motivée et adéquate” de la façon dont les faits étayent leur détermination concernant ces conditions préalables, y compris l’“évolution imprévue des circonstances” dont il est fait mention à l’article XIX:1 a) du GATT de 1994.

S.1.46.3 États-Unis — Sauvegardes concernant l’acier, paragraphes 326, 329
(WT/DS248/AB/R, WT/DS249/AB/R, WT/DS251/AB/R, WT/DS252/AB/R, WT/DS253/AB/R, WT/DS254/AB/R, WT/DS258/AB/R, WT/DS259/AB/R)

L’article 3:1 de l’Accord sur les sauvegardes oblige les autorités compétentes à exposer des “conclusions motivées” sur tous “les points de fait et de droit pertinents”. L’un de ces “points de droit” est l’obligation de démontrer l’existence d’une “évolution imprévue des circonstances” qui a entraîné un accroissement des importations causant un dommage grave. Par conséquent, il incombait à l’USITC, à notre avis, de présenter une “conclusion motivée” au sujet de l’“évolution imprévue des circonstances”. …

… Il ne revient pas au Groupe spécial de faire le raisonnement pour le compte ou à la place des autorités compétentes, mais plutôt d’évaluer dans quelle mesure ce raisonnement satisfait à la prescription pertinente. En conséquence, nous ne pouvons convenir avec les États-Unis que le Groupe spécial était “tenu” de prendre en considération les données pertinentes auxquelles l’USITC s’est référée dans d’autres sections de son rapport pour étayer la constatation de l’USITC selon laquelle l’“évolution imprévue des circonstances” avait entraîné un accroissement des importations; …


S.1.47 Relation entre l’article XIX du GATT de 1994 et l’article 4:2 c) de l’Accord sur les sauvegardes     haut de page

S.1.47.1 États-Unis — Sauvegardes concernant l’acier, paragraphes 289-290
(WT/DS248/AB/R, WT/DS249/AB/R, WT/DS251/AB/R, WT/DS252/AB/R, WT/DS253/AB/R, WT/DS254/AB/R, WT/DS258/AB/R, WT/DS259/AB/R)

… nous estimons que l’article 4:2 c) est l’élaboration de la prescription énoncée dans la dernière phrase de l’article 3:1 et voulant qu’une “conclusion motivée” soit fournie dans un rapport publié.

Les États-Unis ont fait valoir à l’audience que “l’article 4:2 c) ne s’applique pas à la justification par les autorités compétentes de l’évolution imprévue des circonstances” dont il est fait mention à l’article XIX:1 a) du GATT de 1994. Nous ne sommes pas de cet avis. L’article 4:2 c) est un développement de l’article 3; en outre, l’“évolution imprévue des circonstances” dont il est fait mention à l’article XIX:1 a) du GATT de 1994 est l’un des “points de fait et de droit pertinents” dont il est fait état dans la dernière phrase de l’article 3:1. Il s’ensuit que l’article 4:2 c) s’applique également à la justification par les autorités compétentes de l’“évolution imprévue des circonstances” dont il est fait mention à l’article XIX:1 a).


S.1.48 Article XIX du GATT de 1994 — “par suite de”     haut de page

S.1.48.1 États-Unis — Sauvegardes concernant l’acier, paragraphe 315
(WT/DS248/AB/R, WT/DS249/AB/R, WT/DS251/AB/R, WT/DS252/AB/R, WT/DS253/AB/R, WT/DS254/AB/R, WT/DS258/AB/R, WT/DS259/AB/R)

Si l’on examine maintenant les termes “par suite de” (“as a result of” dans la version anglaise), qui figurent également à l’article XIX:1 a), nous observons que le sens ordinaire de “résultat”, tel qu’il est défini dans le dictionnaire, est: “effet, issue ou conséquence d’une action, d’un processus ou d’un dessein”. L’accroissement des importations dont il est fait mention dans cette disposition doit donc être un “effet ou [une] conséquence” de l’“évolution imprévue des circonstances”. En d’autres termes, l’“évolution imprévue des circonstances” doit “entraîner” un accroissement des importations du produit (“ce produit”) qui est visé par une mesure de sauvegarde.

S.1.48.2 États-Unis — Sauvegardes concernant l’acier, paragraphe 350
(WT/DS248/AB/R, WT/DS249/AB/R, WT/DS251/AB/R, WT/DS252/AB/R, WT/DS253/AB/R, WT/DS254/AB/R, WT/DS258/AB/R, WT/DS259/AB/R)

… nous avons dit dans l’affaire Argentine — Chaussures (CE) que “les quantités accrues d’importations auraient dû être “imprévues” ou “inattendues”. Ce faisant, nous nous référions au fait que l’accroissement des importations doit, au titre de l’article XIX:1 a), résulter de “l’évolution imprévue des circonstances” pour justifier l’application d’une mesure de sauvegarde. L’“accroissement des importations” devant se produire “par suite” d’un événement qui était “imprévu” ou “inattendu”, il s’ensuit que l’accroissement des importations doit aussi être “imprévu” ou “inattendu”. Ainsi, le “caractère exceptionnel” de la réaction au niveau interne à l’accroissement des importations ne dépend pas des quantités absolues ou relatives du produit qui est importé. Il dépend plutôt du fait que l’accroissement des importations était imprévu ou inattendu.


S.1.49 Article XIX du GATT de 1994 — “ce produit”     haut de page

S.1.49.1 États-Unis — Sauvegardes concernant l’acier, paragraphe 314
(WT/DS248/AB/R, WT/DS249/AB/R, WT/DS251/AB/R, WT/DS252/AB/R, WT/DS253/AB/R, WT/DS254/AB/R, WT/DS258/AB/R, WT/DS259/AB/R)

Les termes “ce produit”, qui figurent à l’article XIX:1 a), désignent le produit qui peut être visé par une mesure de sauvegarde. Ce produit est, nécessairement, le produit qui “est importé en quantités tellement accrues”. Lu dans son intégralité, l’article XIX:1 a) exige clairement que les mesures de sauvegarde soient appliquées au produit qui “est importé en quantités tellement accrues”, et que ces “quantités accrues” soient importées “par suite” de l’“évolution imprévue des circonstances”.

S.1.49.2 États-Unis — Sauvegardes concernant l’acier, paragraphe 316
(WT/DS248/AB/R, WT/DS249/AB/R, WT/DS251/AB/R, WT/DS252/AB/R, WT/DS253/AB/R, WT/DS254/AB/R, WT/DS258/AB/R, WT/DS259/AB/R)

Il est évident … que n’importe quelle évolution des circonstances qui est “imprévue” ne fera pas l’affaire. Pour que le droit d’appliquer une mesure de sauvegarde puisse être exercé, l’évolution des circonstances doit être telle qu’elle entraîne un accroissement des importations du produit (“ce produit”) qui est visé par la mesure de sauvegarde. En outre, conformément aux dispositions de l’article XIX:1 a), un produit peut éventuellement être visé par cette mesure de sauvegarde, à condition que l’“évolution des circonstances” alléguée entraîne un accroissement des importations de ce produit spécifique (“ce produit”). Par conséquent, nous nous accordons à penser comme le Groupe spécial que, s’agissant des produits spécifiques visés par les déterminations respectives, les autorités compétentes sont tenues par l’article XIX:1 a) du GATT de 1994 de démontrer que l’“évolution imprévue des circonstances qui aura été identifiée … a entraîné un accroissement des importations [des produits spécifiques visés par] … chaque mesure de sauvegarde en cause”.

S.1.49.3 États-Unis — Sauvegardes concernant l’acier, paragraphes 318-319
(WT/DS248/AB/R, WT/DS249/AB/R, WT/DS251/AB/R, WT/DS252/AB/R, WT/DS253/AB/R, WT/DS254/AB/R, WT/DS258/AB/R, WT/DS259/AB/R)

Il doit … y avoir un “lien logique” entre l’“évolution imprévue des circonstances” et l’accroissement des importations du produit qui cause, ou menace de causer, un dommage grave. Sans ce “lien logique” entre l’“évolution imprévue des circonstances” et le produit auquel des mesures de sauvegarde pourraient être appliquées, il ne serait pas possible de déterminer, comme l’exige l’article XIX:1 a), que l’accroissement des importations de “ce produit” est le “résultat de” l’“évolution imprévue des circonstances” pertinente. Par conséquent, le droit d’appliquer une mesure de sauvegarde à ce produit n’existerait pas.

… lorsqu’un Membre importateur souhaite appliquer des mesures de sauvegarde aux importations de plusieurs produits, il ne lui suffit pas de démontrer simplement que l’“évolution imprévue des circonstances” a entraîné l’accroissement des importations d’une grande catégorie de produits qui inclut les produits spécifiques visés par les déterminations respectives des autorités compétentes. S’il pouvait en être ainsi, un Membre pourrait établir une détermination et appliquer une mesure de sauvegarde à une grande catégorie de produits, même si les importations de un ou de plusieurs de ces produits ne s’étaient pas accrues et ne résultaient pas de l’“évolution imprévue des circonstances” en cause. Par conséquent, nous nous accordons à penser comme le Groupe spécial que cette approche ne satisfait pas aux exigences de l’article XIX:1 a), et que la démonstration de l’“évolution imprévue des circonstances” doit être faite pour chaque produit visé par une mesure de sauvegarde.


S.1.50 Article XIX du GATT de 1994 — “évolution imprévue des circonstances”     haut de page

S.1.50.1 Argentine — Chaussures (CE), paragraphe 92
(WT/DS121/AB/R)

… La première clause énoncée à l’article XIX:1 a) — “par suite de l’évolution imprévue des circonstances et par l’effet des engagements, y compris les concessions tarifaires, qu’un Membre a assumés en vertu du présent Accord …” — est une clause subordonnée qui, à notre avis, est grammaticalement liée au syntagme verbal “est importé” figurant dans la deuxième clause de ce paragraphe. Bien que nous ne pensions pas que la première clause de l’article XIX:1 a) établisse des conditions indépendantes pour l’application d’une mesure de sauvegarde, s’ajoutant aux conditions énoncées dans la deuxième clause de ce paragraphe, nous estimons que la première clause décrit certaines circonstances dont l’existence doit effectivement être démontrée pour qu’une mesure de sauvegarde puisse être appliquée conformément aux dispositions de l’article XIX du GATT de 1994. En ce sens, nous pensons qu’il y a un lien logique entre les circonstances décrites dans la première clause — “par suite de l’évolution imprévue des circonstances et par l’effet des engagements, y compris les concessions tarifaires, qu’un Membre a assumés en vertu du présent Accord …” — et les conditions énoncées dans la deuxième clause de l’article XIX:1 a) pour l’imposition d’une mesure de sauvegarde.

S.1.50.2 Corée — Produits laitiers, paragraphe 85
(WT/DS98/AB/R)

… La première clause énoncée à l’article XIX:1 a) — “par suite de l’évolution imprévue des circonstances et par l’effet des engagements, y compris les concessions tarifaires, qu’un Membre a assumés en vertu du présent Accord …” — est une clause subordonnée qui, à notre avis, est grammaticalement liée au syntagme verbal “est importé” figurant dans la deuxième clause de ce paragraphe. Bien que nous ne pensions pas que la première clause de l’article XIX:1 a) établisse des conditions indépendantes pour l’application d’une mesure de sauvegarde, s’ajoutant aux conditions énoncées dans la deuxième clause de ce paragraphe, nous estimons que la première clause décrit certaines circonstances dont l’existence doit effectivement être démontrée pour qu’une mesure de sauvegarde puisse être appliquée conformément aux dispositions de l’article XIX du GATT de 1994. En ce sens, nous pensons qu’il y a un lien logique entre les circonstances décrites dans la première clause — “par suite de l’évolution imprévue des circonstances et par l’effet des engagements, y compris les concessions tarifaires, qu’un Membre a assumés en vertu du présent Accord …” — et les conditions énoncées dans la deuxième clause de l’article XIX:1 a) pour l’imposition d’une mesure de sauvegarde.

S.1.50.3 États-Unis — Viande d’agneau, paragraphe72
(WT/DS177/AB/R, WT/DS178/AB/R)

Bien que nous ayons dit dans ces deux rapports que, conformément à l’article XIX:1 a) du GATT de 1994, l’évolution imprévue des circonstances “d[eva]it effectivement être démontrée”, nous n’avons pas eu l’occasion, dans le cadre de ces deux appels, d’examiner à quel moment, à quel endroit ou de quelle manière cette démonstration devait être faite. En procédant maintenant à cet examen, nous notons que le texte de l’article XIX ne renferme aucune indication explicite à ce sujet. Néanmoins, comme l’existence d’une évolution imprévue des circonstances est une condition préalable dont l’existence doit être démontrée “pour qu’une mesure de sauvegarde puisse être appliquée” conformément à l’article XIX du GATT de 1994, comme nous l’avons dit, il s’ensuit que cette démonstration doit être faite avant que la mesure de sauvegarde ne soit appliquée. Sinon, le fondement juridique de la mesure serait vicié. Nous trouvons des indications utiles sur la question de savoir à quel endroit et à quel moment la “démonstration” devrait être faite dans le “lien logique” que nous avons observé précédemment entre les deux clauses de l’article XIX:1 a). La première clause, comme nous l’avons fait remarquer, décrit en partie les “circonstances” dans lesquelles s’inscrit l’“évolution imprévue des circonstances”. La deuxième clause, comme nous l’avons dit, a trait aux trois “conditions” régissant l’application des mesures de sauvegarde, lesquelles sont également reprises à l’article 2:1 de l’Accord sur les sauvegardes. Manifestement, l’élément central du rapport des autorités compétentes, qui doit être publié conformément à l’article 3:1 de l’Accord sur les sauvegardes, doit être la question de savoir si ces conditions sont remplies. À notre avis, le lien logique entre les “conditions” indiquées dans la deuxième clause de l’article XIX:1 a) et les “circonstances” décrites dans la première clause de cette disposition dicte que la démonstration de l’existence de ces circonstances doit également figurer dans le même rapport des autorités compétentes. Toute autre façon de procéder romprait le “lien logique” entre ces deux clauses et laisserait dans le vague et l’imprécision les modalités d’exécution de la première clause de l’article XIX:1 a).

S.1.50.4 États-Unis — Sauvegardes concernant l’acier, paragraphes 289-290
(WT/DS248/AB/R, WT/DS249/AB/R, WT/DS251/AB/R, WT/DS252/AB/R, WT/DS253/AB/R, WT/DS254/AB/R, WT/DS258/AB/R, WT/DS259/AB/R)

… nous estimons que l’article 4:2 c) est l’élaboration de la prescription énoncée dans la dernière phrase de l’article 3:1 et voulant qu’une “conclusion motivée” soit fournie dans un rapport publié.

Les États-Unis ont fait valoir à l’audience que “l’article 4:2 c) ne s’applique pas à la justification par les autorités compétentes de l’évolution imprévue des circonstances” dont il est fait mention à l’article XIX:1 a) du GATT de 1994. Nous ne sommes pas de cet avis. L’article 4:2 c) est un développement de l’article 3; en outre, l’“évolution imprévue des circonstances” dont il est fait mention à l’article XIX:1 a) du GATT de 1994 est l’un des “points de fait et de droit pertinents” dont il est fait état dans la dernière phrase de l’article 3:1. Il s’ensuit que l’article 4:2 c) s’applique également à la justification par les autorités compétentes de l’“évolution imprévue des circonstances” dont il est fait mention à l’article XIX:1 a).

S.1.50.5 États-Unis — Sauvegardes concernant l’acier, paragraphe 506
(WT/DS248/AB/R, WT/DS249/AB/R, WT/DS251/AB/R, WT/DS252/AB/R, WT/DS253/AB/R, WT/DS254/AB/R, WT/DS258/AB/R, WT/DS259/AB/R)

Selon nous, le Groupe spécial n’a pas simplement supposé, mais a au contraire clairement mis en évidence, une insuffisance dans le raisonnement de l’USITC. Il a examiné les constatations de l’USITC et constaté que celle-ci n’avait pas démontré que l’évolution imprévue des circonstances “plausible” avait en fait entraîné un accroissement des importations des produits spécifiques visés par les mesures de sauvegarde en cause. Puisque l’USITC, selon les États-Unis, s’était appuyée sur des événements macro-économiques ayant des effets sur un certain nombre de branches de production, il lui appartenait de montrer comment ces événements étaient pertinents pour chaque produit visé par chacune des mesures de sauvegarde en cause. Comme les États-Unis eux-mêmes le reconnaissent, “l’article 3:1 impose aux autorités compétentes — et non pas au groupe spécial — l’obligation de “publier[ ] un rapport exposant les constatations et les conclusions motivées auxquelles elles seront arrivées sur tous les points de fait et de droit pertinents”. Par conséquent, il appartenait à l’USITC, et non au Groupe spécial, d’expliquer comment les faits étayaient sa détermination concernant l’“évolution imprévue des circonstances”. Avec l’argument qu’ils présentent dans le présent appel, les États-Unis cherchent à faire passer la charge de cette démonstration au Groupe spécial, dont la fonction, à cet égard, se limite à évaluer l’adéquation des “conclusions motivées” énoncées par l’autorité compétente. Nous convenons avec le Groupe spécial que la démonstration de l’USITC était insuffisante et nous ne constatons aucune erreur dans l’explication de cette constatation donnée par le Groupe spécial.

 

388. À cet égard, nous notons que le fait que, conformément au droit interne d’un Membre de l’OMC, une constatation faite sur la base d’un large groupement de produits est réputée étayer la détermination d’une autorité compétente qui se rapporte à un produit plus restreint n’implique pas, en lui-même et à lui seul, que cette conclusion est aussi vraie aux fins de l’Accord sur les sauvegardes.     haut de texte


Les textes reproduits ici n’ont pas le statut juridique des documents originaux conservés par le Secrétariat de l’OMC à Genève.